Année 2013 / 2014 Français 1ère ESL OE3-S4Le théâtre- texte et représentation Fiche signalétique d'Antigone : La pièce est composée sous sa forme quasi-définitive en 1942, et reçoit à ce moment l'aval de la censure hitlérienne. Elle n'est jouée la première fois que deux ans après, le 4 février 1944, au théâtre de l'Atelier à Paris, sans doute à cause de difficultés financières. Après une interruption des représentations en août 1944, due aux combats pour la libération de Paris, elles reprennent normalement. Antigone sera ensuite à nouveau représenté à Paris en 1947, 1949 et 1950 mais aussi dès mai 1944 à Bruxelles, en 1945 à Rome, et en 1949 à Londres. Le contexte historique : Antigone est une pièce des années noires, lorsque la France connaît la défaite face aux armées nazies et elle tombe sous l'Occupation. Nous étudierons d'une part l'Occupation : la situation générale et ensuite la radicalisation du régime de Vichy et d'autre part les origines historiques de la pièce. En 1942, Jean Anouilh réside à Paris, qui est occupée par les Allemands depuis la débâcle de 1940 et l'Armistice. La République a été abolie et remplacée par l'État français, sous la direction du maréchal Pétain. La France est alors découpée en plusieurs régions : une zone libre au Sud, sous l'administration du régime de Vichy, une zone occupée au Nord, sous la coupe des Allemands, une zone d'administration allemande directe pour les départements du Nord et du Pas-de-Calais, rattachés à la Belgique, une zone annexée au Reich : l'Alsace-Lorraine et enfin, une zone d'occupation italienne dans le Sud-Est (Savoie). Refusant l'Armistice et le gouvernement de Vichy, le général Charles de Gaulle lance un appel aux Français le 18 juin 1940 depuis Londres et il regroupe ainsi autour de lui les Forces françaises libres (F.F.L.). C'est le début de la Résistance. Le 23 septembre 1941, un "Comité national français" a été constitué, c'est une première étape vers un gouvernement en exil. En métropole, la Résistance s'organise, tout d'abord de façon indépendante et sporadique (qui se produit occasionnellement), puis en se rapprochant de de Gaulle sous la forme de réseaux, comme Combat. En 1942, le mouvement a déjà pris une certaine ampleur qui se manifeste par des actes de sabotage et des attentats contre des Allemands et des collaborateurs ; l'armée d'occupation réplique par des représailles massives et sanglantes. L'année 1942, marque un tournant décisif dans cette période. Les rapports de force se sont modifiés, car les États-Unis viennent de déclarer la guerre à l'Allemagne. En France, le 19 avril 1942, Pierre Laval revient au pouvoir après une éclipse d'un an et demi et accentue la collaboration avec Hitler. Dans un discours radiodiffusé le 22 juin 1942, il déclare fermement : "Je souhaite la victoire de l'Allemagne" et il crée le Service du travail obligatoire (S.T.O.) pour l'aider en envoyant des ouvriers dans leurs usines de guerre. La rafle du Vél. d'Hiv. le 16 juillet 1942 envoie des milliers de juifs, via Drancy, dans les camps de concentration de d'extermination. Ce n'est qu'en 1944 que nazis et collaborateurs subissent de véritables revers. Le Comité national de la Résistance (C.N.R.), institué le 15 mai 1943, fédère les différentes branches de la lutte antinazie et prépare l'après-guerre. Le 6 juin 1944, le débarquement des Alliés en Normandie déclenche l'insurrection des maquis en France et organise la reconquête du territoire français. Paris se soulève avant le moment prévu et se libère seul fin août 1944. Avant même que la guerre ne soit terminée, l'épuration se met en place : de nombreux sympathisants du régime de Vichy sont jetés en prison et condamnés, certains sont exécutés, parfois sans procès ; les milieux culturels (journalistes, écrivains et acteurs) ne sont pas épargnés. C'est dans ce climat troublé que de Gaulle regagne la France et en assure dans un premier temps le gouvernement. C'est à un acte de résistance qu'Anouilh doit l'idée de travailler sur le personnage d'Antigone. En août 1942, un jeune résistant, Paul Collette, tire sur un groupe de dirigeants collaborationnistes au cours d'un meeting de la Légion des volontaires français (L.V.F.) à Versailles, il blesse Pierre Laval et Marcel Déat. Le jeune homme n'appartient à aucun réseau de résistance, à aucun mouvement politique ; son geste est isolé, son efficacité douteuse. La gratuité de son action, son caractère à la fois héroïque et vain frappent Anouilh, pour qui un tel geste possède en lui l'essence même du tragique. Nourri de culture classique, il songe alors à une pièce de Sophocle, qui pour un esprit moderne évoque la résistance d'un individu face à l'État. Il la traduit, la retravaille et en donne une version toute personnelle. La nouvelle Antigone est donc issue d'une union anachronique, celle d'un texte vieux de 2400 ans et d'un événement contemporain. Dissertations Antigone est l'un des personnages les plus célèbres du théâtre antique : déjà, en 442 av. J.-C., dans la pièce de Sophocle, elle incarne l'obéissance à des lois divines et morales, qui transcendent la justice humaine. Antigone a ainsi inspiré de nombreux auteurs dramatiques. En 1944, sous l'occupation allemande, Jean Anouilh fait d'elle une figure de la résistance à l'oppression. SUJET 1: COMMENT ANOUILH PARVIENT-IL A RENOUVELER LE THEME ? QUELS SONT LES DIFFERENTS PROCEDES DRAMATIQUES MIS EN ŒUVRE ? I. Le sujet • Le sujet de la pièce et son déroulement sont fidèles à la tragédie de Sophocle. La scène se passe à Thèbes. Les deux fils d'Œdipe, Étéocle et Polynice, se sont entre-tués sous les murs de la ville. Le roi Créon a ordonné de n'enterrer qu'Étéocle, laissant sans sépulture celui qu'il considère comme traître, Polynice (ce qui, selon les Anciens, condamne son âme à errer éternellement). Quiconque enfreindra la loi sera puni de mort. La sœur d'Étéocle et de Polynice, Antigone, ose braver l'interdit et défier Créon : elle accomplit à deux reprises les rites funéraires. Découverte, elle est condamnée à mort, malgré l'intervention de son fiancé, Hémon, fils de Créon. Elle se pend dans la caverne où elle est emmurée, et Hémon se suicide sur son corps. II. Les thèmes 1. Le duel entre morale et politique Le thème principal de la pièce est l'opposition entre les lois de la société, justifiées par l'ordre et le pouvoir, et une loi non écrite, celle des obligations dues aux morts et à la famille. • L'interdiction formulée par Créon n'est pas despotique mais politique. Étéocle et Polynice étaient« deux larrons en foire qui se trompaient l'un l'autre en nous trompant et qui se sont égorgés comme deux petits voyous qu'ils étaient, pour un règlement de comptes ». Pour que l'ordre règne dans Thèbes, après cette révolution manquée, il faut rassembler les esprits. Créon s'en explique ainsi : « il s'est trouvé que j'ai eu besoin de faire un héros de l'un d'eux […]. J'ai fait ramasser un des corps, le moins abîmé des deux, pour mes funérailles nationales, et j'ai donné l'ordre de laisser pourrir l'autre où il était. » Ainsi, le maintien de l'ordre implique le calcul, le mensonge et le cynisme. • La règle à laquelle obéit Antigone, cependant, est supérieure au décret pris par le roi. C'est une obligation intérieure, indépendante des circonstances. Elle affirme la liberté de la conscience : « Je suis là pour vous dire non et pour mourir. » 2. Le pouvoir • Anouilh n'exalte pas la fonction politique. Selon lui, le pouvoir ne relève pas de l'ambition, c'est un métier : « Ce n'est même pas une aventure, c'est un métier pour tous les jours et pas toujours drôle, comme tous les métiers. Mais puisque je suis là pour le faire, je vais le faire », dit Créon à Antigone. • Il y faut cependant un certain courage : « Pour dire oui, il faut suer et retrousser ses manches, empoigner la vie à pleines mains et s'en mettre jusqu'au coude ».Pragmatique, Créon se contente de joies modestes : « la vie c'est un livre qu'on aime, c'est un enfant qui joue à vos pieds, un outil qu'on tient bien dans sa main, un banc pour se reposer le soir devant sa maison ». 3. L'intransigeance de la pureté • À cette figure d'homme âgé, usé par le pouvoir, s'oppose celle d'une adolescente intransigeante, quirefuse les compromis et les « bonheurs de cuisinier » auxquels Créon a consenti en acceptant la couronne : « Quelles pauvretés faudra t-il qu'elle fasse elle aussi, jour après jour, pour arracher avec ses dents son petit lambeau de bonheur ? » Antigone est prête à mourir pour ne pas sacrifier son idéal à la réalité : « Je veux être sûre de tout aujourd'hui et que cela soit aussi beau que quand j'étais petite – ou mourir. » 4. Le conflit des générations • Créon est un adulte lucide, qui assume ses responsabilités, et qui, en consentant par nécessité à devenir roi, aliène sa liberté aux exigences du pouvoir. Antigone et Hémon sont des adolescents. Antigone refuse le temps qui use les sentiments et conduit à accepter des compromis : « Moi, je veux tout, tout de suite, – et que ce soit entier – ou alors je refuse ! » De la même façon, Hémon refuse la leçon de son père : « Chacun de nous a un jour, plus ou moins triste, plus ou moins lointain, où il doit accepter d'être un homme. » Antigone et Hémon tout deux refusent finalement la vie. Le petit page qui accompagne Créon représente la génération suivante, dans son innocence. Créon tire pour lui la leçon : « Il faudrait ne jamais devenir grand. » III. Les personnages 1. Antigone • Antigone n'est pas belle (« la maigre jeune fille noiraude et renfermée que personne ne prenait au sérieux dans la famille ») mais représente l'intransigeance et la pureté. Elle risque la mort en transgressant la loi pour son frère, qui pourtant ne l'aimait pas. Quand Créon lui révèle les coulisses politiques du drame, elle choisit la mort, non plus pour honorer son frère, mais pour ne pas pactiser avec la médiocrité : « Vous me dégoûtez tous avec votre bonheur ! ». Elle affronte avec violence le roi, son oncle (le frère de sa mère Jocaste), et revendique sa liberté : « Moi, je ne suis pas obligée de faire ce que je ne voudrais pas ! » Elle a l'orgueil d'Œdipe. • En même temps, elle reste enfant : elle est affectueuse et tendre (envers sa sœur Ismène et sa nourrice). Au moment de mourir, elle est prise par la peur : « je ne sais plus pourquoi je meurs ». 2. Créon • « C'est le roi. Il a des rides, il est fatigué. Il joue au jeu difficile de conduire les hommes. » Il assume le pouvoir, après la mort d'Œdipe et de ses deux fils, avec courage, et sans illusions. Il tente de sauver Antigone : pour cela, il lui révèle les coulisses sordides du drame. Il comprend cependant que ses efforts sont vains ; les exigences du pouvoir l'emportant même sur le désespoir de son fils : « Je suis le maître avant la loi. Plus après. ». Il finit complètement seul, son fils puis sa femme, Eurydice, s'étant suicidés. Il poursuit néanmoins son ouvrage : « Ils disent que c'est une sale besogne, mais si on ne la fait pas, qui la fera ? » 3. Les autres personnages • Ismène « est bien plus belle qu'Antigone » : elle est « éblouissante ». Elle se dit elle-même « plus pondérée » qu'Antigone. Elle réfléchit. Quelle que soit son affection pour son frère, elle ne se sent pas le courage de braver l'interdiction. Elle accepte sa faiblesse de femme et s'incline devant le pouvoir de Créon. • Hémon a préféré Antigone à la belle Ismène, vers qui tout le portait. Il l'aime et veut la sauver, en intercédant auprès de son père, et sans connaître les vraies raisons du choix d'Antigone. Il partage son sort par désespoir d'amour : « Crois-tu que je pourrai vivre, moi, sans elle ? » • Antigone prend congé de la nourrice comme elle se sépare d'Hémon et d'Ismène, avant d'affronter Créon. En disant adieu à la nourrice, Antigone perd sa dernière protection et le dernier lien avec son enfance : « Je tiens ta douce main rugueuse qui sauve de tout… Peut-être qu'elle va me sauver encore. » • Les gardes sont étrangers à l'univers de la tragédie : « Eux, tout ça, cela leur est égal ; c'est pas leurs oignons. Ils continuent à jouer aux cartes. » Ils représentent la force aveugle et la bêtise. IV. Les procédés dramatiques 1. La structure de la pièce • La pièce se déroule de façon continue, sans interruption : elle n'est pas divisée en actes, ce qui maintient la tension dramatique. Elle est encadrée par deux interventions du chœur (joué par un seul personnage), qui, dans le prologue, présente les personnages et annonce le drame, puis qui commente le dénouement. Le chœur tente également de sauver Antigone et annonce à Créon la mort de sa femme, Eurydice. Il joue donc un rôle d'intermédiaire entre les spectateurs et les personnages. Il renseigne et commente. 2. La transposition • Jean Anouilh a conservé tous les éléments de la tragédie grecque : drame, lieux, personnages, mais l'a transposée à notre époque. Il a ainsi modernisé les fonctions et le mode de vie : les gardes ont des grades et des statuts comparables à ceux des soldats d'aujourd'hui ; la reine tricote pour les pauvres ; les princes ont des voitures et une vie mondaine ; la nourrice prépare du café et des tartines grillées, etc. • Anouilh mêle le tragique et le familier. Ce contraste est particulièrement sensible dans les conversations d'Antigone et de sa nourrice : « Allons, ma vieille bonne pomme rouge. Tu sais quand je te frottais pour que tu brilles ? » • Dans la tragédie antique, le destin, supérieur aux dieux eux-mêmes, frappe les hommes. Chez Sophocle, Créon, qui s'obstine dans sa décision, est coupable de démesure et se retrouve seul. Jean Anouilh supprime le caractère sacré de la tragédie. Antigone incarne la jeunesse et son intransigeance et montre que l'homme reste libre de se révolter contre l'injustice, de lui résister. V. Qui est Jean Anouilh ? • Jean Anouilh est né à Bordeaux en 1910, d'un père tailleur et d'une mère pianiste. Ses parents s'installent à Paris où il fait ses études. Son goût pour le théâtre s'éveille très tôt. Il fait deux rencontres décisives : celle de Jean Giraudoux et celle de Jean Cocteau, qui lui font découvrir le théâtre poétique. • Il classe lui-même ses œuvres selon leur tonalité, en « pièces roses », « pièces noires » (Antigone),« pièces brillantes, grinçantes, costumées, baroques, secrètes », etc. SUJET 2: LE RÔLE DE L’OBJET AU THEÂTRE Objet essentiel pour le comédien de l’Antiquité, le masque permettait au spectateur d’identifier le personnage joué et de voir de quel registre il s’agissait (tragique ou comique). En revanche, certains accessoires du décor, dans les pièces classiques par exemple, ne servent apparemment qu’à remplir l’espace scénique afin de créer l’illusion théâtrale. Au théâtre, l’objet est-il accessoire, utile ou indispensable ? A-t-il trait au décor, au personnage ou à l’action ? [problématique] En somme, quel est le rôle de l’objet au théâtre ? [plan] L’objet au théâtre apporte d’abord des indications sur le cadre ou les personnages. C’est aussi un élément en lien avec le personnage qui peut avoir un rôle par rapport à lui. Il se peut enfin qu’il ait un rôle déterminant dans l’action. Sur scène, l’objet peut être considéré comme un panneau indicateur qui délivre une information au spectateur. Les objets ont d’abord pour mission de représenter, c’est-à-dire de rendre concrète et visible la fiction qui est vécue par les personnages. Ils permettent au spectateur d’entrer dans l’illusion théâtrale en recréant un décor vraisemblable en en conférant aux personnages une activité. Telle est la fonction des objets qui occupent Roxane dans la dernière scène de Cyrano de Bergerac : « Elle revient à son métier, le replie, range ses laines »(v.8). Cela crée pour le spectateur l’illusion de la réalité. Les objets permettent également de « dire » au spectateur où se déroule l’action sans pour autant prendre le temps de la description. On reconnaît tel objet caractéristique d’une époque ou d’un pays. Les romantiques ont beaucoup développé cet aspect informatif avec l’idée de « couleur locale » : il s’agissait de décrire très précisément le décor, dans la didascalie initiale notamment, pour que sa représentation soit proche de la réalité historique évoquée. En effet, dans Ruy Blas de Victor Hugo, le dramaturge commence la pièce en décrivant très précisément le décor et les costumes, ce qui permet de situer la scène dans l’Espagne du XVIIème siècle. Un regard avisé suffit pour situer la scène. Porteur d’indications temporelles ou spatiales, l’objet peut aussi donner une indication sur l’identité des personnages : leur âge ou leur statut social peut être signifié par un objet. Une couronne par exemple suffit à identifier un roi, un torchon disposé sur le bras un serveur, une canne un vieillard. L’objet peut même servir, comme dans l’Antiquité, à définir l’identité du personnage. La pelle d'Antigone rappelle que c'est une enfant. Accessoire utile, mais pas toujours indispensable, l’objet permet au lecteur/spectateur de situer l’action et d’identifier les personnages. Mais lorsqu’il est utilisé par un personnage, son importance grandit et sa signification s’enrichit. L’objet porté par un personnage peut être considéré comme un prolongement de son corps et lui est conféré alors une valeur symbolique. Phèdre ne parvient pas à convaincre Hippolyte de la tuer, c’est pourquoi elle lui demande son épée, avec le projet de se donner la mort avec. Dans ce cas, elle considère l’objet comme un attribut du jeune homme qui le symbolise et dont elle se saisit, faute de pouvoir séduire son possesseur. L’épée de Dom Diègue dans Le Cid de Corneille a également une valeur symbolique : elle représente sa gloire passée et sa défaite présente : « et toi, de mes exploits glorieux instrument,/Mais d’un corps tout de glace inutile ornement ». Harpagon, l’Avare de Molière ne parveint pas à exister sans sa cassette d’argent. Plus qu’un indicateur, l’objet peut être alors un symbole dont le sens est à décrypter. la pelle d'Antigone symbolise sa révolte. elle est derisoire, c'est juste un jouet, mais c'est l'intention d'Anouilh de montrer à travers cet objet decalé et inoffensif l'aspect derisoire de la révolte et la disproportion des forces entre résistants et collaborateurs. L’objet peut aussi provoquer diverses réactions chez les personnages et devenir le témoin de l’expression de ses sentiments. C’est alors presque un personnage, tel le confident dans les tragédies, qui permet au spectateur de découvrir les émotions des personnages.( le crane dans Hamlet). Il arrive enfin que l’objet se hisse jusqu’au rang du personnage et acquière la même importance sur la scène en tant qu’actant. Dans Dom Juan, la statue du commandeur n’est-elle pas un objet qui parle et qui agit comme un autre personnage ? Ainsi l’objet peut-il représenter symboliquement le personnage, permettre de découvrir ses sentiments ou devenir lui-même un personnage qui agit dans l’intrigue. Mais il n’a pas forcément besoin d’être comme un personnage pour avoir un rôle fondamental dans l’intrigue : certains objets sont indispensables au bon déroulement de la pièce alors qu’ils ne prennent pas sur scène la place d’un personnage. Il y a d’abord des objets sans lesquels la scène ne peut être représentée sous peine de ne pas être crédible. Comment jouer la scène dans laquelle Scapin se joue de Géronte sans le sac et le bâton (Molière, Les Fourberies de Scapin) ? Et comment jouer le dialogue entre Elmire et Tartuffe sans la table qui sert à cacher le mari (Molière, Tartuffe) ? la cassette dans L'Avare? Dans ces deux cas l’objet permet à un quiproquo de se dérouler sur scène puisque le spectateur en sait plus que l’un des personnages qui se fait duper par un autre. L’objet est donc indispensable tant pour exécuter l’action que pour assurer le comique de situation. L’objet peut enfin conditionner le dénouement de l’action en apportant les éléments de résolution. Dans le mariage de figaro la lettre sur laquelle s’appuie le quiproquo va être utilisée contre le comte et permettre le dénouement. Le rôle de l’objet au théâtre est donc variable selon qu’il sert le décor, les personnages ou l’action. En ce qui concerne la portée de sa signification, il sera utile de distinguer les objets qui sont présents dans le texte de théâtre et ceux qui sont ajoutés par le metteur en scène. Alors que l’on voit peu d’objets dans le texte de théâtre classique, le théâtre contemporain en abonde dans certains textes. Se développe même le « théâtre d’objets » où l’objet a remplacé le personnage, avec des marionnettes ou des objets plus quotidiens. SUJET 3: VOUS PARAIT-IL DECONSEILLE OU AU CONTRAIRE SOUHAITABLE QU’AUTEUR ET METTEUR EN SCENE SOIENT UNE SEULE ET MEME PERSONNE ? VOUS APPUIEREZ VOTRE REPONSE SUR LES PIECES QUE VOUS CONNAISSEZ ET VOTRE EXPERIENCE DE SPECTATEUR. Quelques questions que l’on peut se poser pour réfléchir au sujet : Qui est le metteur en scène ? Est-il un auteur, voire l’auteur de la pièce qui est montée ? Et s’il n’est pas l’auteur, quel est son rôle vis-à-vis de ce dernier ? Comment se fait-il que le théâtre -qui s’est si longtemps passé de lui- le considère aujourd’hui comme l’élément central ? Eléments pour une introduction : En 1946, Jean Vilar écrit : « Le premier rôle, de nos jours, tout au long de la vie d'une pièce, n'appartient plus à nos Mounet-Sully et à nos Sarah Bernhardt ; nous constatons qu'il est la possession plus ou moins avouée de nos metteurs en scène. » Or, le mot « metteur en scène » ne se trouve attesté dans le dictionnaire que depuis 1873. C’est dire si cette fonction se trouve étroitement liée au théâtre moderne. Jusqu’alors, ne comptaient que les acteurs ou, au mieux les auteurs. Mais depuis plus d’un siècle, auteur et metteur en scène se sont trouvés sur un pied d’égalité, voire en concurrence. Tout fonctionne comme si une pièce ne pouvait plus être le fait d’un auteur seul, mais devait nécessairement se référer à un metteur en scène. I) Dans la plupart des cas, il vaut mieux que les deux rôles (auteur et metteur en scène) soient distincts 1. Les distinguer est une nécessité : sinon comment jouer les auteurs morts ? Ex : faudrait-il renoncer à Molière et à Shakespeare ? 2. Ce sont deux activités qui demandent des compétences différentes et un auteur n’est pas forcément compétent en tant que metteur en scène. De plus, le théâtre français a permis d’observer des associations très performantes 3. Un auteur risquerait de vouloir imposer SA vision dans un spectacle qui est une œuvre collective. Mieux vaut donc éviter de mêler l’auteur à la mise en scène. Ex : Difficultés relationnelles de Jean Genet ( auteur de Les Bonnes) avec ses metteurs en scène. Genet demande l’annulation des représentations pour « assassinat de la pièce ». II) Cependant, il peut arriver que cette association soit favorable 1. L’histoire du théâtre montre que cela n’a pas toujours été un problème. Ex : Molière, Shakespeare en sont des exemples de taille. Auteur et metteur en scène n’ont pas toujours existé dans le théâtre comme c’est le cas depuis un siècle. L’auteur jusqu’à la fin du XIXe assumait les deux tâches sans que cela pose de problème 2. Ce peut être pour l’auteur l’occasion d’explorer son texte et de lui donner une dimension qu’il n’avait pas prévue. Lui permettre d’avancer dans son cheminement intérieur. 3. L’auteur pour peu qu’il en ait la compétence saura adapter son texte aux exigences de la mise en scène et ne « trahira » pas ses propres intentions. Deux personnes distinctes risquent au contraire de ne pas se comprendre. Et le texte risque d’être trahi par un metteur en scène qui n’en aura rien compris. Ex : Dans Notes et contre-notes (Folio, p.257), Ionesco donne des indications sur les représentations de sa pièce Les Chaises avec de multiples détails matériels, et rejette les velléités d’indépendance de ses metteurs en scènes. « Texte pour le programme du Théâtre du nouveau Lancry » : [Il s’adresse à un metteur en scène] « Vous avez voulu tout naturellement tirer la pièce à vous alors que vous deviez vous y abandonner ; le metteur en scène doit se laisser faire. Il ne doit pas vouloir quelque chose de la pièce, il doit s’annuler, il doit être un parfait réceptacle. Un metteur en scène vaniteux, voulant imposer « sa personnalité », n’a pas la vocation d’un metteur en scène. Tandis que le métier d’auteur, au contraire, demande que celui-ci soit vaniteux, imperméable aux autres, avec un ego hypertrophié … ». III) Au-delà reste une évidence : un texte de théâtre n’existe que s’il est mis en scène. Le théâtre est un art vivant et un art du vivant. -Il n’est pas certain que l’auteur soit le mieux placé pour apprécier ce qui rendra justice à son œuvre. Son désir d’être fidèle à lui-même peut se révéler un piège. Une pièce qui est jouée est une œuvre à part entière. Vouloir qu’elle respecte à tout prix les souhaits de l’auteur peut être une totale absurdité. L’auteur a pu imaginer une mise en scène mais celle-ci peut tout à fait n’être pas une bonne idée et seule la confrontation à la scène permet de s’en rendre compte. Par analogie, vouloir jouer un texte exactement comme l’a voulu un auteur, ce serait comme vouloir traduire un texte mot à mot. Le passage de l’écrit à la scène est aussi important que le passage d’une langue à l’autre. Ex1 : Ionesco pour Le roi se meurt avait de nombreuses idées de mise en scène mais Jacques Mauclair, créateur de la pièce, a dû les modifier lors de la création du spectacle parce que cela ne fonctionnait pas -C’est accorder une place excessive à celui qui n’est que l’un des créateurs. C’est dans le même temps mépriser tous ceux qui contribuent à enrichir le sens du texte. Il serait temps de se demander qui est l’auteur d’une pièce de théâtre (ou tout au moins s’il n’y en a qu’un seul). Ex : à la lecture, le texte de Reza est assez plat. Quel intérêt a-t-il sans le jeu des comédiens ? Une nouvelle mise en scène, un jeu d’acteurs inattendu redonne parfois vie à une pièce que l’on trouvait vieillie. SUJET 4: UN TEXTE DE THEATRE EST-IL SUFFISANT EN LUI-MEME POUR MONTER UN SPECTACLE ? Problématique : Si le texte de théâtre est indispensable pour qu’un spectacle existe, peut-on dire pour autant que ce soit lui, le seul nécessaire ? Sinon, quels autres éléments entrent en jeu ? Jusque quel point ? Et n’y a-t-il pas un risque de « trahir un auteur » en montant un spectacle ? I) Le texte de théâtre comme base de travail pour monter un spectacle 1) Au centre : la parole d’un auteur : La double énonciation est le principe même du théâtre. Une parole écrite est prévue pour être dite. Le texte est fait pour être dit devant un public. Moyen pour un auteur de s’adresser directement à un auditoire Ex : Beaumarchais, Le Mariage V, 3 (monologue de Figaro) 2) Autour : les didascalies De plus en plus important dans le théâtre du XXe siècle (en général). Autant d’indications, d’indices sur ce que l’auteur a imaginé Ex : Beckett, En attendant Godot. Didascalies sont parfois plus nombreuses que la parole. 3) Le metteur en scène comme pierre angulaire : Assure le passage du texte à la scène. Indispensable. Peut être l’auteur ou non (Cf. en anglais : director) Ex1 : Elie Briceno auteur et metteur en scène de Camille Claudel a expliqué comment pour monter le spectacle, il a dû renoncer à tout ce qu’il avait imaginé en tant qu’auteur. Ex2 : pièces de Molière ont parfois peu de texte et qq didascalies. Jeu ~ improvisé (finit réplique par « etc. ») Molière auteur laissait faire Molière metteur en scène II) Un spectacle est une entreprise qui ne peut (ni ne doit) se suffire du texte 1) Au centre de l’entreprise collective : les acteurs Ils sont la partie visible du spectacle, les « instrumentistes ». Ont souvent les suffrages du public, (on retient le nom de l’acteur principal, pas du réalisateur -> ~ ni du metteur en scène) Ex : Quand on voit un film (populaire), une pièce (boulevard) seuls comptent les acteurs : on a vu Piège de cristal avec B. Willis mais rarement de John Mc Tierman… 2) La partie technique, celle « sans qui rien n’aurait été possible » Un ensemble des métiers techniques (éclairage, son, décors, costumes…) Ex : « tout est permis au théâtre […] Il est donc non seulement permis mais recommandé de faire jouer les accessoires, faire vivre les objets, animer les décors, concrétiser les symboles » Ionesco, Notes et contrenotes 3) Le metteur en scène comme un chef d’orchestre et un chef d’entreprise Donner une harmonie à l’ensemble tout en respectant certaines contraintes matérielles (techniques mais aussi financières) Ex : Cromwell de Hugo ne peut toujours pas être joué. III) L’ensemble de la création est dans la « re-création » 1) Le metteur en scène crée toujours en ayant en tête ce qui l’a précédé Le théâtre évolue au fil de l’histoire. On ne joue pas en 2004 comme en 1904. Les mises en scène précédentes, les textes de et sur le théâtre font évoluer notre regard, nos attentes. 2) Il faut surprendre le public, lui donner du neuf (…même avec du vieux) Public = destinataire de tout ce travail. Il est à la fois exigeant et frileux. Il faut le surprendre, le bousculer sans le faire fuir exercice périlleux qui met en balance des ambitions esthétiques ou intellectuelles et d’autres financières 3) Création, re-création, récréation Savoir jongler entre le connu et l’inconnu. Inventer ce qui n’avait jamais été fait. Etonner, enthousiasmer, choquer, brutaliser un public. Faire de lui un enfant qui entre pour la 1re fois dans une salle de spectacle. Le bouleverser, le faire rire ou pleurer etc. Ex : donner à entendre « être ou ne pas être » ou la tirade d'Alceste comme si c’était la première fois. Citations diverses : -Les acteurs « ont besoin d'un homme qui crée, d'un homme qui est bien presque toujours un acteur, mais qui est toujours en tout cas ce que nous nommons aujourd'hui, d'un terme assez impropre, un metteur en scène, et qu'il vaudrait mieux nommer un animateur » -« C'est bien une vie réelle qu'insuffle l'homme qui dirige ces théâtres, et non pas seulement aux acteurs qui l'entourent, mais encore aux objets inanimés, aux projecteurs, aux toiles peintes, aux mille accessoires du rêve. C'est ainsi qu'il rivalise avec ses autres émules, et qu'aux notes du musicien, aux mots de l'écrivain, il oppose, lui, des matériaux plus réels et plus difficiles, le corps de l'homme, la lumière fuyante, unis pour un miracle qui ne se renouvellera pas demain, pour le miracle d'un soir. Et sa personnalité devient parfois si forte qu'on oublie et la pièce et l'auteur, et que c'est lui dont on vient contempler le chef-d'oeuvre, comme on va contempler le tableau du peintre, et non son modèle» (Ibid.). QUESTION A SE POSER AUTOUR DE LA PIECE Antigone Antigone, dans la mythologie grecque, est la fille d'Œdipe, roi de Thèbes et de la reine Jocaste. Antigone accompagna son père en exil, mais retourna à Thèbes après la mort de celui-ci. Au cours de la guerre des Sept Chefs, les deux fils d'Œdipe, Étéocle et Polynice ses frères, se disputèrent le trône de Thèbes et s'entre-tuèrent. Pour asseoir son autorité, son oncle Créon (le frère de la reine Jocaste), qui hérita de la couronne et du pouvoir, fit donner à Étéocle une sépulture décente, mais ordonna que le corps de Polynice, qu'il considérait comme un traître, restât à l'endroit où il était tombé et il décréta l'interdiction de l'enterrer. Antigone, convaincue que la loi divine (qui réclamait que tout homme ait une sépulture pour pouvoir jouir de la vie éternelle) devait l'emporter sur les lois des hommes, brava le décret de Créon et enterra son frère. Arrêtée, elle tint tête au roi, qui voulait pourtant la sauver. Mais elle revendiqua son acte et réclama la sanction encourue : la peine de mort. Créon la condamna à être enfermée vivante dans le tombeau des Labdacides. Elle se pendit dans sa tombe et son amant éploré, Haemon, fils de Créon, se suicida. Antigone fut le sujet de pièces de théâtre du dramaturge grec Sophocle et de l'écrivain français du ème XX siècle Jean Anouilh. Chez SOPHOCLE, le mythe d'Antigone symbolisait l'affirmation du sacré contre les lois humaines et la raison d'Etat. Chez ANOUILH, ce mythe devient l'histoire d'une adolescente éprise d'absolu, qui, par un geste de rébellion, affirme sa personnalité et proclame son refus d'une existence qu'elle ne trouve pas à sa mesure et dont elle refuse les petitesses et les compromissions. Œdipe Œdipe, dans la mythologie grecque, c'est fils de Laïos et de Jocaste, roi et reine de Thèbes. Laïos, averti par un oracle qu'il serait tué par son propre fils, décida d'échapper à son destin : il attacha les deux pieds de son fils nouveau-né et le perdit dans la montagne. Mais l'enfant fut recueilli par un berger et confié à Polybos, roi de Corinthe; il l'appela Œdipe («celui qui a les pieds enflés») et l'éleva comme son propre fils. Œdipe ignorait le secret de sa naissance, aussi quand un oracle déclara qu'il tuerait son propre père, il quitta Corinthe. Au cours de son voyage, il rencontra Laïos et le tua, ayant pris le roi et ses serviteurs pour des voleurs. Ainsi, Œdipe accomplit la prophétie sans le vouloir. Œdipe arriva à Thèbes, qui était sous la coupe d'un monstre sanguinaire appelé le Sphinx. La créature bloquait les routes menant à la ville, tuant et dévorant les voyageurs qui ne pouvaient résoudre l'énigme qu'elle leur proposait. Œdipe, l'ayant résolue avec succès, le Sphinx se suicida. Œdipe s'attira les faveurs de la ville pour avoir libéré Thèbes du Sphinx. En remerciement, les Thébains le firent roi de Thèbes et lui donnèrent comme épouse la veuve de Laïos, Jocaste. Pendant de nombreuses années, le couple vécut heureux, ne sachant pas qu'ils étaient en réalité mère et fils. Jusqu'au jour où la peste ravagea le pays. L'oracle de Delphes proclama que le meurtre de Laïos devait être puni. Œdipe fit rechercher l'assassin qui, pensait-il, devait se trouver dans la ville, mais il ne tarda pas à découvrir que c'était lui qui avait tué son père sans le savoir, et qu'il avait de plus épousé sa propre mère. Jocaste se suicida de désespoir, et lorsqu'Œdipe se rendit compte qu'elle était morte et que leurs enfants, Étéocle, Polynice, Antigone et Ismène, étaient maudits, il se creva les yeux et renonça au trône. Il demeura à Thèbes pendant plusieurs années mais fut finalement banni de la cité. Exilé, il erra, accompagné de sa fille Antigone, et arriva près d'Athènes C'est là qu'Œdipe mourut, après que le dieu Apollon lui eut promis que l'endroit de sa mort resterait sacré et serait bénéfique à la ville d'Athènes. Antigone , de Jean Anouilh La pièce est proposée comme une œuvre intégrale. vous devez donc bien connaitre les autres extraits afin d'être prêts à affronter un hors-liste. 1 er extrait : le Prologue la situation d'énonciation 1°) Qui parle ? Que désignent les pronom "vous" et "nous" ? Quelle est la situation d'énonciation ? Estce l'usage au théâtre ? 2°) Quelles indications sont données par la didascalie initiale ? 3°) La scène d'exposition se présente-t-elle comme un dialogue ? Est-elle écrite en vers ou en prose ? 4°) Le Prologue est-il un personnage de l'histoire ? Quels sont les 2 niveaux de langage que vous pouvez repérer dans ce texte ? (citez des mots, des constructions de phrases…) les éléments d'exposition 6°) Faites la liste des personnages dans leur ordre d'apparition : quelle remarque faites-vous sur cet ordre ? Précisez leur lien de parenté ; faites leur arbre généalogique. 7°) Faites un tableau à 5 colonnes, et pour chaque personnage cité, relevez ce qui est dit sur son physique, ses qualités, ses défauts, ses activités, ses rapports avec les autres. 8°) Quelles sont les deux époques qui sont mêlées dans cet extrait ? Précisez. la mise en place du tragique 9°) Quel destin est annoncé pour Antigone, Hémon et Eurydice ? Citez un champ lexical, à l'appui de votre réponse. Quel est le temps verbal utilisé pour annoncer ce destin ? 10°) Quel sens donnez-vous à l'expression "il n'y a rien à faire"? 11°) En vous appuyant sur vos réponses à la question 10, essayez de donner votre définition du tragique. 12°) En quoi ce début de pièce est-il différent de celui d'une tragédie classique ? (appuyez-vous sur vos réponses aux questions 1 à 5 , et 8. Dans les pièces de théâtre de la Grèce antique, le chœur (du grec ancien choros) présente le contexte et résume les situations pour aider le public à suivre les évènements, fait des commentaires sur les thèmes principaux de la pièce Le chœur s’exprime généralement par le chant, mais aussi parfois en langage parlé. Dans les tragédies les plus anciennes, tous les rôles étaient joués par un seul acteur ; comme l’acteur devait fréquemment quitter la scène pour changer de personnage, le chœur avait un rôle dominant le chef est appelé coryphée . Les Érinyes étaient des divinités vengeresses qui persécutaient les hommes coupables de crimes, en particulier d'homicides contre un membre de sa famille. Dans la mythologie grecque, les Érinyes (en grec ancien « pourchasser, persécuter »), sont des divinités persécutrices. 2 ème extrait : Antigone et sa nourrice " L'éclairage s'est modifié sur la scène…" la situation d'énonciation 1°) Quel est le rang social des personnages ? Et quel est leur niveau de langage ? Relevez un exemple d'anachronisme ? Quel est l'effet produit ? 2°) Quelle information la didascalie initiale donne-t-elle sur le moment où débute l'action, et sur le lieu dans lequel elle se situe ? la progression du dialogue 3°) Quel personnage pose des questions ? Quels sont les deux types de phrases dominants employés par ce personnage ? Quels sentiments traduisent-ils ? 4°) Les personnages prennent-ils vraiment en compte les paroles de l'autre pour répondre ? Observez l'enchaînement des répliques. Relevez dans les répliques d'Antigone des phrases qui peuvent paraître mystérieuses pour la nourrice : le sont-elles le spectateur ? 5°) Sur quel quiproquo (=une méprise, une erreur de compréhension) toute la scène est-elle construite ? A quoi pense la nourrice, que craint-elle ? Qu'est réellement allé faire Antigone ? Qu'est-ce qui est le plus dangereux ? la construction du personnage d'Antigone 6°) A quel moment de la journée Antigone préfère-t-elle la nature ? Pourquoi, qu'est-ce que cela révèle sur elle ? 7°) Quel sens donnez-vous à la phrase "c'est beau un jardin qui ne pense pas encore aux hommes"? Quel rapport Antigone entretient-elle avec le genre humain ? Citez, dans la suite du texte, des mots ou expressions qui confirment ce rapport. 8°) Lisez rapidement l'autre scène de la pièce où intervient la nourrice: dans quel univers se retrouve plongée Antigone lorsqu'elle est avec sa nourrice ? 3 ème extrait : Antigone et Ismène " Tu sais, j'ai bien pensé, Antigone."…." Pauvre Ismène ! " la progression du dialogue 1°) a) Quelle relation les deux sœurs entretiennent-elles ? Qui est l'aînée ? b) Qui est le personnage qui mène le dialogue et qui avance les arguments ? 2°) Relevez les principaux arguments avancés. Classez-les selon qu'ils se réfèrent à l'autorité familiale, à l'autorité politique, ou à la force. 3°) Qui est désigné par le pronom "il" dans "il nous ferait mourir" ? Et le pronom "ils" dans "ils nous hueront" ? Ont-ils tous les deux un référent explicite ? Justifiez votre réponse en citant le texte. Expliquez le passage d'un pronom à l'autre. 4°) Relevez le champ lexical de la violence,. Dans quelle intention Ismène l'utilise-t-elle ? Quel trait de son caractère révèle-t-il ? Citez une réplique d'Ismène qui confirme votre hypothèse. la construction du personnage d'Antigone 5°) Y a-t-il une véritable contre-argumentation de la part d'Antigone ? Justifiez votre réponse en relevant notamment les formes de phrases utilisées dans ses répliques. 6°) Antigone a-t-elle été convaincue par les propos de sa sœur ? Pour quelle raison ? Justifiez votre réponse. 7°) Quel trait de son caractère Antigone révèle-t-elle? A quel moment de sa vie se réfère-t-elle ? 8°) Quel sens donnez-vous à l'expression "Pauvre Ismène !"? Que révèle-t-elle sur la conception qu'Antigone a de la vie ? Justifiez votre réponse en vous appuyant sur l'ensemble de l'extrait. 4 ème extrait : Antigone et Hémon " Pardon Hémon pour notre dispute d'hier…" la situation d'énonciation 1°) Quelles relations Antigone et Hémon entretiennent-ils ? 2°) Quel est le mode verbal dominant dans la réplique d'Antigone page 39-40 et celle page 42 au milieu ? Quelle est la valeur de ce mode ? Hémon a –t-il perçu la signification des paroles d'Antigone conjuguées à ce mode ? Justifiez vos réponses en vous appuyant sur les répliques d'Hémon. Et le spectateur ? le tragique 3°) Observez la longueur et l'enchaînement des répliques : qui mène cet échange ? 4°) Antigone demande "Pars maintenant, pars vite. Tu sauras demain.". Que comprend Hémon selon vous ? Qu'en est-il en réalité ? 5°) Quel sens donnez-vous à la dernière phrase d'Antigone ? En quoi peut-on dire que toute cette scène est tragique ? Appuyez-vous sur vos réponses précédentes. l'évolution du personnage d'Antigone 6°) A partir de ces deux répliques, dites en quoi Antigone fait preuve de faiblesse et de force : "Et serremoi. Plus fort que tu ne m'as jamais serrée. Que toute ta force s'imprime en moi." et "Oh, je l'aurais serré si fort qu'il n'aurait jamais eu peur" 7°) Quelle représentation Antigone a-t-elle de la féminité et du rôle de la femme ? Et de celui de mère ? Se révèle-t-elle, dans cette scène, plutôt femme ou plutôt enfant ? Vous prendrez soin de comparer avec les extraits précédents, et de justifier votre réponse. 5 ème extrait : Antigone et Créon " Tu me méprises n'est-ce pas ? … Créon est resté seul, le chœur entre et va à lui. la situation d'énonciation 1°) Quelle est la fonction sociale de Créon ? Quel est son lien de parenté avec Antigone ? Relevez les pronoms personnels par lesquels les personnages se désignent ; commentez le changement que vous observez en donnant la page où le changement de pronom se produit. 2°) Relevez deux exemples d'anachronisme flagrant ; pourquoi Anouilh a-t-il fait cela et quel est l'effet produit ? 3°) A qui Antigone s'adresse-t-elle et de quel est le référent du "vous" dans sa phrase: "Vos têtes, vos pauvres têtes… C'est vous qui êtes laids… Vous avez tous…" ? la progression du dialogue 4°) Qui parle le plus au début de l'extrait et pourquoi ? Qui parle le plus à la fin et pourquoi ? Quel mot précis déclenche l'inversion du rapport de force dans le dialogue ? Qui le prononce en premier ? Citez la page. 5°) De quoi Créon veut-il convaincre Antigone ? Quels procédés et arguments utilise-t-il pour cela ? Relevez et commentez quelques uns des termes qu'il emploie pour parler de Polynice. 6°) Quel argument Créon croit-il bon d'ajouter ? 7°) A partir du moment où un mot fait tout basculer, (voir question 4), observez les didascalies et les répliques de Créon : à quel ultime argument recourt-il ? 8°) En quoi peut-on dire que l'arrivée d'Ismène aggrave le conflit ? l'évolution du personnage d'Antigone 9°) Pourquoi Antigone traite-t-elle à plusieurs reprises Créon de "cuisinier" ? Sur quel ton s'adresse-telle alors à lui ? Commentez aussi les types de phrases qu'elle utilise à partir de ce moment. 10°) Quel sens faut-il donner à la réplique d'Antigone : "Enfin, Créon ! " page 99 ? Pourquoi peut-on dire qu'Antigone a sciemment provoqué sa marche vers la mort ? 11°) Quelle conception Antigone a-t-elle de la vie et du bonheur ? En quoi cette conception s'oppose-telle à celle de Créon ? Justifiez votre réponse en citant des passages précis du texte. Repensez au contexte de représentation de la pièce (écrite en 1942 et jouée en 1944) et dites de quoi le conflit entre ces deux personnages est le symbole pour l'auteur et les spectateurs ? 6 ème extrait : Antigone et le garde " Alors, c'est toi ? ….. Elle s'en va sans un mot vers les autres gardes. Ils sortent tous. la situation d'énonciation 1°) Par quel pronom Antigone et le garde s'adressent-ils l'un à l'autre ? Rappelez le rang social de chacun. 2°) Commentez le niveau de langage du garde (appuyez-vous dur le lexique, et sur la syntaxe). En quoi s'oppose-t-il au niveau de langage d'Antigone ? Quel est l'effet produit ? 3°) Quel est le troisième personnage évoqué ? Par quel pronom Antigone s'adresse-t-elle à lui ? Pourquoi ? la progression du dialogue 4°) Peut-on dire qu'il y a un véritable échange entre le garde et Antigone ? Le garde est-il sensible à la situation de la jeune fille ? Quels sont ses sujets de préoccupations ? l'évolution du personnage d'Antigone 5°) Pourquoi Antigone éprouve-t-elle le besoin de parler au garde ? Que cherche-t-elle ? Comment l'aborde-t-elle ? 6°) Que ressent Antigone, p 115 en haut, puis 116 en haut ? De quel personnage ce sentiment la rapproche-t-elle ? 7°) A qui Antigone destine-t-elle sa lettre ? Pourquoi à votre avis modifie-t-elle le contenu de sa lettre ? Commentez ce qu'elle fait supprimer, et qu'elle fait écrire à la place? Le destinataire recevra-t-il ce message ? le ton de la scène 8°) En quoi cette scène comporte-t-elle des éléments comiques, ou qui font sourire ? 9°) En quoi cette scène est-elle tragique ? Expliquez avec des exemples précis. 7 ème extrait : Antigone et le garde LE MESSAGER fait irruption en criant……CRÉON : " Ils ont fini, eux. ". la situation d'énonciation 1°) Le spectateur a-t-il déjà entendu parler de ce personnage qui arrive en criant ? (référez-vous au prologue) A qui s'adresse-t-il ? le tragique 2°) Définissez le cadre spatio-temporel. Relevez les termes qui désignent et qui caractérisent les personnages (Antigone, Hémon, Créon). En quoi Créon a-t-il changé ? 3°) Quels sont les événements rapportés par le Messager ? 4°) Relevez le champ lexical de la violence et de la mort. Analysez les jeux de regards. Commentez la symbolique des couleurs. En quoi tous ces éléments contribuent-ils au tragique 5°) Pour quelle raison ces événements sont-ils racontés, et n'ont-ils pas été joués sur la scène ? (référezvous notamment aux règles du théâtre classique). Analyse de la réplique de Créon : 6°) Quel sens donnez-vous à sa dernière phrase, " Ils ont fini, eux. "? Culture et Histoire : 1°) Quelle est l'origine de la tragédie ? Citez les trois auteurs grecs de tragédie et dites quel est celui qui a aussi écrit une pièce intitulée "Antigone". 2°) Quel siècle est "l'âge d'or de la tragédie" en France ? Citez les deux grands auteurs français de tragédies. 3°) Qu'est-ce que le "tragique" ? Donnez la définition. La pièce d'Anouilh 4°) Contre quoi Antigone se révolte-t-elle, qu'est-ce qu'elle n'accepte pas ? 5°) "Créon, qui est le roi, le maître, en réalité n'est pas libre, mais est comme prisonnier" ; expliquez cette phrase d'un critique. 6°) Un autre critique a écrit que dans cette pièce personne ne communique réellement avec personne. Illustrez et commentez cette opinion en prenant plusieurs exemples de dialogues. LE PERSONNAGE RÉVOLTÉ AU THÉÂTRE. Conflit et révolte Le conflit en tant que thème ou ressort dramatique a souvent été étudié. On a coutume de dire que le moteur du théâtre, tragique ou comique, est, justement, le conflit : le théâtre repose sur une action (drama), et le protagoniste contient dans sa racine « agôn », l’idée du combat. Quelle que soit l’époque, le théâtre met en scène des affrontements. Le conflit se définit comme la rencontre de deux volontés opposées. La révolte a un sens plus restreint : elle est une réaction indignée, souvent violente, personnelle ou collective, contre une autorité, une contrainte. Dans l’idée de révolte, on trouve l’idée du combat naissant de l’individu soumis, contre l’autorité qui le tient sous son joug. D’un point de vue dramatique, la révolte interroge le spectateur plus clairement, plus violemment, plus « cruellement » que le simple conflit. Le spectateur, avec parfois avec lui le personnage, se pose la question de la légitimité morale de la révolte du protagoniste. Le personnage révolté ne l’est pas nécessairement pour de bonnes raisons, il n’est pas nécessairement sympathique. L’identification au personnage, principal moteur dramatique, est parfois mise à mal (Médée, ou Alceste, monstre d’orgueil, ou, d’une certaine manière, Antigone). Le théâtre est le lieu privilégié de l’expression de la révolte. Pourquoi ? la proximité physique des spectateurs et des acteurs. Pas de distanciation, pas la même relation que celle d’un romancier et de son lectorat. La révolte d’un auteur (Molière, par exemple, est facilitée). Le théâtre est un art vivant et, pour le spectateur, immersif. Le spectateur est sommé de réagir. C’est un art de l’éphémère, souvent imprévisible, ce qui a causé maints scandales, comme la première de Tartuffe, puis de Dom Juan. Il n’est pas complètement censurable, car ce qui est prononcé sur scène peut se différencier de ce qui a été écrit. La scène peut se transformer en véritable tribune. Dans l’antiquité, on comptait sur le chœur pour commenter, ou parfois s’offusquer des actions des personnages. Le chœur représente la bonne foi et le bon sens du peuple. Il se révolte à sa place aux actions de Médée. Le théâtre est depuis toujours un genre très codé. Le théâtre classique (XVIIe) l’est particulièrement, et l’est resté jusque très tard. Il faut attendre le XIXe siècle pour que le théâtre se révolte contre lui-même (d’abord avec Hugo, préface de Cromwell, puis Jarry, Ubu roi, puis Artaud au XXe). Dramaturges révoltés Directeur de troupe, auteur, metteur en scène et comédien tout à la fois, Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière commence à connaître un grand succès avec les Précieuses ridicules en 1659 et l'École des Femmes, en 1662 ; mais dès ce moment il se heurte au clan dévot, mené par de grands personnages de la cour et par la Reine-mère, Marie de Médicis, qui l'accusent d'irrespect à l'égard du mariage, donc de la religion. Se croyant fort de la protection du Roi Louis XIV, Molière contre-attaque par une comédie féroce contre l'hypocrisie, le Tartuffe ; la cabale des dévots l'accuse alors d'athéisme, une accusation très grave pouvant mettre sa vie en danger, et fait interdire Tartuffe. Molière écrit alors, à partir d'août 1664, Dom Juan, destiné à remplacer Tartuffe à l'affiche : courageusement, il y reprend l'attaque contre l'hypocrisie ; Dom Juan fera à son tour l'objet d'une violente attaque des dévots La pièce, créée le 15 février 1665, connaît un vif succès et sera représentée 15 fois jusqu'au 20 mars. Mais Molière ne la fait pas imprimer, et elle ne sera plus représentée de son vivant. Molière sera désormais plus prudent pour les pièces suivantes : la faveur du Roi est inconstante. Le Misanthrope, qui date de 1666, témoigne de son amertume. Molière écrit donc ses pièces en fonction des combats. Son théâtre peut être réactif (ce n’est pas toujours le cas, loin de là, mais ça l’est pour Tartuffe, Dom Juan et le Misanthrope ou la Critique de l’École des Femmes, écrite pour répondre à ceux qui ont critiqué l’Ecole des femmes, de… Molière !). Pour Molière, le théâtre est donc un moyen d’exprimer sa révolte contre une société entièrement régie par l’hypocrisie et la fausse dévotion, mais aussi contre la médecine, qui malgré ses prétentions n’est jamais parvenue à le guérir de son affection pulmonaire.