Avant de décrire les éléments constitutifs ou les contours du modèle de développement agricole pour les
prochaine décennies, il serait pertinent de répondre à la question suivante : qu'elle agriculture pour la Tunisie
de demain?
S'il est difficile de répondre à ce stade de la réflexion, il me semble qu'il devrait s'agir d'une agriculture qui soit
à la fois productive, durable et ancrée dans des territoires dynamiques.
Dans ce cadre, seule une agriculture familiale intégrée au marché et bénéficiant d'un environnement
économique favorable et d'un encadrement professionnel de proximité est en mesure de répondre à cet objectif.
Cela va sans dire que l'agriculture tunisienne restera diversifiée et que des exploitations de firme occuperont
une place importante à la fois en termes de production et de dynamique du secteur d'une part et qu'à l'autre
extrême une agriculture de subsistance se maintiendra tant que les conditions de l'emploi en dehors du secteur
agricole ne sont pas suffisamment devenues attractives pour favoriser une sortie complète du secteur agricole
de la population concernée.
En dehors donc d'une agriculture de firme qui est en mesure de se développer sous les conditions du marché et
dans le cadre d'une concurrence ouverte, la politique de l'Etat doit être orientée vers le développement d'une
agriculture familiale fortement intégrée au marché, ouverte à l'innovation et basée sur des formes
d'intensification compatibles avec les enjeux de durabilité des ressources naturelles.
Le développement de cette agriculture devrait se faire autour des éléments suivants :
• un modèle agronomique rénové tourné vers l'intensification écologique en lieu et place de l'intensification de
la révolution verte basée sur les intrants et la génétique. L'intensification écologique étant la seule alternative
capable de permettre à l'agriculture tunisienne de faire face aux impacts des changements climatiques et
d'assurer une gestion durable des ressources naturelles ;
• une compétitivité territoriale basée sur la différenciation des produits des filières courtes et un partage de la
valeur ajoutée équilibrée entre les différents acteurs de la chaîne d valeur ;
• un contenu social avec un accès équitable aux ressources naturelles et notamment au foncier et à l'eau à fin
que le développement soit le plus inclusif possible ;
• une prise en compte de la multifonctionnalité de l'agriculture et le paiement des externalités positives que
génère l'activité agricole.
Pour ce faire, un certains nombre de leviers sont à mettre en œuvre dont notamment :
• une politique de prix et de mise au marché susceptible d'assurer une répartition la plus équitable possible
entre les acteurs d'une filière ;
• un encadrement de proximité des agriculteurs à travers l'appareil administratif et celui de la profession ;
• un cadre institutionnel et une organisation de la profession seule en mesure d'offrir un cadre pour une
gouvernance partenariale du secteur agricole et de la mise en œuvre de la politique;
• une recherche dynamique en mesure de répondre aux attentes des agriculteurs et les aider à construire un
modèle agronomique basé sur l'intensification écologique.
Une telle politique, qui demande un appui financier des pouvoirs publics et peut se traduire dans un premier
temps par le renchérissement des produits agricole ne peut avoir le jour que si elle est acceptée par les