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Raymond Boudon
Raymond Boudon (1934-). L'un des sociologues français contemporains, avec
Pierre Bourdieu, Edgar Morin, Alain Touraine, notamment, ayant une notoriété
internationale. Sa vision libérale du monde s'oppose à la vision "socialiste"
longtemps, et peut-être encore, dominante en France.
I. Sa vie, son oeuvre
I.1. Sa vie
à Paris en 1934 dans une famille bourgeoise de culture classique Raymond
Boudon fait ses études secondaires dans les meilleurs lycées, Condorcet et Louis
le Grand, puis il intégre l'Ecole Normale Supérieure et passe, en 1958,
l'agrégation de philosophie.
Pendant la guerre d'Algérie (1954-1962) son service militaire lui permet, en
1958-1960, de participer aux travaux du CERPA (service de recherches
psychologiques de l'armée française).
En 1961 il épouse une allemande, Rosemarie Riessner, née d'une mère catholique
et d'un père protestant qui se sont réfugiés en Bavière, en 1945, pour fuire
l'armée rouge de la Russie soviétique qui occupe l'Est de l'Allemagne qu'ils
habitaient.
Pendant l'année universitaire 1961-1962, sur une recommandation du sociologue
français Raymond Aron au sociologue américain Paul Lazarsfeld, et avec une
bourse de la fondation Ford, il séjourne à l'Université de Columbia à New York.
Entré au CNRS (Centre national de la recherche scientifique) en 1962 il est
nommé maître de conférences à Bordeaux en 1963.
Il séjourne pendant l'année universitaire 1964-1965 à Harvard.
Il soutient sa thèse en 1967 et est nommé professeur à la Sorbonne.
Raymond Boudon a enseigné dans de nombreuses universités étrangères,
notamment : Genève (1971-1995), Chicago, Columbia, Florence, Harvard, Québec,
Lisbonne, Milan, Montréal, Moscou, Oxford, Saint-Petersbourg, Santiago, Sao
Paulo, Stockholm, Hong-Kong.
I.2. Son oeuvre
Evidemment considérable son oeuvre est, en France, moins connue que celle des
sociologues socialistes, notamment celle de Pierre Bourdieu.
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On peut retenir sur une vingtaine d'ouvrages :
- L'analyse mathématique des faits sociaux, Thèse, Plon, Paris, 1967,
- A quoi sert la notion de "structure" ?, Gallimard, Paris, 1968,
- Les méthodes en sociologie, PUF, Paris, 1970,
- La crise de la sociologie, Droz, Genève, Paris, 1971,
- L'inégalité des chances, A. Colin, Paris, 1973,
- Effets pervers et ordre social, PUF, Paris, 1977,
- La logique du social, Hachette, Paris, 1979,
- L'idéologie ou l'origine des idées reçues, Fayard, Paris, 1986,
- L'Art de se persuader des idées fausses, fragiles ou douteuses, Seuil, Paris,
1992,
- Déclin de la morale ? Déclin des valeurs ?, PUF, Paris, 2002,
- Raison, bonnes raisons, PUF, Paris, 2003.
II. Sa sociologie
Raymond Boudon est un libéral au sens social du terme, qui pense que la personne
humaine, de par son action volontaire joue un rôle irremplaçable dans la
construction des systèmes sociaux. De ce fait il s'oppose aux socialistes
marxistes et à leur pensée totalisante, holiste. En France sa pensée s'est
heurtée au système idéologique très agressif de Pierre Bourdieu et de ses
disciples.
Pour Raymond Boudon les constructions sociales relèvent de l'individualisme
méthodologique (1.); elles ne sont pas déterminées par des lois mais relèvent de
comportements qui se veulent rationnels (la rationalité des comportement)(2.),
comportements qui ont des effets qui peuvent être pervers (les effets de
composition et les effets pervers)(3.).
II.1. L'individualisme méthodologique
Une société peut être individualiste au sens moral, au sens sociologique ou au
sens méthodologique.
Au sens moral l'individu est considé comme étant l'auteur des valeurs
fondamentales, le créateur des valeurs morales est humain.
Au sens sociologique l'individu est considéré comme étant autonome, le créateur
humain ne dépend pas.
Au sens méthodologique l'individu créateur de valeurs et constructeur de
systèmes est motivé pour le faire, il a de bonnes raisons pour croire et pour
faire.
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L'individualisme méthodologique pose comme principe que la société n'est que la
production collective d'individus plus ou moins autonomes et rationnels, ce qui
n'interdit pas de regrouper les acteurs sociaux en catégories mais interdit de
dire qu'il existe dans les sciences sociales des lois générales gouvernant les
comportements humains, qu'il existe un déterminisme social.
II.2. La rationnalité des comportements
Les êtres humains, selon Raymond Boudon, peuvent avoir des comportements
surprenants, ces comportements répondent cependant à une rationalité : les
acteurs sociaux ont, sauf exceptions qui peuvent relever de l'anormalité,
toujours de bonnes raisons d'agir comme ils le font.
Cette rationalité peut prendre plusieurs formes, elle peut être psychologique,
économique, axiologique.
La rationalité psychologique fait intervenir les émotions et les passions.
La rationalité économique fait intervenir l'intérêt, l'utilité (utilitarisme).
La rationalité axiologique fait intervenir les valeurs sociales, donc morales. Les
acteurs sociaux prennent leur décision dans un cadre social, une culture, à une
époque déterminée. Mais pour Raymond Boudon les valeurs morales de référence
des acteurs sociaux ne sont pas pour autant relatives (relativisme culturel).
En effet selon Raymond Boudon les valeurs morales seraient universelles et se
développeraient de façon irréversibles.
Si les acteurs sociaux se déterminent en fonction de valeurs ce n'est pas pour
autant sans intérêt au sens large, car s'ils se déterminent c'est qu'ils ont de
bonnes raisons de croire à ces valeurs. Toutefois on ne saurait confondre l'homo
oeconomicus des économistes libéraux avec l'homo sociologicus selon Raymond
Boudon.
Contrairement à l'homo oeconomicus qui agit toujours par intérêt l'homo
sociologicus peut agir par habitude, en fonction de valeurs qui lui disent de faire
ainsi.
Le choix de l'homo sociologicus n'est pas aussi clairement définissable que le
choix de l'oeconomicus.
Son choix est dépendant de l'environnement, qui peut être ritualisé, et sa
rationalisation peut être postérieure au choix lui-même (voir la rationalisation du
non-logique chez Pareto).
II.3. Les effets de composition et les effets pervers
Les actions des individus, en s'agrégeant, produisent des résultats sociaux,
collectifs. Ses résultats peuvent avoir été voulus par les acteurs mais ils peuvent
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également ne pas avoir été voulu, au contraire.
Raymond Boudon qualifie les résultats d'effets de composition, d'effets
émergents, d'effets d'agrégation, d'effets de systèmes, qui se partagent en
deux catégories, les effets simples et les effets complexes.
Les effets simples résultent d'une addition des comportements individuelles.
C'est parce que tous les entrepreneurs calvinistes (voir l'éthique protestante de
Max Weber) se comportent de même manière que le capitalisme naît et se
développe.
Les effets complexes résultent du fait que certaines des décisions des acteurs
sociaux peuvent être influencées de telle sorte qu'au lieu d'être agrégatives
elles soient désagrégatives. Ainsi l'addition des intérêts individuels ne conduit
pas toujours à l'intérêt collectif visé, il y a des effets pervers.
La liberté des acteurs ne conduit pas nécessairement à leur collaboration. Leurs
actions au lieu de se combiner peuvent s'opposer, et ainsi produire des effets qui
leur échappent, des effets pervers.
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