Ethique économique et sociale: invité n°1: Pierre Defraigne 1

Ethique économique et sociale:
invité n°1: Pierre Defraigne
 Présentation de Pierre Defraigne
Présenté par groupe n° 78
 Discours de Pierre Defraigne
Intro
Pour débuter, je vais vous dire à vous, la chance que vous avez, aujourd'hui d'avoir 20 ans et
quelque et de vivre un moment inouï de l'histoire de l'humanité. Pourquoi cette période est
extrêmement intéressante? Car nous vivons la convergence de trois phénomènes tout à fait
fondamentaux, qui vont changer le rapport de l'Europe en ce monde.
1. Le grand basculement de l'économie et forcément de la politique, (la démocratie a tendu du
monde nordique vers l'Asie et donc bien entendu principalement, la Chine) Ce fait est
dorénavant avéré, la crise va tester la réalité de ce schème mais il n'y a pas de doute, l'Asie
est amenée à prendre dans les 20 ans qui viennent la place qui était celle de l'Europe et que
l'Europe est en train de perdre. Pour une seule raison : l'Europe vieillit. A partir du moment
où il n'y a plus de croissance démographique, la croissance économique ne peut provenir
uniquement des gains de productivité, ce qui ne permet pas de garder son rang par rapport à
des continents plus dynamiques démographiquement et économiquement.
Ce n'est pas une mince affaire ce basculement. Ça veut dire que nous somme plus nombreux
à partager les mêmes ressources → conflit pour les ressources.
Quand il s'agit de décider, dorénavant, l’Europe ne dicte plus la loi de l'Occident, elle doit
dialoguer avec des continents nouveaux, qui ont fait une toute autre expérience qu’elle. Ils
se sont en partie appuyés sur le système qui est le notre et que l'ont qualifie de capitalisme
de marché, pour être très clair sur le sujet mais, ils l'ont fait à leur manière. C'est un lieu de
pouvoir dorénavant, on le voit dans le commerce mais aussi dans la finance du bien public,
on a appelé récemment à la rescousse pour refinancer, recapitaliser une série d'entreprises
dont certainement la moindre n'étant pas Fortis en Belgique. (Que néanmoins le bon
souverain chinois n'a pas réussi à sauver, il a fallut que ce soit fait en bourse.)
2. Le deuxième trait qui est fort important et lié au premier, c'est le choc climatique. Le fait
que pour la première fois dans l'histoire de l'humanité la tension entre les hommes et les
ressources aboutit à une situation où de toute évidence la technologie n'arrivera plus à nous
sortir d'affaire (comme ça a été le cas quand nous n'étions qu'une partie du monde à nous
développer). Maintenant que nous avons cette remontée en puissance de la Chine, c'est clair
qu'il faudra changer nos modes de vie, nos modes de production, de consommation et
probablement beaucoup de valeurs sociétales qui se verront dépassées.
3. La crise financière : Comment ne pas en parler aujourd'hui quand on voit, il y a quelques
semaines, tant de certitudes proclamées depuis très longtemps sur la supériorité d'un système
de marché qui se sont effondrées brutalement ? Si on avait dit, il y a trois mois qu'un parti
d'extrême gauche s'était réuni quelque part en Europe pour dire: il faut nationaliser les
banques européennes, tout le monde aurait sourit, pourtant c'est fait. Le premier actionnaire
dans la plupart de nos banques en Europe et aux Etats-Unis est dorénavant directement sous
le contrôle de l'Etat, car il est lui-même actionnaire principal.
→ Grands changements !
Il est dit que l'Etat fait cela momentanément, dès que ce sera possible il va revendre. Mais
on va voir comment le scénario de la crise va se dérouler. Peut-être que certains états vont
être amenés à utiliser cet instrument à cause du tour dramatique qu'a pris cette crise.
Cette crise a un mérite, elle nous rappelle la nature du système économique dans lequel nous
vivons. Ce système est définit par Mr Defraigne de capitalisme de marché, car c'est l'expression
habituel utilisé.
Bien sûr, ce système est innovant, créatif, efficient; (au moment où il apparait sous sa forme
industrielle au 18-19e s, le taux de croissance de la productivité, soit ce qui détermine le standard de
vie, a fortement augmenté) il a permis à l'Europe sur la sphère du capitalisme mondial d'imposer ces
intérêts et ces lois à l'ensemble du monde. Cette suprématie de l'Europe au sens large (projection
américaine, canadienne, australienne,...) est remise en question aujourd'hui avec ce basculement qui
a été cité plus haut. C'est un système efficient mais qui a trois défauts:
- Il est instable, on a vu depuis la première crise financière de 82 au Mexique que les
crises se sont multipliées à répétition, mais c'est la première fois que la crise se situe chez
nous, c'est-à-dire au cœur du système.
- Il est également injuste car il aggrave les inégalités de départ, on vient au monde avec
un stock de capital, une santé plus ou moins bonne, avec une intelligence plus ou moins
vive, avec des relations ces inégalités de départ sont aggravées
- Il soulève également la question de l'insoutenabilité environnementale mais qui n'est pas
propre au système lui-même, qui est propre au fait que ce système n'est pas suffisamment
régulé.
Certains pensent que c'est le système qui est en crise et qu'il faut le remplacer, Defraigne est plutôt
de ceux qui pensent depuis longtemps que c'est une crise à l'intérieur du système et qu'il faut le
réformer mais c'est extrêmement difficile. Ça demande beaucoup de qualités au niveau de l'analyse,
de la compréhension, mais aussi au niveau de la morale collective, chose que particulièrement le
système libéral a découragé les gens de faire, de se mêler de la manière dont fonctionne l'économie
de marché.
Il faut mettre l'accent sur cette dimension qui a prévalut ces dernières années, cette idée qu'il faut
étendre le marché à tous les domaines possibles, que les défaillances de marché sont moins graves
que les défaillances du politique. Cette idéologie qui est bien au delà de ce qui est la norme libérale
économico-politique classique, est une des explication de l'incapacité que les gens ont montré ces
dernières années pour réformer ce système. Tout en maintenant son efficience, il faut corriger son
instabilité, lutter contre les inégalités et l'obliger à respecter l'environnement et particulièrement la
biodiversité et le climat.
Nous vivons maintenant ce temps fabuleux où la politique reprend place. Le dernier mot doit
revenir au politique car, c'est là que se situe l'ultime recours. Il détient une supériorité sur le marché,
il a le monopole de la violence légale (ce qui est le pouvoir ultime dans une société et n'est pas
confié au marché). On peut se réjouir de l’éventualité que le politique pourrait dépasser le marché
mais ne nous réjouissons pas trop vite car le politique peut faire des erreurs. Mais aussi, parce qu'on
est passé à un capitalisme de marché global qui a pris l'habitude depuis une quinzaine d'années de
mettre les états en compétition sur le social, l'environnemental,...
Et si les politiques reprennent la main ? Les politiques ne sont restés que des institutions nationales
sauf dans un cas, l'Europe. Il y a une division du travail entre les Etats et l'Europe qui n'est pas
idéale, pas stable et donc, il y le risque qu’en rendant la main au politique, on arrive à fractionner le
monde, pas seulement autour du marché mais on pourrait arriver à d'autres types de tensions que par
exemple l'accès à l'énergie. En laissant la main aux politiques, comment ces tensions vont se
négocier ? Est-ce que se sera des rapports de forces stratégiques qui vont se substituer à des rapports
de force économiques ? Il y aura de nouveaux enjeux qui vont être très difficile à gérer.
Approfondissement sur la question du développement:
Suite aux différentes questions: comment se fait-il que la Chine a réussi à se développer et que
d'autres n'y sont pas parvenus?
Il y a deux façons de voir les choses:
On regarde les recettes données pour développer un pays et sans doute que certains pays
n'appliquent pas bien les recettes.
On reprend ici le narratif. Le développement, ce n'est pas un phénomène abstrait basé sur
des modèles plus ou moins bien construit mais c'est la suite d'une séquence. C'est-à-dire que
à un moment donné, quelque part autour de l'an 1000, l'Europe a été le premier continent
non pas à faire des innovations mais où la productivité a commencé à croitre. Les raisons de
la bonne fortune européenne sont assez complexes: la géographie de l'Europe est très
avantageuse, bon climat, sol acceptable, les communications par les côtes, par les rivières
sont faciles, les européens ont eu la chance d'être porté par une vision du monde qui est elle-
même spéciale, elle les incitait à être des co-créateurs du monde. Ils ont appliqués souvent
ce que d'autres avaient inventé mais eux, l'ont appliqué à la vie économique et au
développement.
L'Europe a démarré son progrès agricole, elle a dégagé des ressources pour aller conquérir
le monde, le dominer, l'exploiter. Le machinisme industriel, la règle de droit et la théorie du
marché; ces trois choses qui ont fait la modernité, ont été conçues et appliquées en Europe.
(Attention généralisation car ce sont les Américains qui ont été les premiers suite à la
révolution à créer la république) L'Europe a pris de l'avance, elle a construit l'ordre mondial
et par la suite, les autres continents ont eu beaucoup de mal pour remonter.
La remontée de l'Asie est un phénomène récent. Ce phénomène est repris par la Chine, par la
décision historique de faire une tentative de revenir dans le marché, pour stimuler ce grand
pays qui jusque là avait un développement réel mais un peu chaotique. Elle a exploité des
procédés occidentaux: le marxisme tout d'abord et puis le capitalisme de marché pour faire
son développement, rattraper, dominer. Aujourd'hui, elle arrive a un niveau
d'industrialisation qui donne à penser qu'un jour la Chine sera à part égal avec les puissances
industrialisées.
Et les autres?
L'Afrique, l'Amérique latine, le monde Arabe, ils ce sont trouvés dans cette situation de
fournir des matières premières, de l'énergie… C'est ça le problème essentiel du
développement. Les pays qui ce sont le mieux développés (l'Amérique est un cas à part),
sont des pays qui n'avaient pas beaucoup de matières premières, d'énergie mais qui avaient
une certaine capacité pour transformer et organiser la société, pour se transformer.
Dans le fond, le développement est une anomalie, ce n'est pas le cours normal des choses,
surtout pour ces économies rentières. Le développement demande un sursaut, un
changement social qui n'est pas toujours possible dans ces pays. Ces pays sont cantonnés,
mais pas seulement, le capitalisme de marché est un système hiérarchisant au niveau
mondial. Il y a de la part de ces pays déficit de projet, de capacité d'interagir avec ce monde
globalisé.
La différence entre efficience et équité:
Cette question est un enjeu pour le capitalisme de marché. Ça explique en grande partie la
prééminence de la doctrine libérale, y compris à l'intérieur de nos universités du côté des
économistes pendant très longtemps. C'est l'idée que si la croissance se réalise, tout le monde finira
par en profiter et que la clé de la libération du bien-être c'est la croissance. Ce qu’on appelle en
anglais ? (version wallonne: quand il pleut sur le curée, il y a des goutes sur la tête du sacré saint).
Cette théorie est fausse! On ne peut pas avoir un phénomène de croissance sans aucun
développement qui suit et des rémunérations marginales pour la plupart des gens. Il y a des
difficultés de penser le développement à partir de la réduction des inégalités.
→ Plusieurs observations, réflexions sur ce point :
1 er observation statistique : les pays où il y a de trop fortes inégalités ne se développent pas,
pas assez d’attention au capital humain et aux capitaux sociaux.
Question : Est-ce que les inégalités sont tempérées par une forte mobilité (comme ça a été le
cas très longtemps aux Etats-Unis) ou est-ce qu’elles ne le sont pas ?
Une société fortement inégalitaire fait apparaître un inconfort technique. On ne peut pas en
même temps parler de la dignité de l’homme et de l’égalité foncière des hommes, concept
fondamental de nos sociétés civilisées et en même temps accepter de voir mourir des gens,
de voir les immigrés vivre dans des conditions lamentables, accepter la pauvreté des enfants
qui se développent dans beaucoup de nos pays (l’Angleterre étant un exemple
remarquable),…
Il y a un moment donné une contradiction entre les valeurs que l’on cautionne et celles que
l’on applique.
Est-ce qu’on peut corriger les inégalités sans altérer la croissance ? OUI.
A une condition : l’écart de base ne doit pas être trop grand. Si on doit prendre trop aux riches pour
les pauvres, on va décourager les riches rentiers pour donner à d’autres qui vont développer une
dépendance par rapport à ces ressources. De la manière dont les revenus sont négociés, il y a un
certain rapport de force sociale pour que les revenus primaires ne soient pas trop inégaux.
Sous cette condition, la politique peut faire des corrections qui n’entrent pas en contradiction avec
la croissance.
Par exemple, si vous démocratisez l’enseignement secondaire, primaire même gardien, vous avez
un effet à la fois sur la justice et l’efficacité.
Il faut trouver des mécanismes qui exploitent au mieux la potentialité de création, d’innovation dans
un pays. (ça demande par exemple une mixité scolaire, des logements convenables, des
transports,…)
L’élitisme versus l’égalitarisme
Certains redoutent un renouvellement par la bas. Les gens qui ont ce genre de crainte ne sont pas
très sûr des privilèges qu’ils revendiquent. Il faut se méfier quand on dit que l’égalitarisme amène
une descente vers le bas. (ça cache d’autres choses) L’égalitarisme en soi part d’une valeur
intéressante, un facteur de développement sur le long terme, il pourrait mener vers une société de
cohérence.
On ne peut pas différencier l’économie de la société et la société de la civilisation. Il faut avoir une
vue d’ensemble. Pouvoir voir la civilisation entière où sont dégagées des valeurs comme la dignité
de l’homme, la liberté, la justice. Il faut que la société s’organise pour donner un contenu à ses
valeurs sinon, on vit dans la diversité et le mensonge à soi-même. S’il y a un système économique
qui contredit cette ambition de la société et ces valeurs alors on est dans l’indifférence.
Il faut que l’Europe suite à ces derniers bouleversements se redonne une ambition collective pour
transformer notre société, pour la mettre à la hauteur de ces valeurs assumées et si elle ne le fait pas,
le XXIe siècle va devoir apprendre à se passer de l’Europe !
 Aperçu de la personnalité de Pierre Defraigne ou de ses écrits
Présenté par groupe n° 82
 Débat :
Par rapport aux banques → peur de revenir à une souveraineté plus prononcé des Etats et
par là des tensions plutôt stratégiques qu’économiques. En quoi ces tensions seraient-elles
plus dangereuses ?
Le politique aujourd’hui va travailler dans un domaine où il n’est pas prêt à travailler. Pour
l’ensemble de l’Europe, le politique détient un potentiel énorme mais, celui-ci est loin d’être
exploité au moment où la crise est intervenue. La crise peut soit, aider l’Europe à travailler
ensemble ou au contraire, l’aider à se renfermer dans une logique de chacun pour soit.
Autre difficulté : pour travailler ensemble, il faut pouvoir se mettre d’accord sur des objectifs
communs : il faut relancer l’économie par des mesures plus simples mais être capable d’utiliser
les interventions importantes de l’Etat au niveau budgétaire,… pour engager un nouveau projet
de développement. Il faut trouver un ciment pour travailler ensemble mais rassembler les
européens aujourd’hui sur un projet c’est difficile !
Dans le monde, nous vivons dans des systèmes différents, différences entre les capitalismes
chinois, européen et américain, il faut avoir un projet compatible pour tout le monde. C’est vital.
Il faudrait rentrer dans une phase de négociations internationales, d’où beaucoup d’espoirs
reposent sur Obama.
Interpellation du groupe 64 : quelles sont les armes que possèdent l’Europe pour peser sur le
gouvernement Chinois par rapport à la place que la Chine occupe aujourd’hui dans l’OMC
notamment ? si on veut un monde meilleur faut-il vraiment collaborer avec la Chine, ne
faudrait-il pas mieux opérer un boycott ?
On ne peut pas faire sans la Chine, elle fait un travail extraordinaire. La Chine, il est vrai a
commis pas mal d’erreurs. L’exemple le plus marquant, c’est en 1421 quand l’empereur Ming a
rappelé sa flotte qui était en train d’explorer l’Asie. Les chinois ne sont plus sortis de Chine. Ce
qui a ouvert la porte à l’Europe.
On a oublié que ce grand pays s’est trouvé pendant près d’un siècle dans une position très
désavantagée en partie à cause de la décision qui a été prise mais surtout en partie, à cause des
européens qui ont profité de la situation.
La Chine a pu se relever, se moderniser, exporter des produits manufacturés vers le reste du
monde. A ce moment là, les chinois sont entrés dans l’interdépendance avec le reste du monde.
L’alliance avec la Chine se concrétise par l’entrée dans l’OMC en 2001. Elle s’est vue imposée
des règles sans comparaison avec ce qu’aucun pays entrant dans l’OMC n’a jamais eu. Une
série de réformes ont été commandés à l’intérieur de la Chine (à travers le marché, l’arbitraire
politique…). La Chine a réussi à sortir de la pauvreté (du moins une partie de se population). Il
y a une dynamique en Chine qui va dans la bonne direction. On ne peut pas revenir à l’ancienne
situation, le monde a changé.
(ne comprend rien)
Sans les investissements en provenance des Etats-Unis, de l’Europe et de la périphérie, la Chine
n’aurait pas pu acquérir la technologie qui lui a permis cette croissance. C’était indispensable mais
cette croissance est de plus en plus intégrée dans les règles qui sont celles de l’OMC. Le corps de
doctrine de l’OMC a été réalisé par les pays industrialisés. Les deux ont joués pour développer la
Chine.
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