opérationnelle et parfois même stratégique (Fink, 2003). Leur engagement dans la promotion
de ces solutions est infaillible car plus le concept est accepté dans les milieux académiques et
de l’entreprise, plus ils se créent de la légitimité et s’enrichissent. Mais Kieser (1996 ; 1998)
va plus loin en estimant que le développement des modes managériales se fait souvent dans le
cadre de coalitions plus ou moins larges d’entreprises de conseil et d’autres parties prenantes
à l’instar des maisons d’édition, des revues spécialisées, des organisateurs de conférences et
parfois même de certains organismes gouvernementaux.
La diffusion des modes managériales se fait généralement à travers l’utilisation d’études de
cas ciblées. En analysant les cas présentés par les gurus du management, Jackson (2001)
constate qu’ils sont chargés d’une rhétorique symbolique. Le choix des termes n’est pas
innocent à ce stade de développement des modes du management. Les auteurs utilisent des
mots fascinants, attracteurs et parfois même ambigus. Les cas reflètent souvent des succès
stories qui ventent les mérites du concept à vendre. La rhétorique utilisée prend souvent une
allure « manipulatoire ». Il faut dire que consultants et gurus du management sont réellement
conscients des enjeux que présentent les solutions créées pour les managers sur le terrain. Ces
derniers sont généralement fascinés devant ce génie créateur des gurus du management. Fink
(2003) considère à ce niveau que les modes managériales permettent de résoudre des
difficultés stratégiques et donnent aux managers un certain sens et repère d’orientation dans
les moments des difficultés. Elles sont généralement « bien construites ; leurs protagonistes
montrent leurs valeurs stratégiques à partir de succès stories tirées du terrain. Leurs
structures claires permettent une prise de décision rapide et aisée (…) de telles modes
réduisent la complexité du processus de résolution des problèmes dans l’entreprise puisque
l’attention du manager sera portée sur l’applicabilité de cette mode dans le contexte de
l’entreprise en isolant les multiples facteurs internes susceptibles de complexifier la prise de
décision » (Fink, 2003 : 46-47).
Au delà du rôle hégémonique des gurus du management, les modes managériales présentent
certaines caractéristiques en commun. En effet, leur discours normatif leur donne un caractère
de vérité absolue applicable dans tous les contextes. Ce même caractère facilite le processus
de décision pour les managers aux prises avec les difficultés du terrain. D’autre part, l’intérêt
pour les modes managériales suit quasiment l’allure d’une courbe sous forme de cloche.
Abrahamson (1996, 1999) et Fink (2003) estiment que les modes du management ont un cycle
de vie similaire à celui de tout produit ou service offert par l’entreprise. Le cycle de vie d’une
mode managériale est generalement constitué de quatre phases : construction du concept,
expansion, domination et enfin renonciation au concept. Dans la phase de construction, il y a
d’abord formation des premières coalitions de consultants et d’institutions diverses. Certains
discours commencent à préparer le terrain pour lancer la nouvelle innovation managériale.
Dans la phase d’expansion, les idées clefs du concept sont largement acceptées par les
entreprises. Celles-ci passent à l’action en mettant en œuvre les démarches d’implantation
telles que décrites et conseillées par les créateurs du concept. La phase de domination est celle
de l’exploitation des avantages tirés de la phase précédente. Il s’agit de maintenir les idées
clefs tout en les renforçant par certaines modifications incrémentales. La dernière phase
correspond à une renonciation au concept. Les raisons d’un tel déclin sont multiples. Par
exemple, le concept peut paraître désuet. Egalement, il peut ne plus être en mesure
d’expliquer et de prédire de nouveaux phénomènes organisationnels. Enfin, l’apparition d’une
nouvelle mode aux frontières d’une autre peut précipiter le déclin du concept managérial.
L’analyse du cycle de vie d’une mode managériale se fait souvent à la lumière des
publications dans des revues et journaux spécialisés. Les chercheurs ont souvent recours à des