Leurs prérogatives sont peu importantes :.Au XVè ils ne sont plus que des
fonctionnaires sans réels pouvoirs d’initiative.
3.1.5.1.2. Le pouvoir législatif : le Rat
Le pouvoir législatif est détenu par un organe collégial élu : le « Rat » délibère, édicte les lois
et délègue ses pouvoirs... C’est lui qui détient, en théorie, le pouvoir législatif.
Dès 1456 les membres du conseil sont élus pour deux ans. Chaque année la moitié du conseil
est renouvelé. Pour être élu, il faut être âgé d’au moins 25 ans, être de naissance légitime et
ne pas bénéficier d’un poste de fonctionnaire au service de la ville, de l’évêque ou d’un
seigneur.
Les élections se déroulent dans les 10 premiers jours du mois de janvier. Les représentants
des corporations au conseil sont, jusqu’en 1433, élus par le conseil sortant, puis, à partir de
1433 par les échevins de chacune des corporations. Entre 1349 à 1420, le conseil est formé de
58 membres, répartis entre « Constofler » (bourgeois notables et nobles) et représentants des
corporations, plus les 4 Stettmeister en fonction. Mais en 1420 (suite à la « guerre de
Dachstein), le nombre des sièges accordés aux « Constofler » est réduit et ils ne disposent
plus que de 1/3 des sièges, contre 2/3 aux représentants des corporations, qui disposent donc
de Dès lors, les représentants des corporations occupent 28 sièges et les patriciens 14 sièges,
soit un total de 43 sièges avec l’Ammeister.
Cette composition va être à nouveau modifiée au cours de la seconde moitié du XVe siècle. La
ville profite de la réorganisation générale des corporations pour supprimer des sièges au
conseil. En 1462, 1470 et 1482, huit corporations disparaissent, entraînant la suppression de
leurs sièges respectifs, mais aussi de sièges détenus par les « Constofler » afin de respecter
la règle du 2/3-1/3.
Suite à ces modifications, le conseil trouve en 1482 sa structure définitive qu’il gardera
jusqu’en 1789 : un « Rat » de 31 membres : l’Ammeister, 10 Constofler et 20 membres des
corporations.
3.1.5.2. Les chambres secrètes et le conseil de la ville
L’organisation législative et exécutive « traditionnelle » de la ville est relativement instable vu
la courte durée des mandats. Elle est compensée par l’existence de « chambres secrètes »
dont les membres sont nommés à vie et d’échevins, ce qui relativise quelque peu la valeur
« démocratique » de la république de Strasbourg… Ces organes permettent un exercice plus
efficace du pouvoir car ils favorisent une stabilité (chambres secrètes) et une participation des
élites (échevins des corporations) à la vie politique de la cité. Le pouvoir n’est donc pas laissé
exclusivement au conseil et au chef de la ville.
Les chambres secrètes sont au nombre de trois, la chambre des XXI, celle des XV et des XIII.
Leurs membres sont les mêmes : ainsi, les membres de la chambre des XXI qui siègent au
conseil sont répartis entre la prestigieuse chambre des XIII et la chambre des XV qui siègent
séparément.
3.1.5.2.1. La chambre des XXI
La chambre des XXI est à l’origine une assemblée de « sages de la ville » que consultait le
conseil, mais qui ne disposait pas du pouvoir de décision. Il n’acquiert ce droit de vote qu’en
1413, et finit par dominer le conseil. Composé à l’origine de 21 « sages » il passe à 24
membres (1403), puis à 31 (1407) et enfin à 32 (sur 43 conseillers !). Ce conseil détient le
pouvoir effectif : son vote précède celui des autres conseillers, privilège de première
importance et de première influence sur les autres votes. Cependant, le conseil des XXI ne
peut siéger indépendamment. Il n’a en effet aucun statut juridique et ne possède pas de
sceau propre. Ses compétences sont très étendues : la chambre participe à tous les travaux
du conseil, hormis lorsqu’il siège en tant que tribunal. Son pouvoir est de premier ordre
puisque ses membres sont nommés à vie, ce qui leur confère un prestige certain ainsi qu’une
expérience supérieure à celle des conseillers élus pour deux ans. Les 32 membres de la
chambre des XXI se répartissent en deux autres chambres, celle des XV et la plus
prestigieuse, celle des XIII, à raison de 15 membres dans la première et de 13 dans la
seconde ; ne restent alors que 4 membres, les « vacants » (« ledige einundzwanziger ») qui
ont pour fonction de remplacer un membre décédé ou disparu dans l’une des deux chambres.
3.1.5.2.2. La chambre des XV
La chambre des XV est créée en 1433. Son rôle est de contrôler l’application et le
fonctionnement de la constitution, autrement dit de contrôler les dirigeants et de proposer des
mesures propres à améliorer le régime. C’est la chambre qui a le moins de pouvoir mais son
rôle est crucial pour la survie et l’évolution de la République. Elle est aussi compétente en
matière de direction de l’administration, des finances, des constructions, de la police et des
métiers...
3.1.5.2.3. La chambre des XIII
La chambre des XIII est la plus prestigieuse : elle est la survivance d’un comité militaire de 5
membres institué en 1392, lors de la guerre qui suivit la mise au ban de Strasbourg par
l’empereur Wenceslas. Ce conseil est présidé par l’Ammeister et composée de 4 « Constofler »
et de 8 représentants des métiers, dont 4 anciens Ammeister. La chambre des XIII possède
une personnalité juridique propre et dispose d’un sceau particulier. Elle peut siéger
séparément de toute autre institution, mais ne peut décider sans l’accord du conseil et des
XXI.
La chambre des XIII s’occupe des questions militaires et diplomatiques ; elle est responsable
de l’organisation de la milice, du recrutement des mercenaires, de la gestion des fortifications,
de l’importation et de la fabrication des armes, de la composition des ambassades et de la
conclusion des traités.
Ainsi, ce sont donc les chambres qui imposent leur point de vue au conseil, ce dernier ne
conservant pleinement au final que sa fonction judiciaire.
3.1.5.2.4. Les échevins
Les échevins sont à l’origine (1214) assesseurs dans les tribunaux, tous patriciens. Ils
pouvaient être réunis en assemblée sur convocation du conseil afin d’exprimer leur point de
vue sur certaines affaires et d’approuver des décisions importantes.
Leur composition et leur rôle se modifient au XVe siècle : en 1420 que les « Constofler » sont
définitivement éliminés de l’échevinage. En 1437, une ordonnance fixe à 15 le nombre des
échevins au sein d’une corporation. Comme à cette date il existe 28 corporations, il y a en
principe 420 échevins pour la ville... Mais comme certaines corporations ne comptent que peu
d’artisans, il ont beaucoup moins d’échevins, alors que les corporations riches et influentes en
possèdent plus : ainsi les orfèvres, les bateliers ou les merciers ont respectivement 22, 30 et
25 échevins. Finalement, en 1482, après l’élimination des 8 corporations, il y a en tout 300
échevins pour 20 corporations. Ce nombre sera respecté jusqu’en 1789.
Au XVe siècle les échevins siègent dans les tribunaux et peuvent être convoqués au complet
par le conseil, mais uniquement sur décision du conseil et des XXI pour les questions difficiles.
Les échevins délibèrent en collaboration avec le conseil de questions précises qui leur sont
soumises. Leur avis est uniquement consultatif. Enfin, les échevins de chaque corporation ont
le droit d’élire le représentant de leur corporation au conseil grâce à l’ordonnance de 1433.
3.1.5.3. Conclusion
Ainsi, la république de Strasbourg est un régime relativement évolué pour son époque et sa
constitution est assez complète. Elle est exemplaire de la fin de l’emprise de la noblesse sur
les grandes villes qui s’affranchissent de tout gouvernement non élu afin de garder une
indépendance nécessaire à leur développement social et économique. Mais ce régime montre
ses limites dans la mesure où il est relativement ploutocratique, donnant de fait le pouvoir aux
bourgeois les plus influents et les plus riches de la cité. L’évolution des institutions et de la vie
politique strasbourgeoise est un exemple frappant d’une évolution générale qui aboutit à la
création d’une nouvelle élite, la bourgeoisie.
3.2. Le développement de la cité
3.2.1. L’extension de la ville
L’extension de la ville de Strasbourg depuis l’empire romain au second Reich
A partir du XIIè siècle, et jusqu'au milieu du XVe siècle, Strasbourg entre dans une des plus
grandes phases d'urbanisation de son histoire : cette urbanisation est due d’abord à l’action de
l’évêque et du chapitre, puis elle est relayée, et souvent concurrencée, par celle de la
bourgeoisie, formée de commerçants et d’artisans : la société qui est en train de naître ne
cesse de s'étendre par cercles concentriques, appelant à elle toujours plus de biens et plus
d'hommes.
3.2.1.1. La première extension : XIIè
Au début des années 1100, le premier agrandissement de Strasbourg est le signe tangible de
la croissance d'une cité encore dominée par l'évêque : les fonctions artisanales et domestiques
se développent, entraînant l'expansion des différents quartiers et leur assimilation au cœur
d'une seule et même enceinte. Une nouvelle enceinte est créée : elle s’appuie sur le rempart
romain, et, à partir de l'actuelle place Broglie, longe les rues de la Mésange, de la Haute-
Montée et du Vieux-Marché-aux-Vins avant de rejoindre Saint-Pierre-le-Vieux.
3.2.1.2. La seconde extension : 1200-1220
De 1200 à 1220, une seconde extension porte les limites de la ville au canal du Faux-Rempart
et aux Ponts-Couverts. Cette enceinte délimite une ville de 10 000 habitants et s’enrichit de
nouveaux quartiers autour des églises Saint-Pierre-le-Jeune et Saint-Pierre-le-Vieux. Les
nombreuses tours de fortification qui jalonnent le rempart ne disparaitront du paysage urbain
qu'au XIXè siècle.
3.2.1.3. La troisième extension : 1228-1344
Le troisième agrandissement, entre 1228 et 1334 marque un cap décisif dans l'évolution de
Strasbourg d'un point de vue économique, politique et architectural : il intègre des corps de
métiers dont la ville dépend étroitement et englobant des quartiers de jardiniers, de pêcheurs,
de bateliers et de bouchers (Finkwiller, quai des Bateliers, rue des Bouchers, rue d'Or)
L’enceinte est une construction de briques, aux larges créneaux et portant un chemin de ronde
(Vestiges entre l'église Sainte-Madeleine et la rue du Fossé-des-Orphelins). Elle est flanquée
de tours carrées. Ce dispositif de défense est particulièrement renforcé sur le bras de l'Ill,
ouvert au trafic fluvial : c’est le système des « Ponts-Couverts » : les quatre tours actuelles
faisaient partie des remparts et étaient reliées par des ponts couverts d'une toiture en bois
(disparue au XVIIIè siècle). Ces tours abritent les corps de garde et servent aussi prisons et
veillent sur le canal de navigation et les moulins disposés sur les autres bras de la rivière.
Reste aussi de cette enceinte la « Porte de l’Hôpital ».
Strasbourg : reste de fortifications du Moyen-âge
rue du fossé des Orphelins
Strasbourg Krutenau : partie du mur d’enceinte
médiévale derrière l’église Sainte Madeleine
3.2.1.4. La quatrième extension : 1370-1390
Dans les années 1370-1390, à la fin de la seconde phase de la Guerre de Cent Ans en France,
la population redoute l'invasion des bandes de pillards et de grandes compagnies qui
parcourent la France sans combattre. Aussi la municipalité décide de protéger les parties
Ouest et Nord de la ville. Ce quatrième agrandissement repousse les murailles à l'Ouest et au
Nord-Ouest en assimilant surtout les quartiers maraîchers et les nombreux jardins des
faubourgs Blanc, de Saverne et de Pierre.
3.2.1.5. La dernière extension : 1387-1441
La dernière extension se situe entre 1387 à 1441 et consacre la puissance de Strasbourg :
dans sa volonté de conserver le monopole de la navigation entre Bâle et Mayence, la ville
absorbe vers le sud-est un nouveau quartier de maraîchers et de pêcheurs, la Krutenau, tout
en contrôlant le Rheingiessen, voie d'eau essentielle qui relie l'Ill au Rhin (actuelle rue de
Zurich, le canal ayant été comblé en 1872). Le doublement de la ligne de défense sud au X
siècle ne changera pas radicalement la silhouette de Strasbourg. La ville est alors défendue
par une muraille crénelée, portant chemin de ronde, que renforcent selon l'usage des pays
germaniques 28 tours, 8 tours-portes et autant de poternes.
Strasbourg vers 1570. Gravure de Georg Braun et Franz Hogenberg tirée de « Civitates orbis terrarum »
édité à Anvers par Philippe Galle
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