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Historiographie
CHAPITRE I : Les traditions historiques non européennes
I] Historiographie chinoise
1) Histoire et légendes
Un homme, Confucius (551-479), fait tout le savoir, il anticipe Hérodote, c’est le grand-père de l’histoire chinoise.
Confucius a donné les cinq Wouking, les bases de la civilisation dont le Chouking (Histoire) retraçant des histoires
anciennes du 3ème et 1er millénaire, exemple de la Chronique des printemps et des automnes qui concerne le royaume de
Lou, celui de Confucius.
L’histoire chinoise et très morcelée parce que la Chine est découpée politiquement (féodalité). Chaque royaume a
son histoire officielle, peu méthodique où les mythes et les légendes dominent la recherche de la vérité, « histoire fiction »
rédigée par des prêtres, des astrologues, des devins, des augures.
2) Histoire mandarinale
En 221 avant notre ère, Shi Houangi (César chinois) fait l’unification de la Chine, et fonde, après une transition
politique, la première dynastie impériale. Les Han vont s’implanter de 206 avant notre ère à 220. Les Han ont besoin de
légitimer leur pouvoir et vont s’entourer d’une cours de lettrés, composée de spécialistes de l’histoire, d’archivistes,
d’historiographes pour rédiger une histoire officielle de la couronne, de la mémoire de l’Etat. Ces fonctionnaires vont
recevoir des commandes officielles pour écrire des biographies, l’histoire des dynasties royales. Cette histoire, qui se veut
officielle, est partisane et subjective, raconte le passé, consigne le présent et prédit l’avenir.
Les pères de l’histoire chinoise sont Sseu Ma, père et fils, qui produisent le premier Che ki. Les Che ki sont les
histoires sérieuses et vont devenir les références historiographiques jusqu’en 1949, jusqu’à Mao, devenant un outil de
propagande pour le pouvoir. Toute l’histoire a des causes providentielles, les historiens n’ont pas d’esprit critique,
aucune volonté de comprendre le passé mais simplement le raconter. L’histoire chinoise va se figer pendant vingt siècles
à cause de Confucius qui ne fait transmettre et non interroger le passé, « vénère les ancêtres et non les juger ».
II] Historiographie arabe
1) Islam et Histoire
L’Islam repose presque entièrement sur le Coran, sous-entendant une parole transmise par Dieu (Allah) à son
disciple. Normalement, toute action humaine doit se rapporter, s’expliquer à Dieu. Il y a débat entre les causes premières
(surnaturelle, divine) et les causes secondaires (naturelle, dues à l’homme). L’histoire islamique privilégie, par tradition,
les causes premières, les premières histoires concernent les prophètes dont la mort de Mahomet en 632. Au Moyen Age,
Ibn Hicham rédige une grande biographie sur Mahomet, « Vie de Mahomet » (Sira), avec des témoignages oraux et des
sources écrites. La rédaction des Hadiths, c’est-à-dire les traditions orales voire légendaires, explique la vie du prophète.
Les historiens arabes vont se proclamer héritier de l’histoire Sainte judéo-chrétienne. L’histoire des premiers siècles n’a
pas la rigueur des histoires occidentales, elle doit se trouver une méthode.
2) Histoire de la période classique (XI-XIIIème siècles)
Maçoudi (vers 1000) est le précurseur de la fondation de l’histoire arabe qui devient un genre majeur dans la
littérature et la pensée arabe. Maçoudi rédige un dictionnaire des 800 personnages importants de son temps avec 80
historiens. Le style est très littéraire donc subjectif, manque de rigueur avec des sources nombreuses mais critiquables.
Les événements militaires, politiques et de la prophétie se mélangent, où les actions des hommes et de Dieu sont liées.
L’histoire doit enseigner le membre de l’Umma, la communauté musulmane. Avec Maçoudi, on assiste à une révolution
historique où l’histoire devient politique, « histoire bataille ».
Le tunisien Ibn Khaldun (1332-1406) est un historien d’exception, comme Tacite, Tite-Live, Hérodote. L’histoire des
berbères est son œuvre importante avec un esprit critique et la volonté de tout expliquer comme l’Ecole des Annales.
L’histoire doit tout envisager et traiter tous les thèmes de la civilisation. Il fonde une méthode du vrai faux en accordant
la priorité à la vraisemblance, et une charte de la bonne méthode historique, une philosophie de l’histoire.
L’historiographie aztèque est conciliée dans des codex à base d’écriture pictographique avec un pictogramme pour
une idée. Elle est très partiale et lacunaire, a contrario, certains épisodes sont exagérément racontés.
CHAPITRE II : Histoire et historiens au Moyen Age
I] Une histoire mal appréciée
1) Le procès de l’histoire au Moyen Age
Le mépris des humanistes, ceux qui revivent l’Antiquité et les méthodes grecques et romaines, pense le Moyen Age
pendant dix siècles, une parenthèse fâcheuse reflétant un entre-deux médiocre (medi aevi : âges moyens, sombres). Les
historiens du Moyen Age n’ont pas de méthode, de rigueur, d’esprit critique, en plus d’être crédule et naïf, ce sont de
mauvais historiens. L’histoire est remplie d’énormes erreurs, par exemple, un historien du XIV ème siècle fait de
l’empereur Trajan, mort en 117, un contemporain de Charlemagne. Les histoires pullulent de faux documents, « l’histoire
se fait avec des histoires fausses ».
Les historiens des XIXème et XXème siècles, dont Langlois, disent que l’histoire du Moyen Age est entrée dans une
grande nuit et retombée en enfance. Les sources sont manipulées, corrigées au besoin soit en ajoutant, soit en enlevant
des passages. L’histoire est pleine de mythes et de légendes, comme les origines troyennes, un fatras d’hagiographie
comme la vie de Saint-Louis. L’histoire du Moyen Age n’est pas un genre autonome, à peine un genre mineur de la
pensée, l’histoire n’est plus enseignée dans les écoles et les universités médiévales. Depuis une trentaine d’année, les
historiens, dont Bernard Guenée, contribuent à réhabiliter l’histoire médiévale.
2) Les apports du Moyen Age
Au Moyen Age, les historiens ont fixé la chronologie du passé qui est, pour eux, l’explication d’une ère chrétienne.
La vision grecque de la chronologie est cyclique entre grand empire et décadence, mais au Moyen Age, la vision est
linéaire avec un début et une fin.
La chronologie universelle prise à Saint-Augustin (mort en 430) donne une division du temps en six âges d’environ
1 000 ans, Noé, Abraham, David, Captivité de Babylone, Christ, actuelle. Denys le Petit (mort en 540) avait donné la date
de naissance du Christ, avec une erreur de 6 à 7 ans, et le point de départ de l’ère chrétienne.
On voit apparaître des chronologies politiques, c’est-à-dire que les historiens fournissent des listes précises des
noms et de leur date de règne. Pour faciliter le classement, on numérote les rois en plus de leur surnom, Philippe II est
appelé Philippe Auguste car il maîtrise son territoire et nommé Philippe Dieudonné.
II] De l’histoire chrétienne à l’histoire nationale
1) Histoire des clercs
Les clercs sont les plus lettrés et les meilleurs latinistes de la société médiévale, ce sont les penseurs et les historiens
du Moyen Age. Depuis le IVème siècle, les histoires modèles sont dues à des clercs, référence à une histoire ecclésiastique,
avec Eusèbe de Césarée et Orose.
Pendant la période mérovingienne, les historiens sont des évêques ou des abbés dont Grégoire de Tour (mort en
594) avec Historia francorum nous léguant l’essentiel sur Clovis. Chaque royaume barbare aura un historien
ecclésiastique, Jordanes pour les ostrogoths, Isidore de Séville pour les wisigoths, Bède Le Vénérable pour les angles, Paul
Diacre pour les lombards.
La renaissance carolingienne, du IXème au XIIème siècle, voit un nouveau développement du genre historique avec
les Annales épiscopales (Mets, Reims) dont Hincmar (vers 850), Flodoard puis Richer (vers 1050) ; et avec l’Histoire
monastique dont les ateliers de copistes (scriptoria), la grande bibliothèque de Bobbio dans le nord de l’Italie, les abbayes
de Fleury et de Saint-Denis. L’abbaye de Saint-Denis est le centre officiel de l’historiographie royale surtout au XIIème
siècle sous Louis VI et Louis VII avec l’abbé Suger. C’est le lieu de production de l’histoire des capétiens, l’histoire
officielle à travers les Grandes chroniques de France, où le premier tome est en latin.
2) Tournant du XIIème siècle, la nouvelle histoire
L’histoire ecclésiastique ne suffit plus car elle trop providentielle, on entre dans une période de renaissance. Les
laïcs réclament d’autres histoires plus passionnantes et politiques, ils vont transformer la guerre historique via la légende
arthurienne.
Il y a une passion pour les croisades entre expéditions lointaines et exploits des francs avec des actions
chevaleresques exotiques. Guibert de Nogent développe cette passion à partir de la 2 ème croisade, « Gestra dei per
franco », et Guillaume de Tyr rédige la première histoire du royaume latin de Jérusalem et l’histoire de Baudouin IV.
Pour la 4ème croisade, Villehardouin justifie cette épopée à Constantinople, Robert de Clary ne parle pas des pillages. Les
croisades de Saint-Louis donnent naissance à de nouvelles histoires par Joinville, ces histoires exaltent la fierté d’être
franc et chrétien.
De plus en plus, les historiens sont laïcs qui viennent concurrencés les moines de Saint-Denis, comme Froissart
(1337-1404) choisi par la chancellerie royale. Ces laïcs écrivent tous dans une période difficile de l’histoire de France,
pendant la Guerre de Cent Ans, les Jacqueries, les fléaux réguliers (disette, famine, peste). Les historiens ont pour mission
de rassurer en flattant l’orgueil national et l’attachement à l’histoire du pays. Il y a débat sur le mythe des origines dont la
descendance des francs par le fils de Noé (Seth) et l’origine troyenne qui se trouve avant les grecs afin de concurrencer les
peuples voisins car selon la légende, l’Allemagne a une origine romaine, et l’Italie, grecque.
CHAPITRE III : L’historiographie des temps modernes (1450-1700)
L’histoire médiévale ne va pas s’éteindre en 1450, Bossuet, vers 1670, répand l’habitude médiévale par une
chronologie universelle, mais l’histoire va connaître une formidable évolution entre 1450 et 1600.
I] La naissance d’une nouvelle histoire
La nouvelle passion culturelle, des humanistes, est l’antiquité. Carbonell pense que cette période se tourne vers
une « rétro histoire ». Les humanistes sont éblouis par les historiens grecs et romains. Dans l’abbaye de Fulda en Saxe, on
y retrouve les manuscrits de Tacite. On essaie d’imiter le style des historiens des humanistes de l’Antiquité comme
Thucydide, Tite-Live et Plutarque. Michel de Montaigne dit de Plutarque que « c’est mon homme ». De Thou écrit vers
1605 son histoire en latin et utilise des mots qui existaient sous l’Antiquité du début IIIème siècle.
De nouvelles méthodes apparaissent dont le renouveau de l’archéologie dès la Renaissance pour retrouver l’art
antique. A force de fouilles, on multiplie des trouvailles, des catalogues, l’ouverture de musées, de guides touristiques
notamment Rome. La Renaissance veut faire un retour à l’Antiquité, fait une quête des langues anciennes. L’esprit
critique se développe avec le philologue Valla, un critique des sources écrites. La numismatique se développe aussi, et la
bibliographie est inventée.
L’humanisme stimule le sentiment civique et patriotique, c’est l’essor d’une histoire nationale avec Commynes,
Gaguin, Guichardin et Machiavel. L’essor du protestantisme suit le développement d’une histoire d’une langue nationale,
non latin. Le protestantisme est un phénomène critique qui créé une historiographie critique. C’est l’époque des grandes
découvertes où nouveau monde interroge l’ancien monde, on s’interroge sur l’origine des civilisations.
II] Les nouveaux historiens
Jean Bodin (1530-1596) est un théoricien du pouvoir royal, rédige « 6 livres de la République », veut rétablir un Etat
fort. Il est un juriste et essayiste en histoire, écrit en latin la « Méthode pour une facile compréhension de l’histoire »,
inspirée par Pierre Alciat qui est l’inventeur du commentaire de document, trois leçons décrètent que l’historie est une
vraie science humaine. Parallèlement, Bodin rejette le découpage traditionnel de la chronologie universelle, établit
l’histoire des pays déterminés par la théorie des climats. Un climat tempéré évoque un idéal, une histoire et des mœurs
tempérés, face à un climat rude déterminant une histoire et des mœurs rudes comme en Russie.
La Popelinière (1541-1605) est un juriste et homme de lettre, a écrit pour la première fois un livre d’historiographie,
« Histoire de histoires ». Il écrit une histoire totale de tous les aspects de la vie humaine et demande que l’histoire soit
libre et indépendante de tous pouvoirs et de toute religion. Il écrit la première histoire française du nouveau monde.
Etienne Pasquier (1529-1615) est un avocat et un humaniste, inspiré par Hérodote, il écrit « Enquête sur les origines
de la France » qui est une histoire monumentale avec six tomes en 1560, sept en 1567 et huit en 1607. Il décide d’écrire en
français et renonce aux grands mythes des origines. Pasquier invente une nouvelle origine, l’ancêtre des gaulois n’est ni
grec, ni italien, ni allemand. Il en vente la qualité d’un grand peuple, solidaire et brave, il reprend les propos de Jules
César, des insubordonnés mais libre avec une valeur de franchise, les francs. Tout événement historique est étudié à
partir de la multiplication et la confrontation des sources, exemple du procès de Jeanne D’Arc.
III] L’histoire du « Grand Siècle » (XVIIème siècle)
C’est une période de coup d’arrêt dans les progrès historiques, le siècle de la révolution scientifique avec Newton,
Descartes, Kepler et Galilée. Le règne des sciences exactes est au-dessus du règne des sciences humaines.
L’histoire est au service de la monarchie absolue avec la construction d’un Etat central qui utilise tous les moyens
pour asseoir son autorité. L’histoire est l’instrument de la propagande royale pour glorifier la monarchie et le roi. Les
souverains multiplient la charge des historiographes avec Mezeray (auteur de chevet de Louis XIV), Racine, Boileau.
C’est une histoire littéraire, bien rédigé mais retourne à d’ancien défaut avec le retour de la chronologie universelle de
Bossuet, et au retour des mythes des origines troyennes et franques.
Le courant historique scientifique est constitué par des équipes d’historiens et de chercheurs d’archives. Les frères
Dupuy, des moines érudits, élaborent l’exégèse étant l’étude critique des livres saints. Le patristique est l’étude des pères
de l’Eglise entre le IIème et VIIème siècle dont Saint-Augustin, Isidore de Séville. Une étude historique est mise en place
avec une critique sur les histoires des saints, des sources et des archives. Papenbroek étudie les chartes médiévales et fait
une critique sévère où il déclare que les trois quarts des documents mérovingiens sont faux. Mabillon réhabilite la plupart
des documents rejetés, « De re diplomatica » en 1680 est un compensé de mots, d’expressions, de langues, d’effets et
supports, la texture du papier, l’encre.
CHAPITRE IV : L’Histoire au XIXème siècle
Avec la Révolution Française, pendant 20 ans, l’historiographie ne connaît pas un réel élan, des sources et des
documents sont détruits notamment ruraux. Les ordres monastiques sont fermés, les bibliothèques dispersées, le
vandalisme révolutionnaire détruit volontairement le patrimoine artistique et culturel. Au début du XIX ème siècle,
l’histoire reprend sur de nouvelles bases avec la charte de l’historiographie sous le premier empire et Napoléon
Bonaparte, rédigée par les abbayes Grégoire et Sieyès.
I] Siècle de l’histoire
1) Rôle du romantisme
Entre 1800 et 1848, les écrivains sont fascinés par l’histoire :
 Chateaubriand, « Le génie du christianisme » en 1802, réhabilite le rôle de la religion dans l’histoire ;
« Les martyrs » en 1810 est le point de départ de vocation d’historiens (Michelet) ;
 Walter Scott crée le roman historique, « Ivanhoé » en 1820, « Quentin Durward » en 1824 ;
 Dumas devient le maître français du genre avec « Les trois mousquetaires » en 1844, « 20 ans après » en
1845, « Le Vicomte de Bragelonne » en 1848, les contemporains sont sûrs de lire des livres d’histoire ;
 Hugo met l’histoire dans tous ces livres, « Notre-Dame de Paris », « La légende des siècles », « Hérani »
en 1830, « Ruy Blas » en 1838.
L’histoire a même gagné le courant artistique, la peinture avec Delacroix. Les légendes anciennes reviennent via les
contes (Arthur), les sagas nordiques, les études folkloriques (Frères Grimm).
2) Moyen Age, la nuit du savoir
Le Moyen Age est devenu une époque privilégiée, pour la première fois valorisée. Augustin Thierry est le premier
grand historien des temps mérovingiens et de la conquête de l’Angleterre par les normands. Les instruments de
connaissance du Moyen Age sont les archives départementales, les écoles des chartes en 1821 formant les archivistes et les
bibliothécaires. L’Etat crée un comité des travaux historiques en 1834 qui publie des documents inédits de l’Histoire de
France, le Moyen Age généralement. La création d’inventaire et de monuments historiques permet de classer les lieux, les
bâtiments pour éviter les destructions, les abandons. Les programmes d’histoire sont dans le secondaire en 1838 avec une
très large place au Moyen Age. Le style troubadour se développe dans l’architecture notamment Viollet-Le-Duc pour le
château de Pierrefonds et Cluny. Les grands personnages du Moyen Age rentrent dans le patrimoine, Richard Cœur de
Lion, les Cathares, Guillaume Tell, Vercingétorix.
3) La Révolution Française
Entre 1798 et le second empire, les livres sur la Révolution sont une constante du travail historique, cet événement
ne laisse pas neutre et entraîne des querelles historiques.
 L’abbé Barruel écrit une histoire contre-révolutionnaire, un succès d’un complot organisé par les
philosophes et les francs-maçons. Beauchamp écrit la première histoire vue du côté de la Vendée, la
Vendée martyre, une histoire partisane et sans nuance popularisée sous l’Empire et la Restauration.
 Dans les années 1820, les libéraux ont une autre lecture de la Révolution, une instauration des libertés
fondamentales, opposés à la Restauration. Thiers écrit « L’Histoire de la Révolution Française » en 1823,
pense que la Révolution est restée inachevée par la faute de la bourgeoisie, donc qu’il faut faire une
seconde révolution (monarchie de juillet en 1830).
 Entre 1830 et 1840, l’historiographie romantique de la Révolution a à sa tête, Michelet qui soutient que la
Révolution a été voulue par le peuple, faite par le peuple et confisquée par la bourgeoisie (sans-culottes)
et doit être achevée par le peuple. Lamartine, « Histoire de la Révolution » en 1847, et Blanc font la
révolution de 1848, le printemps des peuples (allemands, italiens, autrichiens, français, russes).
Toutes les lectures révolutionnaires sont partisanes et engagées, il manque une histoire neutre et objective.
Tocqueville et Quinet montrent une histoire dépassionnée, comme un phénomène total qui a des causes, des faits et des
conséquences. La Révolution a des bonnes et mauvaises périodes comme la Terreur. Cette histoire paraît ni rigoureuse, ni
satisfaisante.
II] La première école historique française
1) Les deux influences allemandes
Avant 1870, l’Allemagne est qualifiée « de temple de l’intelligence historique », reprend le flambeau de philosophie
de l’histoire avec Kant et Hengel. En France, on admire les grands historiens allemands de l’âge romantique dont Léopold
Ranke (histoire des papes et du peuple allemand) et Théodore Monnsel (Antiquité romaine). Ces historiens travaillent
tous pour l’Etat prussien, Michelet fait un voyage en 1865 en Allemagne.
Après 1870, l’admiration est brisée avec la perte de l’Alsace et du nord de la Moselle, et 5 milliards d’or. Le
traumatisme de la défaite est grand, un sentiment d’humiliation et de trahison naît. L’Allemagne a gagné car elle est plus
avancée au niveau technologique et a un esprit patriote supérieur à la France. La pangermanisme, amenée par ses
historiens, est une conscience historique très développée qui explique la réunification en 1866 et la victoire contre la
France, oubliant son histoire. L’histoire est alors mobilisée pour réveiller le nationalisme et la revanche.
Fustel de Coulanges entre dans un combat face à Monnsen sur la question de l’Alsace. La IIIème République renforce
le sentiment national et développe l’histoire nationale et l’esprit patriotique. Lavisse publie en 1902 les manuels scolaires
historiques. Des institutions culturelles historiques sont créées à l’étranger dont Athènes, Rome, La Caire, Hanoi, SaintPétersbourg, et en France avec l’école pratique des hautes études (EPHE) à Paris en 1868 et l’école du Louvre en 1881, la
bibliographie historique est également créée.
2) Ecole positiviste ou méthodologique
Les précurseurs isolés de cette école sont Augustin Thierry, Michelet, Tocqueville, Numa Denis Fustel de
Coulanges et Hippolyte Taine. Taine écrit « Origine de la France contemporaine » en 1884, il est très hostile à la
Révolution car elle montre la faiblesse de la France. Fustel de Coulanges est un grand historien de l’Antiquité, « La cité
antique » en 1863, il est considéré comme le père spirituel de l’école positiviste :
 L’Histoire ne résout pas les questions, elle nous apprend à les examiner ;
 L’Histoire, c’est ce qui s’est vraiment passé ;
 L’Histoire est une science qui n’imagine pas mais qui voit.
Le positivisme influé par Auguste Comte est un mouvement scientifique où l’histoire aimerait faire aussi bien :
 Partir à la recherche des sources et les publier toutes (l’Allemagne l’a fait au début du XIXème siècle) ;
 Confronter les sources (exemple de la date de baptême de Clovis) ;
 Lire toutes les sortes de documents, étude critique, distinguer le vrai du faux.
Le positivisme veut faire une histoire objective et neutre mais ce mouvement est trop ambitieux et se fait des
illusions. L’histoire engagée et patriote amène à une sélection des sources pour glorifier l’histoire des pays en minimisant
les mauvais moments. L’histoire politique néglige les mentalités et les comportements.
Gabriel Monod crée en 1876 la revue historique qui établie la feuille de route de la recherche historique, coordonne
les grandes enquêtes historiques, publie les résultats de la nouvelle histoire. Il est professeur à l’école nationale des
chartes, de l’EPHE et au collège de France (crée en 1530), il a une influence énorme sur l’histoire.
Ernest Lavisse est plus célèbre et populaire que Monod, il publie les manuels du primaire, du secondaire,
universitaires. Il est professeur à la Sorbonne, l’école normale supérieure, membre de l’Académie Française. Il fonde la
revue de Paris, qui n’existe plus, il est la cheville ouvrière de la première grande histoire de France de l’époque galloromaine à la Révolution en 15 volumes, il se réserve le XVII ème siècle avec Louis XIV ; c’est l’histoire de référence jusqu’à
la seconde guerre mondiale.
Marx et Engels s’appuient sur Thierry et son histoire mérovingienne et du Moyen Age. La succession de la lutte des
classes a 5 périodes historiques (rapports de production) dont la commune primitive (à retrouver), l’esclavage
(l’antiquité), le régime féodal, le régime capitalisé (nouveau monde, révolution industrielle) et le régime sociocommuniste.
CHAPITRE V : Les remises en cause du XXème siècle
I] Les conditions de la critique
1) Le procès de l’école méthodique
François Simiand écrit en 1903 contre les idoles de l’école positiviste :
 Idole politique, histoire trop politique et nationaliste (répandue après 1918) ;
 Idole chronologique ou historisante qui se préoccupe de la conjoncture, de date, d’événement, de bataille ;
 Idole individuelle centrée sur les grands de ce monde (succession de biographie célèbre).
2) De nouveaux horizons historiques
Simiand prend le contre-pied des idoles dénoncés avec l’histoire des structures qui préconisent de s’intéresser aux
autres domaines négligés jusque là. L’économie se développe suite à la crise de 1929 où naît la nouvelle politique
économique. Du coup, les historiens s’intéressent à l’économie, de même pour les démocraties historiques c’est-à-dire
l’étude des populations anciennes.
Simiand veut défricher de nouvelles sources, l’école positiviste prend tous les textes, mais lui ajoute l’iconographie
et l’archéologie. Jérôme Carcopino est le premier historien à mélanger texte et archéologie dans « La vie quotidienne à
Rome » en 1938.
Simiand est pour la pluridisciplinarité, l’historien doit connaître d’autres méthodes scientifiques que les sciences
« géohistoire ». D’ailleurs, les très grands historiens viennent de la géographie comme Duby et Braudel. Durkheim avait,
quant à lui, une bonne maîtrise de la sociologie et de l’anthropologie. L’histoire est proclamée reine des sciences
humaines, toutes les autres sciences lui sont auxiliaires.
II] L’influence du courant des annales
1) Des hommes et une revue
Les historiens du courant des annales vont tous être nommés dans la même université, Strasbourg, université
allemande prestigieuse. L’école des annales est fondée par deux historiens, Lucien Febvre et Marc Bloch, et le sociologue
Gabriel Le Bras qui est aussi juriste, géographe et théologien. D’entrée, cette école travaille dans l’interdisciplinarité entre
la génération d’historien français et les précurseurs étrangers dont belges et néerlandais.
Febvre (1876-1956) est d’origine franc-comtoise, fait une thèse sur Philippe II et la Franche-Comté. Il est nommé à
Strasbourg en 1919 puis enseigne au collège de France en 1933. Il devient un grand spécialiste du XVI ème siècle, et un
redoutable polémiste avec plusieurs centaines de comptes-rendus sévères.
Bloch est un médiéviste à la Sorbonne. Il est l’auteur du premier livre des écoles des annales, « Les rois
thaumaturges » en 1924, c’est une étude composée sur les miracles royaux. Il inaugure le style des études comparées dans
l’espace et la longue durée (Moyen Age, temps modernes), c’est un travail diachronique et synchronique. Il a connu les
deux guerres mondiales et est traumatisé par la défaite française, « L’étrange défaite ». Il se réfugie en zone libre à
Clermont-Ferrand, il fuit car il est juif et devient maquisard et résistant mais il est arrêté et fusillé en juin 1944.
« La revue des annales » est fondée en 1929, le 15 janvier, sous les deux directeurs Bloch et Febvre. De suite, la
revue se fait rivale de l’école positiviste. En 1948, la 6ème section de l’EPHE se crée et se spécialise dans l’économie et le
social. En 1975, l’EHESS (Ecole des Hautes Etudes des Sciences Sociales) est fondée.
2) Le rayonnement de la seconde génération
Braudel remplace Febvre en 1956, il est connu par sa thèse sur la Méditerranée et sur sa thèse sur les origines du
capitalisme. Ensuite, se succède les médiévistes Duby et Le Goff, le moderniste Mandrou et le spécialiste de la Révolution
Française, Furet. Ils ont la mainmise sur les médias historiques, ils fondent les premières émissions de radios sur France
Inter, de télé avec Apostrophe, et à travers le cinéma comme conseillers historiques.
La seconde génération, celle des disciples, a développé de nouveaux centres d’intérêts. La Nouvelle Histoire
concerne l’histoire des mentalités ou culturelles avec entre autres, l’enfance, la famille, la mort, le corps, les gestes, la
lumière, la nuit, les couleurs, le goût, les odeurs, le son, les femmes. Le courant des annales a crée un élan historique mais
tous les historiens n’appartiennent pas à ce courant, on trouve des descendants du positivisme (Tulard). Certains n’ont
pas connu une grande carrière à cause de leur indépendance d’esprit comme Ariès.
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