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« Agriculteurs, régions, Etats dans la PAC réformée »
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Le Doyen GADBIN
Question de la solidarité et de l’égalité
Il est vrai que la question de l’inégalité dans la gestion de la politique agricole commune (PAC)
refait surface depuis un certain temps. La question n’est pas nouvelle, depuis le début des
critiques sont adressées à la PAC au motif qu’elle ne traite pas les agriculteurs de manière
équitable.
Le succès de la PAC dans les premières années est du au fait que celle-ci permet le
développement de la production et la conquête des marchés extérieurs. Sur le plan des revenus,
dans les années 1960, la question est le rattrapage des revenus agricoles par rapport aux autres
catégories sociaux professionnelles (60 % du revenu non agricole). Le problème est donc de
permettre aux agriculteurs de rattraper leur retard. De ce point de vue, la PAC a relativement
bien réussie.
Mais aujourd’hui, le problème n’est plus l’augmentation de la production agricole (avec des
excédents de production et des problèmes pour les juguler), ni la conquête des marchés
extérieurs (il n’y a plus de réelles ouvertures).
Aujourd’hui, le problème non encore résolu est celui des inégalités de revenus au sein du monde
agricole et aussi, l’occupation du territoire par les agriculteurs de manière satisfaisante et la
question de la protection de l’environnement.
Il se trouve que les interventions de la PAC n’ont pas fondamentalement changées depuis
l’origine et les soutiens de la PAC sont encore organisés selon les objectifs initiaux et sont très
peu réorganisés en fonction d’objectifs comme l’aménagement du territoire ou la protection de
l’environnement. C’est un problème politique, mais est ce un problème juridique : est on en
présence de discrimination ? En effet, le principe de non discrimination entre agriculteurs ne doit
pas être méconnu.
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Compte rendu de Morena Paget, membre du CESICE, ATER de la Faculté de droit de Chambéry
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Il peut y avoir discrimination lorsque l’on traite différemment des situations identiques ou de
manière identiques des situations différentes.
Mais ce principe de non discrimination n’est pas utile car le système des objectifs de la PAC
n’est pas modifié depuis 1957 : productivité agricole, niveau de vie équitable pour l’agriculteur,
stabilité des marchés, curité des approvisionnement et un prix raisonnable pour le
consommateur. Ce sont des objectifs largement économiques et très peu sociaux. Faut il alors
réviser les Traités ? La question se pose, mais l’avantage du Traité est que c’est un Traité cadre
et les dispositions laissent une marge discrétionnaire d’appréciation aux décideurs : il y a dans le
traité des dispositions qui permettraient de faire évoluer la PAC dans un sens positif. Il y a
notamment l’article 33 § 2 qui permet de tenir compte de certaines catégories de producteurs ou
de régions qui se trouvent structurellement dans des situations difficiles ou les clauses de
cohérence. Ces clauses de cohérence sont pour un certain nombre de politiques communautaires
des dispositions qui indiquent que les objectifs de la dite politique doivent être pris en compte
par les autres politiques de la Communautés. (Exemples : la protection de l’environnement, la
protection de la santé publique, les objectifs de la cohésion économique et sociale). Il est donc
possible en s’appuyant sur les Traités de faire une PAC qui ne soit pas seulement économique.
De fait, le législateur utilise les possibilités offertes par le Traité, mais il y a une différence entre
les textes et la réalité.
I. La tendance réelle à se perpétuer d’une PAC issue d’un modèle
d’intervention économique très inégalitaire.
La PAC est fondée sur un modèle d’intervention inégalitaire et qui se perpétue.
Ce modèle a 2 clinaisons avant la réforme de 2003 : la PAC jusqu’à la réforme Mac Sharry
1992, un modèle des prix et des structures et la PAC de 1992 à 2003, un modèle d’aide directe
compensatoire et le développement rural.
Jusqu’en 1992
L’objectif prioritaire est le niveau de vie équitable en agriculture, élever le revenu individuel des
agriculteurs, car comme l’explique M. Blumann, il faut faire des agriculteurs des agents
économiquement responsables ; capables d’investir et de se moderniser.
Pour la réalisation de cet objectif, le Traité fait obligation de mettre en place une organisation
commune de marché qui est fondée sur une politique des prix.
Par cette politique des prix, on va essayer de garantir aux agriculteurs un prix minimal pour leurs
produits ; donc, l’organisation de marc a des implications : la protection du marché
communautaire du marcmondial lorsque le prix mondial est inférieur au prix communautaire
(notamment au prix d’intervention). On a maquillé de protectionnisme sous le principe de
préférence communautaire).
Qui va bénéficier de cette organisation de marché ?
1 : les grosses structures agricoles, car il y a un soutient du prix unitaire. Ce sera donc les régions
les plus riches de la Communauté qui vont en bénéficier.
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Mais cette organisation commune de marcne bénéfice pas de la même façon à toutes les
productions, car il n’y a pas une organisation commune unique de marché pour tous les produits
(l’organisation la plus protectrice est celle des céréales).
2 : les fournisseurs, ceux qui fabriquent ce qui va permettre la modernisation de l’agriculture.
3 : les propriétaires fonciers non agriculteurs, qui possèdent la terre donc les soutiens liés à celle-
ci
Les implications sont donc la difficulté pour les jeunes agriculteurs à s’installer et ainsi le
vieillissement de la population agricole.
Qui paie ?
Le consommateur, puis le contribuable et selon la clé de répartition des contributions au budget
communautaire, les Etats membres.
Grâce à une conscience assez rapide de ces problèmes, va être mis en place parallèlement une
politique des structures. Cette politique consiste en une aide aux agriculteurs âgés pour quitter
leurs exploitations et pouvoir mettre ainsi les terres à disposition des agriculteurs qui veulent
s’agrandir ou s’installer et ce pour permettre à ceux qui restent d’augmenter leurs revenus. Cette
politique des structures date de 1972 mais dès 1975, on va prendre conscience de ces limites et
mettre en place pour la première fois des aides directes pour les zones de montagnes et les zones
défavorisées.
Mais il n’y a toujours pas de réductions des disparités régionales.
Par l’Acte Unique de 1986, une politique globale d’envergure est mis en place : la politique de
cohésion économique et sociale qui va englober la politique des structures.
Mais la politique de cohésion économique et sociale va permettre à une PAC inégalitaire de se
perpétuer.
De 1992 à 2003
Par cette réforme, il y a une remise en cause de la politique des prix et une diminution donc du
prix de soutien. Pour compenser cette baisse, il va y avoir une aide directe à l’euro près.
Ce qui change : ces aides sont plafonnées, non en fonction du revenu agricole mais en fonction
de la capacité de production de l’agriculteur acquise avant 1992. Cette réforme est donc un frein
à l’augmentation de la productivité et a l’avantage de permettre un contrôle sur les dépenses de la
PAC.
Mais, elle n’a aucun effet de redistribution, car les aides vont toujours au plus grosses
exploitations et elle engendre une réduction de l’offre et pour le consommateur une
augmentation de prix. On transforme le soutient aux agriculteurs en une rente.
Il y a une prise de conscience des problèmes en 1997 et dans l’Agenda 2000 on parle pour la
première fois d’une aide aux revenus pour les agriculteurs.
En 1999, un règlement va modifier en ce sens la réforme de 1992, mais si il y a un changement
de vocabulaire, dans la réalité, le système des aides compensatoires est maintenu.
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La Commission européenne fidèle à son discours décide d’un plafonnement des aides par actif
mais le Conseil laisse les Etats membres libres de réduire leurs aides (avec un maximum de 20
%).
Il y a une relance de la politique des structures agricoles qui devient la politique de
développement rural et dans le même temps le développement de la politique de cohésion
économique et sociale qui masque les effets de plus en plus inégalitaires de la PAC.
II. La difficulté à concevoir et à imposer un modèle d’intervention
plus équitable
La réforme de 2003 a l’ambition de mettre en place un nouveau système d’aide sous forme d’un
droit à paiement unique (DPU). Il s’agit de regrouper l’ensemble des aides directement perçues
au niveau d’une exploitation donnée. (Avec un calcul identique à la somme des aides
antérieures).
Le calcul du DPU est effectué par rapport à la production antérieure, on en revient donc au
système de la rente.
Pourquoi ces aides ?
La réponse n’est pas convaincante : pour que les agriculteurs puissent satisfaire à d’autres règles
non économiques comme l’environnement, le bien être des animaux….Mais ces autres règles ne
sont jamais prises en compte pour le calcul des DPU.
Donc le soutien par les aides est un chèque fait sans justification.
L’avenir : il est difficile aujourd’hui d’imaginer avec cette réforme une PAC plus sociale à cause
de difficulté techniques (il faudrait des critères européens communs pour les revenus agricoles)
et juridiques.
La mérite de la réforme de 2003 est qu’elle donne une piste : envisager d’aider les agriculteurs
en fonction de leurs fonctions non économiques : la multifonctionnalité. Mais il y a aussi des
difficultés : comment évaluer une rétribution de l’agriculteur pour ces fonctions ? Et dans quelle
mesure l’OMC aura la possibilité d’accepter cette forme de la PAC car l’OMC vise à une
réduction des aides directes. Depuis le mois de juillet les négociations entre l’UE et l’OMC par
rapport au DPU sont suspendues.
Il y a aussi un courant de pensée qui considère que multifonctionnalité et découplage de l’aide
par rapport à la production ne sont pas compatibles.
La France dans les options laissées par la réforme de la PAC en 2003, a fait le choix d’attribuer
les aides DPU que lorsque l’activité de production est maintenue et un choix d’une gestion
départementale des aides.
Suite aux questions des auditeurs, Monsieur le Doyen Gadbin a apporté les précisions suivantes :
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Par rapport aux nouveaux membres de l’UE (principalement pour les PECO). Il y a le principe
d’une extension progressive des aides pour 2013. On voit aussi arriver une renationalisation de la
PAC et en 2013, l’UE ne pourra pas attribuer aux 25 ce que donnait aux 15 : on va donc vers une
réforme de la PAC.
Est-ce que c’est légitime par rapport aux PECO d’accorder progressivement l’aide ? Oui, car si
on donne aux agriculteurs des PECO la totalité des aides, ceux-ci vont devenir très riches et il y
aurait une remise en cause de la solidarité nationale.
Pour les DPU, il devrait y avoir une application aux PECO, mais la situation est différente car il
n’y a pas d’antécédent de production pour son calcul : chaque hectare de terre aura la même
valeur.
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