on transgresse ces références et l’élément s’avère dans une position dont les références sont plus
ou moins éloignées de celles de la position initiale. Dans ce cas il sera question d’un particulier
obtenu par transposition. Un élément en position initiale doit être considéré, au niveau du
système, comme un fait général, et un élément en transposition - comme un fait de discours. En
d’autres mots, la position initiale est ouverte, de l’ordre de la compétence, elle rend compte de la
fonctionnalité du système; la transposition est résultative, de l’ordre de la performance, elle rend
compte du fonctionnement linguistique. Il faut donc étudier la transposition comme une
corrélation entre la fonctionnalité des faits et le fonctionnement linguistique2. Pour bien prendre
connaissance de ces mécanismes, il faut procéder à l’analyse des éléments qui en sont concernés.
La transposition en tant que phénomène linguistique est signalée par un grand nombre de
chercheurs, mais, à notre connaissance, elle n’a pas été objet d’une étude plus détaillée qui
couvre tous les niveaux linguistiques. Dans son ouvrage Eléments de syntaxe structurale, Lucien
Tesnière parle de translation (la parenté sémantique entre transposition et translation est plus
qu’évidente). Selon Tesnière “la translation consiste à transférer un mot plein d’une catégorie
grammaticale dans une autre”3. Charles Bally4 souligne qu’ «au fond de toute substitution on
aperçoit une transposition d’une catégorie dans une autre» et il parle d’un échange fonctionnel
dans les cas de passage tels que paternel - de père et qui appartient au père. Les éléments
engagés occupent des niveaux d’analyse différents (respectivement le niveau du mot, le niveau
du syntagme et le niveau de la phrase) et c’est le contexte qui les fait changer de position pour
leur communiquer des références positionnelles différentes. A la suite de Ch. Bally nous
pourrions affirmer que cet échange résulte d’une transposition réalisée au niveau respectif: de
père - niveau syntagmatique (le translateur de forme avec le substantif qui suit, mais qui est déjà
sorti de son assiette nominale et privé de ses références catégorielles, un adjectif fonctionnel) et
qui appartient au père - niveau phrastique (le pronom relatif qui, à part son rôle référentiel, a, lui
aussi, une fonction translative - il fait passer (il transpose) la proposition en adjectif fonctionnel.
R. Martin considère la transposition comme “un mécanisme syntaxique par lequel on crée
au niveau du discours des substantifs, des adjectifs et des adverbes fonctionnels au moyen
d’opérateurs tels que les prépositions et les conjonctions”5.
Il y a lieu de faire un parallèle entre transformation et transposition. Dans les cas de
trasformation il y a un changement de forme - un passage d’une forme à une autre. Les
transformations sont codifiables. C’est ce qui explique le fait que depuis longtemps déjà sont
rédigées des grammaires transformationnelles6. Les transpositions ne regardent pas que la forme,
elles peuvent avoir pour objet aussi bien le côté formel que le côté sémantique. Une grammaire
transpositionnelle ( si l’on se décide à en faire une) devrait couvrir un champ bien plus large
parce qu’il faudrait prendre en considération l’ensemble des faits de langage où l’on constate un
écart des références positionnelles qu’un élément donné possède dans le système auquel il
appartient.
Le problème de la transposition trouve un fondement théorique incontestable dans les
ouvrages de Gustave Guillaume et de ceux qui ont fait l’école guillaumienne. Le guillaumisme se
présente comme “une linguistique de position, une linguistique regroupant trois disciplines: la
psycho-mécanique, science de la pensée en action de langage, la psycho-systématique, science du
système de représentation, et la psycho-sémiologie, science des signifiants”7. La théorie
guillaumienne repose sur quelques points cardinaux qui nous intéressent particulièrement, à
savoir: