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Introduction
La société québécoise actuelle est le reflet des interrelations entre les différents groupes
culturels, ethniques et religieux qui la compose, le tout, dans le canevas de la laïcité. Ainsi, il est
important de faire la lumière sur certaines problématiques et surtout, sur certains stéréotypes qui
dépeignent quelques communautés. C’est le cas de la communauté juive québécoise. Celle-ci connaît,
depuis quelques années, des problèmes de dialogue avec les autres membres de la société québécoise.
Le judaïsme peut-il s’accorder avec les valeurs une société laïque? Les juifs sont considèrent-ils comme
québécois? La communauté juive québécoise forme-t-elle un bloc monolithique? Voilà de nombreuses
questions qu’il faut se poser et surtout, auxquelles il faut répondre. C’est donc ce que nous tenterons de
faire dans les pages qui suivent.
Tout d’abord, pour comprendre où s’inscrit cette communauté dans la société québécoise, nous
verrons à quelle époque et dans quel contexte les juifs ont immigrés ici. Nous tenterons de comprendre
leurs réalités et les facteurs qui ont marqués leur arrivé. Ensuite nous verrons en quoi l’identité juive est
complexe et diversifiée. Pour ce faire nous exploreront les diverses branches et courants qui compose
le judaïsme au Québec.
Puis, nous verrons comment le profil socioprofessionnel des juifs et des juives peut nous
indiquer comment leur communauté fait partie de la société québécoise. Nous analyserons le niveau
d’instruction ainsi que le taux de francisation des jeunes juifs.
Pour conclure, nous définirons l’image médiatique de la communauté juive québécoise et les
stéréotypes que l’on diffuse sur elle. Nous nous pencherons sur les liens entre les problématiques et la
laïcité de notre société. Nous analyserons brièvement l’opinion publique ainsi que médiatique que nous
avons des juifs québécois. De plus, nous verrons la place qu’occupent les femmes dans les
communautés juives.
Finalement, nous nous aventurerons vers quelques pistes de réflexions sur le vivre ensemble
dans la société québécoise actuelle.
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Historique
L’histoire du judaïsme à au Québec s’inscrit dans des contextes particuliers qui permettent de
définir en partie l’identité des juifs québécois. Pour comprendre les problématiques liées à la
communauté juive il faut tout d’abord comprendre dans quels contextes ses ressortissants se sont
installés au Québec. Il faut également savoir que la communau juive est l’une des plus anciennes
communautés non chrétiennes à s’installer au Québec. Tout au long du XXe siècle, plusieurs vagues
d’immigration juive on contribuées à créer le groupe que nous connaissons actuellement. Ainsi,
l’histoire des Juifs du Québec se traduit par un patrimoine particulier que nous analyserons.
L’immigration Juive ashkénaze débute vers 1850 avec l’arrivée de quelques immigrants Russes,
Polonais et Allemands. Par la suite, le nombre de nouveaux arrivants Juifs continue d’augmenter, bien
que leur nombre réel soit toujours très bas par rapport à la société québécoise. À l’approche du XXe
siècle, la pensée antisémite se fait de plus en plus populaire dans les pays de l’Europe de l’est
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. Vers
1905 jusqu’à 1910, c’est l’époque des Pogroms de Russie. De nombreux Juifs sont persécutés, leurs
propriétés sont pillées et incendiées et de nombreux incidents violents ont lieux. C’est l’émergence de la
pensée occidentale de supériorité. Ainsi, une vague importante d’immigration juive arrive au Québec
peu avant la première guerre mondiale. De ce fait, le nombre de nouveaux arrivants juifs explose au
Canada et au Québec.
Ensuite, une seconde vague arrive entre 1918 et 1930. L’Occident clame toujours sa supériorité,
ce qui contribue à l’essor de la pensée raciste. De nombreux juifs de Pologne, de Russie, d’Autriche, de
Hongrie et de Roumanie, victimes de la primauté des occidentaux, décident donc de faire leurs valises et
de partir pour le Québec, ils croient retrouver la tranquillité. À partir de 1930, c’est la montée du
Nazisme qui encourage les Juifs à quitter leurs pays. Cette affluence incessante d’immigrants juifs durera
jusqu’en 1933, année le Canada interdira totalement tout immigrant Juif voulant entrer au pays.
Cette baisse est en majeure partie due au climat de peur et de méfiance qui entour les populations
juives d’Europe suite à la guerre. On ne veut pas s’attirer d’ennuis en les accueillants chez nous.
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REL3330. Notes de cours rapides sur les juifs et les musulmans québécois
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Ce n’est qu’en 1948, après avoir réalisé l’ampleur du drame causé par les nazis, que le Canada
rouvre ses portes aux immigrants juifs. Ceux-ci sont des rescapés de la Shoah et des camps de la mort.
Ces gens sont empreints d’une souffrance incomparable et ils viennent au Québec pour s’établir et se
sentir en sécurité. Suite à la tombée du nazisme, L’Europe se vide peu à peu de sa population juive. La
vague d’immigration qui s’en suit est également d’une importance considérable.
On peut donc voir une constante dans l’historique migratoire des populations juives ashkénazes
du Québec. Celles-ci sont toutes issues de la montée de la pensée occidentale de supériorité. Cette
façon de penser a mené des groupes à commettre des actes d’une inhumanité inouïe. Les populations
juives qui ont du quitter leur pays d’origine sont empreintes d’une grande souffrance. Les raisons de
leur départ sont plus souvent qu’autrement liés à des violences subies par eux ou par des membres très
rapprochés de leur famille. Ainsi, les immigrants juifs ashkénazes transmettent un patrimoine souvent
teinté de souffrance et de déchirement.
Dans l’historique de l’immigration juive au Québec que nous dressons, il ne faut en aucun cas
oublier les juifs sépharades. Originaires de l’Afrique du nord et du Moyen-Orient, ce groupe à vécu une
expérience migratoire tout autre que les juif ashkénazes. De plus, ceux-ci ont la particularité d’avoir des
antécédents francophones. L’immigration juive Sépharade débute vers 1956 et s’étend jusqu’en 1970.
C’est à cette époque que naissent des tensions géopolitiques au Moyen-Orient et en Afrique du nord.
Ainsi, de nombreux Juifs se sentent moins les bienvenus dans leurs pays respectifs. Ils décident donc de
partir vers des terres d’accueil qui reflètent les valeurs de leur tradition juive et francophone, soit
l’Israël, la France ou encore le Québec. Ceux qui choisissent le Québec sont majoritairement Marocains
(90%)
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. À l’encontre des juifs ashkénazes, ces juifs sépharades arrivent au Québec heureux et proactifs.
Ils n’ont pas connu les horreurs que les juifs européens ont connues. Ainsi, ils ne ressentent qu’une
nostalgie plus culturelle que religieuse envers leur pays d’origine.
Plus récemment encore, une vague de départs à vu le jour chez les juifs Ashkénazes. Entre 1975
et 1985, les remous que créent la révolution tranquille et ses suites encouragent les juifs à migrer vers
Toronto, plusieurs d’entre eux ont de la famille. Cet attrait pour une ville anglophone s’explique par
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CASTEL, Frédéric, notes de cours, REL3330 session été 2010, UQAM
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l’anglicisation qu’on vécu les juifs ashkénazes montréalais. Comme nous le verrons plus loin, les
immigrants juifs ont du fréquenter les écoles protestantes anglophones et se sont ainsi anglicisés. Avec
les tensions qu’on créés les batailles pour la langue française, l’élite juive unilingue anglophone n’a pu
s’adapter et plusieurs ont choisi de quitter Montréal pour une ville où l’on parle majoritairement
anglais, soit Toronto. Il faut par contre noter que la grande vague de Sépharades arrivée dans les années
60 à permis à la communauté juive de renflouer la population perdue par tous les départs. Il ne faut pas
oublier d’ajouter que d’autres immigrants sont issus de communautés juives venant de pays tels que
l’Éthiopie et qui restent plutôt méconnus du grand public.
Les institutions
L’immigration de milliers de Juifs tout au cours du XXe siècle à permis la création et
l’implantation de nombreuses institutions. Au tout but, le but de ces institutions était de préserver et
de perpétuer la tradition juive au sein de la nouvelle terre d’accueil soit le Québec, et plus
particulièrement Montréal. Ces institutions sont majoritairement des écoles religieuses et des lieux de
culte, bien qu’aujourd’hui plusieurs nouvelles institutions revêtent un caractère plus laïc.
La problématique des écoles juive est certes d’actualité mais elle remonte aussi à un problème
datant du début du XXe siècle. Puisque celle-ci sera abordée plus loin dans cette analyse du judaïsme
Québécois, nous parlerons ici du contexte de création et de la signification de ces écoles. Ainsi, lors de
l’arrivée massive des premiers juifs au Québec
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, nous ne savions pas les envoyer à l’école puisqu’ils
n’étaient ni catholiques, ni protestants. Voyant le refus catégorique du milieu catholique, les écoles
protestantes anglophones ont donc ouvert leurs portes aux juifs. Malgré cette entrée dans le système
des écoles publiques confessionnelles, la place des juifs dans était souvent remise en question. Ainsi, à
partir de 1910, de nombreuses institutions scolaires privées juives ont été créées. Certaines d’entre
elles perdurent toujours aujourd’hui. De nos jours, ces institutions, qu’elles soient séculières ou
orthodoxes, ont du adapter leurs pratiques aux changements sociétaux. Ainsi, y a-t-il aujourd’hui un
mouvement de bilinguisme au sein de certaines écoles juives.
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2006, «Les écoles juives dans la tourmente» Dans Michel Venne et Antoine Robitaille (dir.), L’annuaire du Québec,
Institut du Nouveau Monde, p.147-154
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D’autres types d’institutions ont aussi été créés avec l’arrivée des rescapés de la Shoah. Fort de leur
bagage de souffrance, plusieurs juifs ont senti le besoin d’informer et de commémorer les évènements
de la seconde guerre. Des institutions telles que le Musée de l’Holocauste ont été créés afin de pouvoir
informer la population québécoise mais aussi pour permettre aux survivants de pourvoir transmettre
aux nouvelles générations toute l’horreur qu’ils ont vécue.
Avec la naissance d’une génération plus distanciée des souffrances du passé et surtout d’une
génération née au Québec, ont voit apparaître des institutions juives laïques. Il peut sembler paradoxal
de leur donner ce titre mais il faut comprendre que les instigateurs de ses institutions jouissent d’une
identité culturelle juive et non religieuse. Ainsi, ces institutions sont ouvertes à tous dans le but de faire
connaitre la culture juive.
Le judsme au Québec est-il un bloc monolithique?
À la lumière de ce que nous venons de voir sur l’origine de l’immigration juive au Québec, nous
pouvons avancer l’hypothèse que les communautés juives québécoises ne forment pas un bloc
monolithique, contrairement à la croyance populaire. Ainsi, le judaïsme québécois est-il diversifié par
les pays d’origine des ressortissants, les différents groupes culturels qui le compose ainsi que les
différents courants confessionnels. Prenons d’abord la diversité des pays d’origine.
L’identité juive en tant que telle ne réside pas seulement dans le fait de pratiquer le judaïsme ou
d’être issu d’une famille juive, il s’agit également de l’attachement à son pays d’origine. En effet, lorsque
l’on rencontre des gens de la communauté juive, ceux-ci se définissent souvent comme juif mais aussi
comme polonais, ukrainiens, allemands ou encore comme marocains ou israéliens. Ainsi, il est évident
que le pays d’origine des immigrants juifs à beaucoup d’importance pour eux. L’identité culturelle est
souvent ce qui explique un lien si fort avec le pays d’origine. Certaines pratiques du judaïsme diffèreront
selon le pays d’où l’on vient. Aussi, les immigrants provenant d’un même pays auront-ils tendance à se
retrouver entre eux une fois établis ici. Ils fréquentent souvent les mêmes institutions et habitent
parfois le même quartier. L’identité ethnique des juifs est donc certes commune dans le sens où ils
partagent la même religion, mais elle en diffère encore plus par la différence de pays d’origine. À
Montréal plus particulièrement, on dénote une très grande diversité de ces pays d’origine, ceux-ci allant
d’un peu partout en Europe jusqu’aux confins du Moyen-Orient. Plusieurs juifs sont également passés
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