Le NAO après El Niño Fabrice Node-Lauglois Un phénomène comparable au fameux El Nino du Pacifique est-il à l'origine des tempêtes qui viennent de ravager la France ? Depuis une dizaine d'années, les climatologues ont bien identifié un réchauffement cyclique des eaux de surface de l'océan Pacifique oriental. Ils savent que ce phénomène baptisé El Niño, dont l'épisode 1997-1998 a été particulièrement marqué, produit des effets sur les régions tropicales et une partie de l'Atlantique du Nord : sécheresse en Indonésie et en Afrique de l'Ouest, pluies diluviennes au Chili, ouragans au Mexique et aux Etats-Unis. Le progrès des connaissances sur El Niño avait permis des prédictions justes à plusieurs mois lors du dernier épisode. Le phénomène susceptible de jouer, dans l'Atlantique, un rôle équivalent pour le continent européen existe. Les spécialistes l'appellent en anglais NAO, pour oscillation nord-atlantique. Ils observent que plus la pression atmosphérique est élevée au-dessus des Açores, plus elle est basse au-dessus de l'lslande, et vice versa. “ Depuis vingt ans cette osci1lation est forte, constate Jean-Jonzel, climatologue au Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement a Saclay (CNRS- CEA), donc la différence élevée de pressions et de températures entre les Açores et l'lslande favorise par nature la formation de tempêtes ”. Un “ NAO intense ” pourrait même expliquer que les tempêtes soient déroutées au sud de leur route habituelle qui les pousse vers l'Ecosse et la Scandinavie pour frapper la France. Cette oscillation nord-atlantique va-t-elle perdurer ? Aucun modèle informatique n'est capable de l'affirmer, selon Jean Jouzel. Et pourtant, la clé de la prévision météorologique pour l'Europe se situe bien dans l'Atlantique. Mieux comprendre la machine climatique de l'océan, ses courants et sa circulation atmosphérique, est l'un des objectifs de Clivar, un vaste programme international de recherche lancé par l'Organisation météorologique mondiale (OMM). Le NAO, cycle naturel, est-il perturbé par le réchauffement global provoqué par l'augmentation des émissions de gaz a effet de serre ? “ Nous sommes incapables d'établir un lien entre le réchauffement global observé et l'augmentation de la fréquence des tempêtes sous nos latitudes ”, commente prudemment Jean Jonzel. Source : Le Figaro, 30.12.1999