Punir, c’est enfin transformer la souffrance en malheur ( discours juridico-éthique qui
tentera de remonter la pente de la vengeance pour penser une justice relationnelle ).
Punir, c’est rappeler la Loi.
La peine répond tout d’abord à un régime expiatoire. Il ne faut pas chercher les racines de la
pénalité publique dans le règlement des offenses entre familles ( vengeance, vendetta ) car la
peine légale est publique et individualisée. L’ancêtre de la pénalité d’Etat a des origines
religieuses : c’est la sanction infligée pour la transgression d’un interdit sacré. L’avènement
du christianisme va prétendre viser la régénération intérieure, la rémission des fautes et la
réconciliation. Le droit canon va permettre au droit pénal étatique d’affiner sa théorie de la
responsabilité pénale. Avec la séparation de l’Eglise et de l’Etat, ce dernier va faire sienne
l’œuvre de régénération morale ( « le salut des âmes » ).
La peine correspond ensuite à un régime rationnel. Pour Kant, le droit de punir est
exclusivement réservé au souverain. Le crime est à lui seul la justification du droit de punir, et
la pénalité doit se fonder sur un principe d’égalité ( loi du Talion ). Hegel a critiqué la vision
de Kant en ce que sa définition de la pénalité ne permet aucune réconciliation : le criminel ne
peut être réconcilié avec la Loi car cette dernière, au nom de la pénalité, lui est imposée
comme être vivant et le fait souffrir en son nom. La peine ne fait ainsi que rétablir un droit :
elle supprime une violation ( crime ) par une violation ( peine ). Selon Marx, la Loi n’est ni
un interdit sacré ni une norme universelle : c’est un instrument politique de conservation des
rapports de force sociaux, l’expression des intérêts de la minorité dominante. Dès lors, punir
c’est s’attacher à conserver ces intérêts.
Punir, c’est défendre la société.
La peine va revêtir plusieurs conceptions. Elle est tout d’abord un outil de protection du
corps social. On est passé ici d’une conception rétributive de la peine à une conception
utilitariste qui est l’œuvre des positivistes italiens ( Lombroso, Ferri, Garofalo ). Le système
pénal ne doit plus être fondé sur la responsabilité mais sur l’idée d’une « pure défense
sociale ». le sens de la punition va se diluer dans des opérations vagues de prophylaxie et
d’hygiène médicale. Pour Durkheim, la peine doit être réfléchie comme jeu de
représentation. Elle va relever d’une symbolique générale : sa fonction est de manifester
l’unité d’une société et son attachement irréductible à des valeurs sacrées. Il faut bien
distinguer le sens social de la peine d’un sens individuel. Selon Hobbes, la peine est un
moyen de défense du corps social : c’est acte politique attribué à l’Etat constitué lors de la
disparition de l’état de nature. Quand il punit, le souverain use de droits qu’il juge bons pour
garantir la sécurité de tous. Beccaria, quant à lui, considère la peine comme un « minimum
requis de contrainte » : punir est une nécessité, tout autant qu’il est nécessaire de sacrifier une
part de libertés pour vivre ensemble. Dès lors, seule peut être légitime la plus petite quantité
de peine requise pour la conservation des liens sociaux. Locke estime que la peine est une
garantie publique destinée à assurer la protection d’un droit naturel fondamental : la propriété.
La peine est ici un instrument politique au service de la conservation et du maintien des
propriétés. Enfin, selon Bentham, il faut envisager la pénalité sous l’angle de la prévision des
coûts : Punir, c’est intervenir sur le marché des délits et des crimes. La loi pénale est
l’expression d’une arithmétique des plaisirs et des peines.
Punir, c’est éduquer un individu.
Le point de départ est le suivant : l’individualisation des peines est essentielle en ce qu’elle
va permettre de passer de l’idée de la réadaptation sociale à celle de le « régénération
intérieure » ( Saleilles et Tocqueville ). Individualiser, c’est le principe depuis lequel un sujet
est reconnu comme socialement responsable des actes qu’il a commis et c’est ensuite le