Introduction
« Oui, c’est elle, celle des Trois Mousquetaires et des deux cardinaux : Richelieu qui
la persécuta, Mazarin qui l’aima ; c’est elle qui a grisé le plus grisant de tous : Buckingham.
C’est elle enfin, c’est elle surtout, qui a donné le jour à Louis XIV, et Louis XIV, avec une
autre mère, n’aurait peut-être pas régné
». Telle est l’image d’Anne d’Autriche, que nous
renvoient les biographes du XXe siècle. De même que Mazarin fut réhabilité par les historiens
dés le début du XIXe siècle
, on constate une tendance générale des biographes à dresser un
portrait très flatteur de celle-ci, depuis près d’un siècle et demi.
Si les romans d’Alexandre Dumas ont transmis dans l’imaginaire collectif la légende
d’une reine admirable tant religieusement, qu’intellectuellement et physiquement, force est de
constater que celle-ci fut extrêmement vilipendée par ses contemporains. La vision idyllique
d’une reine de France incomprise et innocente, devenant l’objet de persécutions injustifiées
sous Richelieu puis durant la Fronde, est bien évidemment erronée. Quel véritable visage se
cachait derrière le masque de l’attachante cabaleuse ou derrière celui de l’intransigeante
régente faisant face aux frondeurs ? En étudiant les sources des différents biographes, il
apparaît que les documents utilisés contenaient très peu ou pas du tout de mazarinades, les
mémoires et correspondances demeurant les vecteurs principaux d’informations. Hubert
Carrier constate la négligence des mazarinades par la science moderne, du fait de leur
formidable quantité et de leur décourageante difficulté. Aux yeux des historiens et des
littéraires, elles sont longtemps passées pour des documents douteux ou des textes mineurs
.
Ainsi, bien que les mazarinades renvoient une image caricaturée de la réalité, le regain
d’intérêt observé ces dernières années pour celles-ci et le débat qu’elles alimentent quant à la
représentation d’une opinion publique, font regretter leur sous-représentation dans l’étude des
protagonistes qu’elles décrivent.
Le terme Mazarinade remonte aux origines de la Fronde, néanmoins son utilisation est
antérieur au libelle de Scarron. En effet, le mot est formé sur le modèle de trivelinade et
représente un tour de farce ou une facétie de bateleur. Scarron lui apporte une nouvelle
dimension, avec son pamphlet
, le mot acquiert un sens plus général, celui de libelle satirique
contre Mazarin. Cependant, le terme n’apparaît que très tard dans les dictionnaires : le Littré
Claude Dulong, Anne d’Autriche, mère de Louis XIV, Paris, 1985, p.3.
Hubert Méthivier, La Fronde, Paris, 1984.
Hubert Carrier, La presse de la Fronde : Mazarinades, t.I, Paris, 1989, page 22.
M.B., M 14 878, Mazarinade, Paris, 1651. L’abréviation M.B. signifie Bibliothèque Mazarine et B.N.F signifie
Bibliothèque Nationale de France.