La fonction sécurité dans l’entreprise 1 La fonction sécurité Comme toute fonction organique de l'entreprise, la fonction sécurité a deux aspects : - un aspect opérationnel qui est l'affaire de la hiérarchie, seule responsable, au regard de la loi et de la jurisprudence, de l'application de la réglementation en ce domaine ; - un aspect fonctionnel, affaire d'une personne spécialisée ou, suivant la taille de l'entreprise, d'un service spécialisé, le service SCT (sécurité et conditions de travail) ou SST (Sécurité et protection de la santé au travail) plus couramment appelé service Sécurité. 2 Absence de statut juridique Si les textes relatifs au CHS (D. 1er août 1947) ; (D. 1er avr. 1974) ; (D. 20 mars 1979) puis au CHSCT (D. no 83-844, 23 sept. 1983) ont mentionné le fonctionnel de la sécurité, aucun texte n'a précisé son rôle, son profil, ses moyens, en bref son statut. 3 Réglementation européenne La directive cadre 89/391/CEE du Conseil du 12 juin 1989 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs a retenu la création de services de sécurité, qu'elle appelle services de protection et de prévention. ( Directive transposée par la loi du 31/12/1991 ) 4 L'APPELLATION DU FONCTIONNEL ET DE LA SECURITE ET DES CONDITIONS DE TRAVAIL Les décrets des 1er août 1947, 1er avril 1973 et 20 mars 1979 relatifs au CHS désignaient le fonctionnel de la sécurité en ces termes « le chef du service de sécurité du travail ou l'agent chargé de la sécurité du travail. Tenant compte de l'évolution qui eut lieu au cours de la dernière décennie, le décret no 83-844 du 23 septembre 1983 relatif au CHSCT emploie les termes « chef du service de sécurité et des conditions de travail ou agent chargé de la sécurité et des conditions de travail » (C. trav. , art. R. 236-6. C'est lorsque la taille de l'entreprise ne justifie pas un service SCT et qu'un seul agent en fait fonction qu'il convient d'utiliser, pour désigner celui-ci, l'expression « agent chargé de la sécurité et des conditions de travail. Remarque : bien d'autres termes sont utilisés en pratique : - « ingénieur de sécurité «, - « Technicien de sécurité » - « animateur de sécurité » - « responsable de la sécurité » est particulièrement mal venu. Il peut démobiliser la hiérarchie et laisser croire que l'agent ainsi désigné est le délégué de l'employeur dans l'autorité (ce qui n'est jamais le cas. 5 RATTACHEMENT HIERARCHIQUE DU FONCTIONNEL DE LA SECURITE ET DES CONDITIONS DE TRAVAIL Tous ceux qui se sont penchés sur ce problème ont émis des points de vue concordants (professeur Salmont en 1945 ; J. Pluyette en 1966 ; le « Patronat français » en 1966 ; J.-M. Cavé en 1971 ; J. Boisselier et G. Boué en 1977. Comme c'est le cas aux USA, le chef du service de sécurité et des conditions de travail doit être rattaché ou dépendre directement de la direction de l'entreprise. Ce principe est d'ailleurs repris dans les principes de prévention de la CEE ( Directive du 12 juin 1989 ; Loi du 31 décembre 1991) 6 Définition des missions du service sécurité et conditions de travail La seule définition française de la fonction sécurité qui soit complète est l'œuvre de l'AFTIM (Association française des techniciens, ingénieurs de sécurité et médecins du travail. Elle ne fut critiquée lors de son adoption par personne et le conseil de l'Europe a adopté ses thèses. Dans cette définition, l'AFTIM a regroupé les missions du service sécurité et conditions de travail sous quatre rubriques : mission de recherche, mission opérationnelle, mission fonctionnelle et mission de liaison. 7 missions de recherche La mission de recherche a essentiellement pour but de réunir les éléments d'information indispensables à l'exécution des autres missions. Il s'agit notamment de : - l’analyse des accidents de l'entreprise ; -l'analyse des conditions de travail ; -l'élaboration de statistiques techniques, tant dans le cadre de l'entreprise que dans le cadre de la branche professionnelle ; -l'établissement d'un programme de prévention et d'amélioration des conditions de travail ; -la consultation et la tenue à jour d'une documentation technique et réglementaire. Cette mission est particulièrement importante car elle constitue la base de l'action du service sécurité et conditions de travail. 8 Mission opérationnelle Elle s'exerce dans le cadre fixé par la direction et concerne en général les domaines suivants : - vérifications et contrôles pouvant dans certains cas être des missions d'inspection ; - animation et éventuellement organisation des campagnes de sécurité, conférences, colloques, etc. ; - participation à l'enseignement de la sécurité dans la formation continue et l'accueil des nouveaux embauchés ; - interventions directes dans des domaines précis : la lutte contre le feu, par exemple. 9 MISSION FONCTIONNELLE OU DE CONSEIL La frontière entre les missions opérationnelle et fonctionnelle est difficile à situer et différente selon l'entreprise. C'est notamment le cas lorsque le « chef du service de la sécurité et des conditions de travail cumule ces fonctions avec des responsabilités de production ou d'entretien. Dans l'exécution de sa mission fonctionnelle, le « chef du service de la sécurité et des conditions de travail a son rôle le plus large, mais aussi le plus variable, en fonction de l'entreprise et de son activité. Au sein d'une entreprise déterminée, les limites et le cadre de cette mission doivent être fixés avec exactitude. Elle comportera : - la collaboration à l'élaboration des projets de réalisation nouvelle, d'extension ou de modification, - la participation à l'analyse des processus de fabrication ou d'entretien : - afin d'établir des consignes de sécurité (conception traditionnelle), - ou mieux, d'intégrer dans le cours des travaux, exactement au moment utile et suivant un ordre rigoureux, les gestes et les moyens de protection (conception ergonomique), - la proposition à la direction des consignes de sécurité concernant certains dangers spécifiques tels que l'incendie. 10 MISSION DE LIAISON Conséquence logique de l'accomplissement des autres missions, elle concerne : - l'ensemble des liaisons permanentes ou épisodiques avec les divers services de l'entreprise, les organismes extérieurs de prévention, de secours, de contrôle, - en tant que membre du Comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail, la liaison permanente entre les représentants du personnel et la direction de l'entreprise. 11 PRINCIPE DE NON-INTERVENTION Le « chef du service de la sécurité et des conditions de travail » ne doit jamais perdre de vue son rôle fonctionnel qui le conduit à agir pour le compte de la direction ou de la hiérarchie, ce qui exclut toute intervention directe auprès du personnel d'exécution sauf en cas de danger immédiat. 12 Collaboration institutionnelle avec les services médicaux du travail L'article 13 du décret no 88-1198 du 28 décembre 1988 relatif à l'organisation et au fonctionnement des services médicaux du travail prévoit qu'à titre expérimental, « des conventions peuvent prévoir le recours, sous le contrôle du médecin du travail, à des personnes ou des organismes, publics ou privés, spécialement qualifiés en matière de prévention des risques professionnels, de sécurité et de conditions de travail. Responsabilité du fonctionnel de la sécurité et des conditions de travail . 13 NON-RESPONSABILITE DU FAIT DES FONCTIONS Le chef de service de Sécurité et des conditions de travail (ou l'agent chargé de la sécurité et des conditions de travail) est un fonctionnel qui ne peut en cette qualité recevoir délégation d'autorité en matière de sécurité du travail. (Mais un agent de sécurité à temps partiel peut assumer une seconde fonction compatible avec une délégation de pouvoir.) En effet, il ne saurait disposer du pouvoir de discipline et des moyens, car il y aurait alors « court-circuit » de la hiérarchie et l'organisation de l'entreprise s'écroulerait ipso facto. Il ne peut donc être condamné du simple fait de ses fonctions. 14 RESPONSABILITE POUR FAUTE PERSONNELLE La présence d'un chef de service de sécurité ou d'un « ingénieur de sécurité » n'entraîne aucun transfert de responsabilité au sein de l'entreprise. C'est la hiérarchie qui demeure seule et entièrement responsable. Ce qui n'empêche que, conformément aux principes de base du droit pénal français, et notamment à celui de la personnalité de la peine, le chef du service de sécurité et des conditions de travail est pleinement responsable des fautes professionnelles qu'il peut personnellement commettre.