- Durant cette période où la gauche revient au pouvoir, elle acquiert une compétence
égale à la droite en matière de gestion de l’économie. Les politiques d’un Michel
Rocard, premier ministre en 1998-90, ou d’un Lionel Jospin entre 1997 et 2002, sont
souvent appréciées par les marchés financiers. Mais ce que la gauche gagne en
capacité de gestion, elle le perd dans tous les domaines qui faisaient son identité, à
savoir un objectif : changer la société pour aller vers une démocratie sociale.
- Or la gauche, comme la droite d’ailleurs, est alors sous l’emprise de l’économisme :
toute l’action politique est subordonnée aux résultats économiques : chiffre d’affaire
des entreprises, taux de croissance, inflation des prix, conquête des marchés. La vie
politique devient une affaire d’experts, de spécialistes de la chose économique, qui
vont imposer aux hommes politiques leur vision du monde, une insertion de la France
dans une économie mondialisée où les gouvernements ont pour tâche d’aider les
entreprises et les banques à dégager de la croissance pour permettre le développement.
Il n’appartient pas ici de juger le bien fondé ou non de ces choix mais d’en voir les
conséquences sur le plan politique :
- De plus en plus de gens finissent par dire qu’ils ne voient plus de différences entre
droite et gauche de gouvernement ;
- Une grande partie de la classe politique se coupe des citoyens, au nom de la
complexité grandissante des affaires.
- La gauche spécialiste de gestion économique, perd de fait l’objectif de changer la
société : les programmes du PS, par exemple, sont de moins en moins ambitieux sur ce
plan, donnant finalement l’impression que le socialisme est parvenu à la fin de sa
tâche historique : le temps des transformations est achevé.
- Pourtant, les années 1990- 2002 sont celles de la montée de la précarité, ce qu’on
appelle alors la nouvelle pauvreté de masse ; la désindustrialisation du pays s’accélère avec
les délocalisations ; la baisse du chômage n’est jamais suffisante pour passer au-dessous de la
barre de 2 millions de chômeurs ; la mondialisation fragilise des catégories entières de
populations, plus assez qualifiées ; la concurrence internationale pousse les entreprises à
limiter davantage les hausses de salaires, à exiger plus de performance de la part des salariés ;
la société devient pluriethnique ; enfin le mouvement pluriséculaire qui conduit les pays
occidentaux vers plus de liberté de l’individu et d’individualisme, dans un contexte
idéologique libéral qui privilégie l’individu au détriment de la collectivité, produit une mise
en cause des solidarités collectives : sécurité sociale, services publics, système de retraite.
C’est peu à peu un monde nouveau qui apparaît et qui entraîne dans cette phase initiale, des
peurs, des questionnements, des inégalités nouvelles, de l’incompréhension. Or face à ces
nouveaux défis, la gauche, et singulièrement celle qui est au pouvoir n’apporte ni réponse ni
solution ni ligne directrice aux yeux du moins d’une majorité de Français qui vont se
détourner d’elle, durablement après 2002.
C/ Une gauche condamnée à disparaître ?
1/ Qu’est-ce que la gauche en 2010 ?
- sur le plan des institutions, la gauche est extrêmement diverse et divisée aujourd’hui :
PS, NPA, Front de GAUCHE, LO, Europe Ecologie, PCF, Fédération Anarchiste, etc.