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Association Nationale des Anthropologues et Sociologues de Côte d’Ivoire
(ANAS-CI)
PÔLE SANTE
Responsable pôle : Dr YORO Blé Marcel
THEMATIQUE
Evolution des pratiques de santé et de soins : identification des acteurs, manifestations
des transformations, enjeux et incidences sur les usagers.
Appel à communication
Le champ thérapeutique africain se caractérise de nos jours, en milieu rural comme urbain,
par une variété de traitements offerts aussi bien par les thérapeutes traditionnels, religieux,
que de la médecine moderne. Sans oublier les colporteurs de médicaments qui parcourent les
rues des villes et campagnes, mais aussi la médecine chinoise qui prend de plus en plus de
l’ampleur, surtout en zones urbaines (Fassin, 1990 et 1996 ; Yoro, 2002). Pour certains
auteurs, le succès de ce pluralisme thérapeutique en Afrique est à la mesure de la crise des
systèmes de santé et plus globalement de la crise des Etats africains (Dozon, 1995 : 188). Pour
d’autres, ce pluralisme peut être attribué au cours de l’histoire de l’Afrique, à l’influence de
diverses cultures et religions, notamment l’islam et le christianisme qui ont introduit de
nouvelles pratiques thérapeutiques en Afrique sub-saharienne (Brenner, 1985a et 1985b ;
Constantin, 1988 ; Janzen, 1995. Mac Gaffey, 1983).
Face à cette diversité de l’offre, les demandes de soins sont tout aussi nombreuses et diverses,
justifiées par la pluralité des pathologies et infortunes multiples (Yoro, 2004). Les malades
usent en effet de l’une comme de l’autre et suivent des itinéraires thérapeutiques balisés aussi
bien par l’hôpital que par le guérisseur, tendant ainsi à égaliser ou à cumuler les spécificités et
les avantages de chacune (Dozon et Sindzingre, 1986 :46). De façon spécifique, l’émergence
du VIH/SIDA a lancé un nouveau défi notamment au système moderne de soins dès lors que
cette pandémie impose de nouveaux besoins plus socioculturels et relationnels que
proprement médicaux (Blibolo, 1998).
Au regard de ce tableau, l’objectif du programme est de mettre l’accent sur la façon dont le
contexte général de globalisation qui favorise d’une part, une offre plurielle de soins en raison
des origines et de la nature des formes de prise en charge de ces pathologies et infortunes, et
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d’autre part, la cohabitation ou l’interpénétration entre différents systèmes sanitaires, modifie
progressivement le rapport offre/demande de soins et oblige à une évolution des pratiques de
santé : celles des pourvoyeurs de soins d’une part, et celles des demandeurs de soins d’autre
part.
Plusieurs axes pourraient permettre de saisir cette dynamique :
1. Qu’est-ce que la maladie aujourd’hui ?
Une ethnographie de la maladie qui s’appuie sur le champ couvert par les thérapies
alternatives sera faite. Que veut dire « être malade » et « se soigner » dans un contexte de
pluralisme de l’offre de possibilité de soins ? Ceci permettra d’appréhender les
représentations de la maladie. En effet, pour nombre de sociologues et anthropologues, les
représentations de la maladie sont un déterminant essentiel des comportements de santé en
Afrique (Fainzang, 1986, Fassin, 1992 ; Augé et Herzlich, 1984). Ce sera ici l’occasion de
revisiter l’anthropologie des « itinéraires thérapeutiques » et de l’enrichir.
2. Evolution des pratiques de soins traditionnels.
On s’attachera (i) à identifier les acteurs de ce système de soins, à (ii) interroger leurs
pratiques afin d’en (iii) identifier les mutations ou les transformations en termes d’ajouts
nouveaux par le biais du croisement des emprunts, ou d’abandon de pratiques au profit de
nouvelles pratiques. L’objectif est de montrer comment, le processus de modernisation qui se
caractérise par exemple par la mobilité des praticiens de la ville au village et vice-versa, les
rencontres à l’occasion des forums d’exposition des médicaments, les associations des
tradipraticiens comptant en leur sein des pharmaciens et médecins, etc., agit sur leurs
pratiques en termes de mutations de leurs manières de faire. Comment se manifestent ces
transformations sur le plan : 1) des emprunts : emprunts faits à la médecine moderne au
niveau de l’identité sociale, de l’architecture des lieux de soins, de l’organisation des
prestations en termes bureaucratique et économique; 2) les transformations liées à l’usage des
nouvelles technologies de l’information et de communication.
Les enjeux et les implications sociales et sanitaires de ces transformations seront analysés.
3. Le marché des cultes de guérison
Il s’agit de la multitude de cultes thérapeutiques offerts aussi bien par des religions judéo-
chrétiennes, de la religion musulmane, que des religions prophétiques dont l’ampleur est
manifeste au regard des spots publicitaires télé, des affiches au carrefours des rues ou dans la
presse écrite. L’objectif est d’interroger les pratiques cultuelles de ces religions à travers une
série de questions : quelles sont les structures qui offrent ce service religieux ? Quelles sont
les différences et les similitudes entre les offres de guérison ? Quelle est la différence entre les
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obédiences de spiritualités chrétiennes en concurrence sur ce marc? Quelles sont les
caractéristiques des demandeurs de guérison ? Quelle est la nature des demandes adressées
aux cultes religieux ? Quelles sont les représentations que se font les bénéficiaires et leur
entourage de ces prestations offertes par les spécialistes des cultes de guérison ? Bien plus,
quelle place occupe le recours à cette forme de thérapie dans l’itinéraire thérapeutique du
demandeur ?
4. Les dimensions sociales et culturelles de la maladie
Du côté des bénéficiaires des soins, le pluralisme médical se traduit selon les affections, les
individus et leurs groupes d’appartenance par des recours combinant les systèmes de soins
disponibles. Dès lors, la gestion de la santé et les questions relatives à la prévention et au
traitement doivent être traitées dans la compréhension des dimensions sociales et culturelles
de la maladie qui sous-tendent les choix thérapeutiques. Quelles sont ces dimensions sociales
et culturelles dans des cas de maladies et d’infortunes diverses ? Des maladies émergentes et
chroniques telles que le SIDA, l’hyper tension artérielle, le diabète, l’insuffisance rénale ?
Etc. Comment les malades et leur entourage perçoivent-ils la gravité de ces affections ? Quel
est le niveau de gravité qui induit le recours ? Les risques d’infection perçus, notamment dans
le cas des maladies sexuellement transmissibles? La prise de décision de recours ? Comment
les proches participent-ils aux choix thérapeutiques et quelles sont les responsabilités qui leur
incombent ? Les pratiques de l’entourage et des spécialistes et leurs interactions sont aussi à
analyser selon les distinctions de milieux sociaux et de genre. On mettra aussi en évidence les
relations soignant-soigné modulées par le regard porté par les usagers sur le dicament en
tant que produit. Ce faisant, on pose à nouveau la vieille problématique de l’observance du
traitement mise à jour par des maladies de plus en plus inquiétantes telles que la tuberculose
et l’ulcère de buruli. Mais cette problématique peut être étendue aux autres affections, voire
les plus courantes telle que le paludisme étant donné que divers facteurs (économiques,
culturels, sociaux, etc.) interviennent en matière d’observance du traitement.
Références bibliographiques
- Augé M. (1986). L’anthropologie de la maladie. L’Homme, PP.81-90.
- Benoist J. (éd.), (1996). Soigner au pluriel, Essais sur le pluralisme médical. Karthala, Paris.
- Blibolo A.D. (1998). « Ecologie sociale d’une maladie : réponses de prévention et de prise
en charge thérapeutique et psychosociale de l’infection à VIH/SIDA en Côte d’Ivoire ». Thèse
Doctorat 3ème cycle. IES, Université d’Abidjan.
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- Dozon J-P. (1995). La cause des prophètes. Politique et religion en Afrique contemporaine.
Suivi de la leçon des prophètes par M. Augé. Ed. Seuil, Paris.
- Dozon J-P. et Sindzingre N. (1986). La santé dans le tiers monde. Prevenir, premier
semestre.
- Fainzang S. (1990). De l’anthropologie médicale à l’anthropologie de la maladie.
Encyclopaedia Universalis, Paris.
- Fainzang S. (2001). Médicaments et société. Le patient, le médecin et l’ordonnance. Puf,
Paris.
- Fainzang, S. (1989). Pour une anthropologie de la maladie en France : un regard africaniste.
Cahiers de l’Homme, Editions de l’EHESS, Paris.
- Fassin D. (1990). « Maladie et médecine ». In sociétés, développement et santé. Ellipses,
Paris, PP. 38-49.
- Fassin D. (1996). L’espace politique de la santé. Puf, Paris.
- Fassin D. (1996). La vente illicite des médicaments au Sénégal. Economie parallèle, Etat et
société. Politique africaine, vol. 23, PP.123-130.
- Janzen J. (1995). La quête de la thérapie au bas-Zaïre. Karthala, Paris.
- Massé R. (1995). Culture et santé publique. Les contributions de l’anthropologie à la
prévention et à la promotion de la santé. Gaëtan Morin, Montréal.
- Yoro B. M. (2002). Pluralisme thérapeutique et recours aux soins en milieu rural ivoirien :
approche socio-anthropologique du syncrétisme thérapeutique à Guibéroua, République de
Côte d’Ivoire. Thèse Doctorat unique. Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne (IEDES).
- Yoro B.M. (2004). Dynamique et enjeux des tradipraticiens contemporains en Côte d’Ivoire.
In Kasa Bya Kasa. N°6, EDUCI, Abidjan, PP.197-209.
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