Le scandale

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Le scandale
« Inadmissible », « intolérable » sont des mots qui évoquent le scandale. Or contexte politique, parlons de la réaction au
scandale et non de ce qui fait scandale. Il y a au moins trois formes de scandales :
-
celui dans le but de provoquer délibérément une crise et qui donc s’utilise comme une arme
-
celui qui résulte de la méconnaissance des règles élémentaires
-
celui qui naît de l’échec des institutions, du constat des limites, de nos rêves et de nos actions soit un scandale
institutionnel
Le terme de scandale est étrange car il oscille en permanence entre deux sens. Tout d’abord un sens légitime . A Rome
existait une « pierre du scandale » qui était une pierre où l’on faisait asseoir ceux qui avaient fait une faillite frauduleuse.
Mais un sens aussi plus fort qui est celui religieux. Dans la bible, à plusieurs reprises le scandale est mentionné. Par
exemple dans la phrase « malheur à l’homme par qui le scandale arrive ». Ce mot est aussi employé pour caractériser
Jésus lui-même (« le scandale du monde »).Ceci est étrange mais il est scandale par son enseignement, par sa
condamnation, sa lutte contre le péché et par son supplice. Le mot « religion » indique dans la religion quelque chose de
fort. Il n’est pas seulement contraire au dogme mais occasionne le péché. Si ces termes sont utilisés dans la bible, c’est
pour donner un sentiment d’indignation. De là apparaît un sens philosophique proche : le scandale est ce qui fait naître
le sentiment de refus et d’indignation. Il existe aussi un sens faible à ce mot : le scandale a toujours un état public sur
quelque chose refusé. Très tôt, le scandale a ciblé l’offense.
En matière juridique, le mot « scandale » peut nous intéresser de deux façons. Tout d’abord d’une manière générale soit
dans la justice et puis de façon plus ciblée dans la discussion sur le scandale de la peine.
I)
Le scandale dans la justice
Dans l’histoire de la philosophie du droit, le scandale a été traité sous couvert d’autres termes comme la résistance et
l’oppression. On pense l’oppression par la légalité mais depuis quelques siècles on cherche à savoir s’il est permis de
résister à ce type d’oppression. On observe que dans tous les systèmes juridiques institutionnels il y a une place pour
l’inadmissible soit une place pour la réaction à la justice. Traditionnellement, cette réaction est laissée dans l’interstice
des institutions. Dans le système romain et jusqu’à la révolution l’hypothèse d’une loi injuste était très envisagée. Au
Moyen-âge, la théorie dicte des coutumes odieuses. Il faut donc en éviter l’application. Elles étaient reconnues comme
telles pour leur injustice. Au 17° siècle, les coutumes odieuses sont caractérisées par leur irrationalité. Un exemple : la
coutume selon laquelle le roi peut vendre la chose d’autrui. Dans le droit plus moderne et à cause de la rationalisation,
certains droits ont laissé à la réaction une place explicite. En effet le code civil reste fidèle à l’idée d’équité donc se
propose de protéger les citoyens d’une interprétation raide de la justice. On se préoccupait de la justice dans un souci
d’efficacité.
En philosophie il y a trois tendances : la légalité, le jus naturaliste et celle du droit naturel.
1)
Vue de la légalité
Force et respect doivent rester à la loi au point que l’expression « loi injuste » est écartée selon Rousseau : « Plutôt
une injustice qu’un désordre ». Cette formule a une justification importante : si on fait prévaloir la justice c’est pour éviter
la création d’une nouvelle injustice. Dans le droit positif français il y a une illustration manifeste de ce principe : la cour de
cassation doit se demander si un arrêt parfaitement contraire aux principes fondamentaux reste une décision, conserve
l’autorité de chose jugée. La cour de cassation répond par l’affirmative ce qui est choquant. Mais ceci s’explique par le
triple fondement de cette philosophie :
-
un formalisme avoué : il n’y a pas de résistance car la procédure formelle dès qu’elle est respectée ne peut pas
être une injustice.
-
un formalisme rampant : il consiste à éliminer l’existence de résistance au motif que les règles sont contrôlées
par le juge constitutionnel qui veille au respect des principes fondamentaux présentés comme protecteurs et
indiscutables. Mais souvent, le juge constitutionnel a une position moyenne, il censure que ce qui est
totalement contraire aux droits fondamentaux. Il y a donc des injustices.
-
un formalisme fondamental : il vient de la conviction que le droit est dans les règles. Mais toutes règles se
présentent sur certaines formes. La loi est consacrée indépendamment des ses conséquences concrètes. Or,
certes il peut advenir que la mise en application de la loi soit injuste mais elle évite tout de même l’arbitraire et la
discrimination.
2)
Vu du jus naturaliste
C’est la philosophie d’Hobbes, de Kant et de Locke. Il s’agit de faire référence à un principe abstrait soit à un idéal
tiré d’une nature humaine qui n’a jamais existé. Kant cherche cela quand il donne pour fondement au droit l’impératif
catégorique. Cette théorie recouvre deux caractéristiques. Tout d’abord, il y a une étroite parenté entre le Jus
Naturalisme et le Positivisme. En effet, ils cherchent un fondement supérieur à imposer aux citoyens et dans les deux
cas, le droit est présenté comme un ensemble de règles. C’est donc un droit dans l’abstrait et le général. Ensuite, les
différents tenants du Jus naturalisme ne se sont pas mis d’accord sur la question de résistance à l’oppression.
3)
Vu du droit positif
C’est la philosophie d’Aristote, de Villey et de saint Thomas d’Aquin. Le droit naturel est le droit qui fait
référence à la nature des hommes en circonstance concrète, qui fait référence à la réalité humaine. La règle qui régit la
nature humaine ne peut être la même que l’homme qui a tout. On tient compte aussi de la permanence de la nature
humaine qui tend au Bien. Ce qui le mène au mal est contre nature. Pour eux, il est évident qu’on puisse résister à
l’oppression légale car si le droit positif est injuste ce ne serait plus du droit. De plus, le droit dont parlent les tenants du
droit naturel ne se réduit pas aux règles. Ils parlent du droit tel qu’ils le définissent soit le droit qui se situe quelque part
entre les règles générales et les décisions. Il n’est pas enfermé dans les décisions où l’on ne trouve que du droit mort, ni
enfermé dans les règles car il n’a pas un sens déterminé sans conséquence. Ces philosophes sont plus réalistes car on
constate qu’ils confèrent à la règle un rôle limité. D’où trois conséquences : la justice de la règle a quelque chose
d’insignifiant, toutes nos dispositions légales ont un aspect de justice. Certaines aboutiront à des conséquences justes.
Il est facile de caractériser la justice des règles si ont-en à un exemple. En revanche, dans les cas particuliers, les règles
sont beaucoup plus compliquées donc selon Domat en plus d’un exemple, il faut une méthode : « je me lève en colère
contre tout le monde y compris contre moi-même ». En faisant cela on essaie à chaque injustice de la combattre.
II)
Le scandale de la peine
P. Ricœur dans « le juste, la justice et son échec » (2005) part de la conviction que la peine en elle-même est un
scandale intellectuel car nous sommes les héritiers de Platon selon lequel en aucun cas il est juste de faire du mal à
quelqu’un. Il réfléchit ensuite aux trois solutions trouvées pour essayer que la peine ne soit plus un scandale :
- la thérapie de l’arme : inspirée par Platon selon laquelle la peine n’est pas scandale car permet au coupable dans un
souci de moralité de se soigner. On la sanctionne car en tant qu’homme capable il doit comprendre qu’il a fait quelque
chose de mal. Cependant cette justification n’est pas suffisante.
- justification restitutive de la peine : on en rend pas hommage au coupable ni à la victime mais à la loi qui impose du
dessus une souffrance pour rappeler son autorité
- enfin, s’il y a un scandale intellectuel c’est que l’un des plus beau progrès qui est passé par le remplacement des
institutions sociales par le droit pénal. Ce progrès se fait dans la rationalité d’où un certain retour vers le jus naturalisme.
Ricœur passe cependant à coté de trois questions :
-
est ce que la discussion sur la peine de mort n’a pas servie d’alibi pour éviter d’autres discussions beaucoup
plus embarrassantes sur le traitement indigne que les français imposent à leurs prisonniers ?
-
le droit peut-il et doit-il être une conquête de la rationalité ou devrait-il être plutôt une conquête de la justice ?
-
la détermination des peines est elle juridique ? Est-ce que le droit à des moyens à offrir pour choisir les
peines ?
Il n’est pas sûr qu’il existe des critères juridiques de la peine notamment en France en 2008. Il est cependant interdit de
dire ça car selon les contemporains se qui caractérise le droit c’est la contrainte de la peine.
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