maîtrisent. Car droit et pouvoir en Europe et en Occident sont, depuis
des siècles, liés l’un à l’autre et forment un couple inséparable, bien que
chacun conserve par rapport à l’autre une relative autonomie (Berman
1983 : 8-9). Or, ces acquis reposent évidemment sur des processus
historiques, des logiques et des acteurs qui n’ont pas d’équivalents
ailleurs. À mon avis, non seulement est-il nécessaire d’identifier ces
processus, ces logiques et ces acteurs afin de mieux comprendre les
théories juridiques associées aux notions de pyramide et de réseau, mais il
également impératif de reconnaître que la complexité règne dans ce
domaine et que ce qui a pu prévaloir à un moment précis en Occident ne
peut être simplement transposé ou exporté ailleurs sans tenir compte des
caractéristiques propres aux sociétés concernées.
À la lumière de ces propos, on peut facilement comprendre la
perspective qui est la mienne, celle d’un juriste soit, pour qui le droit
demeure une ressource incontournable dans l’ensemble des sociétés –
encore qu’il faille discuter de la définition même de ce qu’on désigne
comme constituant du droit -, mais également un anthropologue pour qui
tout phénomène doit être abordé en l’associant à la société et au contexte
dans lesquels il se manifeste et est utilisé, interprété et parfois déjoué par
des acteurs pour qui les normes abstraites et formelles sont rarement
prises isolément mais plutôt intégrées dans une nébuleuse où s’insèrent
leurs intérêts immédiats, leurs associations avec d’autres individus et
groupes, une part d’héritage et une part de créativité (Moore 2000).
Cette perspective mérite d’être mise en œuvre partout, aussi bien au sein
de nos sociétés occidentales, où la notion de pyramide est clairement le
produit de processus historiques qu’il est permis de retracer, que dans des
sociétés très différentes où les notions de droit, de résolution des conflits,
de normes et de comportements, n’ont pas nécessairement les mêmes
définitions et où leurs interrelations diffèrent.
Ceci étant dit, ce serait faire injure à mes hôtes que de simplement
nous faire buter tous sur pareille opposition entre une perspective disons
plus interne aux systèmes juridiques européens et occidentaux et une