Hormonothérapie adjuvante des cancers du sein : nouveautés

OPIO SFCP MARS 2009
HORMONOTHERAPIE ADJUVANTE DES CANCERS DU SEIN : NOUVEAUTES CONGRES SAN-
ANTONIO, SAINT-GALLEN, SAINT-PAUL.
Dr Anne-Claire Hardy-Bessard.
L’efficacité de l’hormonothérapie adjuvante par inhibiteurs de l’aromatase a été largement démontrée
en termes de réduction d’événements spécifiques du cancer pour les patientes ménopausées
présentant un cancer du sein hormono-dépendant. Nous exposerons les résultats actualisés des
grandes études d’hormonothérapie adjuvante et nous conclurons par les recommandations des
experts sur ce sujet.
San-Antonio Breast Cancer Symposium.
Résultats de la méta-analyse d’après les essais randomisés d’hormonothérapie adjuvante comparant
inhibiteurs de l’aromatase (IA) versus tamoxifène (Tam) en monothérapie ou en séquentiel par J Ingle.
Cette méta-analyse compare l’efficacité des IA de troisième génération (Anastrazole, Letrozole,
Exemestane) à celle du Tam. L’analyse d’efficacité a exclu les patientes RE négatifs ou indéterminés.
L’hormonothérapie est administrée pour une durée de 5 ans;
En monothérapie (Tam ou IA pendant 5 ans) pour la cohorte N°1 regroupant les essais ATAC,
BIG 1-98 et IBCSG 18-98.
En séquentiel (Tam pendant 2-3 ans puis relais par IA) pour la cohorte N°2 regroupant les
essais ABCSG 8, ARNO 95, IES/ BIG 2-97 et ITA.
Pour la cohorte 1 qui concerne 9856 patientes avec un suivi médian de 5,9 ans, le traitement par IA
diminue significativement le risque de récidive à 8 ans par rapport au Tam.
Ce gain reste proportionnel dans le temps, après Tam, le risque de récidive à 5 et 8 ans est de 12,6%
et 19,2%, alors qu’il est à 9,6% et 15,3% après IA (logrank 2P ‹ 0,00001).
Ce gain en survie sans récidive ne se traduit cependant pas par une diminution de la mortalité
spécifique du cancer du sein (environ 10% à 8 ans quelque soit l’hormonothérapie).
Pour la cohorte 2 qui concerne 9015 patientes avec un suivi médian de 3,9 ans, il existe également un
bénéfice en survie sans récidive avec les IA. En effet, le switch par IA après Tam diminue
significativement le risque de récidive (8,1% et 16,1% à 5 et 8 ans avec Tam versus 5% et 12,6%
après switch, logrank 2P ‹ 0,00001). Contrairement à la cohorte 1, ce gain s’accompagne d’une
diminution modérée mais significative de la mortalité spécifique du cancer du sein (1,6% à 6 ans).
Mise à jour des essais :
BIG-1-98/ IBCSG 18-98 (1).
8010 patientes ménopausées ayant un cancer du sein RH+ ont été incluses entre 1999 et 2003. Elles
ont reçu une hormonothérapie adjuvante selon un schéma comparant monothérapie et administration
séquentielle (1).
L’analyse du schéma monothérapie (Tam versus Letrozole pendant 5 ans) concerne 4922 patientes
avec un suivi médian de 76 mois et porte sur deux populations:
La première en intention de traiter,
La seconde en tenant compte du cross-over faisant suite aux résultats de 2005 qui avaient
montré la supériorité du Letrozole.
Les résultats confirment le net bénéfice en survie sans récidive en faveur du Letrozole, quelque soit
l’analyse effectuée.
L’analyse des schémas séquentiels a comparé chacun des bras séquentiels au bras Letrozole 5 ans.
Il n’y a pas de différence significative pour ces 6182 patientes après un suivi médian de 71 mois en
terme de survie sans récidive, survie globale et survenue de métastases à distance.
Le sous-groupe des patientes pN+ pourrait avoir un avantage en SSR avec le schéma Let / 5 ans en
comparaison au schéma Let / Tam.
L’actualisation des données de cet essai permet de conclure :
Les patientes ayant un risque de récidive précoce auraient avantage à débuter leur
hormonothérapie adjuvante par Letrozole.
Le relai par Tam après 2 ans d’IA peut-être proposé en particulier pour les patientes pN0.
Il faut améliorer la prise en charge après 5 ans afin de limiter les récidives tardives.
ABCSG 8 (2).
Cette étude évalue l’effet de l’hormonothérapie séquentielle (Tam 2 ans suivi d’Anastrozole 3 ans) sur
la SSR par rapport au Tam x 5 ans. La population sélectionnée est celle des femmes ménopausées
âgées de moins de 80 ans, ayant un cancer du sein avec un risque de récidive faible ou modéré, RE+
et/ou RP+, ne recevant pas de chimiothérapie adjuvante (n= 3714).
Avec un recul médian de 72 mois, le schéma séquentiel diminue significativement (HR = 0,82, p =
0,038) le risque de récidive par rapport au Tam, quelque soit l’âge de la patiente, le grade ou le statut
RP de la tumeur.
Pour la survie globale, le gain avec le schéma séquentiel est modéré (HR = 0,77, p = 0,025) car la
différence du nombre de décès liés au cancer est faible dans cette population âgée où les décès non
liés au cancer dominent.
En conclusion, la séquence Tam suivi par Anastrozole améliore la SSR et la survie globale à 5 ans
pour la population considérée.
TEAM (S Jones).
En 2001, cet essai comparait Exemestane vs Tam pendant 5 ans. Le traitement hormonal était initié
dans les 10 semaines suivant la chirurgie R0 ou la fin de la chimiothérapie chez des patientes
ménopausées, ER+ et/ou RP+.
Les résultats de l’Inter Exemestane Study ont conduit à modifier le design de l’essai en 2004 qui,
depuis, compare Exemestane 5 ans à Tam 2-3 ans suivi d’Exemestane 2-3 ans (durée totale de 5
ans).
L’analyse intermédiaire à 2,75 ans ne porte que sur les patientes avant le switch par IA et montre une
équivalence en terme de survie sans récidive, avec toutefois un délai de survenue des métastases
plus long dans le bras Exemestane (HR : 0,81 ; p ‹ 0,02).
Une mauvaise observance des traitements a été relevée chez 29,5% des patientes sous Tam et
18,9% sous Exemestane. Lorsque l’analyse censure ces patientes, on assiste à un gain en SSR pour
le groupe Exemestane (HR : 0,83 ; p = 0,02). Le profil de tolérance était sans surprise.
Nous attendons en 2009 les résultats de la comparaison Exemestane à Tam suivi d’Exemestane.
ZO-FAST (H Eidtmann).
Cette expérience concernant l’utilisation en situation adjuvante de l’acide zolédronique a été menée
chez 1065 femmes traitées par Letrozole et présentant un score T - 2.
L’objectif principal était le changement de la densité minérale osseuse à 12 mois. La randomisation
distinguait l’administration immédiate de l’acide zolédronique (4 mg deux fois par an) et celle différée,
où l’acide zolédronique n’était administré qu’après l’apparition d’un score T ‹ - 2 ou d’une fracture.
Les résultats objectivent que le traitement immédiat prévient significativement le risque d’ostéoporose
sous inhibiteur de l’aromatase et permet de maintenir une densité osseuse correcte.
Il semble qu’il existe également un gain significatif en survie sans récidive après administration d’acide
zolédronique d’emblée versus administration différée.
Cet effet anti-tumoral de l’acide zolédronique devra être vérifié par d’autres études.
Saint-Paul de Vence, Janvier 2009.
L’hormono sensibilité est définie par : présence de RE ou RP ≥ 10%.
Le niveau d’hormono sensibilité est :
Elevé si RE et RP sont › 50% et intensité à 2 +.
Partiel si RE ou RP sont › 50% et intensité à 2 +, ou si RE et RP ‹ 50%.
Recommandations sur l’hormonothérapie adjuvante de la femme non ménopausée :
Après chimiothérapie, cinq ans de traitement par Tam, pas de traitement séquentiel, pas de
suppression ovarienne systématique, pas d’IA.
En cas d’hormonothérapie seule, Tam pendant cinq ans, pas de traitement séquentiel.
Recommandations sur l’hormonothérapie adjuvante de la femme ménopausée :
Chez la femme ménopausée RH+, le choix est donné entre cinq ans de traitement par IA ou
un traitement séquentiel par IA et TAM.
Il en est de même pour les femmes âgées de plus de 70 ans, pour lesquelles le choix est
guidé par l’évaluation des risques ostéoporotique et thrombo-embolique (niveau 1, grade A et
accord d’expert).
Saint-Gallen Mars 2009.
Est-ce que le Ki67 devrait être utilisé pour le choix de l’hormonothérapie ? Non à 59%.
Hormonothérapie pour les femmes non ménopausées :
1. Tam monothérapie ? Oui à 87%.
2. Suppression ovarienne + Tam ? Oui à 87%.
3. Suppression ovarienne seule ? oui à 79%.
Hormonothérapie pour les femmes ménopausées :
1. Doivent-elles toutes recevoir un inhibiteur de l’aromatase ? Oui à 68%.
2. Certaines doivent-elles recevoir le Tam en monothérapie ? Oui à 73%.
3. A quel moment l’inhibiteur de l’aromatase doit-il être donné ?
Comme traitement initial ?
Après deux ans ?
Après cinq ans ?
AI pendant deux ans suivi par Tam ?
Pas de vote à la 3ème question, toutes les réponses sont valides.
Est-ce que le choix d’un AI ou de Tam devrait dépendre du profil biologique tumoral ? Oui à 56%.
Est-ce que cinq ans représentent une durée convenable pour les traitements avec inhibiteur de
l’aromatase ? 38% oui, 23% non, 38% ne sait pas.
En conclusion, les essais d’hormonothérapie adjuvante ont démontré un avantage des IA en terme de
réduction d’événements spécifiques du cancer du sein, mais aucun impact sur la survie globale.
1. Coates AS, Keshaviah A, Thurlimann B, et al. Five years of letrozole compared with tamoxifen
as initial adjuvant therapy for post-menopausal women with endocrine responsive early breast
cancer: update of study BIG-1-98. J Clin Oncol 2007; 25: 486-492.
2. Jacesz R, Jonat W, Gnant M, et al. Switching of post-menopausal women with endocrine
responsive early breast cancer to anastrozole after 2 years adjuvant tamoxifen: combined
results of ABCSG trial 8 and ARNO 95 trial. Lancet 2005; 366: 455-462.
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