Traumatisme de la rate
par Marc Leclerc du Sablon*
* Chirurgien, Hôpital de Vannes (56), MSF.
Organe friable, fragile et très vascularisé, la rate est normalement profondément
située sous la coupole diaphragmatique gauche et protégée par les dernières côtes
gauches.
A l'état pathologique, comme en cas de paludisme chronique, la rate, hypertrophiée
et alourdie (poids normal: 150 à 200 g) est particulièrement exposée au risque de
contusion lors d'une chute ou d'un traumatisme.
La rupture de la rate peut entraîner une grave hémorragie intrapéritonéale dont il
faut savoir faire le diagnostic très vite. La splénectomie (ablation de la rate)
représentait, jusqu'à maintenant, le geste de sauvetage le plus couramment réalisé
en urgence.
Cependant, la rate a un rôle hématologique et immunologique important. Les
malades qui sont splénectomisés courent un risque accru d'infections graves, rares
mais parfois foudroyantes. Pour cette raison, on essaie aujourd'hui d'avoir une
attitude moins radicale. Certaines plaies sont minimes et le saignement peut se tarir
de lui-même, sans avoir à opérer. Dans d'autres cas il est possible, en opérant, de
faire l'hémostase en conservant la rate. Ce traitement conservateur est certainement
le meilleur, quand il est possible.
Malheureusement, ce n'est pas toujours si simple, loin de là. La rupture de la rate
survient de plus en plus souvent au cours d'accidents de la route. Il s'agit alors d'un
polytraumatisé et le diagnostic de rupture de la rate peut être difficile, masqué au
début par d'autres lésions.
Par ailleurs, les conditions matérielles locales sont souvent précaires: la banque du
sang fait défaut, l'anesthésie est rudimentaire, l'expérience du chirurgien (ou du
médecin isolé) est parfois insuffisante pour faire face à des lésions complexes. Il ne
faut pas sous-estimer ces difficultés matérielles qui risquent de transformer une
simple splénectomie en une aventure dangereuse!
Les contusions de la rate surviennent surtout chez les enfants et adolescents et les
adultes de trente à quarante ans, plus souvent des hommes. Il s'agit le plus souvent
de traumatismes fermés (contusions) consécutifs à des accidents de la route
(accidents de voiture, de moto, de vélo ou piéton renversé), parfois de rixe avec
coups sur l'abdomen, ou encore, chute d'un lieu élevé, ou dans un contexte de
guerre: plaies par arme à feu touchant l'hypochondre gauche mais aussi explosions
de bombe ou de roquette, par effet de souffle ou par éclat.
Après avoir analysé les différents types de lésions rencontrés, nous étudierons la
conduite à tenir pour chaque tableau rencontré et selon les moyens techniques dont
on dispose sur place.