- L’évocation d’un événement historique à l’étage inférieur : un enjeu clef dans la politique de
domination aztèque.
La bataille évoquée sur ce dessin renvoie aux deux premières conquêtes aztèques (celles des
villes de Colhuacan et de Tenayuca), qui auraient marqué le début d’une ascension implacable. En
fait, il semble qu’il faille relativiser cette victoire, et l’inscrire plutôt dans une geste relevant plus de
la propagande que de l’histoire.
→ Pour ce peuple jeune à l’échelle de l’histoire de la Méso-Amérique, en plein essor à l’arrivée des
Espagnols, l’histoire a constitué très tôt un énorme enjeu de légitimation du pouvoir, en invoquant
une destinée d’essence divine et une série de victoires irrésistibles. La politique extérieure, dominée
par la guerre de conquête et la nécessité de maintenir un contrôle brutal, a trouvé un puissant
justificatif dans la politique instaurée par Tlacaelel (personnage central du XVe siècle qui conseilla
trois empereurs), reposant sur la propagande officielle alliée à la destruction des archives des
peuples vaincus.
2) Une évocation géographique ?
Par plusieurs aspects, ce document permet de retrouver la configuration de la capitale aztèque telle
que l’ont décrite les Espagnols :
- Un site peu ordinaire : la Venise américaine
Tenochtitlan est bâtie sur des ilots d’une vaste lagune: le lac Texcoco est ici évoqué par la
bordure de l’image supérieure. C’est donc une ville lacustre.
- La croix de Saint André : la division en 4 quartiers et les 4 voies d’accès
La bourgade construite au milieu des roseaux s’est considérablement accrue, consolidée et
embellie, dans le respect de règles urbanistiques alors inconnues en Europe, notamment avec la
division en quartiers, les calpuli. Au nombre de quatre, ils représentent des unités territoriales
correspondant probablement à d’anciens clans. Ils sont évoqués par la croix qui, partageant l’image
en 4, ne traduit pas seulement les données urbanistiques de la capitale : le chiffre 4 correspond à une
conception religieuse de l’univers.
- Le grand temple, centre religieux de l’empire, de l’Etat, de la cité
Il est représenté au dessus de l’aigle. C’est en fait une grande pyramide à degrés, au cœur
d’un vaste ensemble cérémonial comportant une quarantaine de monuments, le tout s’inscrivant
dans la tradition des grandes civilisations antérieures, en particulier Teotihuacan. La pyramide
portait à son sommet deux temples, consacrés à Huitzilopochtli, le dieu tribal des Mexicas, et à
Tlaloc, la grande divinité amérindienne : le premier préside à la guerre, le second aux activités
agricoles.
→ Ce document est l’occasion de percevoir le haut degré de raffinement atteint par la civilisation
aztèque et ses prouesses architecturales et plus encore urbanistiques qui émerveilla les
conquistadores.
3) Une référence à l’organisation socio-politique des Mexicas
- l’empereur : garant des équilibres cosmiques, civilisationnels et sociaux
Le personnage à l’extrême gauche de l’aigle est l’empereur Tenoch, le fondateur mythique et
divinisé, reconnaissable à son siège, à la volute qui s’échappe de sa bouche (avec la même fonction
qu’une bulle de bande dessinée indiquant celui qui parle pour disposer de l’autorité nécessaire, le
Tlatoani), et au glyphe au dessus de lui (le cactus sur la pierre, renvoyant à la même référence
éponyme que le perchoir de l’aigle).