L`Âme

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L’Âme
Conférence de Xavier DUFOUR, théologien, à Mornant le 28 Novembre 2010
1 - Qu’est-ce que l’âme ?
2 - Les enjeux d’en parler : dignité de la personne, mort et résurrection.
3- Les applications : éducation et culture…
A la question : « Le christianisme a-t-il un caractère spécifique » ? Xavier Dufour répond d’emblée :
C’est la venue de Dieu chez l’homme. Depuis que Dieu a pris visage humain, il nous faut nous tourner
vers le Christ.
Pourquoi les mots : Corps – âme – esprit ont-ils une signification ambigüe ?
Quel est le sens de ces 3 mots de l’anthropologie chrétienne ?
-
Le corps désigne la personne humaine dans son existence physique, matérielle.
L’âme est le principe de vie (naturelle) du corps.
l’esprit est le principe de vie (surnaturelle) de l’âme dans sa relation avec Dieu. C’est un
souffle de Dieu.
Les premiers chrétiens ont réfléchi sur la personne humaine, en tant que témoins du relèvement
(résurrection) du Christ par Dieu et dans le cadre de leur culture grecque. Donc, leur base de
réflexion a été constituée par la Bible et les philosophes de l’antiquité.
L’apport de la philosophie
Les philosophes ont pensé l’homme comme corps et âme.
Pour Platon, l’être humain est composé d’un élément immortel : l’âme et d’un élément périssable : le
corps. L’âme existait avant d’être introduite dans le corps, et elle existera après notre mort. Dans
cette conception dualiste, le corps est remplaçable ; seule compte l’âme. C’est aussi ce que disent le
bouddhisme et l’hindouisme.
Chez les grecs, Platon a eu un grand disciple Aristote pour qui âme et corps sont
inséparables. Donc, je suis l’unité indivisible et vivante d’un corps et d’une âme.
Que serait un corps sans âme ? Ce serait un cadavre.
Il n’y a un corps que s’il y a une âme et l’âme est l’âme d’un corps spécifique
On peut distinguer :
- l’âme végétative : les végétaux
- l’âme sensitive : propre aux animaux
- l’âme rationnelle : chez l’homme qui contient toutes les dimensions : végétative, sensible et
rationnelle.
L’apport de la Bible
La Bible s’intéresse à l’homme entier. Par exemple : « Mon âme a soif du Dieu vivant ».
La Bible dit « mon âme » car elle se centre sur le désir de l’homme.
Dans « Je crois en la résurrection de la chair » c’est toute la personne humaine qui est concernée.
Pour la Bible, il y a trois façons de considérer la personne :
-
Le corps : du point de vue de la fragilité, de la dépendance de l’homme ; c’est l’homme dans
sa vulnérabilité.
L’âme : c’est-à-dire le souffle vital, ce qui donne la vie au corps.
L’esprit qui insuffle l’haleine de vie. Le souffle de Dieu. C’est le fait que tout homme est
mystérieusement relié à Dieu par le fond de sa personne, car il est porteur de l’esprit de
Dieu.
Saint Paul, juif pharisien de grande culture fait cette synthèse à partir de la Bible et des philosophes.
(En grec, soma= le corps, psyché=l’âme et pneuma= l’esprit.) :
« Que le Dieu de la paix lui-même vous sanctifie tout entiers, et qu’il garde parfaits et sans reproche
votre esprit, votre âme et votre corps, pour la venue de notre Seigneur Jésus-Christ (1th 5,23).
Quels sont les « enjeux de cette anthropologie ?
Aujourd’hui, avec un héritage biblique fort, notre culture chrétienne est très discutée, il
convient donc de se plonger dans cette vision de l’homme.
Affirmer l’existence de l’âme
Notre corps n’est pas qu’un tissu d’organes, de structure osseuse, etc…
Le corps matériel n’est pas le tout de la vie. C’est ce que veut signifier la dialectique grecque d’âme
et corps. C’est ce que le peuple hébreu tentait de dire également avec son anthropologie ternaire :
l’être humain n’est pas seulement chair, il est aussi cette néphesh, cette réalité personnelle animée
par le souffle de Dieu.
L’unité de l’âme et du corps
Dans la vision biblique, l’homme est unité âme-corps-esprit. Dans un monde marqué par le
matérialisme, des biologistes notamment, pensent que les sentiments résultent des liens avec la
matière du corps (la pensée serait réduite à des mouvements électriques dans les neurones). En
culture chrétienne, le corps est investi de la même destinée que l’âme.
La théorie de la réincarnation est incompatible avec la Bible car l’âme, le corps et l’esprit forment un
ensemble unique.
La sexualité
C’est le lieu où toute la personne est engagée. Toute mon intelligence, mon histoire, sont
engagées. Donc, la sexualité devrait intégrer l’unité de la personne. Aujourd’hui, on dit « le sexe » et
non « sexualité ». La bonne nouvelle, c’est que la personne est plus grande que le sexe.
La mort et la résurrection
Le christianisme est né d’un évènement qui est le relèvement de Jésus de la mort. Donc, le
christianisme peut parler de la mort et de la résurrection. La mort vient briser l’âme et le corps. La
mort est un drame car je suis fait pour être corps et âme.
Comme nous le dit Saint Paul, lorsque le Christ reviendra, le dernier ennemi qu’il vaincra sera
la mort.
La résurrection, c’est le relèvement de la personne tout entière de la mort.
Le récit des disciples d’Emmaüs nous rappelle que le Christ ressuscité a la mémoire des
stigmates de la Passion. Le corps glorieux du Christ est un corps spirituel. Ce récit nous aide à
comprendre la mort et la résurrection de tout homme. La résurrection à la fin des temps, fait passer
d’un corps psychique (âme et corps) à un corps spirituel (glorieux), à l’image du Christ Ressuscité,
comme nous le fait connaitre Saint Paul.
La personne du Christ
Le Christ a un corps humain, une âme humaine. Il a assumé toutes les souffrances des hommes. Il a
pris conscience de sa condition humaine. La personne est sauvée grâce à l’âme du Christ.
L’esprit
L’âme humaine est mémoire, conscience des droits et devoirs, recherche du vrai, volonté de me
construire. L’homme se caractérise par sa liberté. Est-ce une liberté totale, absolue ? Cette liberté, je
l’ai reçue comme un don d’une source dont je ne connais pas le nom. L’esprit, c’est prendre
conscience que Dieu désire mon amour. « Dieu plus intérieur à moi que moi-même ». La source de
notre être, c’est le Dieu d’amour. Notre liberté se reçoit d’une autre Liberté (la liberté divine).
Applications concrètes
1 la psychologie
Chacun a un héritage psychologique, des émotions, de la mémoire, une histoire…. Dans l’échange
des regards, je peux retenir de mon interlocuteur, qu’il est tendu, calme ou joyeux…
L’âme, c’est l’intériorité. Est-ce que je suis seulement mes blessures ? Comment se sentir épanoui,
zen… ? On peut être très superficiel. Quelqu’un est autre chose que son histoire. Il faut-être attentif à
cette histoire, mais il y a un risque de l’enfermer. Un enfant est plus que son histoire.
Oui à la psychologie, mais plus que cela, oui à la liberté.
2 la liberté
C’est la capacité de se déterminer de l’intérieur. Cela repose sur l’intelligence (l’analyse, le choix) et
la volonté (la réalisation). Notre société survalorise la liberté et ne cesse de nous dire que nous ne
sommes pas libres.
Le risque est de s’autonomiser ou de psychologiser à outrance.
Donc travailler sur cette contradiction :
-
se libérer de tout, tout en prenant en compte les conditionnements qui pèsent sur moi.
Exemples de désordres dans l’éducation :
- une liberté dégagée de toute règle,
- l’Amour, ça ne tient pas !
- La famille se fragilise !
- C’est difficile d’être ado… !
3 l’éducation
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Permettre à un jeune de s’approprier sa propre liberté.
Accompagner un jeune
Dialogue entre 2 libertés
La limite est faite pour que l’enfant se développe.
Pour éduquer un homme, il faut avoir une certaine vision de l’homme.
Au début du siècle, les instituteurs laïcs avaient la même vision de l’homme que les prêtres.
2 visions de la sexualité : - C’est secondaire,
- c’est essentiel pour l’engagement.
4 la culture
Le propre de l’homme : s’interroger sur lui-même, sur son mystère. Pourquoi les cathédrales, les
arts… ? La culture est totalement nécessaire. Culture = ensemble des interrogations.
C’est le christianisme, c’est Jésus Christ qui a apporté une bonne nouvelle pour l’homme.
Aujourd’hui, le christianisme est-il capable de se révéler dans la culture ? Le film qui attire, sur
Tibhirine, (3 millions d’entrées) fait par un incroyant : il dit la vérité chrétienne la plus totale : aller
jusqu’à donner sa vie pour l’homme. C’est la vérité de l’homme. Merci, Seigneur, c’est une
révélation !
Questions – Réponses
Après la conférence de Xavier Dufour
40 questions ont été posées par les auditeurs. Xavier Dufour les a rassemblées en 3 groupes
-
L’anthropologie : corps – âme – esprit
La résurrection,
Dans l’éducation, quel est notre message de chrétien ?
Compte tenu du temps limité, il a ensuite donné une réponse succincte à une dizaine de questions
1 L’Islam a-t-il la même anthropologie ?
L’Islam a un héritage reconnu. Certaines choses sont tirées de la Bible, mais il y a un refus de dire que
l’homme a été créé à l’image de Dieu.
2 Rapport entre cerveau et âme
L’âme a sa dimension vitale. Elle a besoin du cerveau, mais ne se réduit pas au cerveau. Il n’y a pas
que le cerveau qui parle. Cela montre que l’âme diffuse dans le corps. L’âme a besoin du corps.
3 La conscience
C’est un mot contemporain. Dans l’âme humaine, il y a mémoire intelligence et volonté.
La conscience, c’est la mémoire.
4 les maladies de la personnalité
Ex Alzheimer. La vision chrétienne va plus loin pour comprendre la personnalité qui jaillit de Dieu au
plus profond du moi, même si la personne a perdu ses facultés de mémoire et d’intelligence.
5 Une émotion peut retentir dans le corps
Exemple du cancer. La personne humaine est unité. Une conversion peut retentir sur le psychisme et
aller vers un épanouissement de la personne. La dépression (psychisme) est significative d’un impact
physique. Elle peut aussi venir du refus du spirituel.
6 Les fins dernières
La réincarnation : dans le bouddhisme, ma condition corporelle est temporaire et douloureuse. D’où
le cycle de réincarnation où je crois voir l’expérience du Bouddha. C’est incompatible avec la
conception unitaire de la personne.
La résurrection : La mort est un drame. Jésus lui-même a pleuré devant le caveau de son ami Lazare,
mais l’amour est assez fort pour relever de la mort.
7 le Credo
Dit la foi en la résurrection de la chair. C’est la résurrection de toute la personne.
8 Une personne affectée d’une maladie mentale face à la mort.
C’est par l’esprit que nous serons unis à Dieu.
9 L’âme séparée du corps dans la mort
Voir le Catéchisme de l’Eglise Catholique p 214.
« Dans la mort, séparation de l’âme et du corps, le corps de l’homme tombe dans la corruption
(périssable), alors que son âme va à la rencontre de Dieu, tout en demeurant en attente d’être réunie
à son corps glorifié. Dieu dans sa Toute-Puissance rendra définitivement la vie incorruptible
(immortelle) à nos corps en les unissant à nos âmes, par la vertu de la Résurrection de Jésus »
10 Comment faut-il voir la résurrection ?
On peut se référer en particulier, à l’apparition de Jésus ressuscité aux deux disciples sur le chemin
d’Emmaüs.
C’est bien le Christ qu’ils reconnaissent, mais ils ne le reconnaissent pas totalement. C’est par la foi
que nous reconnaissons nous aussi la résurrection…
« Comment les morts ressuscitent-ils ? » Cela dépasse notre imagination et notre entendement ; ce
n’est accessible que dans la foi.
11 Que peut dire l’Eglise à la société.
L’Eglise est faite pour rencontrer l’humanité.
Sur l’éducation morale et l’éducation religieuse : Montrer la beauté de la sexualité et sa grandeur et
d’autre part l’appauvrissement que suscite une vision ludique.
Avoir le courage de contester la libération sexuelle.
Si c’est une gymnastique ludique, est-ce que ça rend plus heureux ?
Il y a un engagement pastoral du couple qui en montre la beauté.
Comment faire passer cette vision de l’homme dans les médias ? Il faut des chrétiens qui témoignent
pour la grandeur de l’homme. L’éducation religieuse et biblique ne peut se faire que par une vie
spirituelle qui témoigne.
Recueilli par Michel Cronenberger et Michel Mitton
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