Les Etats-Unis depuis 1914

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Les Etats-Unis depuis 1914
1. Situation et conditions de croissance avant 1914 : que sont les EU
avant 14 ?
Équilibre entre différentes activités américaines
Tendance à la concentration industrielle
Equilibre entre primaire, secondaire et tertiaire
Les EU s’affirment comme grande puissance agricole à la fin du XIX°
70 % du maïs mondial + 60 % du coton + 20 % du blé + 25 % du tabac + fruits
et légumes. Mais cette croissance est extensive car la main-d’œuvre est alimentée par
l’expansion démographique et le recul de la frontière.
Déforestation de l’Amérique du Nord
Élevage : 60 millions de bovins ; 50 millions de porcins ; 45 millions d’ovins,
le plus grand cheptel du monde.
Amélioration des transports, forte spécialisation agricole : on parle d’un « âge d’or » de
l’agriculture américaine qui emploie un tiers des actifs mais fait vivre 50 % des Américains.
Croissance des ménages dont le pouvoir d’achat augmente, d’où une exigence croissante en
matière de consommation agricole.
Mécanisation : moissonneuses-batteuses ou « combines » inventées par McCormick, mais le
taux d’autofinancement reste élevé. L’agriculture devient scientifique (engrais + irrigation +
dry farming pour ne pas trop massacrer les terres)
En 1909, la production industrielle = deux fois la production agricole en valeur.
Dotation importante en ressources naturelles : 1/3 du charbon mondial et de l’électricité
hydraulique, 2/3 du pétrole, autant de fonte que l’Allemagne et l’Angleterre réunies en 1902,
auxquelles il faut ajouter la France et la Russie en 1913.
Cette production est alimentée par l’immigration
1870 : 280 000 immigrés
1900 : 1 000 000 immigrés
1900 3/5 salariés industriels sont nés à l’étranger. D’où l’apparition dès 1893 d’une ligue pour
la restriction de l’immigration (+ problèmes de citoyenneté).
B. Coriat, dans L’atelier et le chronomètre, explique que le taylorisme s’est imposé grâce à
l’immigration qui a aussi conduit à un déclassement des ouvriers qualifiés.
Rôle de l’entrepreneur ; innovation dans tous les domaines : produits, procédés, organisation
de la production (taylorisme, fordisme, Marketing) et mythe des self made men, brasseurs
d’affaires, « barons pillards » aux remarquables capacités d’adaptation : ils savent par
exemple se protéger très tôt de la concurrence.
Tarifs douaniers :
Mac Kinley 49% 1890
Wilson
40 % 1893
Dingley
57% 1897
Payne 600 articles 1909
Underwood en 1913
Le protectionnisme (doctrine Clay dès 1820) a permis le développement économique et
industriel, car les prix élevés sur le marché intérieur permet de couvrir très rapidement les
investissements et de réaliser des profits substantiels -> Exportation vers la Grande-Bretagne
grâce aux prix cassés que permettent les économies d’échelle. Le début du siècle est une
période de conquête de parts de marché.
Part des EU dans le commerce mondial des produits manufacturés.
23.3 % en 1870 contre 32 % pour la GB
35.8% en 1914 contre 14 % pour la GB
Balance commerciale structurellement excédentaire de 1893 à 1970.
Dès 1900 = 3ème puissance commerciale du monde derrière l’Angleterre et l’Allemagne.
Mais commerce = 6 % du PNB, soit une part négligeable. Les droits de douane assurent des
recettes fiscales très importantes, le budget est donc structurellement excédentaire et permet la
création d’infrastructures : canaux, chemins de fer, ponts, ports, routes.
Conséquences du protectionnisme : concentration verticale et horizontale, qu’il faut interdire
sans grande efficacité :
Concentration > contrôle des prix (petits industriels, propriétaires agricoles qui deviennent des
capitalistes) + contrôle des banques, donc du crédit + presse, donc de l’opinion => formation
de groupes de pression et de lobbying. Exemple de grands groupes : Rockefeller, Carnegie et
Morgan pour l’acier, Dupont de Nemours, Armour
1890= Sherman Act et 1913, Clayton Act -> Interdiction des trusts (organisations qui
concentrent dans les mains d’une seule personne les certificats de dépôts pour obtenir une
majorité) et dissolution des ententes, d’où la constitution de holdings. En 1913, 2,2 % des
entreprises emploient 34 % et réalisent 49 % de la production.
Les lois sont rarement appliquées, donc le phénomène de concentration se maintient au cœur
des débats de la politique économique depuis la fin du XIX° (le libéralisme restant une valeur
fondamentale).
On reconnaît surtout à l’Etat un rôle dans la politique extérieure. Pas de bureaucratie d’Etat
chargée de contrôler et de diriger l’activité économique, le rôle étatique est suivant le plan
institutionnel essentiellement réglementaire, résultat d’un très fort lobbying. La législation du
travail est rudimentaire, relevant de chaque Etat qui sont en concurrence pour attirer les
entreprises (le travail des enfants est très peu réglementé dans le Sud). Au début XX° est mise
en place une procédure d’arbitrage dans les conflits du travail. En 1911, loi sur les accidents
de travail (pension pour les veuves) ; en 1916, une loi fédérale limite la journée de travail à 8
h et interdit le travail à moins de 14 ans, mais elle sera invalidée en 1918.
Développement de syndicats de travailleurs (American Federation of Labor notamment). Les
EU pratiquent un impérialisme politique puis économique, extension de la doctrine Monroe.
Ils présentent cependant quelques faiblesses en 1914
 Les termes de l’échange commercial leur sont défavorables, ils restent exportateurs de
matières premières
 Balance des services déficitaire
 Domination des capitaux étrangers (importants IDE européens), surtout anglais, allemands
et français, dans les secteurs ferroviaire, des mines, de l’industrie alimentaire et de
l’exploitation agricole.
 La monnaie d’échange internationale reste la livre
2. Les années prosperity
La guerre met fin aux fragilités économiques :la puissance financière anglaise perd de son
pouvoir, les hiérarchies économiques entre Ancien et Nouveau monde sont bouleversées. À
l’issue de la guerre, les EU sont un partenaire incontournable qui devient le créancier de tous
les belligérants grâce à sa phase de neutralité politique.
18 = 3 Milliards de créances privées + 10 milliards de créances publiques + stock d’or = 45 %
du stock mondial (60 % en 1929), ce qui favorise la stabilité des prix et l’épargne. Les avoirs
européens aux EU sont liquidés, le $ devient une des monnaies les plus solides du monde.
Bourse de NY dépasse la bourse de Londres
1909-1919 = production américaine multipliée par 3 en valeur, le commerce extérieur par 4,
le budget fédéral s’étend du fait de l’effort de guerre considérable = 26 milliards de $ pour
financer l’entrée en guerre, l’Etat doit organiser l’économie, orienter la production et éviter
les gaspillages
La guerre de 14 inaugure une « New era »
Les forts gains de productivité permettent l’essor de la société de consommation : nouvelle
organisation du travail (généralisation des méthodes fordistes en 1925 et tayloristes) + progrès
techniques (de plain-pied dans la 2e Révolution Industrielle), les liens entre recherche
scientifique et débouchés technologiques se resserrent. Facilité au crédit < fort investissement
nécessaire qui connaît un boom, les machines deviennent de plus en plus « labour intensive »
et il y a substitution du capital au travail car raréfaction de la main d’œuvre disponible dans le
Nord. En 1921, lois eugénistes pour préserver la pureté anglo-saxonne. La loi fixe à 3 % du
nombre de résidents de la nationalité les possibilités d’immigration. En 1924, le quota est
ramené à 2 % avec un plafonnement à 150 000 en 1927 => passage de 900 à 300 000
immigrés entre 1920 et 1925.
Produits manufacturés exportés, importation de matières premières : les termes de l’échange
s’inversent, l’économie devient la plus compétitive du monde, d’autant que les tarifs
douaniers sont remontés en 21 et 22.
=> EU= moteur de la croissance mondiale qui rythme le pouls de la conjoncture internationale
Économie de services : la fonction commerciale prend le pas sur la fonction de production, le
marketing devient un passage obligé des sociétés productivistes. Développement des activités
bancaires et d’assurance, la société américaine est contrôlée par le trust de l’argent :
Metropolitan Bank, Farmer’s Loan and Trust Company, Chase National Bank, Rockefeller.
Sur 87.6 milliards de revenu, 51 Milliards sont dans activités de service
8.5 Milliards
agricoles
27.5 Milliards
industrielles
Nouvelle vision du libéralisme : libéralisme sans concurrence, rôle des médias pour conforter
cette idéologie de la concentration, symbole de la réussite. Firme géante = garante de la
prospérité de l’économie américain pour l’Américain moyen, le moyen de résister aux cartels
européens et de créer des emplois. Mais les fermiers s’enfoncent dans la crise à partir de 21
(surproduction), l’agriculture devient de plus en plus dépendante des industriels (besoin
d’intrants), les coûts haussent du fait de l’endettement => crise de ciseaux. L’industrie mute
sous l’influence de la concentration et de la mobilité géographique : déclin du Nord-Est au
profit du développement industriel du Sud et de l’Ouest. En 1929, 2 % des entreprises
emploient 58 % de la main-d’œuvre et réalisent 69 % de la production. Fortes inégalités : les
dividendes augmentent de 61 %, le partage de la VA se fait en faveur du capital.
Persistance du chômage industriel : 5 M en 21, 2 M quand même en 29 : le syndicalisme
décline tandis qu’émerge un syndicat jaune.
21 à 29 : salaires + 11 % => embourgeoisement des salariés qui rentrent dans l’actionnariat.
Hausse des actifs financiers liée aux facilités de crédit (« la croissance appelle la croissance »)
Déséquilibres internationaux : unilatéralisme et impérialisme financier américain.
Politiquement, interventions militaires en Amérique (Honduras en 25, Nicaragua plusieurs
fois, mise en place de la dictature Somoza).
Exigence des remboursements des dettes sans les lier aux réparations + développement du
crédit dans les pays en développement.
3. La crise de 29
 Une crise d’abord américaine
Lors du jeudi noir, le 24/10/29, 13 milliards d’actions jetées sur le marché ne trouvent pas
preneur (16,5 pour le lendemain). Le lundi suivant, 28/10, chute de 12,9 % des cours, un
record qui ne sera dépassé qu’en 1987. Le krach boursier engendre une crise financière. Le
syndicat Morgan achète des actions pour enrayer la chute, mais échoue et doit les revendre à
partir de janvier 1930. En 32, les cours redescendent en dessous du niveau de 21, qui n’était
déjà pas bien élevé (chute de 85 % entre 29 et 32). Le taux de suicide augmente.
Raisons du krach :
 Hausse du taux d’escompte britannique => fuite des capitaux américains vers une plus
forte rémunération
 Origine spéculative : achat à la marge. Ainsi les actions Goldman Sachs émises en 1928 à
104 $ passent à 228,5 en 29 pour tomber en 32 à 1,75 $
 Hausse des cours de bourse disproportionnée à la hausse des profits (bulle spéculative)
Emprunt financier à 90 % des achats d’actions (effet de levier)
Galbraith, Brève histoire de l’euphorie financière : la logique spéculative entoure l’ensemble
de l’économie américaine des années 20’s (Coolidge et Hoover, responsabilité politique). Elle
débute avec la vente de terrains et se reporte sur la bourse.
Conséquence de cette crise boursière : crise bancaire du fait des retraits massifs et des
faillites. Il se produit un enchaînement vicieux : ruine des agriculteurs (qui à partir de 31 ne
peuvent plus assurer le remboursement de leurs dettes) + ruine des courtiers => effondrement
de l’économie américaine « comme un château de cartes »
Effet de pauvreté + raréfaction du crédit => chute de la demande (la baisse des prix appelle la
baisse des prix qui appelle la baisse de la production industrielle qui appelle la baisse de
l’emploi). D’où une chute de l’investissement, y compris de logement (principe du
multiplicateur inversé). La crise de la demande (chute de la masse salariale) devient crise de
l’offre.
Entre 29 et 32, la production industrielle chute de 45 %, 69 % pour les biens d’équipement et
66 % pour le commerce extérieur, on passe donc d’une crise de surproduction à une crise de
sous-consommation.
Il y a cependant des bénéficiaires : la baisse des prix (déflation) induit une augmentation du
pouvoir d’achat des salariés dont l’emploi est stable (leurs salaires diminuent de 15 %, soit
moins que les prix) mais la misère des chômeurs (24 % de la population active en 31), des
professions libérales et des capitalistes.
Pas d’indemnités assurantielles, d’où le développement de l’assistance publique (soupe
populaire), la crise est autant sociale qu’économique. Le banditisme se développe (Al
Capone).
 Conséquences sur le reste du monde
Les EU représentent 45 % de la production industrielle mondiale, leurs importations 12,5 %
du commerce mondial. La contraction de la demande intérieure a donc un effet « boule de
neige » (Keynes) sur les productions du reste du monde. Remise en cause du commerce
mondial, retour du protectionnisme (Loi Hawley-Smoot 1931 aux EU) et politiques de
dévaluation compétitive un peu partout dans le monde (£ en 31), sauf en France, pour exporter
le chômage (politiques contre-productives). Les puissances coloniales se replient sur leurs
empires et entament des politiques autarciques.
Le retrait des capitaux américains provoque une crise financière internationale.
Le 14/05/31, le Kredit Anstalt fait faillite => faillite généralisée des systèmes bancaires
autrichien puis allemand. L’Angleterre doit renoncer à l’étalon-or. Les dévaluations
successives signent la fin du SMI, les pays suivent la £ pour exporter la crise, abandon des
politiques solidaires. La France demeure quelque temps un îlot de prospérité, du fait des
archaïsmes de l’économie française, et l’URSS marxiste connaît un boom.
 La réaction américaine :
En 31 est accordé un moratoire sur les dettes de guerre. Le New Deal va sauver le capitalisme
en le redéfinissant : l’intégration de l’état dans l’économie constitue une nouvelle forme de
régulation.
1er New Deal = 33-35> New Deal étatiste, voire planiste aux résultats mitigés
1er New Deal = dépassement du capitalisme soi-disant « concurrentiel », en fait monopoliste :
proposition par Roosevelt, qui impute aux firmes géantes, les « royalistes économiques », les
difficultés économiques, d’une organisation « planifiée » de l’économie plus rationnelle.
Tocqueville De la démocratie en Amérique : « les Américains se plaisent à expliquer à l’aide
de l’intérêt individuel bien servi tous les actes de leur vie »
=>réutilisation par Roosevelt du sentiment national
En 1933, l’AAA (Agricultural Adjustment Act) instaure une collaboration des agriculteurs
(diminution de la production en échange d’aides de l’État ). Le NIRA (National Industrial
Recovery Act) supprime les lois anti-trusts et établit des quotas et des prix minima, mais aussi
des salaires minima, une réduction du temps de travail et l’interdiction du travail des enfants.
Mais ces lois échouent politiquement (non-adhésion des chefs d’entreprise et des agriculteurs)
et légalement (elles sont invalidées en 34 par la Cour Suprême).
Il y a pourtant des succès : la renaissance de la négociation collective, l’établissement du Civil
Work Administration (emploie 4 millions de personnes en 34), la politique des grands travaux
avec notamment la TVA (Tenessee Valley Authority). L’investissement reprend en 34.
À partir de 35, le 2° New Deal est plus réfléchi et plus fidèle à Keynes. Celui-ci est moins
dirigiste et plus pragmatique (fondé sur l’objectif de création d’emplois), il est marqué par les
grands travaux et l’augmentation des déficits publics (avec en même temps une hausse des
impôts). En juillet 35, la loi Wagner réaffirme le droit de syndical et le droit de grève, la parité
entre salariés et chefs d’entreprise dans la négociation sociale.
En 35, le Social Security Act procure une assurance vieillesse et chômage grâce à une
participation Etat fédéral / Etats / salariés / employeurs. En 38 est votée la semaine de 40 h et
le travail interdit à moins de 16 ans => ébauche d’Etat Providence qui laisse plus de place aux
syndicats. Le CIO (Comity for Industrial Organisation), issu d’une scission de l’AFL, se
montre plus revendicatif.
Le bilan reste pourtant mitigé : nouvelle crise en 38 (nouveau krach). Pas de rétablissement de
l’équilibre de l’offre et de la demande, la déflation n’est pas enrayée en 37 et la défiance des
investisseurs se maintient du fait des grèves et d’un partage des richesses inadapté. Alors que
le revenu national en 29 était de 87,6 milliards $, il n’atteint en 39 que 72,8 milliards $, les
prix ont baissé de 17,6 % et le chômage se maintient à 16,5 %.
D’où un bilan économique moyen mais bouleversement du rôle acteurs dans l’économie : la
grande entreprise doit négocier avec les syndicats.
L’Etat régule un néocapitalisme, non plus sauvage mais organisé (réglementation,
commissions de contrôle et de surveillance, régulation de l’économie par des politiques
anticycliques financières et sociales). Des secteurs entiers échappent aux lois du marché, il y a
coresponsabilité des partenaires sociaux , le poids du politique dans la régulation économique
s’accroît.
En même temps que la renaissance des mouvements ouvriers, émerge le « common man »,
devenu le pilier de la société américaine au détriment du « business man », qui voit son image
détériorée. Les minorités, les Noirs en particuliers (occasions de promotion sociale), sont
réhabilitées. Avec Roosevelt, le Président des EU prend le pas sur le Congrès.
Pour C. Fohlen, le New Deal (« révolution pacifique ») aura été la synthèse entre l’arrogance
du Big Business, les ambitions des classes moyennes et les aspirations de ceux qui n’avaient
pas pu participer à la prospérité des années 20. Mais la guerre sera un appel d’air qui sort
l’économie américaine de la crise.
4. Les Etats-Unis dans les trente glorieuses
Le PNB passe entre 39 et 45 de 72.8 milliards à 215 Milliards $ (+120 % entre 39 et 45)
Base 100 en 1939, on passe en 45 à :
3000 pour le commerce extérieur
130 pour l’agriculture
205 pour la production industrielle
250 pour les transports
L’Amérique ne se révèle jamais tant que dans les situations d’urgence. La mobilisation passe
par 8 millions de soldats, mais aussi par la mobilisation économique : alliance entre Etat et
grand capital, rationalisation (=> des gains de productivité record grâce à la mécanisation,
standardisation, transports…) et nationalisation de l’appareil productif. La géographie
industrielle est modifiée par les commandes militaires. Le Nord-Est reste dominant mais
l’industrie se déplace vers le Centre, le Sud, l’Ouest. La zone Pacifique devient très
dynamique.
La grande firme est réhabilitée dans l’opinion publique et le bien-être individuel semble
inextricablement lié à son destin, même si l’Etat est l’animateur du capitalisme par sa
recherche, ses commandes… Le profit est réhabilité à grand renfort de publicité. Le
gigantisme des firmes américaines (Bethlehem Steel ; General Electric ; General Motors ;
IAA ; US Steel ; Republic Steel ; Dupont de Nemours ; General Foods) domine l’industrie. La
grande taille semble la condition au développement de la compétitivité et de relations sociales
d’un nouveau type fondées sur la coopération (véritable art de vivre).
500 firmes réalisent 40 % des profits, 20 % de l’emploi non agricole, 50 % de la production
industrielle et 75 % des investissements. Autour d’elles gravite un ensemble d’activités de
services (transports, distribution, crédit, assurances) et de sous-traitants, PME qui servent
d’amortisseurs et sont spécialisées dans les productions pour lesquelles la série n’est pas
adaptée. Les grandes firmes ont des situations d’oligopoles, mais offrent des emplois et
permettent à des milliers de ménages d’accéder à la promotion sociale => adhésion au modèle
Les jeunes couples se ruent sur les biens d’équipement (4000 nouveaux logements sont
occupés chaque jour). Lenombre d’automobiles passe de 10 millions en 49 à 24 en 57. C’est
l’âge d’or de la consommation de masse. L’avènement de la technostructure, dont la légitimité
repose sur les diplômes et qui est responsable de la planification stratégique, permet la
stabilité sociale. Augmentation régulière des salaires : 2,5 à 3 % par an, auxquels s’ajoutent
les avantages sociaux (retraite, assurance maladie…). Mais se maintiennent des inégalités
criantes entre les sexes et envers les minorités (Galbraith, Le Nouvel Etat industriel)
Le rôle de l’Etat est redéfini : avec Truman, c’est le Fair Deal (pas de renoncement au
dirigisme), avec Eisenhower la « voie moyenne » :
 Moins de dirigisme économique mais des interventions militaires (guerre froide, de
Corée, du Vietnam…) et maccarthysme : idée d’une Amérique rempart des libertés
individuelles contre le communisme
 C. Wright Mills : système américain = complexe militaro-industriel (intérêts de l’état
et des firmes liés)
 Mobilisation des forces américaines dans la rivalité à l’égard du bloc communiste avec
en 57 le National Defence Education Act : formation de plus d’ingénieurs et de
scientifiques en réaction à Spoutnik et, en 58, le National Defence Highway Act :
construction d’autoroutes pour faciliter les transports d’armements.
Les programmes de recherche dans l’armement ont des retombées industrielles ( fibres
optiques, plastiques, laser, électronique, miniaturisation…) et sont justifiée par la
responsabilité mondiale des EU ( « Le bien contre le Mal » pour Reagan ). Le leadership
américain s’affirme dans un rôle de gendarme et de barrière, de parapluie pour les entreprises
américaines partout dans le monde (plan Marshall qui permet le redressement économique de
l’Europe et des débouchés pour les EU).
Le SMI est mis en place autour du $, monnaie internationale seule convertible en oret à partir
de laquelle sont définies les autres devises (conférence de Bretton Woods en 44) selon des
changes fixes. Les EU disposent d’une minorité de blocage au FMI (Fonds monétaire
international) et influent sur la BIRD et le GATT (General Agreement on Tariffs and Trade)
Mais l’Amérique a aussi certaines faiblesses (sinon ce serait vraiment pas juste !)
La loi Taft-Hartley remet en cause en 47 les acquis sociaux des années 30 (limitation du droit
de grève, interdiction des closed shops, de l’union shop, remise en cause de la loi de Wagner).
L’économie américaine reste cyclique, d’où un débat entre démocrates (politiques de relance
quitte à avoir de l’inflation) et républicains cristallisé par la courbe de Phillips.
La croissance est plus faible que la moyenne des pays de l’OCDE
TCAM
50-55 55-60 60-65 65-70
EU
4.2
2
4.7
3.1
OCDE
5
3.3
5.3
4.7
Les EU sont en déclin relatif pendant cette période du fait du rattrapage de l’Europe et du
Japon par la diffusion des technologies (convergence des économies). En 45, le PNB
américain vaut 50 % du PNB mondial, contre 30 % en 1970.
Le bilan est moyennement positif pour l’éducation, qui n’a pas l’enjeu qu’elle a en France :
pas de « mythe du boursier », on réussit sans être formé. Le système est fondé sur le
rabâchage et les économies d’échelle pour réduire les coûts. Beaucoup d’élèves n’achèvent
pas leurs études secondaires (sans conséquences financières obligatoires).
La balance des paiements est structurellement déficitaire (capitaux à long terme placés dans le
monde entier), d’où des mouvements de balancier du $ et un impérialisme américain qui
exerce une contrainte sur le reste du monde pour stabiliser leur monnaie.
Le 17/08/75, Nixon annonce un décrochage du dollar alors que longtemps les EU ne s’étaient
que peu préoccupés de la parité du dollar (hausse des salaires réels et déficits budgétaires). :
>Plus de conversion or / $
>Avec les accords de la Jamaïque en 76, passage d’un système de changes fixes à un système
de changes flottants. L’effondrement du système de Bretton Woods semble montrer que le
leadership est menacé. La crise de 73 sonne comme un coup de semonce pour l’économie
américaine.
5. L’Amérique depuis les chocs pétroliers
 La crise des 70s provoque une remise en cause du modèle américain et des années de
doute.
Les chocs pétroliers sont directement à l’origine d’une récession sévère (74-75 puis 80-82),
on voit apparaître la stagflation (inflation à deux chiffres + faible activité), un terme qui
s’applique d’abord à l’économie américaine. Le déficit budgétaire est multiplié par 4 entre 74
et 79. Le déficit commercial augmente en dépit de la dépréciation du $ (forme de
protectionnisme monétaire), d’où des incitations des entreprises étrangères à ne pas exporter
vers les EU. Mais ces barrières non tarifaires (quotas d’importation) et le dumping
affaiblissent la compétitivité américaine (sidérurgie). Le protectionnisme larvé pénalise
croissance et niveau de vie et illustre la nature obsolète des entreprises (profit en chute libre,
ils passent entre 65 et 80 de 10 % du capital après impôts à 7 %).
Exemple : l’acier est protégé, mais cette protection a des externalités négatives sur l’industrie
automobile (acier 40 % plus cher) qui devient peu compétitive => les bénéfices vont aux
industries en déclin, la rentabilité à long terme n’est pas assurée. Les entreprises très
concentrées américaines sont en crise, d’où des stratégies de regroupement des actifs, des
OPA ou LBO –leveradge buy-out – qui accroissent l’endettement dans une optique de
financiarisation favorisée par la législation fiscale.
L’envolée des dépenses militaires (guerre des étoiles) et la diminution du taux de PO
engendrent une augmentation du déficit public et du déficit de la balance des paiements
(déficits jumeaux), d’où le développement d’un marché financier très dynamique qui se
dérèglement et se décloisonne, ce qui favorise la spéculation sur les taux d’intérêt, la libre
circulation des capitaux et la désintermédiation.
Les 80s sont les années de la finance : big bang à Londres en 86, loi facilitant l’accès des
grandes entreprises au marché monétaire en 84, développement de la finance lié au déficit
public puisqu’on refuse de la financer par l’inflation (la décision de Volker met fin aux
réflexes keynésiens).
La période reaganienne étant celle de la relance économique par le déficit budgétaire (pas de
retour au dogme de l’équilibre), la dette devient le marché le plus lucratif dans le monde
occidental. L’Amérique draine l’épargne mondiale par ses bons du trésor, ce qui assèche les
autres marchés et stimule les taux d’intérêt et le dollar.
Ce qui précipite de redoutables crises financières :
Mexique 82
Crise boursière 87
Crise du peso 95
Crise asiatique 98
Crise argentine 2002-01-25
La désindustrialisation menace l’industrie américaine traditionnelle : l’Industrial Belt se
transforme en Rust Belt, le textile perd 250 000 emplois dans les 80s (la moitié des entreprises
disparaissent), Detroit est sinistrée. Le secteur automobile perd successivement (74-75 ;8082 ;89-90) 250 000, 100 000 emplois et 100 000 emplois, en tout 500 000 emplois entre 75 et
95. GM délocalise fin 96 21 usines sur 38.
La production d’acier baisse d’un tiers. La sidérurgie s’effondre faute de compétitivité et du
fait des OPA. Les empires industriels se disloquent au nom de la rentabilité financière. La
remise en cause de la suprématie dans les secteurs nouveaux (secteurs de pointe) et les IDE
permettent de parler d’une « Amérique bis » (Intérêts américains à l’étranger).
=> Pour Friedman, le déficit commercial et budgétaire n’a pas d’importance.
Mais la concurrence s’affirme, notamment japonaise (semi-conducteurs), et européenne
(Airbus / Ariane : domaine de l’aéronautique et du spatial, deux fleurons américains). Le
marché américain de plus en plus cyclique, avec des booms de croissance mais creux par la
suite (première Guerre du Golfe), d’où un unilatéralisme américain en matière de commerce
international (mesures d’arrière-garde, formes de bilatéralisme, rétorsions).
 Le renouveau des années 90
Les déboires américains sont à relativiser au regard de la puissance de l’économie américaine.
Les 80s sont mises à profit pour mettre en place une nouvelle régulation économique. En 79,
on passe d’une économie d’endettement à une économie de fonds propres (Hicks) =>
rationalisation de l’appareil productif américain et réorientation des investissements. Les
gains de productivité s’élèvent progressivement pour atteindre 3 à 4 % par an dans les années
90. Les tendances protectionnistes (qui vont à l ‘encontre du GATT) obligent les entreprises
étrangères à investir aux EU. Les EU concluent des accords d’auto limitation : acier pour la
CEE, l’automobile pour le Japon.
Taxes anti-dumping (administration Clinton)
Les délocalisations internes puis externes (+ les yo-yos du dollar, et l’endaka décidée par les
accords du Plaza le 22/09/85) entraînent une modération des coûts salariaux et une hausse de
la compétitivité. Le coût salarial horaire en 96 est 18 $ aux EU, contre 19,5 en France, 25,5 au
Japon et 32 en Allemagne. Du fait de la faiblesse des charges, le salaire disponible est plus
élevé aux EU (13,5 $) qu’en France (11 $). Les IDE quintuplent entre 80 et 91, triplent à
nouveau entre 91 et 2000, ce qui renforce le tissu industriel américain et crée trois millions
d’emplois (slogan de Reagan : « America first ! »).
Les 90s sont une décennie de croissance ininterrompue, le taux d’intérêt chute après la guerre
du Golfe, (« taux zéro ») et ce sans inflation : le chômage tombe en dessous de 5 % entre 95 et
2000. L’investissement connaît une croissance folle, surtout dans les nouvelles technologies
(effet de levier). La part des exportations américaines dans le monde augmente tandis que le
poids des FMN américaines en fait la deuxième puissance industrielle au monde après les EU.
Selon l’OCDE, en 96, 20 % de la production américaine est réalisée hors des EU et plus de 50
% des exportations des NPI sont le fait des entreprises américaines qui contribuent au déficit
commercial.
Fin XX°, l’économie américaine apparaît plus prospère que jamais même si de fortes
inégalités marquent la structure sociale. Avec l’effondrement de l’URSS, la mondialisation
s’effectue désormais sous son égide et le nouvel ordre économique international ne semble
pas pouvoir échapper à son contrôle. Depuis 2001 cependant, l’économie américaine peut
sembler avoir des tendances à l’unilatéralisme qui remet en cause les règles qui organisent les
échanges internationaux depuis la guerre.
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