Aussi la servitude subsista-t-elle-longtemps encore après la destruction de la ville de Tongres
. Cette
ville avait cessé d'être le siégé du diocèse, lorsque Clovis se convertit au christianisme, en 496.
Maestricht était devenue la résidence épiscopale
, quoique le chef du diocèse continuât de porter le
titre d'évêque de Tongres
.
Le clergé que Clovis avait trouvé dans les Gaules, était romain. Il ne cessa pas de suivre la loi romaine
.
Il en conserva les institutions; il les maintint dans les anciennes possessions dé l'église; il les introduisit
dans les nouvelles qui lui furent concédées
.
Ce n'est-pas cependant quant à la servitude qu'il fut dominé par l'esprit de conservation.
Comme les domaines ruraux étaient alors cultivés par des serfs, la condition de ceux qui appartenaient
au clergé, fut bien adoucie. Les conciles du sixième siècle interdirent les corvées arbitraires à leur
égard; ils défendirent de les opprimer
; et les dispositions de ces conciles furent reproduites dans les
capitulaires
.
Ce n'était plus ces esclaves que les lois romaines déclaraient incapables de contracter
, d'agir en
justice
. Les serfs des églises avaient, comme ceux du Prince, le droit d'ester, en jugement dans les
causes qui leur étaient personnelles
.Ils furent même déclarés habiles à posséder des biens en propre.
C'était une première tendance vers l'affranchissement général. Car affranchir les serfs était un acte
religieux, une oeuvre méritoire
. Ceux des églises étaient hors du commerce; ils ne pouvaient être
soumis à une servitude séculière
; et si l'évêque n'avait pas le pouvoir d'aliéner des biens dont il n'était
qu'administrateur, il pouvait, affranchir les serfs de son église qui se destinaient à l'état ecclésiastique
.
Ces règles étaient celles du clergé, lorsqu'à la fin du sixième siècle, les possessions de l'église de
Tongres furent agrandies par le legs que lui fit saint Monulphe de ses vastes domaines
.
Ces possessions s'accrurent encore dans le siècle suivant, lorsque saint Jean l'Agneau, qui avait occupé
le siège épiscopal de Tongres, gratifia cette église de son riche héritage
.
Les Mérovingiens qui régnaient encore dans l'empire franc; dont le diocèse de Tongres faisait partie,
avaient investi les évêques d'un grand pouvoir
, en même temps qu'ils avaient prescrit le respect de
leurs personnes
.
Suivant Foullon, la ville de Tongres avait été dévastée dès la fin du quatrième siècle (Historia populi Leodiensis, tom. 1, p. 57).
"Trajectum ..... Urbs episcopalis Sedis. " (Le diacre Godeschal, er 770, Gesta Sancti Lamberti, cap. 10; apud Chapeauville, tom. 1, p.
341.
Saint Domitien, qui avait assisté au Concile de Clermont en Auvergne, en 538, souscrivit les actes de ce concile: " Domitianus, in
Christo nomine, episcopus ecclesiae Tungrorum, quod est Trajectum, subscripsi. " Saint Domitien assista ensuite au Ve concile d'Orléans,
en 549 (Harigère, en 990, cap. 32 ; apud Chapeauville, tom. 1, p. 54. Fisen, Historia ecclesiae Leodiensis, tom. 1, p. 45).
"Secundùm legem romanam, quâ Ecclesia vivit. " (Loi des Ripuaires, tit. 58, § 1). Dans le neuvième siècle, Charles-le-Chauve déclarait
que rien n'avait été fait par ses prédécesseurs contre les lois romaines: "Salvâ constitutione legis romanaes in eis qui secundùm illam
vivunt. " (Edit de Pistes, article 34. Baluze, tom. II, p. 192).
Monsieur Guizot, Essais sur L’histoire de France, 1, numéro 16.
4ème concile d'Orléans, de 541. Concile de Tolède de 589. Décret de Gratien, pars secunda, caus. 12, quaest. 2, cap. 69.
Capitulaire de 744, article 7, et lib. 7, article 290 (Baluze, tom. l, p. 153 et 1090) .
L 22 ff de Regulis juris,
L107 ff eod., L44§1 ff de judiciis ; lib. 5, titre: 1 . 50 6 100 eod.; lib. 3, tit.1
"Servi autem regis vel ecclesiarum, non per actores, sed ipsi pro semetipsis in judicio respondeant" (Loi des Ripuaires, titre 58, § 20 et
24).
Décret de Gratien, pars 2, caus. 12, quaest,:2, cap. 68. Marculphe, en 660, lib. 2, form. 32, 33 et 34.
Décret de Gratien, ibid. cap. 55. Cap. 3 et 4, 10·, De rerum permutatione, lib. 3, titre 19. Capitulaire de 867, art. 12. (Baluze, tom. 2,
pag. 364).
Décret de Gratien, pars prima, Dist, 54, cap. 4. Capitulaires de 816, article 6, de 853, cap. 12. Appendix aux formules de Marculphe,
Numéro 8 (Baluze tom. l, page 564, tom. 2, p. 57 et 439).
Gilles d'Orval, apud Chapeauville, tom. 2, p. 58, 59 et 60.
"Beatus Joannes ... erat quippe vir nobilis et magnarurn possessionum abundans reditibus ...... ipsum quidem locupletissimum fuisse
zestantur praedia nostrae ecclesiae ab ipso collata, hactenus a nostris antecessorihus et a nobis possessa. " Son principal domaine était
Tyhange: " in praedio suo Tutantia vocato » [Harigère, en 99O. cap. 37 et 38, apud Chapeauville, tom. l, p. 69).
Ils avaient le pouvoir d'émender la sentence du juge séculier (Edit de Clotaire I, de 560. article 6 ; Baluze, tom. 1, p. 7).
Décret de Childebert, roi d'Austrasie, de 595, article 2 (Ibid, p. 17).