DEPT DE MEDECINE GENERALE / UNIVERSITE PARIS DIDEROT

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DEPT DE MEDECINE GENERALE / UNIVERSITE PARIS DIDEROT
TRACE D’APPRENTISSAGE
Le présent modèle doit être utilisé pour UNE TRACE D’APPRENTISSAGE AU FORMAT WORD. Les données du
formulaire ci-dessous doivent être remplies, puis la trace sera collée à la suite du formulaire
Nom et prénom de l’étudiant auteur de la présente trace : MUNGUR Akshay
Nom et prénom du tuteur : EDDI Alain
Numéro du semestre du DES au cours duquel cette trace a été produite : S1
Date de réalisation de la trace : 01/06/2011
Le maître de stage du stage concerné par cette trace a-t-il évalué cette trace ? :
Non
COMPETENCES VISEES PAR CETTE TRACE (effacer les compétences sans rapport avec ce document)

Compétence 3 : Prendre une décision adaptée en situation d'urgence (potentielle/vraie)

Compétence 5 : Travailler en équipe au sein du système de santé

Compétence 7 : Prendre des décisions fondées sur les données actuelles de la science, adaptées aux
besoins et au contexte
Si votre tuteur estime que cette trace mérite d’être publiée sur le site en tant que trace remarquable, acceptez
vous qu’elle le soit ( Ne laissez que la réponse adaptée) :

Oui
J’ai effectué de nombreuses gardes au sein de différents services d’urgences mais, une, plus particulièrement,
retient mon attention.
Il s’agit d’une garde que j’ai effectuée au cours de mon premier semestre d’internat. Je le rappelle, pour poser la
situation, tant les décisions qui s’en sont découlées furent importantes malgré une expérience clinique
débutante et contre l’avis d’un spécialiste.
Ce soir là, je commençais ma garde comme à l’habitude, enchainant dossier sur dossier, allant de la simple
traumatologie à des cas médicaux plus complexe en passant par de la réassurance de patients quant à leur
état…bref une garde banale. Dans cette hôpital, il n’y a qu’un interne, un senior de médecine et un de chirurgie
en garde ; donc effectif très réduit pour un afflux de patients constant.
Vers 01h du matin mon senior de médecine, le plus gros du travail ayant été effectué, me dit qu’ il va se
coucher. Etant assez autonome malgré tout, je m apprête à débuter cette deuxième partie de la nuit en
confiance, sachant que jusqu’ alors, il ne m était rien arrivé de fâcheux (pour les patients non plus d’ailleurs).
A 01h30 se présente avec son épouse un homme d’environ 55ans avec une violente douleur au niveau du rachis
lombaire. Je prends le dossier, prêt a administrer intérieurement) de la morphine et interroge le patient. Celui-ci
,homme de 55ans sans antécédents particuliers, sans facteurs de risque cardiovasculaire (hormis son sexe bien
sur), de corpulence normale et qui na jamais été a l’hôpital, me décrit sa situation. Il était tranquillement en
train de regarder la télévision, tapis au fond de son canapé, lorsque qu’à 23h une violente douleur abdominale
le prend sans vomissements ni troubles du transit. En creusant un peu, il me dit que cette douleur, non calmé
par la prise d’antalgiques de pallier I, s’est déplacée dans le dos puis est remontée au niveau des omoplates et
du sternum, s’est calmé ensuite pour mieux revenir de manière plus intense au niveau lombaire. Partant tout
d’abord sur une douleur lombaire, au maximum une sciatique, je me retrouve alors devant une séméiologie que
je n’avais jamais encore vu a ce court stade de mon développement médical. L’examen clinique de cet homme
par ailleurs, hormis cette douleur importante, ne retrouvait pas de points d’appel particulier, notamment pas
de souffle cardiaque, des pouls symétriques…de même que l’ECG et la radio du thorax n’étaient pas contributif…
Toutefois et heureusement, il me restait des bribes de ce que j’avais appris pour mon internat et à mon entrée
aux urgences. Très rapidement, je pense alors à une dissection aortique ; je lui prend, seul, la tension artérielle
aux deux bras, l’équipe de nuit ayant décidé qu’il ne s agissait que d’un lumbago comme on en voit tant… Et là :
asymétrie tensionnelle d’environ 50%.
Mes doutes se confirment : douleur intense et asymétrie tensionnelle. N’écoutant que mon courage et après
avoir tenté de soulager le patient par de la morphine, j appelle mon senior et lui expose mon point de vue. Il me
répond : « Ecoute, si tu pense à une dissection, et ça en a l air, je ne servirais pas à grand-chose, appelle le
cardio ».
Déconcerté mais vaillant, j appelle alors le cardiologue de garde et celui-ci m’assure qu’il va passer… qu’il va
passer ; on parle tout de même de dissection aortique. Je le rappelle une demi-heure après, et enfin il arrive soit
45 min après mon premier appel, il est trois heures.
A son arrivée, le cardiologue examine le patient et rend le verdict : ce patient a un lumbago hyperalgique qu’il
faut traiter par AINS. Il me prend à part en me disant en plus que de toute façon, là dissection c’est rare et que
les signes que je lui avais énoncés n’étaient pas spécifiques. Bon, en tant que premier semestre, novice, seul face
au cardiologue de garde qui gère l’USIC, je me tais. J’en parle tout de même au senior de chirurgie qui était là et
ensembles nous faisons rapidement des recherches sur la dissection aortique. Ses recherches que je vous
énoncerais ensuite sont celle-ci : LA DOULEUR INTOLERABLE ET MIGRANTE est à 90% présente et doit nous faire
suspecter cette pathologie.
Je le rappelle en lui faisant part de mes doutes et voyant que je suis très insistant et que je lui fais face,
diagnostic contre diagnostic, il redescend. Prêt à me passer un savon, je lui fais face en lui disant que je vais
inscrire dans le dossier informatique que moi je conclus à la dissection et que lui la réfute. Mis devant ses
responsabilités, et passablement énervé il appelle le centre de référence de la cardiologie ; à ce moment, son
comportement change (je ne sais pas ce qu’ils se sont dit) et appelle le radiologue d’astreinte. Le verdict est
sans appel : dissection aortique de type A.
Le patient est transféré par le SAMU en urgence au centre de référence. Le cardiologue ne s’est pas même
excusé. Il est 5h.
Pour information, le lendemain j’appelle le centre et celui-ci me dit que le patient, toujours vivant, a fait un arrêt
cardiaque pendant le transfert…
Lors de cette garde assez éprouvante, j’ai du affronter malgré ma faible expérience une équipe soignante
absente, un spécialiste avec lequel j’ai du me confronter ardemment. Que faire lorsque l’on est convaincu d’une
chose et que les personnes qui sont censé vous enseigner vous méprise et vous remette à votre place sans
prendre le temps de vous opposer une quelque argumentation. La seule solution que j’ai à ce moment là trouver
était de lui faire du chantage, méthode contestable mais qui m’a semblé dans ce cas précis la seule pour tenter
de sauver ce patient. Les différentes phases par lesquels je suis passé et notamment le doute face à ce
cardiologue ont failli être fatales au patient .En effet, lorsqu’on vous affirme que ce que vous pensez est faux,
vous finissez par y croire; mais je suis allez jusqu’au bout de ma logique. Je suis à posteriori satisfait de ce que j
ai fait et j’ai su prendre une attitude adaptée à une situation d’urgence contre l’avis d’un spécialiste et pour le
bien du malade.
Au cours de cette garde et à mon retour chez moi, j’ai effectué quelques recherches sur cette pathologie et
toutes mes recherches m’ont rassuré quant à ma prise en charge et quant à la difficulté du diagnostic.
La dissection aortique représente l’une des principales difficultés diagnostiques dans un
service d’urgence : rare, de présentation clinique variable, rapidement mortelle en
l’absence de prise en charge rapide (transfert vers un service de chirurgie vasculaire).
Définition :
La DA est due à un clivage longitudinal de la média aortique. Une porte d’entrée intimale met
en communication la lumière vasculaire avec la média disséquée, entraînant l’irruption de
sang sous pression dans la nouvelle cavité. Toutes les maladies altérant la paroi aortique
peuvent conduire à la dissection.
Epidémiologie :
Incidence : 5-10 cas / 100 000 / an
1,5 décès pour 100 000 /an aux USA
Survient principalement chez les hommes d’âge moyen ou avancé (80 % et 5% de moins
de 35 ans), souvent associée à une HTA.
La grossesse est considérée comme un facteur favorisant (exceptionnel) de DA.
Le syndrome de Marfan (collagénose), la coartation aortique peuvent être retrouvées (1015%).
Le diagnostic de Marfan est évoqué en cas de douleur thoracique typique chez un (e)
adolescent ou adulte jeune au profil marfanoide.
Les causes traumatiques thoraciques : traumatismes non pénétrants du thorax ou
iatrogènes
Signes cliniques
LA DOULEUR
3 critères de la douleur doivent être recherchés et permettent le diagnostic clinique dans 91%
des cas : qualité, intensité initiale et irradiation.
La douleur est le signe essentiel (présente dans 90%): le tableau est celui d’une douleur
thoracique habituellement spontanée, intolérable, rarement liée à l’effort, d’intensité
extrême, à type de déchirure, de torsion, d’emblée maximale, de siège antérieur rétrosternal
(80 %),irradiant dans le dos, entre les 2 omoplates, descendant dans la région lombaire ou
dans l’abdomen. Le caractère migrateur de la douleur est évocateur : irradiation postérieure,
descendante (abdominale).
Elle peut mimer la douleur de l’infarctus, mais celle ci démarre plus lentement et
s’accompagne d’une oppression, et reste classiquement résistante à la trinitrine (a éviter
surtout en cas de Tension Artérielle limite)
(A titre d’exemple, dans un service d’urgence, les 3 douleurs les plus intenses sont la
dissection, la colique néphrétique et la pancréatite aigue )
Elle peut rester : isolée ou associée à une symptomatologie liée à une complication ou à
l’atteinte des branches de l’aorte
AUTRES SIGNES
Syncope inaugurale (fréquente),
Collapsus (tamponnade cardiaque) ou au contraire hypertension
Insuffisance ventriculaire gauche (liée à l’insuffisance aortique)
Infarctus, inférieur surtout (coronaire, droite ++)
Ischémie d’un membre supérieur (sous clavière)
Tableau d’accident vasculaire cérébral (troncs cérébraux)
Paraplégie (intercostales)
Ischémie mésentérique (artères à destinée digestive)
Anurie (artères rénales)
Ischémie d’un membre inférieur (iliaques),
Asymétrie des pouls ou asymétrie TA (40%) signe pathognomonique de DA si asymétrie
récente (=> toujours réaliser une mesure de la TA aux 4 membres)
L’examen clinique recherche :
un souffle d’insuffisance aortique (30-40 %) avec souffle diastolique de fuite
aortique
un frottement péricardique, (auscultation) signant un hémopéricarde
une asymétrie des pouls
un déficit moteur
une asymétrie du murmure vésiculaire
une ischémie des membres inférieurs
une fièvre due à la résorption de l’hématome
des signes d’hémorragie (rupture dans un organe profond)
Etat de choc par rupture aortique
HTA (présente dans 50 % des cas)
Paraclinique :
E.C.G: il peut être normal ou montrer des signes d'ischémie myocardique voire de nécrose
en voie de constitution si les ostia coronaires sont atteints par le processus de dissection. il a
donc peu de valeur dans le diagnostic positif
RX THORAX: Elle montre de façon quasi-constante un élargissement du médiastin
L'ECHOGRAPHIE TRANSOESOPHAGIENNE:
Elle permet le diagnostic positif en montrant la présence d'un voile intimal mobile dans la
lumière aortique.
Elle peut préciser à 80% la localisation de la porte d'entrée
Elle apprécie l'extension de la dissection
Elle quantifie la présence d'une éventuelle insuffisance
aortique
Elle détecte un éventuel épanchement péricardique
Ses avantages sont la rapidité de mise en oeuvre, sa grande sensibilité (99%), et sa
spécificité élevée(98%)
Ses inconvénients sont le caractère très opérateur-dépendant et l'existence d'une "zone
aveugle" au niveau de la terminaison de l'aorte ascendante et de la portion initiale de la
crosse
L'ANGIO-SCANNER THORACO-ABDOMINAL:
Permet également le diagnostic positif en montrant la présence d'une membrane flottante et
l'opacification différente du vrai et du faux chenal
Elle apprécie l'extension de la dissection
Elle détecte un éventuel épanchement péricardique
Elle permet l'étude de la vascularisation des reins, repère
Une éventuelle dissection des vaisseaux mésentériques
Ses avantages sont une meilleure visualisation de la crosse et de l'extension au départ des
troncs supra-aortiques et au niveau abdominal.
Ses inconvénients sont le manque de rapidité, une moins bonne sensibilité théorique que
l'E.T.O, et l'absence fréquente de repérage de la porte d'entrée.
C'est cependant l'examen diagnostique le plus demandé à
l'heure actuelle
Traitement
Médical :
Si état de choc :
remplissage en cherchant à viser une TAS (Tension artérielle systolique) autour de 90 à
100 mm Hg
Le G Suit (PAC (Pantalon Anti Choc) a parfois été utilisé, mais n’a pas d’action hémostatique,
présente un risque de majoration de l’hémorragie
Contrôle de l’HTA : « toute TAS à 130 est menaçante ». Réduire la pression artérielle
si elle est élevée, à un niveau entre 100 et 120 mm Hg pour la systolique
Analgésie : contrôler la douleur par morphinique Fentanyl ® ++ titration selon
l’hémodynamique
Oxygénation : guidée par la saturométrie ; au masque à haute concentration ou intubation
et ventilation assistée en cas de trouble de conscience, état de choc ou hypoxie sévère
Thérapeutique :
Bêtabloqueur : propranolol (le plus utilisé est le Brevibloc® 0,05 à 0,15 mg/ kg toutes les
4 à 6 h), qui diminue la force de l’éjection ventriculaire, ou en cas de contre indication,
nicardipine en perfusion
En association, si nécessaire, le nitroprussiate sera ajouté en débutant avec 0,25 μg / kg /
min.
Un vasodilatateur artériel ou artériolaire permet d’abaisser la tension de paroi
Ensuite, le patient est orienté vers un centre disposant d’une chirurgie cardiaque.
Exemples de situations cliniques : (d’après Réanimation et urgences pré-hospitalière.
Ed Frison-Roche)
HTA menaçante :
Nipride® + Brevibloc ®
Nipride® + Trandate®
Nipride® + Avlocardyl® 1 mg/mn IVL (max : 5-10 mg)
DA distales ou de type III : Nipride® 0,5 -10 g/kg/mn au PSE + Brevibloc® ou Loxen®
HTA modérée :
Nepressol® + Brevibloc®
Nepressol® + Avlocardyl®
Eviter absolument l’Adalate® sub lingual et les dérivés nitrés en spray ou dose de charge
(risque de désamorçage)
Traitement Chirurgical :
Indications
TYPE A sauf contre-indication : chirurgie en urgence (toujours) car risque de rupture
intra-péricardique. L’intervention est réalisée sous circulation extracorporelle (CEC).
L’objectif est de prévenir la rupture aortique et la tamponnade. L’intervention après
sternotomie médiane consiste à disséquer l’aorte ascendante enlevant la zone de
dissection devant la porte d’entrée. La grande majorité (90 %) des décès sont dus à une
rupture intrapéricardique. Il meurt dans ces cas 1 % des patients par heure pendant 48 H.
Au bout de 10 Jours, 85 % des patients sont décédés, cela sans traitement chirurgical.
Passé ce délai, la survie est presque toujours obtenue.
TYPE B : traitement médical hypotenseur sauf complication. Possibilité de traitement
endoluminal. La mortalité est d’environ 10 %. Un traitement médical visant à contrôler la
TA peut suffire.
Chirurgie si :
Signes de fissuration et rupture (hémothorax G)
Ischémies aiguës, si le traitement endoluminal n’est pas possible
Evolution anévrysmale du faux chenal et traitement endoluminal inapplicable
Conclusion
Donc, on voit bien que la dissection même si elle est rare est un diagnostic d’élimination à ne
pas rater tant son évolution est inéluctable.
De part sa clinique souvent trompeuse, il est primordiale de toujours l’évoquer car passer à
côté, est non seulement une faute grave médical mais surtout une perte de chance évidente
pour les patients d’autant que les traitements permettent une survie pratiquement avec une
prise en charge adéquate.
Bibliographie
Douleurs Thoraciques en Urgence Monographie de la SFMU- Masson
Dissection Aortique. JL Dubois-Randé. Revue du Praticien 1990
Réanimation et urgences pré-hospitalière. Ed Frison-Roche
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