Compléments
Contreparties de la masse monétaire (M3) et création monétaire
Les crédits font les dépôts. La masse monétaire est composée essentiellement des dépôts. Donc,
les crédits font la monnaie. Qui fait les crédits? Les Hedge Funds?
« Les crédits font les dépôts » est la règle d’or de la théorie moderne de la monnaie bien que, ici ou
là, on trouve encore des documents ou des commentaires pour lesquels les dépôts sont à l’origine
des crédits.
Il faut reconnaître que la logique immédiate, voudrait qu’en effet, une banque ne puisse pas prêter
d’autres fonds que ceux qu’elle a en caisse. Si on concevait l’économie et sa théorie comme on aime
tant le faire avec l’exemple si commode de la ménagère et de son budget, il est clair que tout
militerait en faveur de l’idée que les dépôts font les crédits : la ménagère aurait-elle l’idée de
rompre avec cette sagesse qui veut qu’on ne dépense pas plus qu’on a et, bien sûr, qu’on ne prête
pas l’argent qu’on n’a pas soi-même.
Lorsque l’émission monétaire des pays reposait sur l’or ou l’argent principalement, la contrepartie
de la masse des pièces d’or ou d’argent en circulation se trouvait dans les stocks d’or initiaux. Le
poids total des pièces devait correspondre au poids du stock total initial. Pendant un temps,
l’émission de billets de banque fut l’objet d’un long débat théorique entre partisan du « Banking
school » et ceux du « Currency school ». Cette controverse, essentielle pour la suite des théories
monétaires naquit d’une grave crise monétaire en Angleterre au début du XIXème siècle. Les
défenseurs de l’orthodoxie monétaire, la « Currency school » considéraient qu’il ne pouvait pas y
avoir d’autres contreparties à la masse monétaire, et en particulier à l’émission de billets de
banque, que les réserves d’or détenues par les banques. Il y avait les ultras qui ne voyaient dans
les billets de banque qu’un substitut commode à l’or en raison d’un coût moindre et d’une sécurité
plus grande dans son utilisation. Les modérés de cette thèse énonçait que la couverture à 100%
était un gâchis et une précaution inutile et qu’il fallait que la contrepartie des billets émis reposât
partiellement sur le stock d’or et partiellement sur les crédits consentis aux entreprises et aux
particuliers. La thèse inverse de celle de la « Currency school », la « Banking school » jugeait que
l’émission monétaire devait correspondre à l’activité et aux besoins des agents économiques, les
modérés, penchant pour un frein à l’émission sous la forme d’une encaisse or minimum, les ultras
prétendant ne se reposer que sur la sagesse économique fruit de la liberté d’ entreprendre et de la
main invisible.
La théorie de la banking school l’a finalement emporté. Bien sûr, le stock d’or détenu par la
Banque centrale n’est pas pour rien dans la monnaie d’un pays et dans la confiance dont on peut
l’investir, mais il ne représente plus au passif de l’institut d’émission qu’une modeste fraction de la
masse monétaire. La monnaie est donc créée par les Banques de second rang, c'est-à-dire les
banques qui sont en relation directe avec les agents économiques particuliers et entreprises, à qui
elles prêtent des fonds sous toutes leurs formes. Ces prêts se traduisent par des dépôts dans le
système bancaire, reflétant une lapalissade comptable : le prêt de 100 que la banque X fait à la
veuve de Carpentras pour acheter une télévision, se traduit par le dépôt que le vendeur de
télévision fait à sa banque pour le montant exact du prêt consenti. Or les dépôts sont un élément
constitutif de la masse monétaire. La banque X, a contribué par son prêt à l’émission de monnaie
scripturale, i.e. les dépôts supplémentaires.