Modélisation urbaine et Humanisme de la cité Devoir de prospective

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Modélisation urbaine et Humanisme de la cité
Devoir de prospective, aiguillon de demain, développeur de conscience, que sais-je
encore ? L’écologie n’est pas un phénomène de mode mais un mouvement de fond de
nos sociétés. Pour relever ce défi écologique sans précédent, le décideur politique
utilise l’utopie. Certains diront que l’utopie est un lieu qui n’existe pas, d’autres
parleront d’un outil au service du décideur. Quels acteurs ? Quels enjeux ? Quels
principes ? Quelle politique ? Pour minimiser l’impact des constructions sur
l’environnement, les concepteurs, les ingénieurs, les maîtres d’ouvrage et les
collectivités locales travaillent sur de multiples enjeux, qui relèvent de l’écologie, de
l’économie, du patrimonial, du culturel et du social. Cette remise en question de
l’urbanisme doit normalement déboucher sur un nouveau savoir en appliquant les
principes de subsidiarité et de précaution.
La forme urbaine
Dessiner l’urbanisme, lui donner une forme, l’ancrer à son destin, le projeter
humainement et socialement dans son avenir. La création d’un espace public est une
œuvre sociale. Pour rappel, le domaine public a pour mission d’ « assurer le bonheur
collectif ». Pour ce faire, il faut essayer de faire vivre ensemble les citoyens, d’intégrer
les nouveaux habitants, de favoriser les rencontres entre les générations, de rendre
possible l’accès aux services publics (aînés, handicapés etc.), de rétablir la sécurité et la
justice dans les quartiers « sensibles », de réduire la dépendance à l’utilisation de la
voiture, de réparer l’erreur du « tout-pavillonnaire ».
La psychologie environnementale
L’environnement impacte-il les comportements du citoyen ? L’environnement influencet-il le « bonheur collectif » ? Un aménagement territorial passe incontestablement par la
prise en compte des attentes de la société. L’urbaniste doit ensuite traduire ces
attentes citoyennes et écologiques dans la planification des tissus urbains, péri urbains,
suburbains. Si l’environnement inspire le sentiment d’insécurité, de haine, d’injustice et
de non-créativité, alors il s’agit d’une dérive inacceptable.
Le défi écologique
La question de la cohérence du tissu urbain est fondamentale dans le débat. Un projet
moderne s’exprime dans le cadre d’un plan architectural et urbanistique durable. La
ville s’adapte aux changements économiques, sociaux et démographiques. La règle d’or
veut que toute construction doit s’insérer dans son site. La voirie permet l’irrigation des
quartiers, elle fluidifie la circulation en centre-ville et elle favorise les déplacements
doux. Par exemple, il est crucial que les pistes cyclables soient connectées au réseau de
l’écoville. Le pouvoir politique ne peut s’exercer que par le prisme de la démocratie
urbaine participative.
L'utopie écologique
Tout comme Le Nôtre et Haussmann, il s’agit de bâtir des écoquartiers honorant le
« bien vivre ensemble ». Pour atteindre cet objectif humaniste, favorisons la mise en
place de conditions donnant du sens à cet idéal. L’écoville doit prendre des formes
répondant à des critères durables. Tout en organisant l’espace, le politique doit
considérer la notion de temps. Créer des conditions de développement durable de la
cité pour favoriser le savoir (recherche, éducation), la prospérité (commerce), la santé
(médecine), la créativité (arts, artisanat). Contrairement au modèle américain, le
modèle européen insiste sur l’harmonie, l’équilibre et la fluidité. Face à la solitude et à
la brutalité des villes américaines, les villes européennes sont capables de cohésion
sociale et d’espaces publics.
Le jardin public
Jardiner l’espace, fleurir l’écoville, théâtraliser la nature dans l’écoquartier. Concevoir,
planifier, agencer un jardin public en mouvement, évoluant au gré des saisons mérite
que le promeneur respecte les règles du bien vivre ensemble. « Espace de mémoire »,
un jardin public est un lieu d’expression artistique, alternant pénombre et luminosité.
Savoir plier le fer, modeler la terre, teindre le métal, donner une résonance aux
matériaux, imaginer tout simplement une œuvre urbaine de qualité. Dans une
atmosphère de paix, quelle joie d’escalader une fleur de pierre, de s’endormir sous un
pommier, de photographier une sculpture polychrome en tôle, de faire voler le cerf
volant, de s’embrasser sous un kiosque, de s’abriter dans un bosquet de pins et de
cèdres. Fort de ses effets de volume et d’harmonie, le jardin public accueille les
spectacles vivants tout en préservant la biodiversité. A l’horizon 2030 les biotechnologies et l’agriculture hors-sol connaîtront un essor remarquable, les jardins
publics se nourriront et ils s’arroseront avec une grande autonomie, certaines plantes
seront à « élagage naturel ».
Le logement et la mixité sociale
La croissance démographique corrélée à une espérance de vie qui augmente a pour
conséquence une demande accrue de logements. Au-delà de l’aspect sociétal,
considérons la qualité environnementale et la qualité urbaine. Le premier acte consiste
à créer les conditions pour favoriser la qualité urbaine, le second acte met en
perspective la qualité urbaine avec la qualité environnementale, et ce en raisonnant à
différentes échelles. Pour recenser quelques unes des conditions essentielles à la
conception d’un lotissement écologiquement responsable, proposons des « volumes
fermés », des rues épousant les courbes de niveau, des « coulées vertes », des clôtures
végétalisées, une voirie mixte et une gestion économe du foncier. La transformation
urbaine ne se fera pas sans la question du logement.
La maison écologique
Une maison écologique facilite la circulation de l’air, diffuse la lumière grâce à des
peintures claires et naturelles, récupère et recycle les eaux pluviales, installe des
toilettes sèches, sélectionne des matériaux sains ( = brique, pierre, terre cuite, bambou,
bois, terrazzo), utilise des fibres naturelles comme le lin et le coton, tous deux blanchis
naturellement au soleil teints végétalement, isole grâce au VIR ( = verre à isolation
renforcée), lave le linge avec des noix de l’Himalaya et bannit à jamais des « composés
organiques volatils », ces substances toxiques pouvant nuire à la santé de l’être humain,
sous la forme de nausées, de vertiges ou de crises d’asthme. Échangeons nos lampes à
incandescence (durée : 1 000 heures) avec des lampes basse consommation (durée : 8
000 heures). Retraitons les eaux grises peu usées en provenances des lavabos et de la
douche pour alimenter les toilettes et l’arrosage du jardin écologique.
L'architecture bioclimatique
L’architecture bioclimatique a le devoir de trouver un compromis entre les contraintes
du bâtiment, le confort de l’occupant et les impératifs environnementaux. Par exemple,
une annexe servant à la fois de garage pour les vélos et de lieu de stockage pour les
déchets. Au niveau du plan masse, intégrer la dimension solaire pour l’habitat, les
espaces publics, le tracé des voies. Le « landscaping » est un ombrage lié à la présence
d’arbres. Le captage des apports solaires économise considérablement les charges
pesant sur l’habitat. Par exemple, il est possible de chauffer de l’eau sanitaire grâce aux
apports solaires. Chronologiquement, l’énergie est captée, stockée, distribuée et
régulée dans l’habitat.
Le confort acoustique
Les transports terrestres et aériens, le voisinage, l’industrie sont à l’origine de la
majorité des nuisances sonores qui impactent négativement la santé (irritabilité, trouble
du sommeil, surdité etc.). Les urbanistes et les politiques joignent leurs efforts pour les
réduire par la mise en œuvre d’actions préventives et d’actions curatives. Compte-tenu
de sa nature (= phénomène physique ondulatoire), il est possible de réduire les
nuisances sonores. Dans un premier temps, la cartographie du bruit localise les zones de
conflit et elle sert à quantifier les problèmes. Dans un second temps, la cartographie du
bruit est un support d’aide à la décision et elle priorise les actions de correction.
La circulation en zone 30
Sur un périmètre « zone 30 », les cyclistes et les piétons gagnent en liberté et en
sécurité, les automobilistes en convivialité, le bruit et la pollution de l’air sont réduits.
Dessinons des formes en utilisant des bornes, des caniveaux, des bordures, du mobilier
urbain, tout en oubliant ces « fameuses » peintures au sol comme autant de marques
inefficaces. Une « zone 30 » concentre trois points importants de la politique de ville
durable : la sécurité routière, l’environnement et la qualité de vie dans la cité.
Les technologies innovantes
Nouveaux parfums, nouvelles couleurs, nouveaux volumes, nouvelles matières. Hier,
nous souhaitions avec ardeur la ville à la campagne, demain la ville et la nature
s’interpénétreront. Le visuel urbain mute, l’habitat délaisse la pierre au profit d’une
alliance de verre, de béton et d’acier. La scénographie d’une mise en scène urbaine
intégrera un réseau de diodes colorées s’allumant à l’approche des usagers. Créateur
d’ambiance, le nouvel éclairage public se veut sobre, sécurisant et modifiant les flux de
circulation. Fonctionnel, dépouillé, transparent ( = évoque la liberté), léger et sain (= ni
microbe ni bactérie), telles seront les caractéristiques du mobilier urbain de demain.
Isolons nos habitations en utilisant de l’enduit minéral à la chaux aérienne. Lieu de
refuge à l’être biologique, le logement durable intégrera des technologies sobres en
énergie et porteuses d’un meilleur confort. Par exemple, citons trois technologies
innovantes : l’E-GLASS (= vitrage isolant avec un chauffage rayonnant),
l’ELECTROCHROME (= sous l’effet des conditions climatiques, le verre passe du bleu clair
au bleu foncé) et le PRIVA-LITE (= verre stratifié transparent qui devient translucide).
La gouvernance
« La Cité, c’est le peuple », écrivit Sophocle. Sans mise en relation entre les besoins
humains et les réponses durables, les villes du siècle prochain seront un désastre. Un
cycle nouveau surgit : incertitudes, numérisation, multiple-culturalisme, nouvelles
donnes économiques. Mettons en place les conditions nécessaires et suffisantes pour une
transformation urbaine rapide, si un besoin urgent survient. Puisque l’architecture se
doit d’incarner l’idéal populaire, il est de la « liberté responsable » du politique
d’impulser un projet urbain responsable en pratiquant la concertation populaire. Au-delà
du choix de bonnes pratiques, il incombe à l’édile de faire étinceler durablement le
territoire administré.
L'imagination au pouvoir
Quel visage urbain voulons-nous offrir à nos enfants ? Entre peurs aigües et désirs
écologiques, quels choix justes pour quels usages urbains ? D'une part, des initiatives
d'éco-mobilité démontrent la prégnance de l'inter-modalité, d'autre part, la mobilité se
fait écocitoyenne avec la totale généralisation des vélos en libre-service ainsi que des
transports en commun. Selon des analyses croisées, le dessin urbain idéal s'orienterait
vers un centre-ville hautement densifié, avec une majorité de zones 30 et de voies
vertes pour les déplacements doux, une épaisse ceinture verte, telle un creuset pour la
protection de la biodiversité, épousant les contours du centre-ville. A l'extérieur de
cette « green belt», partiraient des axes verts de transports en commun pour irriguer
harmonieusement le territoire, aux bords desquels, des maisons en grappe ou en bande
seraient construites. Cette conception mettrait en perspective le besoin en logements
durables, une desserte juste et équilibrée, une efficacité économique combinée à des
impératifs sociaux et écologiques. Demain, le soleil ne se lèvera sur la ville qu' à la
mesure d'une programmation urbaine fluide et dense. Et si nous donnions vie au visage
urbain de demain ?
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Sachant que la biodiversité et les ressources décroissent alors que les risques naturels et
les pollutions croissent, la crise environnementale nous a enseigné une chose : la prise
de conscience du BIEN COMMUN. Le dérèglement climatique et la fin des énergies
fossiles conduisent à l’éclosion durable d’un nouveau paradigme, dont les deux leviers
sont la réorganisation spatiale et la transformation des usages. Issues du cuivre et du
cristal, les villes pionnières se caractériseront par l’innovation, l’inventivité et
l’imagination. Une conception urbaine se pense à différentes échelles, en intégrant la
nature à l’écosystème urbain et en exprimant l’audace de ses bâtisseurs.
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La liberté, la conscience, la créativité sont autant de leviers pour bâtir des villes
durables (Pierre-Franck Herbinet).
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