III/ Depuis 1981, la gauche gouverne et se perd

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III/ Depuis 1981, la gauche gouverne et se perd.
A/ les gauches gouvernent
1/ dans une période complexe
- C’est le grand changement par rapport à l’avant 81 : la gauche va gouverner le pays, à
plusieurs reprises, jusqu’en 2002, soit en contrôlant la présidence, l’AN et le gvt ( 19811986 ; 1988-1993 ; soit en contrôlant la présidence ( 1986-88, 1993-95) ; soit l’AN ( 19972002). Cette longue expérience des affaires a complètement transformé la gauche :
- Confrontation normale entre les idées élaborées dans l’opposition et
l’administration du pays ; entre idéal et réalité ; entre objectifs à long terme et gestion du
quotidien ;
- Confrontation résultant aussi de :
- la coopération entre différents partis de gauche ;
- périodes de cohabitation avec la droite : où ni les uns ni les autres
ne peuvent vraiment appliquer leurs idées :
-Confrontation à des bouleversements économiques, sociaux, géopolitiques,
culturels, majeurs : fin de la guerre froide et de l’URSS , mondialisation libérale de
l’économie, essor de l’individualisme, essor des inégalités et des segmentations socioculturelles, etc
Dès 1981, la gauche est donc mise à rude épreuve.
2/ dont il résulte un pluralisme renouvelé.
a : l’effondrement du PCF: dans les années 1980-1990 le PC
accentue un déclin qui l’entraîne à recueillir moins de 5% de voix à la fin du siècle. Cette
agonie s’explique d’abord par le fait que ce parti est lié à une période historique qui se
termine : L’URSS disparaît en 1991, or le PCF était resté très fidèle au modèle
soviétique ; la classe ouvrière, où le parti concentrait l’essentiel de son électorat,
s’effondre avec la désindustrialisation du pays. Or le PCF ne parvient pas à s’adapter à
une société qui change. Il n’attire même plus les classes populaires, qui, quand elles
expriment leur mécontentement et leur détresse face aux difficultés sociales, se tournent
plus volontiers vers l’extrême droite, ou l’abstention.
b : l’écologie est-elle de gauche ?
En France, comme dans d’autres pays européens, les mouvements écologistes deviennent,
dans les années 1990, des forces politiques qui rallient à leurs idées un nombre croissant
de personnes, quoique ne dépassant pas 10% aux élections. Mais cette famille écologiste
est très divisée dès lors qu’il s’agit de poser la question fondamentale suivante : un monde
respectueux de l’environnement peut-il être organisé par un système capitaliste
productiviste ? Une partie des écologistes répondant non à cette question, rencontrent
alors les préoccupations des gauches qui veulent réformer le capitalisme. Ils sont portés
par l’essor et la médiatisation des mouvements altermondialistes, à partir de 1999 ; mais
aussi par le souci croissant d’une partie des classes aisées et moyennes de privilégier une
certaine qualité de vie. Ils fondent le parti des Verts, et , entre 1997 et 2002 font partie de
la majorité dite de gauche plurielle construite par le PS. Mais ils ne parviennent pas à
séduire massivement durant cette période : pour beaucoup de Français, le choix de
l’écologie est un choix individuel et qui coûte cher ; attachés au modèle de la société de
consommation et à défendre leur pouvoir d’achat, ils craignent que les écologistes les
entraînent vers des ruptures trop radicales pour leur niveau de vie. Enfin, dans un monde
libéral et soumis à une concurrence commerciale de plus en plus dure, les écologistes
apparaissent comme des utopistes.
c : un PS hégémonique mais fragile
Une dernière raison pouvant expliquer les difficultés des Verts, c’est le poids
hégémonique du PS, qui a les moyens d’imposer ses choix à ses partenaires de gauche qui
ne pourraient exercer le pouvoir sans lui.
Le PS des années 1980-90 est le premier parti de France regroupant
1/3 à 40% des électeurs. Cette puissance, sa présence au gouvernement, lui donnent une
assise que jamais les socialistes eurent dans leur histoire : nombreux militants, accès aux
medias, société s’organisant autour de leurs idées.
Mais ils apparaissent dans le même temps très fragiles :
-ils connaissant par exemple une grosse défaite électorale en 1986, moins de 5
ans après leur arrivée au pouvoir ;
- n’ayant plus jamais de majorité absolue au Parlement, après 1986, ils sont
constamment critiqués par leurs partenaires qui les menacent sans cesse de ne plus les
soutenir ;
- en démocratisant leurs pratiques politiques, en multipliant les débats avec
l’opinion, ils se fragilisent car leurs divisions apparaissent au grand jour et entraînent des
luttes entre les différents leaders du parti, attachés à attirer le plus de militants,
d’adhérents, en faveur de leurs idées et de leur personne. Enfin, ils ont un électorat très
hétérogène, changeant, et aux intérêts parfois contradictoires : les socialistes s’adressent
en fait surtout aux classes aisées et moyennes instruites, qui ne souhaitent pas forcément
changer radicalement la société ; ils s’ancrent peu dans les classes populaires, et chez tous
ceux qui souhaiteraient au contraire des transformations plus profondes que celles
proposées par les socialistes. En 1981, le PS a gagné les élections parce qu’il caressait
l’espoir d’être le grand parti des classes populaires et moyennes. Force est de constater
que dès le milieu des années 1980 il a échoué.
-
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B/ Une conversion à un certain pragmatisme libéral.
1/ Le tournant libéral de 1983-4
les réformes de 1981-82 appliquent la plus grande partie des 110 propositions du
programme commun. Mais sur le plan économique et social elles sont un échec :
croissance faible, montée du chômage, ne permettant pas à l’Etat et aux entreprises de
se désendetter, perte de compétitivité des produits français. Cela s’effectue dans un
contexte international nouveau, où tous les pays industrialisés, adoptent des politiques
libérales de relance de la croissance par la priorité donnée aux investissements et non à
la consommation ; Cette logique libérale passe par un désengagement de l’Etat de
l’économie, une plus grande liberté des entreprises face à l’embauche et aux salaires,
une plus grande ouverture sur l’étranger pour conquérir de nouveaux marchés. Isolée,
craignant un déclin durable de la France dans ces conditions, la France décide à son
tour une conversion progressive au libéralisme.
Elle se traduit immédiatement par le départ des communistes du gouvernement, puis
par la défaite électorale de 1986, une partie des Français s’estimant trahie par ce choix
libérale, une autre décidée à sanctionner l’échec économique de la gauche.
2/ De 1988 à 2002 : une ligne de plus en plus difficile à
tenir.
-
Durant cette période où la gauche revient au pouvoir, elle acquiert une compétence
égale à la droite en matière de gestion de l’économie. Les politiques d’un Michel
Rocard, premier ministre en 1998-90, ou d’un Lionel Jospin entre 1997 et 2002, sont
souvent appréciées par les marchés financiers. Mais ce que la gauche gagne en
capacité de gestion, elle le perd dans tous les domaines qui faisaient son identité, à
savoir un objectif : changer la société pour aller vers une démocratie sociale.
-
Or la gauche, comme la droite d’ailleurs, est alors sous l’emprise de l’économisme :
toute l’action politique est subordonnée aux résultats économiques : chiffre d’affaire
des entreprises, taux de croissance, inflation des prix, conquête des marchés. La vie
politique devient une affaire d’experts, de spécialistes de la chose économique, qui
vont imposer aux hommes politiques leur vision du monde, une insertion de la France
dans une économie mondialisée où les gouvernements ont pour tâche d’aider les
entreprises et les banques à dégager de la croissance pour permettre le développement.
Il n’appartient pas ici de juger le bien fondé ou non de ces choix mais d’en voir les
conséquences sur le plan politique :
-
De plus en plus de gens finissent par dire qu’ils ne voient plus de différences entre
droite et gauche de gouvernement ;
-
Une grande partie de la classe politique se coupe des citoyens, au nom de la
complexité grandissante des affaires.
-
La gauche spécialiste de gestion économique, perd de fait l’objectif de changer la
société : les programmes du PS, par exemple, sont de moins en moins ambitieux sur ce
plan, donnant finalement l’impression que le socialisme est parvenu à la fin de sa
tâche historique : le temps des transformations est achevé.
Pourtant, les années 1990- 2002 sont celles de la montée de la précarité, ce qu’on
appelle alors la nouvelle pauvreté de masse ; la désindustrialisation du pays s’accélère avec
les délocalisations ; la baisse du chômage n’est jamais suffisante pour passer au-dessous de la
barre de 2 millions de chômeurs ; la mondialisation fragilise des catégories entières de
populations, plus assez qualifiées ; la concurrence internationale pousse les entreprises à
limiter davantage les hausses de salaires, à exiger plus de performance de la part des salariés ;
la société devient pluriethnique ; enfin le mouvement pluriséculaire qui conduit les pays
occidentaux vers plus de liberté de l’individu et d’individualisme, dans un contexte
idéologique libéral qui privilégie l’individu au détriment de la collectivité, produit une mise
en cause des solidarités collectives : sécurité sociale, services publics, système de retraite.
C’est peu à peu un monde nouveau qui apparaît et qui entraîne dans cette phase initiale, des
peurs, des questionnements, des inégalités nouvelles, de l’incompréhension. Or face à ces
nouveaux défis, la gauche, et singulièrement celle qui est au pouvoir n’apporte ni réponse ni
solution ni ligne directrice aux yeux du moins d’une majorité de Français qui vont se
détourner d’elle, durablement après 2002.
-
C/ Une gauche condamnée à disparaître ?
1/ Qu’est-ce que la gauche en 2010 ?
sur le plan des institutions, la gauche est extrêmement diverse et divisée aujourd’hui :
PS, NPA, Front de GAUCHE, LO, Europe Ecologie, PCF, Fédération Anarchiste, etc.
On retrouve une diversité qui a toujours accompagné l’histoire des gauches. La
caractéristique actuelle, outre la quasi disparition du PCF, c’est la multiplicité de
forces radicales, c’est à dire plus favorables que le PS à des mesures de rupture avec le
capitalisme libérale. Cette gauche de la gauche représente aujourd’hui 12 à 15% des
électeurs. Elle est l’héritière des gauches révolutionnaires des XIX e XXe s, socialiste
au sens où elle veut changer radicalement la société dont elle explique les difficultés
actuelle par les inégalités créée par le capitalisme libéral. Cette gauche s’est ressourcée
depuis dix ans en s’intégrant au vaste mouvement altermondialiste international.
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Cette diversité des organisations de gauche aujourd’hui traduit celle de l’opinion
publique, elle aussi très diverse. Une enquête de la sofres en 2007 a montré que les
électeurs de gauche ont peu de points communs entre eux si ce n’est la certitude de
vivre dans une société inégalitaire et qu’il faut lutter pour plus d’égalité par des
programmes sociaux. Mais en ce qui concerne, la liberté des mœurs, la justice, l’UE,
l’école, les services publics, les électeurs de gauche sont très divisés, une partie
d’entre eux ne se distinguant plus de la droite. Il est cependant possible, d’après
certains analystes politiques, que la politique très idéologique menée par les autorités
depuis 2007, ait conduit une part de cette électorat de gauche à revenir à des positions
de gauche plus traditionnelles . Mais c’est loin d’être évident car :
2/ la gauche, vers un déclin irrémédiable ? ( infos sur les thèses de Raffaele
Simone que je vous ai distribuées)
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