ACTUALITIÉS CONCURRENCE
MARS 1999
Promulgation des modifications à la Loi sur la concurrence
Le Directeur porte désormais le titre de Commissaire
Le 18 mars, le projet de loi C-20, intitulé Loi modifiant la Loi sur la concurrence, a été proclamé en
vigueur, avec certaines exceptions dignes de mention. Le «directeur des enquêtes et des recherches»
porte désormais le titre de «commissaire de la concurrence». Ce nouveau titre s’accompagne de
diverses modifications, particulièrement en ce qui a trait à la publicité trompeuse et au télémarketing.
Ce projet de loi comprenait aussi des modifications au régime de préavis de fusionnement, mais ces
modifications n’ont pas encore été promulguées, et il faudra attendre que les règlements afférents
soient prêts. Soyez à l’affût d’un numéro distinct d’Actualités-concurrence, qui sera publié dès que
les règlements projetés seront connus, vraisemblablement dans une semaine ou deux. D’ici là, vous
trouverez dans le présent numéro un résumé des changements à venir.
La loi qui a été promulguée est essentiellement la même que le projet de loi que la Chambre des
communes avait adopté l’automne dernier. La seule différence concerne les dispositions sur l’écoute
électronique, qui ont été modifiées afin de répondre aux réserves exprimées par le Sénat et présentées
ci-dessous avec les points saillants des autres modifications.
IL DEVIENT PLUS FACILE D’OBTENIR UNE INJONCTION PROVISOIRE EN
CAS DE FUSIONNEMENT
Il est maintenant beaucoup plus facile pour le commissaire d’obtenir une injonction provisoire aux
termes de l’article 100 afin d’empêcher la clôture d’un fusionnement. Le commissaire n’aura plus
besoin de prouver, selon la prépondérance des probabilités, que la transaction proposée limitera ou
réduira vraisemblablement sensiblement la concurrence. Il lui suffira désormais d’informer le
Tribunal de la concurrence de la tenue d’une enquête et qu’un délai supplémentaire est nécessaire
pour l’achever.
Le Tribunal doit également conclure qu’en l’absence d’une ordonnance, une partie pourrait poser des
gestes qui auraient pour effet de réduire sensiblement l’aptitude du Tribunal à remédier à l’influence
du fusionnement proposé sur la concurrence, gestes qui seraient alors difficiles à contrer. Il ne sera
pas nécessaire de démontrer la vraisemblance d’effets négatifs sur la concurrence. D’autre part, les
requêtes en injonction pour ces motifs devront être introduites suivant un avis de 48 heures aux
parties (les requêtes ex parte ne seront plus permises pour ces motifs).
Comme avant, les injonctions provisoires demeurent une solution lorsque le Tribunal estime qu’une
partie a fait défaut de donner préavis de la transaction. Des injonctions ex parte pourront être
obtenues uniquement dans cette circonstance.
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Auparavant, les ordonnances provisoires se limitaient à 10 jours s’il s’agissait d’ordonnances
obtenues sur requête ex parte, et à 21 jours si elles étaient rendues en vue d’empêcher une transaction
sur laquelle le directeur n’avait pas terminé son enquête. Les ordonnances provisoires délivrées dans
cette dernière circonstance ont maintenant une durée maximale de 30 jours, délai qui peut être
prorogé jusqu’à un maximum total de 60 jours à la demande du commissaire.
Comme avant, les ordonnances provisoires obtenues ex parte aux termes de l’article 100 ont une
durée maximale de 10 jours, mais les requêtes ex parte sont maintenant limitées aux cas le préavis
n’a pas été donné.
Conséquences pratiques
: Il est clair que la capacité d’obtenir une injonction provisoire sans avoir
à prouver la vraisemblance d’un effet anticoncurrentiel en fait un outil beaucoup plus efficace de
mise en application de la Loi. On peut s’attendre à ce que le commissaire soit beaucoup plus enclin à
demander des injonctions provisoires, et à ce que les sociétés soient par conséquent bien plus
disposées à retarder la clôture d’une transaction lorsque le commissaire soulèvera des questions.
RÉGIME CIVIL POUR UN GRAND NOMBRE DE QUESTIONS AYANT TRAIT
À LA PUBLICITÉ TROMPEUSE
Il existe maintenant deux régimes auxquels on peut avoir recours pour les questions ayant trait à la
publicité trompeuse : un régime criminel pour les infractions de grande portée, et un régime civil,
pour la plupart des questions. Le commissaire ne pourra procéder que dans l’une de ces deux voies,
selon les faits.
Régime criminel
L’infraction que constitue le fait de donner au public des indications fausses ou trompeuses sur un
point important ne revêt maintenant un caractère criminel que si ces indications ont été données
«sciemment ou sans se soucier des conséquences». Les tribunaux doivent tenir compte à la fois du
sens littéral des indications et de «l’impression générale» qu’elles donnent.
Dans le cas d’une déclaration sommaire de culpabilité, la peine maximale augmente à 200 000 $ (au
lieu de 25 000 $), ou à un an d’emprisonnement.
Dans le cas des «ventes pyramidales» et de la «commercialisation à paliers multiples», une déclaration
sommaire de culpabilité peut donner lieu à une amende qui passe à 200 000 $ (au lieu de 25 000 $) et
à un an d’emprisonnement, ou à l’une de ces peines.
Régime civil
Les indications quant au «prix habituel», les indications d’ordre technique, la publication
d’attestations, la pratique de la vente à prix d’appel, la vente à un prix supérieur au prix annoncé et les
concours publicitaires sont maintenant tous des agissements susceptibles d’examen, plutôt que des
agissements criminels.
La Loi établit également une pratique générale globale susceptible d’examen, soit «les indications au
public qui sont fausses ou trompeuses sur un point important» (c’est-à-dire que cette pratique
correspond à la disposition en matière criminelle, mais que dans les circonstances, le contrevenant
n’a pas enfreint la Loi sciemment ou sans se soucier des conséquences).
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Toutes les pratiques de commercialisation trompeuses révisables sont susceptibles d’examen, à la
demande du commissaire, devant le Tribunal de la concurrence, la Cour fédérale ou une cour
supérieure provinciale.
Parmi les peines possibles, notons les suivantes : ordonnances de cesser et de s’abstenir, diffusion
d’avis de correction et amendes (dans le cas des sociétés, un maximum de 100 000 $ pour la première
ordonnance et de 200 000 $ pour les infractions subséquentes et, pour les particuliers, de 50 000 $
pour la première ordonnance et de 100 000 $ pour les infractions subséquentes). Les amendes et les
avis de correction ne pourront être utilisés qu’en l’absence de diligence raisonnable. Les
ordonnances de cesser et de s’abstenir, sauf stipulation contraire, ont une durée de dix ans.
Le commissaire dispose maintenant de la capacité de demander une ordonnance de ne pas faire
temporaire afin d’empêcher une personne de se livrer à des pratiques de commercialisation
trompeuses pendant une période pouvant atteindre 14 jours. Cette période peut être prorogée de
14 jours supplémentaires.
Un nouveau processus pour les ordonnances sur consentement est mis en place en vertu duquel le
commissaire et le contrevenant peuvent convenir d’une réparation et la faire enregistrer par un
tribunal.
Conséquences pratiques
: Le nouveau régime devrait simplifier le processus en ne soumettant que
les cas les plus graves à la procédure criminelle et en donnant au commissaire la capacité de traiter
plus efficacement les infractions non criminelles, sans avoir à établir une preuve «hors de tout doute
raisonnable». D’autre part, les parties à un litige qui réclament des dommages-intérêts aux termes de
l’article 36 relativement à la publicité trompeuse doivent maintenant prouver que des indications
trompeuses ont été données «sciemment ou sans se soucier des conséquences». À titre de stratégie,
le commissaire pourrait être tenté de brandir la menace de poursuites criminelles pour encourager le
dépôt d’une ordonnance sur consentement civile relativement à une infraction civile, ce qui
permettra d’éviter les procès dans certains cas.
NOUVELLES INFRACTIONS AYANT TRAIT AU TÉLÉMARKETING
Les nouvelles technologies donnent naissance à de nouveaux crimes. On estime que les Canadiens
perdent 4 milliards de dollars par an à cause de pratiques trompeuses de télémarketing.
«Télémarketing» s’entend de «la pratique de la communication téléphonique interactive pour
promouvoir directement ou indirectement soit la fourniture ou l’utilisation d’un produit, soit des
intérêts commerciaux quelconques».
Une nouvelle infraction criminelle a été créée selon laquelle il est interdit de donner par télémarketing
des indications fausses ou trompeuses sur un point important. Le télémarketing est également
interdit pour offrir un produit sans frais ou à un prix inférieur à sa juste valeur marchande, en
contrepartie de la fourniture ou de l’utilisation d’un autre produit, si la juste valeur marchande du
premier produit et les restrictions, modalités ou conditions de la fourniture de ce produit ne sont pas
divulguées à l’acquéreur. De même, il est interdit d’offrir un produit en vente à un prix largement
supérieur à sa juste valeur marchande, si la livraison du produit est conditionnelle au paiement
préalable du prix par l’acquéreur.
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Tous les télévendeurs sont tenus de procéder à une certaine divulgation juste, raisonnable et en
temps opportun. La pratique du télémarketing est en effet subordonnée à la divulgation, d’une
manière juste et raisonnable, au début de chaque communication téléphonique, de l’identité de la
personne pour le compte de laquelle la communication est effectuée, de la nature du produit ou des
intérêts commerciaux dont la promotion est faite et du but de la communication; à la divulgation,
d’une manière juste, raisonnable et opportune, du prix du produit dont est faite la promotion de la
fourniture ou de l’utilisation et des restrictions, modalités ou conditions importantes applicables à sa
livraison; à la divulgation, d’une manière juste, raisonnable et opportune, des autres renseignements
sur le produit que prévoient les règlements.
La défense fondée sur la diligence voulue est introduite. Les directeurs et les administrateurs d’une
société contrevenante sont personellement responsables de l’infraction, sous réserve de la défense
fondée sur la diligence voulue, que la société elle-même fasse ou non l’objet d’une accusation.
Dans le cas d’une claration sommaire de culpabilité, les peines comprennent des amendes
maximales de 200 000 $ et un emprisonnement d’un an, ou l’une de ces deux peines et, dans le cas
d’une mise en accusation, les peines comprennent des amendes illimitées et un emprisonnement
maximal de cinq ans, ou l’une de ces deux peines.
Conséquences pratiques
: Les télévendeurs honnêtes devront prendre des précautions
considérables pour s’assurer que toutes les personnes qui font pour leur compte des appels de
télémarketing donnent toutes les indications exigées. Pour établir la défense fondée sur la diligence
voulue, il est conseillé d’instaurer des programmes de conformité internes. Les télévendeurs
malhonnêtes noteront sans doute que les communications trompeuses faites par télécopieur, par
Internet ou au moyen de messages enregistrés automatiques ne sont pas visées. Toutefois, si des
indications «publiques» sont en cause, ces indications continuent d’être couvertes par les dispositions
sur la publicité trompeuse.
EXTENSION DES POUVOIRS D’APPLICATION DE LA LOI EN MATIÈRE
CRIMINELLE
Les pouvoirs du commissaire en matière d’application de la Loi à l’égard des questions criminelles
ont été considérablement étendus par la disposition sur la délivrance d’ordonnances de faire (il s’agit
d’ordonnances qui non seulement interdisent certaines activités, mais qui rendent certaines mesures
obligatoires), par la permission d’utiliser la surveillance électronique sans consentement dans certains
cas et par des mesures de protection explicites pour les dénonciateurs (employés et autres personnes
qui informent le commissaire d’infractions criminelles apparentes à la Loi sur la concurrence).
Ordonnances de faire
En ce qui a trait aux questions criminelles, les tribunaux peuvent maintenant rendre des ordonnances
de prendre les mesures que le tribunal juge nécessaires pour empêcher la perpétration, la
continuation ou la répétition de toute infraction, ou de prendre toutes les autres mesures convenues
par la personne et la Couronne.
Les ordonnances d’interdiction et les ordonnances de faire ont une durée maximale de 10 ans.
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Surveillance électronique
Le commissaire est maintenant habilité à présenter une requête de surveillance électronique pour
certaines infractions, dont la fixation des prix, le truquage des offres et le télémarketing trompeur,
sans avoir à obtenir au préalable le consentement de l’une des parties à la communication (comme
c’était le cas jusqu’à récemment).
Les tribunaux pourront permettre la surveillance électronique dans de telles circonstances lorsque
cette solution sert les «intérêts primordiaux de la justice» et que d’autres méthodes d’enquête ont été
essayées en vain ou qu’elles sont impraticables en raison de l’urgence de la situation.
Le commissaire peut présenter une requête ex parte de surveillance électronique, pourvu que la
requête soit approuvée par le procureur général de la province ou le procureur général du Canada (ou
son représentant).
Dénonciation
«Dénonciateurs» s’entend des employés et des autres personnes qui signalent une infraction
apparente à la Loi sur la concurrence. Les nouvelles dispositions de la Loi protègent les employés qui
dénoncent leur employeur ou d’autres entreprises relativement à des infractions criminelles, et elles
assurent qu’ils peuvent faire cette dénonciation sans crainte de réprimandes ou de représailles.
Les objections du Sénat à ces dispositions ont effectivement retardé l’adoption du projet de loi. Des
modifications à ces dispositions ont été présentées en Chambre le 5 février 1999 pour faire en sorte
que les dispositions sur la dénonciation ne s’appliquent plus aux agissements susceptibles d’examen
par les tribunaux civils et que les employeurs qui réprimandent leurs employés ayant signalé une
infraction apparente, leur imposent d’autres mesures disciplinaires ou leur font subir d’autres
représailles ne sont plus passibles d’amendes ou d’emprisonnement.
Les dispositions sur la dénonciation prévoient que le commissaire doit garder confidentielle l’identité
de toute personne qui signale une infraction apparente à la Loi. Les employées qui croient, de bonne
foi et en se fondant sur des motifs raisonnables, que leur employeur ou une autre personne a enfreint
la Loi ou s’apprête à le faire peuvent signaler le cas au commissaire, et il sera interdit aux employeurs
d’exercer des représailles à cet égard. De même, les employeurs devront s’abstenir d’imposer des
mesures disciplinaires à leurs employés qui refuseront de faire quoi que ce soit qui enfreindrait la Loi,
ou qui prendront toute mesure nécessaire pour qu’une infraction ne soit pas commise.
Conséquences pratiques
: La possibilité d’obtenir des ordonnances de faire et des ordonnances de
ne pas faire en cas d’infractions criminelles sera d’un grand secours pour le commissaire lorsqu’il lui
faudra établir des réparations efficaces. De même, la capacité de faire appel à la surveillance
électronique sans avoir obtenu le consentement de l’une des parties dans certaines circonstances
renforce grandement son pouvoir de mener des enquêtes sur des agissements qui risquent de causer
au public des préjudices considérables. La portée possible des dispositions sur la dénonciation est
diminuée du fait qu’il n’existe aucun régime particulier d’application de la Loi pour punir les
employeurs qui ne s’y conforment pas. Le Sénat s’est opposé aux dispositions telles qu’elles avaient
initialement été adoptées en Chambre, et le compromis atteint semble avoir pour résultat qu’il y a
infraction, mais pas de sanctions. Cependant, il semble que les dispositions sur la dénonciation
seraient à tout le moins conçues pour fournir aux employés des motifs de contester des mesures
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