modérément, plus occasionnellement les femmes étaient soucieuses des conséquences de la
consommation sur l’avenir de leur vitalité, de leur apparence et leur identité symbolique.
1.3 NOUVEAU RAPPORT AUX ALIMENTS
La nouvelle conception du vin induite par la féminisation de sa clientèle accélère l’émergence
d’un nouveau modèle d’alimentation de la fin des années 70, le nourrissant léger. Au plaisir
gustatif s’ajoute l’hédonisme d’un corps non « perturbé » par une graisse superflue, une
quelconque toxine ou une alcoolémie. On revendique alors une nécessaire information pour sa
sécurité, sa santé. Cela explique en partie le passage d’une consommation de vin de table
anonyme à celle du V.D.Q.S. (vin délimité de qualité supérieure), des vins d’A.O.C.
(appellation d’origine contrôlée). L’authentification du produit alimentaire diminue l’anxiété
des consommateurs qui réclament une transparence de l’information. L’étiquetage du vin se
modifie. Il mentionne les cépages, le terroir, valorise le savoir-faire, sort le produit de
l’anonymat.
Dans les années soixante-dix, marquées par la vision hédonique, le plaisir primait encore dans
le rapport à l’aliment et au vin et Champagne en particulier. Puis, au fil des décennies, une
logique de médicalisation de notre alimentation se met en place. Soutenue par certains
discours diététiques et médicaux, les valeurs se redistribuent. Le plaisir n’est plus prioritaire
dans le choix des aliments. Avant de consommer, on préconise d’évaluer un aliment selon
l’apport nutritionnel, les bienfaits et les méfaits pour notre santé, pour l’image du corps, pour
notre vitalité et notre espérance de vie. Une vision rationnelle se substitue au plaisir gustatif.
Cette attitude alimentaire, qui représente une nouvelle forme pathologique (en tant que
réaction à la crise anomique de valeurs sociétales), émerge dans des groupes ou des pays à
vision puritaine qui désirent évacuer toute prise de risque. Les produits vivants sont
particulièrement dangereux pour cette vision du monde. Les fromages au lait cru, les
charcuteries et le vin sont à écarter. On cherche alors à faire des vins « parfaitement
maîtrisés », parfaitement reproductibles, avec une fermentation sans incertitude. Le vin
devient une simple marchandise que l’on peut boire – sans excès – moins par plaisir que pour
s’approprier les vertus des polyphénols et autres composants d’un vin dont on écarte la
puissance alcoolique. Ce nouveau modèle prétend devenir celui d’avenir universel.
1.4 LA STANDARDISATION DE LA PRODUCTION
Dis-moi ce que tu bois et je te dirai quelle cathédrale tu construis, quel tableau tu peins, quel
poème tu chantes... Proverbe
Le vin français est beaucoup plus qu'un produit agricole. Le vin français est un symbole
culturel et historique, un synonyme de civilisation, de traditions et de savoir-vivre.
Aujourd’hui, pour répondre à l’élargissement du marché et à la mondialisation on privilégie
les vins très techniques, culture s’apparentant au hors sol, à la chimie des arômes plutôt qu’à
la qualité spécifique de chaque terroir. Les producteurs sont tenus de produire des vins avec
des qualités gustatives standardisées, correspondantes au goût des consommateurs
internationaux, et ce malgré les variations climatiques. Cela implique l’adoption des