La place des Sciences de la nature
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En affirmant que ce n’est qu’au niveau de la technique que peut s’exprimer d’une manière
spécifique la culture chinoise, la science étant une connaissance universelle, l’auteur semble
sous-entendre que la science n’est pas vraiment le problème de la Chine, du moins qu’elle ne
pourra pas la marquer d’une manière distinctive ; par contre, elle a beaucoup à dire sur le
rapport de l’homme à la nature, sur la manière dont sa culture aborde la transformation de
la nature, sur l’importance primordiale donnée à l’homme sur la technique elle-même, sur le
primat donné à l’homme.
L’auteur cite un passage célèbre du Zhuangzi, celui où le boucher Ding fait part de son art
de la découpe du bœuf. L’usage du mot ‘art’ en français dans ce contexte, où est désigné un
geste qui n’est plus seulement celui du technicien, mais celui d’un auteur entièrement
impliqué dans sa tâche, me permet tout à fait heureux. Les mots ‘artisan’ et ‘artiste’ peuvent
être un assez bon équivalent de la différence que l’auteur cherche à introduire entre
« technique » et « dao ».
Avant d’approfondir les diverses significations du terme « dao », notons la complémentarité
entre le texte précédent et celui-ci. Ce qui compte pour les auteurs, ce n’est pas les sciences,
simple outil ou « connaissance concrète », mais l’application – ou l’implication – de l’homme
ayant assimilé le geste de l’art où il transforme la nature et s’accomplit lui-même. Cette
inspiration, qui est aussi le stade ultime d’un apprentissage, s’appelle
dao.
Dans cette
perspective, les Chinois semblent attendre une sorte de division du travail, attendant
d’autres zones culturelles, les théories permettant de maîtriser les phénomènes culturels, se
réservant de les mettre en œuvre d’une manière originale, et c’est sans doute ce qu’ils font
déjà d’une manière remarquable dans certains domaines.
Conclusion :
Les études d’histoire des sciences ont mis en lumière les résultats, quelquefois très
remarquables du niveau atteint par les mathématiciens de diverses époques et notamment
des Song, de l’exactitude de leurs résultats en dépit de l’absence des démonstrations. Le
caractère « monstratif » plus que « démonstratif » des textes qui nous sont parvenus, est
caractéristique.
C’est le mode de raisonnement hypothético-déductif qui est l’obstacle majeur pour un grand
nombre de Chinois, sans doute la plupart d’entre eux et certainement pas leur totalité, non
qu’ils en nient la nécessité mais plutôt parce qu’il leur paraît contraignant par ses règles
d’élaboration, que ce n’est guère un lieu où la pensée se mouvoir librement.
Notons aussi au passage qu’en rejetant les raisonnements établis par déduction à partir de
propositions tenues pour vraies (axiomes, hypothèses ou affirmations religieuses), les
Chinois tout autant une forme de connaissances scientifiques et une forme d’exposé de la
religion.
Ce qui est valorisé par ces auteurs est le
Dao
et c’est ce que nous allons approfondir.
En illustration la traduction de deux passages de Zhuangzi illustrant le lien entre le
dao
et la
technique, ou plus exactement le geste technique.