La formation professionnelle en mutation

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La formation professionnelle en mutation
coordonné par Henri Jacot, Damien Brochier et Myriam Campinos-dubernet
Editions Liaison, Collection Liaisons sociales, Paris, 2001
Les sessions nationales de l'INTEPF (l'institut national du travail, de l'emploi et de la
formation professionnelle) rassemblent chaque année 30 acteurs économiques et sociaux issus
de trois collèges différents: employeurs ou cadres du secteur privé, syndicalistes et
fonctionnaires. Elles visent à développer les capacités d'analyse des acteurs sociaux sur les
grandes mutation du travail et de l'emploi. Des sessions régionales sont également organisées.
Constats majeurs:
Irruption de notions et de pratiques nouvelles / aux principes fondateurs et aux instruments
liés à la loi de 1971 et à ses aménagements successifs:
-La notion de compétence qui s'est diffusée à partir des années 90 interpellant fortement les
salariés: quel est le positionnement de la notion de compétence/ à celle de qualification?
-La notion d'organisation apprenante: intégrer des modes de développement et de
renouvellement des savoirs ne relevant plus du classique stage de formation mais qui s'appuie
sur les situations de travail. Apparaît un nouveau partage des responsabilités entre l'individu
et l'entreprise en matière de gestion des savoirs liés à l'évolution professionnelle.
1.Etat des lieux de la formation professionnelle en France:
Profonde transformation du système socio économique entre la phase d'émergence du système
de FP et la période actuelle: basculement du paradigme productif, d'une configuration inspirée
par la production de masse de biens relativement peu différenciés à un paradigme gouverné
par la qualité et l'innovation: passage d'un mode de formation des savoirs à un autre (Boyer R
"La FP au cours de la vie", Gauron, formation tout au long de la vie, rapport du conseil
d'analyse économique, La documentation française, 2000).
Cette partie s'appuie sur la rapports suivants:
-Donner un nouvel élan à la FP, rapport de Michel de Virville au ministère du travail et des
affaires sociales, la documentation française, 1996;
-La FP: diagnostic, défis et enjeux, contribution du secrétariat d'Etat aux droits des femmes et
à la FP, 1999.
-Les acteurs de la FP: pour une nouvelle donne, rapport de Gérard Lindeperg (député et
conseiller régional) au 1er ministre, 1999.
-Formation tout au long de la vie, André Gauron, rapport du conseil d'analyse économique, la
documentation française, 2000.
-la professionnalisation de l'offre de la formation et des relations entre les utilisateurs et les
organismes, rapport final de la table ronde organisée par le secrétariat d'Etat aux droits de la
femme et à la FP, 2000.
Transformations:
-La structure et le contenu des emplois se sont modifiés: le nombre des employée, cadres et
professions intermédiaire a augmenté. Par ailleurs, Les NTIC et la communication modifient
l'environnement immédiat de nombreux salariés et nécessitent qu'ils soient plus autonomes,
polyvalents, réactifs, plus ouverts à un fonctionnement en réseau.
-La relation au travail est caractérisée par les mobilités et les ruptures: si durant la période de
croissance, la formation visait à accroître le niveau des qualification et à accompagner les
mutations du travail, aujourd'hui, elle vise en premier lieu à contribuer à la mobilité et à
l'adaptation des salariés.
-La percée des femmes dans la sphère productive pose la question de l'articulation entre vie
professionnelle et privée (éducation des enfants).
-La nécessaire professionnalisation des jeunes qui mettent tous du temps à trouver un premier
emploi stable. L'entreprise assure un rôle de professionnalisation.
Ces mutations font de la FC un levier de la performance économique et une composante
déterminante de la relation de l'homme au travail. Elle doit permettre à chacun de mettre à
jour des connaissances en perpétuelles évolution, mais encore de confronter les savoirs
construits dans l'action et les savoirs formels. Les salariés sont beaucoup plus tributaire de
leurs propres ressources pour construire leur qualification.
Un système inégalitaire qui doit mieux cibler ses bénéficiaires:
Nécessité de recibler les dispositifs de FP sur ceux qui en ont le plus besoin. La France est en
retard dans l'adaptation de la qualification de la Md'O au nouveau contexte socio productif.
Face aux prévisions démographiques, il faudra à la fois compter sur les ressources de
l'immigration et se tourner vers les actifs + âgés pour préserver le niveau d'activité. Un enjeu
central sera celui de l'actualisation des connaissances. C'est un défi pour la formation qui
jusque là privilégiait les actifs plus jeunes et mieux formés.
Il faut repositionner la formation comme un outil de lutte contre l'exclusion temporaire ou
définitive du marché du travail.
Un système gestionnaire en quête de réflexions sur ses finalités:
La loi de 71 à été modifiée par de nombreux apports législatifs au détriment de sa cohérence.
Des institutions nouvelles ont progressivement intégré ce système sur la base de règles de leu
peu claires, provoquant souvent un chevauchement de compétences, un cloisonnement des
dispositifs et une sédimentation des instances de concertation. Cela entraîne un efficacité
amoindrie, la perplexité des partenaires sociaux, une frustration des usagers, une difficulté de
contrôle qui jette la suspicion sur le système de formation.
Les analyses mettent en cause la prédominance actuelle des enjeux gestionnaires et financiers
sur le comportement des acteurs. Nécessité de la reprise des débats entre les différents
partenaires sur les finalités de leurs pratiques et de leurs dispositifs: il faut redonner une
dimension politique à la FP.
Un système qui doit interroger ses critères d'efficacité:
Les différents rapports mettent en question les critères communément utilisés jusque là pour
apprécier son efficacité. L'obligation de dépense n'implique pas pour une entreprise un
engagement de formation des salariés.
Par ailleurs, les PME et surtout les TPE sont beaucoup moins impliquées que les grandes et
surtout valorisent des formations ne relevant pas du cadre légal (comme les formations sur le
tas).
Il faut passer de l'obligation de dépenser à celle de former.
La formation tend de + en +à se concentrer sur les I que l'entreprise veut distinguer des autres
et dont elle souhaite renforcer la collaboration. Or, il paraît + urgent de se focaliser sur la
formation des moins formés.
2. Balises pour un débat:
Un débat fondateur: formation professionnelle versus éducation permanente:
L'une est portée par des enseignements qui prétendaient promouvoir la culture comme gage
de citoyenneté et de démocratie; l'autre s'ancre sur les réalités du monde professionnel.
Si la loi de 71 à articulé ces deux termes, ces développements ultérieurs ont permis à la FP de
prendre le pas sur l'éducation permanente.
L'I et l'entreprise: dualité ou complémentarité?
Le système de FP apparaît aujourd'hui fortement structuré autour de la formation des salariés
dans l'entreprise. Un enjeu du débat actuel est l'élaboration d'un cadre dans lequel la formation
serait reconnue prioritairement comme support individuel des mobilités inter-entreprises et
inter-situations (chômage, inactivité...), sans pour autant que soit supprimée l'architecture des
plans de formation internes aux entreprises.
La formation: investissement de long terme ou adaptation à court terme?
Le salarié mais aussi la hiérarchie et la direction sont confrontés à une injonction paradoxale:
il leur faut concilier la possibilité de bâtir des perspectives sur le long terme pour les individus
grâce à la formation (ce qui à un coût élevé) avec le respect des contraintes immédiates de
production ou de service qui rend très difficile la mise en œuvre d'une autre logique de
formation que celle de la simple adaptation.
La formation: enjeu technique ou pédagogique?
Enjeu lié au développement des NTIC: y a t-il un couplage possible entre le e-learning
(permettant une meilleure diffusion de l'accès à la formation) et le maintient d'une logique
plus personnalisée mais plus coûteuse, fondée sur le face à face pédagogique?
Quel est le niveau d'impulsion maximale: local, national ou Européen?
La décentralisation pose le problème de partage du pouvoir et de construction de logiques
partenariales. S'ajoute désormais la question de l'intégration du niveau européen dans la
dynamique.
3. La question des compétences:
Pour certains, la notion de compétence tendrait à se substituer à celle da qualification. Pour
Zarifian, elle serait plutôt "une forme sociale nouvelle" ("La compétence une approche
sociologique", L'orientation scolaire et professionnelle, n°3, 1997) qui cherche sa voie par la
confrontation sociale. Elle est avant tout une construction sociale. elle doit donc être analysée
avec les enjeux de cette construction.
1. La notion de qualification dans les 30 glorieuses:
Les grille Croizat-Parodi distinguent et décrivent les postes de travail (manœuvres, ouvriers
spécialisés et professionnels), elles sont le résultat d'une longue construction conflictuelle qui
prend sa source au début du siècle et s'accentue dans l'entre deux guerres.
Cette substitution de la qualification au métier, va de pair avec la mise en place d'une
organisation du travail taylorienne et fordienne dans les entreprises: stricte séparation des
tâches de conception et d'exécution censée permettre le maximum d'économies d'échelles
pour une production "de masse". Elle permet aux entreprises d'employer des travailleurs peu
qualifiés, facilement interchangeables et dont les caractéristiques personnelles, les aptitudes
individuelles comptent peu.
o La qualification requise est celle des emplois existants, du travail vivant. C'est celle
qui est demandée aux salariés par les employeurs en fonction de la définition des postes et en
lien avec les mutations technologiques et les changements organisationnels.
o La qualification acquise est celle des salariés et non + des emplois., telle qu'elle
résulte notamment du système de formation initiale et continue mais aussi de la pratique
professionnelle. c'est dons l'articulation des savoirs, savoir-faire et savoir être.
o La qualification reconnue est celle qui s'exprime dans les classifications, compromis
provisoires + ou – acceptés par les salariés ou imposés par les employeurs. Les 1 er veulent se
voir rémunérés le mieux possibles leurs qualifications acquises alors que les 2ième visent au
contraire à ne payer que les qualifications requises par la production.
Les qualifications ne sont que la résultantes toujours provisoire voire instable de la
confrontation permanente de ces point de vue. L'articulation qui s'était progressivement
constituées au cours des trente glorieuses tend à voler en éclat, du fait des transformations tant
dans les modes de production que des formations ou des négociations collectives.
2. Crise du modèle fordiste et émergence de la notion de compétence:
La 1ière revendication d'1 reconnaissance de la compétence n'émane pas des employeurs amis
des travailleurs: des OS de la métallurgie au lendemain de mai 68 exige de voir reconnu leur
travail réel et pas seulement le travail prescrit par le bureau des méthodes. Il faut admettre le
caractère positif de la part d'initiative et de responsabilité prise par les travailleurs d
'exécution. Il en résultera un nouveau système de classification dans la métallurgie (accord du
21 juillet 75). Ce type de grille repose sur une approche de la qualification centrée sur la
capacité des I à occuper un emploi, sa contribution à la réalisation des objectifs de l'entreprise.
4 critères de classement sont introduits: l'autonomie, la responsabilité, le type d'activité et les
connaissances requises. Mais leur impact reste limité. Ce système n'est donc pas une totale
rupture avec le précédent et peut être vu comme un transfert de pouvoir effectif de classement
des branches vers l'entreprise, et comme une individualisation des salaires au niveau de
l'établissement.
Mais l'épuisement du fordisme va amener de nouveaux principes productif mettant l'accent
sur la qualité des produits. Amplifiées par l'essor des NTIC ces transformations
s'accompagnent d'importantes réorganisations du travail et d'une modification de son contenu:
redistribution des services fonctionnels (maintenance, qualité...) vers les ateliers,
racourcissement de la ligne hiérarchique, redéfinition du rôle de l'encadrement, et finalement
un transfert de responsabilité vers les opérateurs.
3. Le modèle de la compétence:
Pour Zarifian: passage d'une logique de l'opérateur à une logique de réaction à l'événement: le
modèle de la compétence repose sur l'intelligence pratique des événements, la communication
dans le travail et la prise de responsabilité. S'instaure un nouveau système de positionnement
des salariés fondé sur les savoir-faire opérationnels, cad sur ses connaissances et son
expérience applicables dans une organisation adaptée, confirmés par le niveau de formation et
ensuite par la maîtrise des fonctions successivement exercées.
4. 2 acceptations de la notion de compétence:
1 définition: la compétence est un savoir agir reconnu. Cette compétence ne peut être
validée qu'en constant que le salarié agit d'une certaine façon.
La seule manière d'observer ces compétences est de rechercher des preuves, cela ne peut se
faire que dans l'entreprise qui est capable de lier ressources technologiques, moyens
organisationnels et ressources humaines pour développer sa productivité et sa compétitivité.
Ce n'est pas l'accès à l'information brute qui constitue le ressort de la croissance et de l'emploi
mais l'aptitude des acteurs à la transformer, à la comprendre, l'interpréter et l'utiliser pour
atteindre un objectif spécifique et mesurable.
ière
La 2ième définition : la compétence est une disposition à agir. Elle est quelque chose en
devenir, en gestation. Elle n'est pas immédiatement visible, il faut la détecter, la repérer, la
faire émerger. Il faut détecter le potentiel à être "en capacité de".
Ceci ne peut se faire que dans une entreprise qui utilise l'ensemble de son K et
particulièrement son K humain, pour mettre en œuvre les changements nécessaires à son
évolution et à son adaptation. Ce n'est pas le travail qui constitue le ressort de la croissance et
de l'emploi mais la capacité des acteurs à se transformer pour anticiper les besoins, à se
remettre en cause pour atteindre des objectifs non encore totalement cadrés.
Une telle conception du fonctionnement de l'entreprise correspond à une stratégie centrée sur
ses métier. Le management passe alors par une évolution régulière de l'entreprise et donc une
capacité à conduire le changement en le faisant accepter par les salariés.
5. La notion de compétence pour la Médef:
Pendant les journées de Deauville de 1998, il retient une définition très stricte de la
compétence comme une combinaison de connaissances, savoir-faire, expériences et
comportements s'exerçant dans un contexte précis. Elle se constate lors de sa mise en œuvre
en situation professionnelle à partir de laquelle elle est validable. C'est donc à l'entreprise qu'il
appartient de la repérer, de l'évaluer, de la valider et de la faire évoluer.
Critique des syndicats: cette conception ouvre la voie à la subjectivité, voire à l'arbitraire des
critères de jugement. Il faut donner un cadre de validation des compétences, entourer cette
notion de garanties collectives.
La démarche compétence est un outil de management des RH, de gestion et d'adaptation de
ces dernières aux nouvelles technologies et à des situations de travail inédites.
6. nécessité de repères collectifs:
La logique compétence opère un déplacement de l'évaluation des qualités du travail vers l'I.
Elle mobilise un des principes de jugement de la logique métier qui prévalait avant mêle la
logique de qualification. Mais la reconnaissance des qualités de l'individu ne dépend plus de
la communauté d'appartenance et du respect des règles instaurées par cette communauté. En
effet, la compétence est évaluée dans et par l'entreprise.
Les compétences introduisent une distance entre les caractéristiques du poste ou de l'emploi et
celle du salarié qui l'occupe. Cela signifie qu'un même emploi peut-être différemment tenu et
qu'en conséquence, la contribution des différents salariés qui l'occupent n'est pas
nécessairement identique. La combinaison des modalités différenciées de tenir un même
emploi et de la proximité entre emploi permet l'ouverture d'espace de mobilité au sein de
l'entreprise. L'organisation de la mobilité entre entreprise, nécessite l'élaboration de repères
communs, collectifs en matière de performance. + le système de professionnalisation est
régulé conjointement par les acteurs sociaux et s'appuie sur des identités professionnelles
fortement constituées, + il a de légitimité pour participer à la production de normes en matière
de compétence.
Mais le débat sur les compétences n'a pas de réel autonomie et ne recèle pas d'enjeu en dehors
du système de qualification. A l'inverse, le débat prend d'autant + d'autonomie que le système
de professionnalisation perd de sa légitimité ou correspond à régulations démantelées.
Mais maillon manquant: l'articulation entre la branche et l'entreprise. Cantonner la notion de
compétence à la seule entreprise n'est pas satisfaisant, ni pour les salariés ni pour les
employeurs. Pour l'entreprise, la valorisation des RH dans une démarche de compétence est
devenue un atout concurrentiel, un condition d'efficacité économique. Ce constat permet
d'imaginer la possibilité de transformer les compétences en outil permettant de redonner aux
salariés et à leurs représentants un nouveau pouvoir de négociation. L'articulation entre un
accord de branche et une procédure d'entreprise négociée peut constituer une nouvelle
dynamique pour un contenu du travail + riche, une liberté et une mobilité professionnelle, une
transparence des conditions d'emploi, de rémunération et d'évolution des carrières.
La compétence est + une forme nouvelle de la qualification qu'une entité différente.
Pour l'entreprise, la qualification requise subit de profondes transformations en lien avec la
transformation des conditions de production. La tendance à sortir d'une organisation
taylorienne et d'une logique de poste conduit à développer une gestion par les compétences.
Pour l'individu, la qualification acquise connaît elle aussi des changements importants qui
tiennent à la diversification des modes d'acquisition des connaissances et + généralement des
compétences.
La dimension dynamique et évolutive de la notion de compétence s'apprécie dans le temps
alors que celle de qualification tend à stabiliser les acquis et les positions pour les classer. La
notion de compétence renforce donc le rôle de la formation. La notion de compétence renvoie
donc à l'émergence d'une nouvelle construction de la qualification en lien avec la formation.
4. Vers l'organisation apprenante:
Les années 80 mirent l'accent sur le caractère formateur des activités de travail, sur
l'importance des savoirs d'expérience. Mais la formation ne va pas seulement de l'entreprise à
ses salariés mais l'entreprise peut également apprendre des salariés. Cette conception soulève
deux questions: celle des choix organisationnels (car une organisation coopérante est +
formatrice qu'une organisation spécialisée) et celle des procédures règles et routines qui
doivent être mises en place pour produire de nouveau savoirs mais aussi pour les conserver
(info-doc), les transmettre (communication) et les enrichir (coopération). Ceci entraîne
l'évolution du management ("knowledge management"").
1. La genèse de l'organisation apprenante:
La caractère changeant, incertain du contexte économique, la difficulté à anticiper nécessitent
une adaptation continue de la part de l'entreprise:
-Le racourcissement des délais d'adaptation suppose que les salariés soient en mesure de
procéder à l'ajustement demandé.
-L'accélération du progrès technique augment l'incertitude mais permet le stockage et la
rapidité de traitement des informations issues de processus variés et rend nécessaire la
combinaison de différentes nature de savoirs, leur extension et + encore leur renouvellement.
Il faut conjuguer une multitude de savoir-faire et d'intelligences différentes.
-Nécessité d'innover de manière continue.
-La réduction des effectifs provoque un renouvellement rapide des salariés et avec lui la
disparition de savoirs d'expérience: il faut formaliser ces savoirs.
Ces mutations conduisent à considérer l'entreprise non plus seulement comme une
simple utilisatrice de savoirs mais également comme productrice de savoirs.
2. Définition de l'organisation apprenante:
La notion apparaît aux Etats-Unis à la fin des années 70: Argyris et Schön: "learning
organisation": une organisation capable d'apprendre des membres qui la composent. Ils
insistent sur l'importance des savoirs d'action. Les erreurs doivent modifier la manière d'agir
mais surtout il faut transformer la représentation de celle-ci.
On peut définir une organisation apprenante comme une organisation qui donne priorité en
permanence à l'apprentissage et qui est capable de tirer des enseignements des succès et
erreurs passées. Elle met en place une division du travail propice à faciliter l'apprentissage,
c'est à dire suffisamment décloisonnée et décentralisée, pour que les problèmes rencontrés
puissent être véritablement posés et résolus, et que les décisions soient prises aux niveaux les
+ à même de reconnaître les solutions à adopter et de résoudre les difficultés que leur mise en
œuvre exigera. L'organisation apprenante peut être lue comme la convergence entre des choix
organisationnels et le plan de formation.
3. Le management:
Da ns ce contexte de l'organisation apprenante, le rôle du management est essentiel:
-il doit veiller à développer les compétences individuelles mais aussi collectives
-il doit choisir des structures et des organisations qui faciliteront les apprentissages
-il doit mettre en œuvre un style de management cohérent et adapté permettant aux apprenants
de devenir moteurs de leur processus d'apprentissage.
Une gestion de la dynamique professionnelle ne peut s'engager indépendamment du
management Ce n'est qu'à partir du moment où l'encadrement joue un rôle un rôle de réflexion
finalisée et approfondie sur l'évolution professionnelle de chaque salarié que la synergie
organisation-compétence prend du sens.
4. Les objectifs de l'organisation apprenante:
Multiplier les apprentissages:
Le développement des compétences ne se limite plus à la session de formation en salle où la
transmission des savoirs est assurée par celui qui sait (les formateurs) à ceux qui ne savent pas
(les stagiaires).
La pédagogie s'appuie sur des situations de travail, sur un échange d'expériences au niveau de
l'équipe..
Au delà des changements organisationnels nécessaires, il est indispensable de mettre en place
les conditions requises pour que chaque salarié devienne moteur, autonome et responsable
dans le processus d'apprentissage.
L'approche pédagogique doit être celle d'une analyse fonctionnelle qui permettra de mettre en
perspective les savoirs/ au défit global à relever par l'entreprise.
Elargir les compétences:
A l'inverse de la pédagogie traditionnelle qui va de la théorie à la pratique, les démarches
pédagogiques, focalisées sur la mobilisation des savoirs d'action; essaient de partir du concret,
de la situation de travail, pour remonter vers l'abstrait. Le travail consiste de – en – moins en
une application stricte des règles et des lois définies par d'autres mais il se fonde au contraire
sur la capacité d'observer et d'analyser la situation avant de remonter aux règles et principes. Il
s'agit de passer du traitement de l'opération à celui de l'événement.
Ce qui paraît central c'est moins le développement des compétence individuelle que
l'augmentation de la compétence collective.
Renouveler les savoirs:
Il faut laisser du temps pour que chacun puisse renouveler son savoir et/ou acquérir de
nouvelles compétences. Cela suppose que le temps de travail comprenne un temps
d'apprentissage.
Donner aux salariés une vision globale:
Philippe Zarifian propose de dépasser le concept d'"organisation apprenante" en lui
substituant celui d'"organisation qualifiante", c'est-à-dire une organisation du travail qui
engage un processus permanent de qualification des opérateurs et de l'encadrement, au sens
où les membres de cette organisation sont en capacité de la faire évoluer suivant la manière
dont se modifie la situation de l'entreprise. Chaque salarié doit intégrer les objectifs de
performances globales fixés par l'entreprise. Il doit appréhender les notions de gestion,
d'économie...Chaque salarié doit avoir une vision globale des enjeux et du contexte de
l'entreprise ainsi que des objectifs clairs. IL faut également la possibilité d'un accès par tous à
l'information, sans intermédiaire et à tous instants: il faut mettre l'information détenue par
chacun dans des bases de données commune ce qui exige une politique de transparence.
Accroître la polyvalence:
Il s'agit de faire émerger les savoirs transversaux en partageant les expériences, en pensant de
façon systémique. La polyvalence ne relève le niveau de compétence qui s'il existe une
possibilité de faire une synthèse entre les différentes compétences mobilisées, par rapport à un
nouveau rôle professionnel. IL ne suffit pas d'additionner les compétences individuelles mais
il faut les conjuguer, les harmoniser, les synchroniser...et constituer une autre compétence qui
permettra à chacun de savoir, outre son propre savoir, où trouver le savoir dont il a besoin.
5. Comment mettre en place une organisation apprenante:
Choisir des organisations adéquates:
Le choix des structures et de l'organisation doit favoriser l'émergence de savoirs. Il faut une
organisation fonctionnellement décloisonnée. Travail d'équipe, autonomie, articulation des
différents types de savoirs détenus développent un milieu favorable à la créativité et à la
responsabilisation. Les salariés devraient être en capacité de faire évoluer les choix
organisationnels.
Avoir un mode de GRH cohérent et un style de management adapté:
-Il est indispensable de reconnaître l'effort consenti, les progrès réalisés, les savoirs enrichis. Il
faut soutenir l'effort individuellement et collectivement consenti.
-Il faut motiver grâce à la polyvalence, le travail en équipe et l'autonomie.
-Il faut donner confiance: accompagner ses subordonnés pour les mobiliser et les faire
progresser, aider son équipe à prendre en charge son évolution, croire à l'intelligence et à
l'intuition des groupes. Il est nécessaire de mettre en place un management de type
participatif.
-Il faut donner du sens: chaque salarié à besoin d'avoir une visibilité personnelle lui
permettant de clarifier son devenir, d'élaborer et de mettre en œuvre un projet, de mettre en
perspective son action quotidienne avec l'avenir. Cela suppose d'expliquer la stratégie de
l'entreprise et de ses orientations pour permettre au salarié de positionner son propre projet
individuel.
-Il faut responsabiliser: permettre + d'autonomie, de prise de responsabilité et d'initiative. Le
management soit accepter le développement de cette prise de responsabilité et accompagner le
développement de ces savoirs faire, créer les conditions permettant de devenir autonome,
responsable...
Mettre à profit l'obligation de financement:
Au delà de l'effort financier, l'entreprise doit rechercher l'efficacité du plan et reprendre
l'initiative an passant d'une situation statique par rapport à l'obligation de financement à une
situation dynamique dans la recherche du retour sur investissement.
5.L'individu et le système de formation;
En France, la formation dans l'entreprise à été principalement conçue au service de la
politique générale de l'entreprise. La FP en dehors de l'entreprise mise en œuvre par les
pouvoirs publics appuie la politique générale de lutte pour l'emploi. Contrairement à son
objectif initial, la logique d'usage du système de FC n'a pas conduit à une élévation générale
des connaissances des personnes ayant quitté le système de formation initiale.
L'I est plus souvent un sujet dans la définition de son parcours de formation et de qualification
qu'un citoyen moteur de ses choix. Or tous les professionnels s'accordent à reconnaître
l'importance de la motivation de l'I dans la réussite d'un acte de formation. Toute formation
conduit à un changement et impose que la personne soit volontaire et acteur de celui-ci. Mais
la formation est décidée formellement par d'autres (l'employeur ou le bureau des placements).:
il n'a ni l'initiative du départ en formation ni le contrôle des chois pédagogiques. D'ailleurs il
n'existe pas de véritables revendications d'un droit des consommateurs en FP et le marché de
l'auto formation reste marginal en France. Les NTIC permettront peut être de faire évoluer
cette situation.
Il n'existe en France ni épargne-temps de formation ni prêt à taux préférentiels pour l'achat
individuel de formation, ni véritable politique de renforcement de FP en dehors du temps de
travail.
1. La législation de la formation et l'I:
Les textes fondateurs de 70-71 voulaient à la fois améliorer l'efficacité collective de
l'économie française et offrir à l'I une 2ième chance. La loi du 17 juillet 1978 rappelle les
objectifs de promotion sociale et culturelle de l'I en identifiant + clairement le CIF. Mais les
congés formation et la logique du choix individuel resteront toujours un dispositif marginal.
Dans les années 70, la FPC est un système d'appoint pour accompagner les transformations
structurelles de l'économie française.
Le développement du chômage va renforcer le lien entre formation et insertion jusqu'à taire
dans les objectifs politiques la reconnaissance de la promotion individuelle par la formation.
Le caractère interministériel de la FP va s'estomper pour entrer dans l'orbite exclusive du
travail et de l'emploi. La période n'est plus au développement des compétences des individus
mais à une recherche rapide de l'adéquation entre offre et demande d'emploi.
Dans les années 90 le système de formation va essuyer de + en + de critiques du fait de la
progression et de la fluctuation du chômage. La recherche d'économie de gestion dans les
entreprises va conduire à l'arrêt de la progression des budgets de formation. L'émergence d'un
capital de temps de formation ne conduit pas + à une capitalisation par l'I d'un investissement
formation, mais surtout accorde la faculté de cofinancer des projets de formation d'entreprise
par la mutualisation d'une partie des ressources antérieurement allouées au congés de
formation.
En 1996, l'année européenne de la formation tout au long de al vie va régénérer le débat. Mais
si l'Europe va agir sur le système de formation grâce à l'effet d'impact du fond social européen
et de programmes communautaires, pour autant, l'absence de mécanismes en France organisés
autour de la personne va plutôt renforcer l'approche collective de la formation.
L'évolution des doctrines patronales va prendre en compte la démarche compétence ce qui
impose de revisiter le positionnement de chacun dans l'entreprise et surtout leurs
responsabilités respectives dans l'entretien et le perfectionnement des connaissances.
La loi du 19 janvier 2000 sur la réduction du temps de travail distingue pour la 1ière fois deux
types de formation:
-Les formations liées à l'évolution des emplois des salariés qui restent sous la stricte
responsabilité de l'employeur.
-Une nouvelle catégorie de formations sur l'initiative du salarié ou avec son accord dont la
finalité est le développement des compétences de la personne.
Poser les principes de la formation tout au long de la vie c'est:
-créer les conditions de la cohésion sociale au travers des moyens d'éducation et de promotion
professionnelle et personnelle,
-donner à chacun la maîtrise et les moyens de réussir son projet professionnel,
-doter notre système économique des RH performantes, gage de compétitivité économique te
sociale,
Il s'agit de nouer un lien entre l'I et la formation et considérer la personne "adulte" de ses
choix tout en régulant les inégalités inhérentes au système.
2. Garanties collectives, personnalisation des parcours et reconnaissance des acquis:
Les multiples acteurs agissant dans le système da la FC ne partagent pas les mêmes buts, ce
qui ne facilite pas les effets leviers par la convergence des moyens.
Avec les mutations de la société tout ne se décide + exclusivement lors de la formation
initiale. De +, le système éducatif est appelé à se focaliser + sur le champs des apprentissages
fondamentaux et généraux (savoirs, savoirs-faire: l'école instruit) y compris les fondamentaux
professionnels et techniques, mais doit développer les capacités des jeunes à s'adapter aux
évolutions que les personnes n'ont pas les moyens d'anticiper (savoir-être, savoir-devenir:
l'école éduque aux choix). L'itinéraire professionnel des actifs tend de + en + à connaître des
ruptures importantes. Il est urgent de mettre en place un mécanisme de validation des acquis
de l'expérience permettant de garantir la transférabilité des compétences acquises dans des
situations de travail ou des secteurs d'activité qui peuvent être très différents.
L'accélération des mutations technologiques et organisationnelles créé un besoin de formation
mais peuvent également être des outils de transmission des connaissances répondant à cette
demande de formation (elles augmentent l'accessibilité et la personnalisation de la formation
et permettent à l'I de créer des parcours de professionnalisation et non pas seulement de
formation et d'être acteur de sa (trans)formation).
L'enjeu est également dans des systèmes flexibles de disposer d'outils pour reconnaître les
moments de formation comme les situations de travail apprenantes.
Il faut mettre en œuvre un outil permettant à toute personne de recenser les expériences
vécues et les formations suivies. Ceci requiert la formalisation de parcours qui facilitent la
validation des acquis professionnels. La FP doit devenir un instrument au service de stratégies
individuelles
des
personnes.
Il n'existe pas de lien explicite entre formation initiale et continue. Il est donc nécessaire de
fabriquer un système cohérent pour passer de la segmentation à la continuité. Il faut:
-harmoniser les reconnaissances officielles de qualifications, si la diversité est souhaitable,
elle ne doit pas être source de confusion.
-mettre en place la validation des acquis professionnels et personnels
-créer un schéma national d'organisation de la formation: recenser toutes les formations
existantes sur le territoire pour + de clarté et une meilleure information.
-mettre en place une plate-forme commune en réseau de services d'information et d'orientation
Il existe 3 grandes familles de départ de formation:
La 1ière est majoritaire et regroupe les formations d'adaptation de courtes durées de 40 heures
en moyennes, accessibles aux salariés dans le cadre du plan de formation et aux demandeurs
d'emploi pour les formations liées aux besoins du marché de formation.
La 2ième sous représentées en France concerne des formations de durée intermédiaires de 200 à
400 heures.
La 3ième (exclusivement représentée par les CIF) regroupe les formations de longues durée
permettant des reconversions individuelles d'une durée d'un an ou de + de 1000 heures. Avec
25000 bénéficiaires par an c'est une exception dans le paysage de la formation. Les ressources
mobilisées ne peuvent garantir le maintien au salarié de sa rémunération au-delà d'un volume
annuel de 20 à 30000 personnes par an. De + il existe des inégalités d'accès à ces formation / à
la taille de l'entreprise et aux catégories socio-professionnelles. De +, le congé de formation
est inhérent à l'existence d'un contrat de travail: rien n'est prévu pour le demandeur d'emploi.
En complément du congé-formation, la création d'un contrat de travail avec une formation en
alternance pour tout adulte pourrait permettre d'appuyer des reconversions individuelles qui
ne seraient pas de trop longue durée.
Il faut:
-éviter le cloisonnement, la segmentation ou l'isolement des différents "systèmes apprenants",
placer en synergie l'école, l'université, la formation en alternance, la FC intra ou hors
entreprise, en plaçant le développement de la personne et de son potentiel au cœur de cette
synergie.
-gagner en efficacité et en efficience en redéfinissant les champs d'intervention des différents
partenaires éducatifs, en organisant leur complémentarité et en précisant les responsabilités
des différents acteurs
-miser sur une plus grande responsabilité des I et des entreprises.
6.Pour un nouvelle régulation du système de formation:
1. compétences et organisation apprenante, et les PME?
La mutation des organisations du travail et en particulier les évolutions dans l'ingénierie des
compétences et de la formation sont en règle générale particulièrement repérées dans les
grandes entreprises. Pourtant en France, les trois quart de la population active du secteur privé
(soit près de 10 millions de personnes) travaillent dans des entreprises de moins de 200
salariés. Ces entreprises investissent de + en + dans la formation et déclarent vouloir renforcer
leur effort dans des proportions toujours + importantes depuis ces 5 dernières années. Mais
l'investissement général en formation dans ces entreprises reste largement inférieur à celui des
+ grandes. Cependant on constate un foisonnement de pratiques et d'innovations. En effet les
PME mobilisent l'"intelligence pratique". Mais, en PME + qu'ailleurs, l'expérience précède le
savoir, et la difficulté de conceptualiser les pratiques empiriques de travail, l'absence de
véritable fonctions de gestion de développement de RH, rendent inaccessible cette réalité
vivante. Le lien de la formation avec l'organisation du travail est indispensable en PME mais
en général il n'est ni observé ni déclaré faute de formalisations suffisantes.
Pourtant, dans ce type d'entreprise + qu'ailleurs, le mode de production et de formation
s'entremêlent. Pour rendre cette formation efficace, il est nécessaire de mutualiser les moyens
entre PME car les PME et les TPE prennent généralement un appuie extérieur complexifiant
l'ingénierie de la formation. La mise en réseau n'est malheureusement pas spontanée. Il est
nécessaire de disposer d'instances de concertation, de mutualisation, de développement et de
portages de projet favorisant les relation inter entreprises. L'isolement de la TPE peut
s'estomper grâce aux NTIC. Mais faute de règles et de langages communs, de réelles
solidarités d'entreprises accompagnées par la mutualisation des moyens d'expertise restent
encore largement à construire en France.
2. Améliorer le dialogue social:
Beaucoup d'employeurs considèrent encore la FP comme relevant de leur seul prérogative et
refusent donc d'accorder une place trop importante à la concertation et à la négociation sur ce
terrain.
Il faut développer l'incitation à se former auprès des salariés eux-mêmes, accroître les mesures
d'information, de sensibilisation, de conseil, d'orientation ou de bilan auprès des salariés. Il
s'agit de donner aux salariés et aux organisations syndicales les moye,s de dialoguer "à armes
égales" avec les directions des entreprises et les organisations professionnelles d'employeurs:
il faut donner aux représentants syndicaux les moyens d'assurer leur mission en matière de
formation. En effet, l'absence de dialogue collectif sur les compétences et l'accès aux
compétences et à la qualification risque de défavoriser les + faibles et renforcer la forme
dirigiste du management
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