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LA SEXUALITE
I. PRESENTATION DU CADRE HISTORIQUE DU DISCOURS SCIENTIFIQUE
SUR LA SEXUALITE
I. 1. Sexualité et procréation : MALINOWSKI, une approche anthropologie
et ethnologique de la sexualité
La sexualité fait l’objet d’un discours scientifique depuis relativement peu de temps. Or, dans
toutes les sociétés humaines, même primitives, il y a un lien entre la sexualité et la procréation. Il
existe un débat sur le fait que dans certains cas la sexualité n’est pas reliée à la procréation.
MALINOWSKI a observé que dans une peuplade mélanésienne, une croyance existe selon
laquelle les femmes sont fécondées par l’esprit des ancêtres à l’occasion d’exercices physiques. Dans
ces sociétés, la notion de père n’a aucun objet. Il n’y a pas de relation de parenté entre l’amant
régulier de la femme ou le père et les enfants de cette femme.
Il y a donc un référent familial pour ces enfants mais cet homme est généralement un frère de
la mère (très répandu dans les sociétés océaniennes). Les enfants portent le nom de leur oncle
maternel.
D’après MALINOWSKI, ces sociétés n’ont pas encore découvert le lien entre sexualité et
procréation.
Pour les psychanalystes, cette méconnaissance serait en fait due au refoulement. Ces
sociétés sont des sociétés de chasseurs-cueilleurs qui ont commencé à disparaître à partir de 2000.
Or, si MALINOWSKI a raison, les premiers éleveurs devraient avoir connu ce lien vers
5000 à 8000 par comparaison avec le lien existant chez les animaux.
Toutes les sociétés primitives connaissent ce lien mais, qu’est-ce qu’elles en connaissent ?
I. 2. Les représentations de la sexualité
Jusqu’au XIX° siècle, deux conceptions de la sexualité coexistaient :
Certains philosophes pensaient que l’être humain était tout entier contenu dans le sperme
et que l’utérus était une sorte de chambre interne propice au développement du fœtus.
D’autre, médecins, pensaient que l’enfant était préformé dans l’ovule et que la fécondation
n’avait qu’un rôle de déclencheur purement mécanique.
C’est à la fin du XIX° siècle (vers 1895), avec les découvertes sur la cellule qui ont permis de
comprendre le fonctionnement cellulaire (amphimixie des noyaux), que l’on a compris que l’échange
entre les gamètes donne individu composé de ½ chromosomes du père et ½ chromosomes de la
mère.
En fait, on a compris très top l’anatomie élémentaire de la sexualité mais on a compris que
très récemment l’anatomie cellulaire. Dans le domaine de la sexualité, la biologie et la psychologie ont
avancé en même temps. C’est seulement en 1930, avec la fondation de la génétique par MORGAN
que l’on a fait des avancées décisives dans ce domaine.
FREUD, par exemple, a cru que l’on pouvait transmettre à sa descendance des éléments
acquis pendant son existence.
I. 3. Fondements pré-psychologiques de la sexualité
Il y avait déjà des connaissances pré-psychologiques sur la sexualité bien avant que la
médecine ait compris ses fondements.
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I. 3. A. Les tribunaux ecclésiastiques
a) L’annulation du mariage
Autrefois, il existait des tribunaux ecclésiastiques chargés d’étudier la dissolution ou
l’annulation du mariage. Pendant très longtemps, le mariage était en effet un acte uniquement
religieux. Jusqu’à peu, dans certains pays d’Europe, l’inscription sur les registres de l’état-civil suivait
celle des registres paroissiaux.
Or, d’un point de vue canonique, le mariage ne peut être annulé que s’il ne remplit pas sa
fonction c’est-à-dire s’il ne conduit pas à la naissance d’enfants. Il peut alors être annulé par l’autorité
ecclésiastique particulièrement lorsqu’il n’a pas été consommé.
A la fin du Moyen-Âge et au début de la Renaissance, lorsque le mariage n’avait pas été
consommé, le tribunal ecclésiastique faisait vérifier la virginité de la femme. Si celle-ci n’était pas
vierge, elle pouvait toujours avouer qu’elle ne l’était pas avant le mariage ou que le mari est
impuissant. Les évêques vont donc instaurer un tribunal qui va instruire pour savoir si l’époux est
impuissant. Ces tribunaux se sont même déplacés dans la chambre nuptiale pour vérifier les faits.
Les magistrats ecclésiastiques ont donc été conduits à rédiger des traités où ils décrivaient les
troubles observés pour justifier l’annulation du mariage (« tribunaux de l’impuissance »).
Dans la classification ecclésiastique, le critère de la pénétration était décisif, plus que
l’éjaculation elle-même :
Ante portas (éjaculation avant la pénétration)
Post portas (éjaculation après la pénétration)
Cela a constitué une première nosographie des troubles. Ce sont donc les médecins et les
ecclésiastiques qui ont les premiers codifiés les troubles sexuels. En fait, on recherchait les troubles
qui empêchaient la consommation du mariage et ceux qui ne l’empêchaient pas.
b) Les péchés et crimes sexuels
Il y a aussi toute une série d’acte et de pratiques sexuelles qui n’entraînent pas la fécondation
et ont été condamnés par l’Eglise.
Ex : La contraception et l’usage du préservatif
Les formes de sexualité déviantes, ne conduisant pas à la fécondation sont aussi des péchés.
Ex : L’homosexualité ou la bestialité (zoophilie)
Ce sont d’autres tribunaux ecclésiastiques, des tribunaux pénaux, qui ont étudié ces péchés
et ces crimes sexuels. Les peines étaient très lourdes, généralement des peines de mort.
Les premières déviances ont donc aussi été étudiées par des tribunaux ecclésiastiques.
I. 3. B. L’expertise médicale
Lorsque les tribunaux ecclésiastiques ont été remplacés par des tribunaux laïques qui sont
devenus compétents pour les déviances les crimes sexuels, beaucoup de pratiques sexuelles, qui
sont d’ailleurs aujourd’hui courantes, ont continué à être réprimé comme des déviances.
Ex : L’homosexualité
Il y a encore des activités sexuelles considérées comme des délits ou des crimes :
Le viol
La pédophilie
L’exhibitionnisme
Le sadisme, surtout s’il y a violence.
Les tribunaux ecclésiastiques ont donc été relayés par la justice pénale moderne et les
premières connaissances médicales ont été apportées par les médecins.
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Au début du XIX° siècle, les déviants appelaient des peines lourdes : la peine de mort ou une
réclusion très longue puis ils ont été considérés comme des malades. Les magistrats ont envisagé
des circonstances atténuantes. Ils étaient enfermés dans des asiles d’aliénés.
a) KRAFT-EBBING : Première classification dans Psychopatia sexualis
Les magistrats ont donc fait appel aux médecins pour pratiquer l’expertise. Un des premiers
médecins concernés est KRAFT-EBBING (professeur de FREUD). Il a élaboré la première
classification des déviations criminelles de la sexualité.
KRAFT-EBBING, Psychopatia sexualis
C’est une classification des crimes et délits sexuels avec des études de cas. C’est la première
classification des perversions sexuelles. Tous les passages directement sexuels sont en latin (langue
permettant une codification du langage).
b) TARDIEUX : La médecine légale des crimes et délits sexuels
En 1860, un médecin, Ambroise Auguste TARDIEUX est le directeur de l’Institut Médico-
Légal à Paris. Il doit examiner des cadavres victimes de sévices sexuels (surtout des enfants). Il va
publier des cas d’enfants victimes de crimes sexuels.
Il a é nom expert auprès d’un tribunal parisien pour les affaires de crimes et délits
sexuels comme sur des enfants. Il a aussi témoigné sur des affaires où les enfants ont survécu : actes
de pédophilie et de mauvais traitements.
C’est le premier, avant KRAFT-EBBING à avoir fait un travail scientifique dans ce domaine. Il
a opéré une description des syndromes médicotraumatiques et psychotraumatiques.
I. 3. C. FREUD (1885 1900)
C’est également à cette époque que FREUD est le premier psychologue à s’intéresser à la
sexualité et à chercher à lui donner un sens. Il était neurologue à la différence de KRAFT-EBBING qui
était psychiatre. Donc il n’était ni psychiatre, ni médecin aliéniste car il n’aimait pas la médecine. Il a
fait toutes ses études sans passer d’examens.
Il travaillait dans un laboratoire d’anatomie et a fait des découvertes sur les terminaisons
nerveuses d’un poisson primitif. Sa spécialité de neurologue le conduit à diagnostiquer des paralysies
générales, des aphasies… En fait, à l’époque on attendait que le patient décède pour vérifier le
diagnostic.
FREUD, qui était un anatomiste du système nerveux, s’est trouvé exposé à des patients en
demande d’aide sans pour autant qu’ils soient exposés à un trouble neurologique. En fait, les
médecins de l’époque orientaient vers les neurologues les patients pour lesquels aucun traitement
n’était efficace et desquels on disait « c’est nerveux ». Il a donc été contraint de s’initier et de pratiquer
par lui-même la psychothérapie à partir de 1886. La plupart de ses patients présentaient des
symptômes de :
Neurasthénie (pour les hommes)
Hystérie (pour les femmes)
Cela correspondait aux catégories de l’époque.
FREUD qui est neurologue a appris grâce aux progrès de Jean-Martin CHARCOT et de
Hughlings JACKSON qui sont les deux fondateurs de la neurologie. C’est eux qui ont dressé, par
exemple, le tableau de l’épilepsie.
Avant la découverte des médicaments actuels (les neuroleptiques), les épileptiques étaient
considérés comme des malades mentaux. Dans l’épilepsie non-traitée, il y avait des phénomènes qui
pouvaient durer plusieurs semaines.
La maladie de Parkinson a été complètement décrite par JACKSON et CHARCOT. C’est à
cette époque là que BROCA ou WERNIKE ont distingué les différentes formes d’aphasies.
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Or, à l’époque, on ne soignait pas tout cela car il n’y avait pas de traitement. Le neurologue
savait faire le diagnostic mais n’avait aucun traitement à proposer. Parmi les patients vus par FREUD,
il y avait des patients « nerveux » c’est-à-dire qui présentaient un ensemble de troubles
psychopathologiques appelés :
Hystérie
Manifestations anxieuses ou phobiques
Neurasthénie.
a) La neurasthénie selon BEARD
Cela veut dire « faiblesse nerveuse ». Ce terme a été créé par un médecin américain, George
BEARD, qui avait repéré que beaucoup de patients présentaient un certain nombre de symptômes
qu’on peut ramener à trois grandes catégories :
Fatigue paradoxale : plus intense avant l’effort qu’après. Maximale le matin et qui
diminue au fil de la journée. Le patient est alerte en fin d’après midi et la fatigue le rattrape
à ce moment là. Aujourd’hui cela sert à faire la différence entre fatigue pathogène et
fatigue réelle. Cette fatigue nerveuse se traduit par l’asthénie et s’accompagne de crainte,
de manque de confiance en soi et d’irritabilité.
Troubles digestifs : chez ces patients, BEARD croit remarquer qu’ils souffrent de
troubles digestifs. Ils présentent des troubles dyspepsiques.
Troubles de l’organisme : Avec ces troubles de la digestion, va un ensemble de troubles
de l’organisme comme des
Troubles du sommeil
Troubles de la sexualité (H : impuissance ; F : frigidité)
BEARD constate que cela apparaît surtout dans les villes. C’est une maladie des citadins.
Donc BEARD en conclut que l’homme n’est pas fait pour tout ce qui est moderne. Cette théorie
s’appuyait sur des troubles intéressants parce qu’ils concernaient les troubles dit névropathiques.
b) La conception freudienne de la neurasthénie
FREUD va velopper une théorie très personnelle de la psychanalyse qui est à l’origine de
toute psychologie moderne.
C’est une théorie qui reconnaît l’exactitude de la description de BEARD mais n’adhère pas
aux explications proposées par le neurologue américain. Si l’explication de la vie moderne était vraie,
toutes les personnes dans les grandes villes présenteraient ces troubles ; alors que ce n’est pas le
cas. En plus, c’est présent à la campagne.
L’intérêt de FREUD pour la sexualité commence bien avant la psychanalyse. FREUD
développe la théorie selon laquelle la neurasthénie est la conséquence de troubles sexuels.
FREUD produit une nouvelle théorie sans avoir encore inventé la psychanalyse. Il remarque,
en observant la vie sexuelle de ses patients, que beaucoup de ceux-ci ont des pratiques
contraceptives mais qui ont pour conséquence de rendre l’acte sexuel moins facile, ou moins facile
qu’il puisse l’être (masturbation et coït interrompu).
Il explique toute la pathologie par le caractère insuffisant de la masturbation ou du coït
interrompu. Pour lui, ceux-ci s’accompagnent de l’excitation sexuelle qui est à la fois physique et
psychique. Dans ces deux cas, ou bien il n’y a pas d’orgasme ou bien l’orgasme n’a pas une qualité
suffisante pour provoquer la détente.
Il considère dans l’acte sexuel qu’il y a deux étapes :
L’excitation qui augmente au cours de l’acte sexuel.
L’orgasme qui va être suivi par une détente complète.
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L’orgasme apparaît comme un phénomène résolutif qui fait disparaître l’excitation sexuelle.
On pourrait comparer cela à une charge électrique qui augmente jusqu’à ce qu’une étincelle décharge
cette augmentation.
Problème : Ce modèle pose question car la tension ne s’évacue que lorsqu’il y a éjaculation dans le vagin.
L’orgasme clitoridien est considéré comme de seconde catégorie.
Donc l’excitation sexuelle non-déchargée s’accumule. Or, FREUD pense que l’on ne peut pas
stoker de l’excitation non-déchargée. A un moment, elle va être transformée en autre chose. Ce n’est
plus de l’excitation ça devient de la fatigue nerveuse chez certaines personnes, des troubles digestifs,
des troubles du sommeil...
Ce sont des pathologies chroniques qui ne sont pas très spectaculaires mais qui sont
régulières et continues parce que cette tension accumulée est bien obligée de se décharger sous
cette forme.
c) Les crises d’angoisses paroxystiques : la névrose d’angoisse
En même temps qu’il développe cette théorie, FREUD a tendance à modifier son opinion sur
le tableau clinique. FREUD croit remarquer que chez certaines personnes, c’est l’anxiété qui
prédomine (personnes qui ont peur de tout : anxiété généralisée). Il note la présence de crises
d’angoisse paroxystiques c’est-à-dire que des personnes développent une attaque de panique avec
des manifestations physiques très intenses et qui peuvent durer.
FREUD croit remarquer que c’est surtout les femmes qui ont ces crises de panique parce
qu’elles n’ont pas d’orgasmes (\\ coït interrompu). La femme n’atteint pas l’orgasme donc la femme ne
décharge pas la tension accumulée sous forme d’angoisse qui sort :
Soit de façon continue
Soit de façon très brève et très forte.
FREUD a donc distingué la vraie neurasthénie d’un trouble très similaire qui se caractérise par
de l’angoisse qui apparaît soit de façon continue soit de façon paroxystique, souvent constatée chez
la femme qu’il appelle : la névrose d’angoisse.
Donc l’anxiété est une façon de décharger la tension sexuelle accumulée comme dans la
neurasthénie la tension s’accumule sous forme de troubles de la digestion, de troubles
organiques…
La neurasthénie concerne plutôt l’homme car elle est liée à la masturbation qui décharge
la tension sexuelle de façon insatisfaisante.
La névrose d’angoisse concerne plutôt les femmes car elles n’ont pas d’orgasme du tout
(coït interrompu).
Ce qui est important c’est de comprendre que FREUD considère qu’il y a une équivalence
entre la décharge d’angoisse, la fatigue nerveuse, les troubles digestifs, et qu’ils sont tous semblables
du point de vue psychologique.
d) Le concept d’énergie psychique
C’est la décharge d’une tension sexuelle non-déchargée normalement qui crée ces troubles.
La tension sexuelle s’accumule mais peut être déchargée par autre chose que quelque chose lié à la
sexualité. FREUD est en train de construire une énergie psychique.
C’est l’époque de la thermodynamique (machine à vapeur) et la science a créé la notion
d’énergie qui est la manifestation d’une même force présente dans différents phénomènes. C’est un
concept unificateur.
De même qu’il y a une énergie une énergie physique, FREUD pense qu’il y a une énergie
psychique. C’est cela qui se manifeste dans l’énergie sexuelle. Cette énergie s’accumule et change de
forme au niveau d’un certain seuil.
Problème : tout cela repose sur une analogie. On ne dit jamais de quelle énergie il s’agit, comment elle se
mesure ? En fait, c’est une métaphore. Ce n’est pas une vraie énergie qui se mesure.
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