
PHILOSOPHIE 
Emmanuelle ROZIER    Cours Terminales / La Culture 
-  Les  techniques  sont  visibles  ou  invisibles,  c’est-à-dire  réalisés  dans  des  objets 
matériels  (y  compris  le  corps  humain)  ou  non  :  elles  peuvent  abstraites, 
intellectuelles. 
 
On  peut  caractériser  la  technique  comme  une  activité  visible  (ou  invisible) 
essentiellement sociale et donc acquise, qui a pour effet d’établir entre l’homme et son milieu 
une barrière qui s’organise en système avec des activités de même nature.  
Ce faisant, on voit que la technique ne se réduit pas à une somme d’objets issus de 
l’artifice,  mais  s’intègre  bien  dans  un  pôle  pratique,  autrement  dit  au  sein  de  l’activité 
humaine. Elle doit donc être définie au regard de ce que l’on a nommé activité. 
 
La technique s’inscrit au sein  d’une activité, qui est orientée vers des fins qui  sont 
choisies  donc  libres.  « La  technique  d’une  activité  est  dans  notre  esprit  la  somme  des 
moyens nécessaires à son exercice, par opposition au sens ou au but  de l’activité qui, en 
dernière analyse, en détermine (concrètement parlant) l’orientation ».  
Dans son sens le plus vaste, on entendra par technique tout mode de composition 
d’éléments d’une activité dont l’agent, individuel ou collectif, se représente les effets. Sont ici 
en  cause  la  structure  générale  de  l’activité  humaine,  c’est-à-dire  la  capacité  de  se 
représenter un but et d’enchaîner virtuellement des procédures utilisant judicieusement les 
ressources disponibles pour les ajuster aux fins. La séquence du « si… alors » représenterait 
le schéma  épuré de l’intrusion  technique dans  l’univers naturel, en  proposant  une pensée 
foncièrement calculatrice, et utilitaire. 
1 - ANTHROPOLOGIE DE LA TECHNIQUE 
La technique, que ce soit comme monde ou système d’objets ou comme ensemble de 
moyens  nécessaires  à  l’exercice  d’une  activité,  nous  caractérise  en  tant  qu’hommes.  Les 
animaux  sont  dotés  d’instruments  organiques  qui  déterminent  leur  survie.  Les 
transformations de ces instruments se font à l’échelle de l’évolution des espèces. En ce qui 
concerne  les  hommes,  nous  avons  vu  qu’ils  étaient  relativement  indéterminés  au  niveau 
instinctuel, mais c’est également vrai au niveau des instruments corporels : il n’en possède 
pas un spécifique, mais un indéterminé et relativement plastique qui lui autorise toute sorte 
d’utilisation  dérivées  de  la  préhension :  la  main.  La  main  est  ce  qui  va  lui  permettre  de 
prolonger son corps dans et par des objets techniques. L’objet technique peut, en ce sens, 
être  considéré  comme  un  prolongement  inorganique  du  corps  de  l’homme,  comme  une 
projection de son corps dans la nature.  
Par ce prolongement, cette projection, l’homme se libère bien d’un certain nombre de 
contraintes et déterminations naturelles, puisqu’il s’organise, au sens propre du terme, pour 
atteindre  ses  buts,  pour  accomplir  ses  fins.  Ainsi,  la  technique  peut  être  dite  caractériser 
l’homme, peut être dite constituer une donnée fondamentale de l’anthropologie. Il n’y a pas 
d’homme sans technique (ni bien sûr, de technique sans l’homme).  
En  quoi  la  technique  nous  libère-t-elle  de  l’emprise  de  la  nature  ?  Quels 
possibles nous ouvre-t-elle que la seule nature nous interdisait ? 
 
On a vu que l’indétermination instinctuelle nous libérait en quelque sorte, ou plutôt, 
nous offrait une certaine condition de possibilité de la liberté. Par la technique également, 
l’homme devient actif dans la nature, c’est-à-dire vis-à-vis de ce qui le détermine et s’impose 
à lui, au lieu de demeurer passif comme l’ensemble des autres espèces du vivant. Il prend en 
main  son  rapport  à  la  nature,  et  le  médiatise  par  le  biais  de  la  technique.  Cette 
médiatisation peut consister par exemple en :  
-  une  bulle  de  protection  vis-à-vis  de  la  nature,  i.e.  par  le  biais  d’armes,  de 
vêtements, d’habitat, etc. 
- un certain nombre de moyens d’actions, i.e. de locomotion, de transformation de 
matériaux, de captation et d’accumulation de ressources ou d’énergie, etc. 
Enfin  et  surtout,  la  technique  nous  libère  en  ce  sens  qu’elle  nous  offre  les 
moyens de réaliser nos actions, nos fins, en dépit des forces de la nature, en triomphant de