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Toxine botulique en neurologie :
que retenir du 10e ICPD & MD ?
Par Pierre Krystkowiak (CHRU de Lille)
d’après les communications présentées au MDS (International Congress of Parkinson's
Disease and Movement Disorders)
Kyoto, Japon - 29 octobre-2 novembre 2006
Première partie
Toxine botulique dans la dystonie
Globalement, rien de bien neuf sur le front du traitement des dystonies par toxine
botulique : plutôt des confirmations. D’abord l’innocuité à long terme : l’équipe
espagnole de Diez-Tejedor (P1314 et P1315) confirme que les injections de toxine
botulique continuent à être efficaces dans le traitement du spasme hémifacial (qui
n’est pas une dystonie, rappelons le…) et du blépharospasme (BPS) jusqu’à 12 ans
après les premières injections, avec une faible incidence des effets indésirables
classiques, et ce chez plus de 95% des patients. Toujours sur le BPS, Grafe et al.
(P219) mettent l’accent sur une nouvelle échelle d’évaluation fonctionnelle
spécifique testée chez 300 patients, la BSDI (Blepharospasm Scale Disability
Index). Ses propriétés métrologiques sont très satisfaisantes, avec une bonne
consistance notamment avec l’échelle de référence qu’est l’échelle de Jankovic. En
fait, plus que de créer de nouvelles échelles, le problème est surtout d’utiliser
couramment les échelles existantes, car faut-il rappeler que c’est le seul moyen
d’évaluer l’efficacité d’un traitement, quel qu’il soit. Ce n’est malheureusement que
trop rarement effectué dans les dystonies en général et dans le BPS en particulier.
La même équipe s’est par ailleurs attachée à préciser les qualités métrologiques de
l’échelle de sévérité TWRSTRS (la classique « twister ») dans la dystonie cervicale
: sans réelle surprise, bien qu’il s’agisse d’une échelle multidimensionnelle, la
sensibilité au changement et la fiabilité inter-cotateur sont très bonnes. Une
nouvelle fois, soulignons plutôt l’impérative nécessité d’utiliser les échelles
d’évaluation afin d’optimiser nos pratiques cliniques (et nos résultats). Molho et al.
(P229) ont quant à eux précisé l’impact socioprofessionnel de la dystonie cervicale
(DS) : chez 1 patient sur 2, la DS affecte l’emploi, particulièrement chez ceux qui
présentent des douleurs cervicales associées. Aucune corrélation n’était par contre
retrouvée avec le type d’emploi, la présence de spasmes dystoniques du chef ou la
durée d’évolution de la maladie avant traitement par toxine botulique. Sans réelle
surprise, le traitement par injection de toxine permettait d’améliorer l’exercice
professionnel de façon beaucoup plus satisfaisante qu’avec les traitements oraux
(61% vs 19% des cas). Tiple et al. (P192) montrent quant à eux un effet indésirable
méconnu et heureusement infraclinique chez les patients bénéficiant d’un
traitement chronique par injections de toxine botulique A : une dysautonomie
cardio-vasculaire a minima. Enfin, Lim et al. (P194) montrent, si besoin il en était,
la nécessité d’injecter les crampes de l’écrivain (en fait, les dystonies en général) en
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s’aidant de techniques de repérage anatomique lectrostimulation dans le cas
présent), afin d’optimiser le résultat et d’économiser de la toxine. Reichel et al.
(P210) abondent en ce sens mais prônent, pour la dystonie cervicale, un repérage
IRM et TDM certes intéressant (hypertrophie des muscles dystoniques) mais qui
sert plus à aider au repérage du muscle impliqué dans le processus dystonique que
du muscle à cibler au moment de l’injection. Dans le 1er cas, le repérage est
effectalors que le muscle a déjà été sélectionné. Dans le second cas, l’imagerie
aide à la sélection du muscle impliqué mais le problème du repérage per injection
reste entier.
Toxine botulique et tremblements
La tentation est grande d’utiliser la toxine botulique dans le traitement des
tremblements. Nombre d’injecteurs le font de façon empirique mais les résultats
issus de l’evidence based medicine sont rares. Le tremblement essentiel est
fréquent, et un tremblement du chef accompagne 20 à 40% des tremblements des
membres supérieurs. Cette composante cervicale est habituellement peu sensible
aux traitements oraux classiques du tremblement essentiel. La gêne est souvent
purement sociale, mais la demande des patients est importante. Seo et al. (P396)
ont injecté de 40 à 150 unités de toxine botulique (en moyenne 85 U) dans les
muscles du cou. L’amélioration était significative bien que modérée. On regrette
que le choix des muscles injectés (notamment splénius capitis versus sterno-cléido-
mastoïdien) ne soit pas explicité car il peut être déterminant vis-vis du résultat. A
noter également une stratégie d’injection différente de celle proposée dans les
études de Jankovic et Pahwa, qui, d’après les auteurs, permettraient une plus faible
incidence d’effets secondaires : plus faible dose et intervalle inter-injection plus
court (6 semaines).
Toxine botulique dans l’hypersialorrhée
30% des parkinsoniens bavent, et ce problème contribue de façon substantielle au
handicap. Bien qu’il soit admis que ce problème est beaucoup plus la conséquence
des troubles de déglutition (stase salivaire intra-buccale) que celle d’un problème
d’excès de sécrétion salivaire, les injections de toxine botulique A dans les glandes
salivaires ont déjà montré tout leur intérêt pour régler ce problème. Si l’on
s’accorde généralement à encore injecter les glandes parotides en première
intention (cela risque de changer : cf. plus loin), les doses proposées sont très
variables : en moyenne 46,5 U Botox® (8 études). Les études avec Dysport® sont
par contre beaucoup plus rares (160 U en moyenne). Chez 20 patients présentant
pour la plupart des syndromes parkinsoniens (dont une majorité de maladie de
Parkinson), Bouktsi et al. (P420) montrent qu’une dose moyenne de 265 U
Dysport® (extrêmes : 60 à 400 U) est nécessaire afin d’obtenir une efficacité
cliniquement significative. Aucun patient ne présenta d’effet indésirable. Ces
résultats réévaluent à la hausse la dose de toxine nécessaire pour atténuer
sensiblement l’hypersialorrhée (ce qui est d’ailleurs suggéré dans les études les plus
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récentes), avec une très grande variabilité des doses. Le message : commencer petit,
mais ne pas hésiter à monter très haut.
Cependant, le meilleur site d’injection reste à déterminer avec certitude même s’il a
déjà été supposé que la cible la plus intéressante était la glande sous-maxillaire, car
de loin la plus impliquée dans la production de salive. Bloem et al. (P663) ont donc
mené une étude très rigoureuse chez 18 patients afin de déterminer le site optimal
d’injection: celle-ci était réalisée sous repérage échographique (150 U
Dysport®/patient). Il semble que la glande sous-maxillaire soit une cible beaucoup
plus intéressante que la parotide, dans la mesure un bénéfice fut enregistré dans
le groupe « sous-maxillaire » mais pas dans le groupe « parotide » et dans le groupe
« placebo ». Cette étude semble confirmer l’expérience, certes empirique, des
injecteurs de toxine botulique. Elle est à corréler à l’étude de Bouktsi qui, pour
obtenir une efficacité clinique, doit injecter une dose presque 2 fois plus importante
de toxine dans la parotide. Seul facteur limitant de l’injection sous-maxillaire : la
nécessité du repérage échographique.
Références
P1314. Hemifacial spasm: Twelve years of treatment with botulinum toxin
F. Vivancos-Matellano, F. Rodriguez de Rivera, A. Miralles, E. Díez-Tejedor
P1315. Blepharospasm: Twelve years of treatment with botulinum toxin
F. Rodriguez de Rivera, F. Vivacos-Matellano, A. Miralles, E. Díez-Tejedor
P219. Relationship between patient outcome response and clinical assessments in a
controlled blepharospasm study
S. Grafe, G. Comes, R. Goertelmeyer
P229. Effect of cervical dystonia on employment; A retrospective analysis of the ability
of treatment to restore premorbid employment status
E.S. Molho, D.S. Higgins, D.F. Celmins, K. Regan, A. Pal, S.A. Factor, P.J. Feustel
P192. Autonomic cardiovascular function in patients with cervical dystonia treated with
botulinum toxin type A
D. Tiple, S. Strano, C. Colosimo, G. Fabbrini, G. Stivali, G. Calcagnini, A. Berardelli
P194. Botulinum toxin-A injections via electrical motor point stimulation to treat
writer’s cramp: a pilot study
E.C. Lim, A.M. Quek, R.C. Seet
P210. Cervical dystonia the role of MRI and CT in botulinum toxin A therapy
G. Reichel, A. Stenner, A. Jahn, W. Hermann
P396 Botulinum toxin treatment in sssential head tremor; Small dose and short interval
method
M. Seo, S. Woo
P420. What is the effective dose of botulinum toxin for hypersalivation?
M. Bouktsi, C. Cordivari, S. Catania, P. Misra
P663. Treatment of drooling in Parkinson’s disease with botulinum toxin A
B.R. Bloem, J.G. Kalf, A.M. Smit, M.J. Zwarts, W. Mulleners, M. Munnek
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