monnaie banque centrale

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Thibault HATTON et Natalie HUET, conférence n° 3
Fiche Technique : QUI CREE LA MONNAIE ?
La monnaie, au sens strict, est un actif liquide directement utilisable pour effectuer des règlements et
accepté par tous et sans coût dans une communauté donnée. C’est à la fois un étalon de mesure des prix
de tous les biens, un intermédiaire des échanges qui pallie les carences du troc, et enfin une réserve de
valeur.
Les encaisses de transaction (agrégat monétaire M1) représentent la composante principale de l’offre de
monnaie. Il s’agit de la monnaie directement utilisable pour les échanges, donc la monnaie
divisionnaire (pièces), la monnaie fiduciaire (les billets acceptés par tous), et la monnaie scripturale, à
savoir les fonds déposés auprès des banques, sur lesquels on peut émettre des chèques ou réaliser des
virements : ce sont les dépôts à vue. L’essentiel de la masse monétaire est composé de la monnaie
scripturale. Ce sont les banques et autres institutions monétaires, qui la créent, par des jeux d’écritures :
elles portent des sommes au crédit des comptes des différents agents économiques.
I)
Les banques commerciales créent la monnaie par l’octroi de crédits
Les intermédiaires financiers transfèrent les fonds des prêteurs aux emprunteurs : ces intermédiaires
sont les caisses d’épargne, compagnies d’assurance vie, fonds de pension ou fonds communs de
placement, mais surtout les banques commerciales, qui gèrent la plupart des dépôts à vue, créant des
actifs (créances détenues sur un agent), essentiellement en monnaie scripturale.
A) La création monétaire par l’octroi de crédits
Reprenons l’exemple fourni par Emmanuel Combe dans son ouvrage Précis d’Économie (page 316). Une
banque dispose du bilan suivant :
Actif (créances)
Passif (dettes)
Réserves
30
dépôt à vue 100
Titres
70
100
100
Cela signifie que la banque n’a conservé en réserve que 30 % du dépôt du client X, et a employé le reste à
l’octroi de crédits, dans le but de toucher des intérêts.
« Les crédits font les dépôts » : la banque consent un crédit de 20 au client X ; ce dernier dispose
désormais d’un dépôt à vue de 20, lequel vient s’ajouter aux 100 existants. En contrepartie, la banque
acquiert une créance de 20 sur le client X. Le nouveau bilan de la banque A s’écrit dès lors ainsi :
Actif
Passif
Réserves
30
dépôt à vue 120
Titres
70
Créance
20
120
120
Il y a donc bien création monétaire car la banque n’a utilisé aucune ressource préalable pour
octroyer un crédit, il y a bien eu « création d’une capacité supplémentaire de paiement ».
Il convient d’ajouter que la création monétaire au sein des banques se fait aussi, dans une moindre
mesure, par l’acquisition de devises étrangères.
B) Le système des réserves partielles permet la généralisation de la création monétaire
L’objectif de la banque commerciale est le même que toute entreprise : maximiser le profit. Or les
banquiers ont réalisé que les dépôts sont rarement retirés par tous au même moment. Dès lors, ils
investissent la monnaie des dépôts (ex : en octroyant des crédits), ne gardant qu’une réserve – environ 10
% du dépôt à vue – pour faire face aux retraits des déposants.
Le système des réserves partielles permet d’accroître la masse monétaire, grâce au multiplicateur
monétaire. Ainsi, lorsqu’une banque met en réserve 10% du dépôt de 1000 euros, elle peut faire fructifier
les 900 restants en les plaçant ou en les prêtant à intérêt. Or, dans le cas du crédit, la personne qui
emprunte les 900 euros les dépose sur un compte crée dans une autre banque (virement). Le montant
total de la masse monétaire est alors de 1900 euros : il y a eu création monétaire. Cette seconde banque,
après avoir satisfait aux exigences des réserves obligatoires, prêtera le reste des 900 euros selon le même
processus qui accroît la masse monétaire jusqu’à ce que chaque banque du système ait des réserves
égales à 10% du dépôt effectué. S’il y a dix banques et que le montant des réserves est de 10%, la masse
monétaire – s’il n’y a aucune fuite dans la circulation de la monnaie – sera multipliée par 10.
Comme le résume Jacques Généreux, tant que le taux d’intérêt sur les placements est supérieur au taux
d’intérêt sur les réserves (nul), les banques sont incitées à se dessaisir des réserves excédentaires.
Ainsi nous avons vu que l’action de transformation des dépôts en crédits fait des banques le principal
chaînon du processus de création de la monnaie.
II)
La banque centrale
A) la banque centrale crée de la monnaie ex nihilo, la « monnaie banque centrale »
Les banques centrales sont les institutions qui gèrent la monnaie d’un pays et ont le monopole
d’émission. Elles sont donc indispensables à la création monétaire.
Les banques commerciales créent de la monnaie par un simple jeu d’écriture, mais si la majeure partie de
la masse monétaire est composée de monnaie scripturale (90% des paiements), il existe néanmoins une
demande de monnaie sous forme d’espèces. Les banques commerciales doivent donc conserver en
réserve, sous forme de monnaie fiduciaire, une partie des dépôts crées. Pour cela elles se procurent les
billets auprès de la banque centrale où elles détiennent des comptes. La banque commerciale doit donc
disposer auprès de la banque centrale d’un compte et d’un stock de monnaie banque centrale. On entend
par « monnaie banque centrale » les billets émis par cette dernière ainsi que la monnaie centrale
scripturale qui permet les règlements ou opérations bancaires entre les différentes banques
commerciales. La monnaie centrale constitue la base nécessaire à la création monétaire.
Finalement le rapport des banques avec la banque centrale ressemble à celui de l’agent économique avec
la banque : la banque de second rang, quand elle a besoin de monnaie fiduciaire, se procure des billets en
effectuant un retrait sur son compte à la banque centrale. Aussi les banques se doivent d’alimenter
leurs comptes à la banque centrale. Elles le font d’abord à travers les virements de banques à banques et
d’autre part grâce à la banque centrale qui accepte de refinancer les comptes des banques en reprenant
leurs créances à son compte.
B ) Elle régule et contrôle la création monétaire
La banque centrale étant à l’origine de la base monétaire, elle peut contrôler la quantité de monnaie
banque centrale que les banques peuvent se procurer et contrôler la création monétaire, notamment en
fixant le montant des réserves obligatoires : la banque centrale impose aux banques de second rang de
garder un pourcentage (plus ou moins élevé) des dépôts en réserve dans un compte à la banque centrale. Il
existe aussi ce qu’on appelle les opérations d’open-market où la banque centrale offre ou demande des
titres en échange de monnaie banque centrale. Enfin la banque centrale peut prêter de la monnaie banque
centrale aux banques en fixant ses propres taux d’intérêts (=> Intervention sur le marché monétaire)
***
Nous avons vu que ce sont les banques qui créent la monnaie en transformant des créances sur des agents
économiques en moyens de paiement. La création monétaire s’effectue surtout par les crédits que les
banques accordent aux agents pour répondre à leur besoin de liquidité. Les banques commerciales ou de
second rang créent donc la plus grande partie de la monnaie scripturale et dépendent ensuite de la banque
centrale ( « la banque des banques » ) pour s’approvisionner en monnaie fiduciaire. La banque centrale
apparaît alors comme l’organe émetteur et régulateur de tout le processus de création monétaire.
BIBLIOGRAPHIE
P.A. Samuelson, W.D. Nordhaus, Economie, 16e édition, Economica, 2000 (pages 475-481 et 493-503)
G. Abraham-Frois, Économie Politique, 7e édition, Economica, 2001 (pages 449-455)
E. Combe, Précis d’Économie, 8e édition, PUF, 2004 (pages 316-320)
J. Généreux, Économie Politique, (Tome 1 : Introduction à l’analyse économique), 4e édition, Hachette
2004 (pages 102-106)
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