La propulsion du voilier
Pour comprendre comment le voilier avance, il faut d'abord savoir pourquoi il
flotte. Puis il faut aborder quelques notions de mécanique des fluides.
L'ensemble des forces en jeu font que le bateau est statique ou dynamique sur
l'eau, qu'il suit le vent ou qu'il le remonte. Le voilier est plongé dans deux
fluides: l'air et l'eau (les fluides regroupent les gaz et les liquides pour leurs
propriétés communes).
Le bateau flotte
Comme un glaçon, le bateau flotte. Ceci est dû à la poussée d'Archimède. Une force s'exerce
sur un corps plongé dans un fluide verticalement vers le haut. Celle ci s'oppose au poids du
corps (Loi de Newton) et est égale au poids du volume du fluide déplacé.
Il est évident pour tous que le bateau ne peut flotter dans l'air mais pourquoi? L'air est 800 fois
plus léger que l'eau, la poussée d'Archimède (et toutes les forces qui s'y développeront) est
diminuée d'autant et ne peut s'opposer au poids du voilier.
La ligne de flottaison du bateau dépendra
donc de ce qu'on y mettra dedans.
Au final, nous avons un équilibre de
forces qui concourent à la stabilité du
voilier. L'ensemble des forces
s'équilibrant représente la statique, les
autres forces, la dynamique.
Les mouvements parasites
L'équilibre décrit précédemment est stable à condition que les fluides le soient aussi. Lorsque
le clapot ou la houle apparaissent, des forces naissent et créent une dynamique. Ces forces
s'exercent sur la carène du bateau. Dans l'air, c'est le fardage qui s'exerce sur les oeuvres
mortes du voilier.
La traînée et la portance
Par l'exemple
Un parapluie qui réagit avec le vent. Lorsqu'il est placé sous le vent avec une surface
maximum (manche horizontal), il est emporté dans le sens du vent. C'est une force de
poussée appelée traînée de forme. Lorsqu'il est placé presque verticalement avec un
bord d'attaque horizontal, il s'envole. C'est cette fois la portance qui agit, la même qui
fait tenir l'avion en vol, 'posé' sur l'air.
Une feuille qui tombe. Même si elle commence par tomber en position horizontale, le
vent vitesse va opposer à la pesanteur, une traînée de forme. La feuille est ralentie
comme un parachute. L'équilibre étant instable, la feuille va pivoter. A ce moment, la
portance entre en jeu en déplaçant la feuille dans le sens horizontal. La traînée et la
portance vont tourner en même temps que la feuille créant un mouvement oscillatoire
(voire le retournement de la feuille).
La théorie
A l'instar du vent qui naît d'une différence de pression dans l'atmosphère, les forces qui vont
faire mouvoir le voilier sont dues à des différences de pression relatives et locales. C'est la loi
de Bernouilli qui nous l'explique: la vitesse et la pression d'un fluide sont liées et évoluent
inversement. Quand le fluide accélère, la pression chute, quand elle ralentie, la pression
augmente.
Plaçons un obstacle dans un courant d'air, les lignes de courant, au départ parallèles, vont être
déviées par l'obstacle. Les lignes compressées vont subir une survitesse donc une dépression.
A l'inverse, les lignes de courant sur l'autre face vont subir un ralentissement donc une
surpression. Une force va s'exercer des hautes vers les basses pressions, la portance. Ce sera le
phénomène observé au niveau des voiles dans les allures de près et au niveau du voile de
quille et de safran.
Quand à la traînée de forme, elle sera utilisée dans les allures portantes.
Ce qui se passe dans l'eau
Nous l'avons vu plus haut, la carène va jouer un rôle parasite à cause de la traînée (de forme et
de friction) qu'exerce l'eau sur elle. Par contre, le safran et surtout la quille vont avoir une
fonction capitale. Pour cela, il faut que le voile de quille soit légèrement braqué par rapport
aux lignes de courant générées par le déplacement du voilier. Il va alors se créer une force de
portance déplaçant latéralement le voilier. Cette force sera utilisée pour contrer la dérive du
voilier. Le rôle du safran sera expliquer un peu plus tard.
Ce qui se passe dans l'air
Dans l'air, ce sont les voiles que l'on va placer avec une certaine incidence par rapport au vent.
Celles-ci travailleront soit en finesse (portance) soit en poussée (traînée).
La traînée étant dirigée dans le sens du vent, ce sera pour les allures portantes: du largue au
vent arrière. La portance sera utilisée dans les autres cas pour remonter le vent: du près serré
au travers.
Toutes ces forces pour un même but
L'équilibre général va dépendre
des couples et moments associés
aux différentes forces.
L'équilibre de la carène sera
régie par la force de gravité
appliquée au centre du même nom
et de la poussée d'Archimède au
centre de carène. Le moment de
redressement est d'autant plus
élevé que l'écart entre les deux
centres est grand.
Les résultantes longitudinales
et latérales de la force vélique et
de celles jouant au niveau des
plans marins vont s'opposer
également en couple:
o la force de propulsion et la
force de résistance de la
carène, la première doit être
suffisamment grande par
rapport à la deuxième pour
faire avancer le voilier..
o la force de dérive et la force
anti-dérive, la première et plus
grande que la deuxième dans
les allures de près donnant une
dérive sous le vent du voilier.
o Le décalage vertical des
deux centres d'application
donnera lieu à un moment de
gîte et à un moment de piqué.
L'action de ces deux moments
sera contrée par celle du moment de redressement.
o Le décalage horizontal de ces deux centres donnera naissance à un moment de lof ou
d'abattée.
Le rôle du safran
Si le voilier est bien réglé, il ne reste qu'une force de propulsion et éventuellement une légère
dérive. Il suit donc un certain cap. Comment alors changer de cap?
Si l'écart est léger, le simple réglage des voiles doit suffire à donner un nouvel
équilibre au voilier.
Si l'écart est plus grand et d'autant plus s'il y a changement d'amure, le voilier ne
trouvera pas seul son nouvel équilibre. Ce sera le rôle du safran. En le braquant par
rapport à l'écoulement de l'eau, une nouvelle force de portance va naître et faire
pivoter le voilier autour du centre de carène.
Il permet également de corriger les mouvements parasites décrits plus haut et de contrôler les
départs au lof du voilier. Si le bateau est gîté, il va vouloir partir au lof, il faut mettre la barre
au vent, s'il l'est trop, la barre sera aux "taquets", c'est le moment de choquer si le vent tourne
ou de réduire s'il se lève.
Le réglage pour chaque allure
Plus on s'écarte du vent, plus les voiles sont choquées et inversement, en se rapprochant du
vent, les voiles sont bordées.
Au près
Nous avons vu que pour les allures de près, les voiles travaillent en finesse, la portance est
prédominante par rapport à la traînée. La composante de propulsion va augmenter en
s'écartant du vent pendant que la dérive va diminuer. Le voilier va gîter avec la force de
dérive donc plus au près serré qu'au travers. La force anti-dérive ne sera pas suffisante
lorsque le voiler se rapprochera du vent, une composante de dérive subsistera.
Si au travers, les voiles sont trop bordées, elles ne travaillent plus en finesse mais en
poussée, la portance disparaît laissant une force de dérive faisant gîter le voilier.
Au portant
Il y aura deux situations possibles: avec ou sans voile légère (spinaker):
Sans le spi: le voilier va contourner son évolution, il continue à se redresser, la force
de dérive tendant à s'annuler. L'allure la plus délicate sera en vent arrière, juste dans
l'axe du vent, lorsque l'on est obligé de mettre les voiles en ciseaux. Le voilier va
osciller autour de sa position d'équilibre (instable), tiré par la prépondérance d'une
voile sur l'autre puis contré par la force de l'autre.
Avec le spi: cette voile a plus de volume donc plus de puissance que le génois, la
vitesse du voilier sera par conséquence plus élevée, changeant la direction du vent
apparent.
La force vélique est déplacée à l'avant du voilier générant un couple de piqué. Elle est
également déplacée à l'extérieur du voilier faisant gîter le voilier du travers au grand largue et
pouvant faire contre-gîter celui-ci en vent arrière. Dans le premier cas il y a risque de départ
au lof et d'enfournement, dans le deuxième, le voilier peut partir à l'abatée et empanner.
Le vrillage des voiles
Nous avons vu que les voiles
sont réglés par rapport au vent
apparent:
La vitesse étant
fonction de l'allure, le
gisement (angle du
vent) ne sera pas tout à
fait celui que l'on aurait
à l'arrêt en étant au
même cap. Cela veut dire qu'en abattant de 10°, le vent apparent change de moins de
10°, il refuse.
Le vent apparent est fonction du vent réel qui augmente avec le hauteur, il adonne en
haut des voiles. Elles doivent être vrillées pour avoir une bonne incidence par rapport
au vent apparent tout le long du bord d'attaque.
Le réglage de cette incidence se fera grâce aux pennons.
Les pennons pour garder l'allure
Des pennons ont été fixés sur les voiles sur des lignes horizontales à différentes hauteurs. Ce
sont de fines lamelles de tissu (genre de bouts de laine) fixées à l'aide d'oeillets. Ils permettent
de matérialiser les lignes de courant d'air. Si l'écoulement est de type laminaire, les pennons
sont horizontaux. Si au contraire, il est perturbé, les pennons montent et descendent en suivant
les perturbations.
Lorsque la voile est trop bordée, il y a décrochage des lignes de courant sous le vent de la
voile. Si elle est trop choquée, le creux de la voile est caché par la bordure et c'est au vent de
celle-ci qu'il y a décrochage.
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