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banques ont été amenées à fournir des crédits pour des placements en titres/actifs
financiers/mobiliers plutôt que pour financer directement la production (investissement
physique). Et ce, d’autant plus avec le développement des marchés secondaires pour les titres
publics. Il n’en demeure pas moins que le processus de fusionnement et de monopolisation
des banques préconisé par Hilferding et Lenin (Foster, 2008, Duménil et Lévy, 2006a) semble
être vérifié. Ce processus de monopolisation constitue le fondement de l’idéologie néo-
libérale, et a contribué au développement et à la promotion de la classe intermédiaire de
gestionnaires, des cadres comme le soulignent Duménil et Lévy (2003, 2006a et 2006b). Vue
l’étendue de leur pouvoir et leurs compétences au sein de l’entreprise, dans un système
économique financiarisé ils sont également responsables de générer des profits en dehors des
activités productives de la firme ; ce qui provoque la financiarisation des entreprises non
financières. Le fusionnement, la monopolisation et l’acquisition de l’anonymat ont amené les
entreprises à se focaliser vers les activités les plus profitables, financières, au-delà de leurs
activités et structures productives. Le capital devient avant tout fictif conformément à la
définition de Marx. L’objectif est désormais d’augmenter la rentabilité/productivité des
dividendes de l’entreprise, et suivre les valeurs boursières des actions sur les marchés
secondaires. Au-delà des gestionnaires, des institutions sont spécialisées dans l’évaluation du
capital fictif : les agences de notation financière. De plus, les critères d’évaluation
développés par ces agences affectent les politiques économiques des pays endettés. Nous
pouvons parler d’une distribution du capital au profit des acteurs financiers et des producteurs
intégrés avec la production globale. Dans ce contexte, la soutenabilité de la dette constitue un
mécanisme contribuant à cette distribution. Selon Foster (2008) le système financier tel que
l’on l’observe aujourd’hui s’est construit sur la récession traditionnelle/cyclique ( ?) du
capitalisme des années 1970 : les entreprises ont cherché des issues de « secours » en dehors
du système productif (Foster, 2008).
2. Taux d’intérêt élevés, dette croissante et la Turquie
Selon les périodes de crise des processus de production des économies capitalistes avancées
du centre, la politique et l’économie se transforment à l’échelle mondiale, tantôt virant vers le
protectionnisme tantôt vers l’ouverture. Néanmoins, quelle que soit les conditions les pays du
centre ont toujours prôné plus d’ouverture aux pays périphériques (Ha Joon Chang, 2003). La
période des Trente Glorieuses (1945-75) peut être considérée comme une exception, période
pendant laquelle les pays du centre étant plus préoccupé par la restructuration de leur
demande domestique, ont « toléré » une industrialisation planifiée sous la direction de leurs
entreprises multinationales dans les pays périphériques. Cette période est caractérisée par
l’application généralisée d’une politique du taux de change fixe et un faible taux d’intérêt réel,
et une faible part des mouvements des capitaux comparée aux autres périodes d’expansion/de
globalisation (XIXème siècle ou la période récente). Avec la saturation des marchés
domestiques au début des années 1970 et la crise de surproduction, une restructuration s’est
avérée inévitable : l’abandon du taux de change fixe, suivi de la décision unilatérale président
de la Federal Reserve Paul Volker d’augmenter les taux d’intérêt aux Etats-Unis. Ainsi, la
possibilité de financement à un coût relativement faible s’est transformée en une dette
alourdie mettant fin à l’industrialisation planifiée introvertie dans la plupart des pays
périphériques dont la Turquie (N. Balkan, 1994, F. Başkaya, 2004, E. Toussaint, 2002). Une
bonne nouvelle aux milieux financiers ayant la nostalgie du capitalisme antérieur à la Seconde
Guerre Mondiale (Duménil et Lévy, 2003).
Avec le choc Volker de 1979 la hausse des taux d’intérêt à l’échelle mondiale a déclenché les
processus de production et de consommation tirés par la dette, ce qui provoqué le