Unité spécifique C3 CORROSION - PROTECTION 1 Oxydoréduction en solution aqueuse L’oxydoréduction en solution aqueuse est l’étude des réactions chimiques s’effectuant en solution aqueuse et mettant en jeu un transfert d’électrons lors des réactions. 1.1 Réaction entre un métal M et un ion métallique M2+ Pour étudier la corrosion, on va établir un équilibre formel entre le métal M et son ion métallique M2+ grâce à un transfert électronique du type : M 2 2e M On appelle cet équilibre une demi-équation électronique. C’est une équation du type : Ox ne Re d Où Ox désigne l’oxydant qui est donc l’ion métallique, il capte les électrons. Et Re d désigne le réducteur qui est donc le métal, il libère les électrons. A chaque oxydant on peut associer un réducteur et former un couple Oxydant/Réducteur que l’on note : soit : Ox / Re d M 2 / M La demi-équation transformant un oxydant en réducteur est une réduction : M 2 2e M Ox ne Re d c’est une capture d’électrons La demi-équation transformant un réducteur en oxydant est une oxydation : M 2 2e M Ox ne Re d c’est une libération d’électrons Les réactions de corrosion sont des réactions transformant un métal en son ion métallique LA CORROSION EST L’OXYDATION D’UN METAL 1.2 Classification des couples redox. 1.2.a Conditions standard La corrosion des métaux dépend de nombreux facteurs mais l’on voit que dans des conditions identiques, chaque métal se comporte différemment. On peut ranger les métaux selon une échelle dite électrochimique qui dans des conditions définies classe les métaux selon leur capacité à s’oxyder ou à se réduire. Dans les conditions standard on a le tableau ci-contre où les oxydants sont classés de haut en bas du plus fort au plus faible et les réducteurs associés du plus faible au plus fort. On notera que plus un oxydant est fort plus le réducteur associé est faible et inversement plus un oxydant est faible plus son réducteur associé est fort. Oxydant ion platine II........ Couple Pt 2+ /Pt Réducteur ..........platine ion mercure II...... Hg 2+ /Hg ........mercure ion cuivre II......... Cu2+ /Cu ..........cuivre ion plomb............. Pb2+ /Pb ...........plomb ion étain............. Sn2+ /Sn ............étain ion nickel............ Ni2+ /Ni ion fer II............. Fe2+ /Fe ...............fer ion zinc.............. Zn2+ /Zn .............zinc ...........nickel 2+ ion magnésium...... Mg /Mg .....magnésium On se placera toujours dans nos exercices dans les conditions standard mais il faut savoir que la réalité est parfois fort différente des conditions standard, l’ordre des couples en est alors sensiblement modifié par rapport au tableau ci-dessus. 1.2.b Utilisation de la classification électrochimique Lors des réactions d’oxydoréduction il y a un transfert d’électrons. Une réaction ne peut avoir lieu que si les électrons libérés par un réactif n°1 (un réducteur) : Re d1 Ox1 ne sont captés par un autre réactif n°2 (un oxydant) : Ox 2 ne Re d 2 Ainsi la réaction d’oxydoréduction est une réaction : entre un oxydant Ox 2 d’un couple Ox 2 / Re d 2 et un réducteur Re d1 d’un couple Ox1 / Re d1 qui s’écrit : Ox 2 Re d1 Ox1 Re d 2 OU IL Y A AUTANT D’ELECTRONS LIBERES PAR LE REDUCTEUR QUE D’ELECTRONS CAPTES PAR L’OXYDANT. Cette réaction ne peut se faire naturellement que si l’oxydant qui réagit est plus fort que l’oxydant produit. Ainsi naturellement les réactions s’effectuent dans le sens d’une diminution du pouvoir oxydant et du pouvoir réducteur, ce qui libère de l’énergie. Les réactions inverses ne sont possibles qu’à condition de fournir de l’énergie. 1.3 Couples redox intervenants dans les phénomènes de corrosion. Dans les phénomènes de corrosion, il y a oxydation d’un réducteur (le métal) par un oxydant. La corrosion est une oxydation particulière dans le sens où les espèces produites sont solubles. Ainsi par exemple les ions fer II produits lors de la corrosion du fer sont solubles dans l’eau et donc éliminable de la surface du métal qui peut donc continuer à se corroder. L’oxydant peut être l’oxygène de l’air mais aussi un acide, un dérivé chloré, un autre métal sous sa forme ionique, ou tout autre réactif oxydant. Pour savoir comment se corrode un métal dans les conditions dans lesquelles il est placé il suffit de connaître la classification électrochimique dans ces conditions. Ce métal se corrodera avec tout oxydant placé au dessus de lui dans la classification. Oxydant dichlore................ Couple Cl2/Cl- Réducteur .....ion chlorure dioxygène.............. O2/H2O ...............eau ion platine II........... Pt2+/Pt ...........platine Hg2+/Hg ..........mercure + ion argent.............. Ag /Ag ............argent 2+ ion cuivre II............ Cu /Cu ............cuivre ion mercure II......... ion hydrogène......... H+/H2 ion plomb.............. Pb2+/Pb ............plomb ion étain............... Sn2+/Sn ..............étain ion nickel.............. Ni2+/Ni .............nickel ion fer II................ Fe2+/Fe ion potassium......... K+/K Li+/Li .....dihydrogène ................fer 2+ Zn /Zn ion zinc................. ...............zinc 3+ ion aluminium......... Al /Al .......aluminium 2+ ion magnésium........ Mg /Mg ......magnésium + ion sodium............. Na /Na ...........sodium ion lithium............. ........potassium ...........lithium Sa vitesse de corrosion sera d’autant plus grande qu’ils seront éloignés sur la classification électrochimique. Le couple intervenant dans la corrosion à l’air est le couple O2/H2O qui s’équilibre : - en milieu acide : O2 4 H 4e 1O 2 2 2 H 2e - en milieu basique : O2 4 H 2O 4e 1O 2 2 2 H 2O ou encore 2 H 2O 2e H 2O 4 HO ou encore 2 HO 2 Corrosion par phénomène de pile Lorsque qu’une situation de corrosion est créée il se produit un transfert d’électron qui se traduit par un courant électrique dans le métal conducteur. Ce phénomène de pile se traduit par une oxydation en un lieu (où la structure cristalline du métal est favorable à la corrosion) qui peut être très éloigné du lieu où a lieu la réduction Ainsi lors de l’étude de l’influence du milieu d’un système subissant une corrosion, il est indispensable de prendre en compte l’ensemble des éléments reliés électriquement. Lors de l’éclatement d’un béton du fait de la corrosion d’une armature il faut prendre en compte tout l’ouvrage à armatures reliées. Lors du choix de radiateurs d’un système de chauffage il faut prendre en compte tout le système de chauffe relié électriquement par les conduites généralement en cuivre. La pile créée lors de la réaction d’oxydoréduction est donc constituée : -d’une anode où a lieu l’oxydation (les électrons sont libérés : pole -). -d’une cathode où a lieu la réduction (les électrons sont captés : pole +). 2.1 Influence du milieu. La connaissance du milieu est indispensable pour le choix des solutions de lutte contre la corrosion et des matériaux à utiliser. Ainsi lors de la construction d’un ouvrage, les choix à faire varieront s’il est situé en milieu marin (pont), en milieu urbain pollué (parking) ou en milieu rural. Une canalisation d’eau usée, d’eau potable ou d’eau d’irrigation ne sera pas construite avec les mêmes caractéristiques. L’étude du milieu consiste donc à regarder les oxydants potentiels ainsi que leur concentration, mais aussi à regarder les caractéristiques physico-chimiques influençant la corrosion : - le pH, - la température, - les défauts de structure du métal dus à une contrainte, une déformation, une altération, -… Vitesse de corrosion de l'acier BINET 2 4 6 8 10 12 pH 14 2.2 Influence de la nature des métaux. On sait par expérience que l’aluminium se corrode beaucoup plus difficilement que le fer. Expliquons la différence qui existe entre les métaux à l’aide du diagramme suivant: BINET Tension Fe3+ Fe(OH)3 Cette espèce est très peu soluble, elle précipite lors du test Fe3+ + 3 HO- 0,4V Fe2+ 0V Cette espèce est très peu soluble, elle précipite lors du test Fe2+ + 2 HO- Fe(OH)2 HFeO2 Fe 2 4 6 8 10 12 pH Ces 3 espèces sont solubles Sans détailler le mode de lecture de ce diagramme potentiel-pH on voit qu’il y a trois grands domaines : La zone où le fer métallique est la forme stable : Zone d’immunité. La zone où les formes stables sont des espèces solubles : Zone de corrosion. La zone où les formes stables sont des précipités (solides insolubles dans l’eau) : Zone de passivation. Dans les conditions habituelles la forme stable est une zone de corrosion dans le cas du fer alors qu’il s’agit d’une zone de passivation dans le cas de l’aluminium. Ainsi l’aluminium se recouvre en surface d’un oxyde (dont on reparlera dans le chapitre sur les ciments) qui protège le métal d’une corrosion en profondeur. 3 Protection contre la corrosion Il existe plusieurs types de protection contre la corrosion qui se différencient par leur mode d’action : - On On On On On On place le métal dans sa zone d’immunité. stabilise la surface corrodée. réduit très fortement la vitesse de corrosion. empêche le contact avec un oxydant. réalise des alliages résistant à la corrosion. place le métal dans sa zone de passivation. Chaque méthode ayant ses avantages et ses inconvénients, les paramètres de coût de mise en œuvre et les caractéristiques physico-chimiques permettront de choisir telle ou telle méthode. 3.1 Protection par un métal plus réducteur. Pour placer le métal dans sa zone d’immunité on place en contact électrique avec le matériau à protéger un autre métal plus réducteur qui s’oxydera donc à sa place. Le métal sacrifié sera donc le réducteur et le métal à protéger deviendra l’électrode où aura lieu la réduction. Le métal protégé devient une cathode, c’est pourquoi on parle de protection cathodique Le métal plus réducteur devra être remplacé dès qu’il est totalement oxydé, et pour être efficace il est nécessaire que le milieu où se produit l’oxydation permette une bonne élimination des produits de la corrosion et un bon transfert électrique. Pour protéger le fer de la corrosion, on utilise généralement du zinc. On réalise une opération de protection de la surface : - soit par électrolyse : électrozingage - soit par trempage dans un bain de zinc fondu : galvanisation. Les rayures de la protection n’entraîneront pas la corrosion du métal protégé tant que du zinc sera en contact avec le fer. Cette caractéristique rend cette méthode de protection bien meilleure que toutes les autres. On peut aussi placer des blocs entiers de ces métaux sacrifiés en contact électrique (Zn, Mg) avec le métal à protéger et remplacer ces blocs quand il n’en reste plus rien. Il est à noté que les ions Zn2+ produits sont polluants et que cette méthode consommatrice de zinc est coûteuse. 3.2 Rôle des inhibiteurs. Les inhibiteurs sont des produits chimiques qui agissent à la surface du matériau à protéger : - soit en stabilisant les produits de la corrosion, empêchant ainsi leur élimination et la poursuite de la corrosion, - soit en agissant sur la vitesse de corrosion. Ces produits chimiques généralement de nature organique peuvent inclure des métaux plus réducteurs que le métal à protéger et sont utilisés comme additifs des peintures ou des matériaux de construction. Le métal à protéger reste le métal susceptible d’être oxydé : c’est une protection anodique. 3.3 Nickelage, chromage. Cette méthode consiste à placer à la surface du métal à protéger un métal résistant mieux à la corrosion. Mais pour être efficace cette méthode doit recouvrir totalement la surface, car tout défaut de recouvrement ou rayure se traduira par une oxydation du métal non protégé sous la protection. Le métal corrodé sera alors dissimulé sous le métal de protection. On réalise cette opération de protection par électrolyse : nickelage (Ni), chromage (Cr), étamage (Sn) et argenture (Ag). Le métal à protéger reste le métal susceptible d’être oxydé : c’est une protection anodique. 3.4 Passivation du métal, anodisation. On place le métal à protéger en contact avec un oxydant puissant de manière à recouvrir sa surface d’une couche d’un solide insoluble. Pour être efficace, le solide formé doit être mécaniquement résistant. L’aluminium anodisé, les aciers bichromatés et parkérisés sont réalisés par cette méthode. Les aciers inoxydables appelés inox sont composés de chrome et de nickel (18% et 8% pour l’inox 18/8) qui protège le fer de la corrosion par formation superficielle d’une couche isolante d’oxyde de chrome CrO2 qui empêche le transfert électronique. Le métal à protéger reste le métal susceptible d’être oxydé : c’est une protection anodique. 3.5 Protection passive de surface. Le même type de protection de surface que précédemment peut être réalisé en recouvrant la surface non pas d’un métal peu oxydable mais par une peinture, une céramique, ou tout produit empêchant le contact avec l’oxydant. Comme précédemment toute rayure de la surface de protection sera une zone de corrosion. Le métal à protéger reste le métal susceptible d’être oxydé : c’est une protection anodique. 3.6 Conclusion Dans le bâtiment la meilleure méthode pour protéger une armature métallique sera de procéder à sa galvanisation (protection cathodique) puis à la recouvrir d’une peinture de décoration.