Belle et joyeuse entrée en Carême à tous ! 1er dimanche de Carême En ce premier dimanche de Carême, l’Eglise nous invite à méditer le texte des tentations de Jésus au désert. Et voici une petite histoire pour nous y aider. Le diable a décidé de prendre sa retraite. Et donc, il lui faut vider son magasin avant de fermer boutique. Beaucoup d’instruments trouvent preneur : la machine à séduire, la machine à tromper, celle à mentir ... Le démon se fait un point d’honneur à expliquer le fonctionnement de tout à ses acheteurs. Il reste cependant une machine dans le fond, et à ceux qui veulent l’acquérir est faite la même réponse : Non, celle-là n’est pas à vendre ! Au bout de plusieurs refus, on demande au diable pourquoi il est si attaché à cette machine. Il répond : « Celle-là je me la garde. On ne sait jamais, si je m’ennuie je pourrais l’utiliser, elle vaut toutes les autres à elle seule ! » « Mais quelle est-elle donc ? » Et lui de ricaner, fier de son effet : « C’est la machine à fabriquer le découragement ! Un tout petit grain suffit pour mettre les plus solides à l’envers ! Et là, croyez-moi, je me régale ! » La plus grande tentation n’est donc pas le pouvoir, l’avoir, mais bien le découragement, le désespoir ! Alors, comme tout au long de ce Carême, écoutons Sainte Claire : « Réjouis-toi donc toujours dans le Seigneur, toi aussi, et ne permets à aucune amertume, à aucun nuage, de venir assombrir ta joie ! » (3è lettre de Claire à Agnès) 2è dimanche de Carême Avec sainte Claire, nous allons contempler le mystère de la Croix. Elle ne parle pratiquement pas de la Résurrection. Est-ce à dire qu'elle ne contemple qu'une face du mystère pascal ? Non ! Elle voit la Croix comme le signe par excellence de « l'amour ineffable » de Dieu pour nous. Elle a donc tout compris : la Croix, c'est l'amour donné jusqu'au bout (cf Jean 13 : le lavement des pieds). Et la Résurrection vient nous le dire de manière éclatante : oui, la mort est vaincue, c'est la Vie, l'Amour qui ont le dernier mot avec le Christ. Gardons cela en tête quand Claire nous parle de la Croix ! C'est aussi ce que Jésus a voulu faire goûter à Pierre, Jacques et Jean lorsqu'il les prend sur la montagne : la Transfiguration, c'est un petit aperçu de ce que sera la Résurrection, après le passage par une autre montagne : le Golgotha ... « Contemple chaque jour ce miroir [= le Christ]. Au bas du miroir, contemple l'ineffable amour qui l'a conduit à vouloir souffrir sur le bois de la croix et à vouloir y mourir du genre de mort le plus infamant qui soit. » (4è lettre de sainte Claire à Agnès de Prague) 3è dimanche de Carême Aujourd'hui, Jésus nous donne un signe (le deuxième après celui de Cana). Un signe nous est donné, tout particulièrement dans l'Evangile de St Jean, pour nous aider à croire, pour avancer sur le chemin de la foi. Un signe, il faut pouvoir le décripter, le comprendre. Jésus nous parle du Temple, du bâtiment de pierres. C'était là que les Juifs pensaient que Dieu habitait. Or, Jésus apporte une nouveauté : lui. Et c'est désormais lui la demeure de Dieu par excellence. C'est pourquoi il peut nous annoncer l'écroulement du temple et son rélèvement en trois jours : c'est une annonce de sa propre Passion – Résurrection. Saint Paul nous dira que nous aussi, nous sommes le temple de l'Esprit Saint. Nous aussi nous sommes la demeure de Dieu ! A condition bien sûr de ne pas laisser cette demeure que nous sommes devenir un repaire de brigands, toujours occupé à toutes sortes de traffics … En ce temps de Carême, nous pouvons lui demander de venir nous libérer de tout ce qui entrave notre marche vers lui ! « Conservez au coeur le brûlant désir de vous unir au Christ pauvre et crucifié, qui a souffert pour nous tous le supplice de la croix, qui nous a ainsi arrachés à la puissance du prince des ténèbres, et qui nous a réconciliés avec Dieu son Père. » (1ère lettre de sainte Claire à Agnès de Prague) 4è dimanche de Carême « La croix n'est pas source de salut par son aspect sacrificiel et sanglant. C'est parce qu'elle est l'expression de l'ultime amour de Dieu qu'elle peut être pour les croyants source de vie. Nous sommes loin de certaines visions de la croix comme lieu de la colère de Dieu, de l'abandon du Fils par son Père pour racheter le péché des hommes. Ici, le Fils et le Père communient dans un même amour pour le monde. » (Père Alain Marchadour dans L'Evangile de Jean) Voilà pourquoi nous pouvons aimer le Seigneur. Non, nous n'aimons pas la souffrance, nous aimons l'Amour poussé à l'extême ! (cf Jean 13) « Aime de tout ton coeur Dieu et son Fils Jésus qui fut crucifié pour nous autres pécheurs ; que son souvenir ne quitte jamais ta mémoire. Fais en sorte de méditer continuellement le mystère de sa croix et les douleurs de sa Mère qui s'y tenait debout. » (Lettre de sainte Claire à Ermentrude) 5è dimanche de Carême Le Seigneur nous dit aujourd'hui que lorsqu'il sera glorifié, il attirera à lui tous les hommes. Laissons-nous attirer vers et par lui, même lorsque tout en nous rechigne à suivre son chemin, que nous pouvons trouver parfois exigeant, trop dur. Regardons bien au fond de nous : quelque chose en nous, un morceau de nous, peut-être très enfoui, le sait : ce chemin sur lequel Jésus nous appelle à le suivre est le chemin de la vie. Même s'il nous faut suivre l'itinéraire du grain … Il nous a ouvert le chemin, il est passé avant nous, et aujourd'hui il marche encore avec nous ! « Regarde le ciel qui nous appelle et nous attend ; prends ta croix et suis le Christ qui nous précède : par lui nous pourrons entrer dans la gloire après avoir traversé toutes sortes d'épreuves. » (Lettre de sainte Claire à Ermentrude) Dimanche des Rameaux Il y a 800 ans, sainte Claire quittait de nuit sa maison familiale pour suivre le Christ sur le chemin tracé par saint François. Voici ce que nous raconte son biographe : « La solennité des Rameaux était proche. La jeune fille était venue trouver l'homme de Dieu [François], lui demandant encore que faire – et comment faire – pour quitter le monde. Le Père lui ordonna de revêtir pour la fête ses plus beaux atours et d'aller avec tout le peuple à la procession des Palmes puis, dans la nuit qui suivrait, de sortir de la ville et de quitter les joies d'ici-bas pour prendre le deuil de la Passion du Seigneur. » (Vie chapitre 4) Claire ouvre donc le chemin des Clarisses le jour où l'Eglise nous fait entrer dans la « Grande Semaine ». Cette Semaine Sainte est la plus importante de toutes pour tous les chrétiens. En ce jour des Rameaux, nous rappelons l'entrée de Jésus dans la ville de Jérusalem, où il sera mis à mort, par amour pour nous comme nous l'a rappelé Claire tout au long de ce Carême. Une foule l'acclame, et pose devant lui manteaux et rameaux, comme elle accueillerait le Messie ! Et nous, qu'avons-nous à offrir ? Des rameaux, des vêtements, des palmes ? Non, mais voici ce que nous propose saint André de Crète : « C'est nous-mêmes qu'il faut abaisser devant lui, autant que nous le pouvons, par l'humilité du coeur et la droiture de l'esprit, afin d'accueillir le Verbe qui vient, afin que Dieu trouve une place en nous, lui que rien ne peut contenir. » Belle Semaine Sainte à chacun ! Jeudi Saint Alors que les ennemis Sarrasins sont aux portes de la ville d'Assise, et même certains franchissent le mur du monastère de Saint Damien où vivent Claire et ses soeurs, voici ce que nous dit le premier biographe de Claire, le franciscain Thomas de Celano : « Claire, bien que malade, se fait transporter à la porte de clôture et demande qu'on la place face à l'ennemi avec, comme seule protection devant elle, la pyxide d'argent revêtue d'ivoire où se trouvait pieusement conservé le très saint Corps du Christ. (…) Relevant son visage en larmes, elle réconforte ses soeurs en disant : « En vérité je vous le déclare, mes filles, il ne vous arrivera aucun mal. Ayez seulement confiance dans le Christ ! » (Vie chapitre 13) Non seulement Claire met effectivement toute sa confiance dans le Christ, mais comme Jésus le jeudi saint, elle aime les siens « jusqu'à l'extrême » (cf Jean 13). Elle est prête à donner sa vie à la suite du Seigneur. Et comme Jésus, si elle est prête à donner sa vie à cet instant, c'est parce que toute sa vie a été un entraînement à donner sa vie. Ce n'est pas seulement maintenant qu'elle est prête à se désaisir de sa vie. « L'amour serviable de Jésus est ce qui nous fait sortir de notre orgueil et nous rend « capables » de Dieu » écrit Benoît XVI (Jésus de Nazareth, tome 2). Chaque fois que nous tendons les mains pour recevoir le Corps du Christ, redisons-nous que dans ce minuscule bout de pain, nous recevons le Seigneur qui a donné sa vie pour nous … et laissonsnous entraîner à sa suite ! Vendredi Saint « Et ce miroir [le Christ], du haut de la croix, attirait lui-même l'attention des passants sur ce qui devait faire l'objet de leur contemplation : Ô vous tous qui passez sur le chemin, arrêtez-vous et voyez s'il est une douleur semblable à la mienne ! A ce cri plaintif, répondons toutes d'une seule voix et d'un même coeur : Ton souvenir ne me quitte pas, et l'angoisse étreint mon âme. » (4è lettre de sainte Claire à Agnès de Prague) Oui, avec Claire, contemplons encore et toujours ce mystère de la Croix. Ce bois où pend la souffrance … la souffrance physique, la souffrance de la solitude, le poids du péché du monde … Avec Claire, gardons présent, dans l'esprit et dans le coeur, le souvenir de la Passion, mais surtout le souvenir de cet Amour grand, si grand … Oui, le Christ est mort par amour pour nous ! C'est tellement grand que nous avons du mal à en saisir toute la grandeur, toute la portée … Alors, avec Claire, sans mot, contemplons … Laissons le souvenir du Christ Amour nous envahir, nous habiter, nous fortifier. Samedi Saint « La Passion du Seigneur était l'objet fréquent de sa méditation et de ses larmes, source tantôt de douloureuse compassion, tantôt de joie reconnaissante et douce. Souvent elle se remettait en mémoire Celui dont l'amour avait imprimé l'image au plus profond de son coeur. » (Vie chapitre 19) Jour de grand silence … Le Christ, la Vie, est au tombeau … Claire nous l'a déjà dit en ce Carême : « Aime de tout ton coeur Dieu et son Fils Jésus qui fut crucifié pour nous autres pécheurs ; que son souvenir ne quitte jamais ta mémoire. Fais en sorte de méditer continuellement le mystère de sa croix et les douleurs de sa Mère qui s'y tenait debout. » (Lettre de sainte Claire à Ermentrude) Avec Marie, n'ayons de cesse de méditer ce mystère, source de notre joie. Oui, c'est paradoxal, mais c'est pourtant vrai … La joie vient de la Croix. Pas de la souffance, mais parce que c'est le signe le plus fort, la preuve pourrait-on même dire, que Dieu nous aime, non seulement d'un amour sans mesure, mais aussi sans condition. Il nous suffit de nous tenir devant lui, même pauvres, même vides, même pécheurs, même dans les cris, le « ras-le-bol », même à genoux … Lui, Il jette loin derrière Lui et derrière nous toutes nos faiblesses, et Il nous aime. Entendons-Le nous dire : « Mes bras sont grands ouverts sur la Croix, et c'est pour mieux te prendre, mieux t'accueillir … J'ai soif … j'ai soif de toi, de ton amour, si petit soit-il …. S'il te plaît, réponds-Moi ! » Dimanche de Pâques [En mourant, voilà ce que Claire dit, s'adressant à son âme] « Pars en toute sécurité, car tu as un bon guide pour la route ; pars, car Celui qui t'a créée t'a aussi sanctifiée ; il t'a toujours gardée et aimée d'un tendre amour, comme un mère aime son fils. Sois béni Seigneur, toi qui m'as créée ! » Son guide pour la route n'était pas loin. En effet, se tournant vers une de ses filles, elle dit : « Voistu le Roi de gloire que j'aperçois ? » (Vie chapitre 28) Alléluia ! Le Christ est ressuscité ! Claire ne parle quasiment jamais de Pâques, de la Résurrection !... Mais elle en vit ! Ce Roi de gloire qui vient la chercher, c'est le Vivant ! C'est son compagnon de route depuis toujours. C'est Celui qui l'a appelée, qui a marché avec elle. Et elle a marché avec Lui, elle l'a suivi, elle s'est laissée conduire, parce qu'elle savait et elle croyait que le chemin sur lequel Il l'entraînait était un chemin de vie. Avec Claire, donnons toute notre confiance à Celui qui nous a promis d'être avec nous jusqu'à la fin des temps (Matthieu 18, 20), à Celui qui nous donne sa paix et nous envoie sur le chemin qui est le nôtre (Jean 20, 21) !