L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S5 UE1 – Dr H MAMMERI - Infections ORL Microbiologie des infections ORL 1 Rhinopharyngites - - Définition : Inflammation de l’épithélium du rhinopharynx principalement d’origine virale, elle reste une pathologie bénigne (rhume), d’évolution spontanément favorable vers la guérison en 7 à 10 jours. Étiologies : Rhinovirus, coronavirus, virus respiratoire syncitial (VRS), virus Influenzae et para-Influenzae, adénovirus, entérovirus. Complications : o Surinfections bactériennes : sinusites OMA (otites moyennes aiguës) 2 Angines - - - - Définition : angines ou amygdalites aigues sont des inflammations aigues des amygdales palatines. Rare chez le nourrisson, son pic de fréquence est entre 5 et 15 ans. Étiologie : dues à des virus : les virus des adénovirus, le VRS, les Influenzae et dans un plus petit nombre de cas les angines sont dues à des bactéries (Streptocoque du groupe A, Corynebacterium diphtheriae, germes anaérobies…) Le diagnostic des angines est essentiellement clinique. Lors de l’examen clinique, on distingue différents types d’angine : o Angine érythémateuse (angine rouge +++) o Angine érythémato-pultacée o Angine pseudomembraneuse o Angine vésiculeuse o Angine ulcéro-nécrotique Signes généraux : syndrome infectieux (fièvre) Signes fonctionnels : l’odynophagie = douleur au moment de la déglutition En fonction des bactéries responsables des angines, on aura d’autres signes fonctionnels. 2.1 Angine érythémateuse - - Étiologie : virale pour la majorité. Signes : o fièvre 39-40°C o vomissements o aspect rouge des amygdales Signes associés : o rhume étiologie virale o si pas d’autres signes fonctionnels possibilité d’un Streptocoque A +++ 1 L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S5 UE1 – Dr H MAMMERI - Infections ORL - o absence de catarrhe rhinopharyngé doit faire pratiquer un frottis amygdalien pour mettre en évidence un streptocoque bêta-hémolytique A L’angine érythémateuse peut être le premier stade de l’angine érythémato-pultacée à Streptocoque. 2.2 Angine érythémato-pultacée - - - - - 2 Étiologie : Streptocoque A (= Streptococcus pyogènes). o La dénomination des groupes de Lancefield des Streptocoques se fait en fonction de la couche polyosidique à leur surface. Il existe une correspondance entre ces groupes et la taxonomie. Signes : o angine rouge o amygdale recouverte d’un exsudat gris-jaunâtre mince et friable seulement à la surface des amygdales. Épidémiologie : l’angine à Streptococcus pyogènes survient après l’âge de 3 ans, jamais avant. Le pic d’incidence est entre 5 et 15 ans. Plus rare à l’âge adulte. Diagnostic bactériologique : o Dans la quasi-totalité des cas, le diagnostic est fait à l’examen des amygdales observation de l’exsudat pultacé. o Pour confirmer le streptocoque A, le médecin va faire un test rapide dans son cabinet = test de diagnostic rapide TDR : prélèvement de l’exsudat déchargement dans un tube ajout d’un réactif au bout de quelques minutes, cette solution a permis l’extraction du polyoside imprégnation du polyoside sur une bandelette contenant des anticorps monoclonaux migration par capillarité (principe des savonnettes) o Intérêt de ce diagnostic pour déterminer le traitement : négatif : probablement virale pas d’ATB positif Complications : o Complication immuno-allergique : endocardite rhumatismale +++ anticorps dirigé vers la bactérie et vers certains antigènes au niveau du cœur (traitement chirurgical pour changer la valve) articulaire glomérulonéphrites o Infection locale : phlegmon de l’amygdale adénite cervicale suppurée Traitement : o pénicilline A = amoxicilline L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S5 UE1 – Dr H MAMMERI - Infections ORL o en cas d’allergie aux pénicillines sans allergie aux céphalosporines : Cefopodoxime (C3G orale) ou une C2G orale comme le céfuroxime. o En cas d’allergie à toutes les bêta-lactamines (pénicilline et autre) on utilise un macrolide. 2.3 Angine vésiculeuse - Définition : Éruption vésiculeuse fugace au niveau des amygdales, suivie d’une ulcération. Évolution spontanément favorable. Contagieuse et très douloureuse. Étiologie : o l’Herpès simplex peut donner une angine vésiculeuse avec des signes : fièvre élevée dysphagie douloureuse bouquets de vésicules sur les amygdales rouges exsudat blanchâtre recouvrant les lésions érosives o Herpangine (virus Coxsackie du groupe A) est une maladie du jeune enfant donnant les mêmes symptômes qu’une angine herpetique 2.4 L’angine ulcéro-nécrotique (angine de Vincent) - - - - - - Définition : ulcération unilatérale d’une amygdale recouverte d’un enduit nécrotique. Elle s’observe chez l’adolescent ou le jeune adulte un peu fragilisé : fatigue, surmenage. Signes généraux : o fébricule o haleine fétide (= halitose) Signes cliniques : o nécrose au niveau de l’ulcération se recouvrant d’un enduit grisâtre friable o ulcération non indurée (molle) o réaction ganglionnaire peu importante voire absente Étiologie : association entre Fusobacterium necrophorum (bactérie anaérobie stricte) et des spirochètes (bacilles GRAM -) association fuso-spirillaire. o Ce sont des bactéries de la flore commensale qui dans certains cas deviennent pathogènes, leur pouvoir est synergique. o Recherche d’une porte d’entrée buco-pharyngée : bilan dentaire. Complication : o infectieuse syndrome de Lemierre (=septicémie post-anginale) par extension locorégionale diffusion au niveau des veines jugulaires thrombophlébite suppurée des veines jugulaires septicémie + risque d’embole septique/métastasique si le thrombus se détache Diagnostic différentiel : chancre ou angine syphilitique : o ulcération indurée +++ o réaction ganglionnaire plus importante (adénopathie sous-maxillaire et cervicale dont l’une sera plus grosse que l’autre) o Diagnostic 3 L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S5 UE1 – Dr H MAMMERI - Infections ORL Mauvais diagnostic : recherche de spirochètes à l’examen direct (microscope à fond noir). Problème présence dans la flore commensale de spirochètes non pathogènes alors que dans l’angine de Vincent d’autres spirochètes sont impliquées aucune spécificité o Bon diagnostic : diagnostic de la syphilis repose sur la sérologie +++ Sérologie négative (possible au stade primaire), il faut répéter la sérologie au bout de 15 jours – 1 mois Traitement : o Angine de Vincent : pénicillines orales (ex : pénicilline V) o Syndrome de Lemierre : pénicilline + métronidazole (le syndrome de Lemierre est essentiellement due à la bactérie anaérobie stricte). - 2.5 Angines pseudomembraneuses ou à fausses membranes - - - Définition : à l’examen on observe une membrane extensive pouvant déborder de la surface des amygdales. Étiologie : o EBV +++ o Corynebacterium diphtheriae (donne la diphtérie) réservoir = homme o Corynebacterium ulcerans, réservoir = chiens et chats (zoonose) Signes généraux : o asthénie marquée o adénopathies diffuses Examen complémentaire : o NFS hyperleucocytose avec mononucléose hyperbasophile o splénomégalie o Le diagnostic de certitude repose sur la sérologie. 2.6 Corynebacterium - Toutes les souches de ces deux bactéries ne sont pas pathogènes : la toxine est apportée par la présence d’un bactériophage. 2.6.1 Cycle du bactériophage - - 4 Le bactériophage va se fixer sur la bactérie et libérer son ADN dans le cytoplasme de la bactérie. Cet ADN viral va coder pour des endo-nucléases et il va se répliquer dans le cytoplasme de la bactérie. Certains de ces gènes vont servir à la constitution de la capside. Au bout d’un certain temps, les protéines de la capside vont s’assembler en incorporant à l’intérieur l’ADN du virus néo-formé. À un moment donné, la bactérie parasitée va exploser et libérer des centaines de virus. Mais dans certains cas : l’ADN viral s’intègre dans le chromosome de la bactérie sans provoquer la lyse de la cellule hôte (ADN intégré = prophage). L’ADN viral apporte de nouveaux caractères génétiques stables transmissibles à la descendance. C’est la conversion lysogénique. L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S5 UE1 – Dr H MAMMERI - Infections ORL - La bactérie lysogène va pouvoir synthétiser la toxine apportée par l’ADN du virus. Cette exotoxine est une toxine pantrope parce qu’elle a un tropisme pour plusieurs organes différents : o épithélium du pharynx destruction du pharynx produisant la fausse membrane o cardiaque myocardite o neurologique paralysie périphérique o rénal syndrome glomérulaire avec protéinurie et hématurie 2.6.2 Transmission du germe - Corynebacterium diphtheriae : transmission interhumaine par gouttelettes. Corynebacterium ulcerans : transmission par chien et chat. Caractéristiques : o incubation rapide 2 à 5 jours o début insidieux o angine banale avec fièvre modérée o évolution caractérisée par la formation d’une fausse membrane extensive non friable (adhérente) o Pouvant s’étendre jusqu’au larynx (croup) provoquant une dyspnée, une aphonie + aboiement de chien quand le patient tousse o angine associée à de très volumineuses adénopathies bull neck ou corps proconsulaire 2.6.3 Diphtérie cutanée - Infection des pays tropicaux due à Corynebacterium diphtheriae. Porte d’entrée préalable (plaie, piqûre) qui va se surinfecter et va donner une ulcération avec des bords indurés, douloureux. La diphtérie cutanée est difficile à diagnostiquer car elle n’a rien de spécifique. La bactérie n’est pas retrouvée en culture pure car souvent associée à d’autres bactéries qui ont aussi des pouvoirs pathogènes cutanés. 2.6.4 Complications toxiniques - - Atteintes neurologiques : o paralysie vélopalatine = paralysie des nerfs qui sont proches de l’angine provoquant une voix nasillarde, trouble de l’accommodation possible. = Complication précoce. o Atteinte tardive = syndrome malin tardif de Grenet et Mezart (36e jour) = polyradiculonévrite ascendante avec une atteinte diaphragmatique nécessitant une prise en charge en réa avec assistance respiratoire. Atteintes cardiaques : o myocardite aigue (complication toxinique la plus fréquente et la plus grave car mortelle dans 20% des cas), elle est précoce (6-8e jour) on peut la dépister en faisant un ECG : extrasystole, arythmie, tachycardie. Le patient risque de décéder d’une IC. Rare cas d’étiologie bactérienne des myocardites. 5 L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S5 UE1 – Dr H MAMMERI - Infections ORL 2.6.5 Épidémiologie - - En France, la vaccination est obligatoire et la diphtérie est devenue très rare. L’incidence chute dans les années 70. Dans les années 90, il n’y a quasiment pas de cas déclarés à l’institut de veille sanitaire. Quelques cas décrits dans les années 2000 : cas importés (ex-pays de l’URSS, Algérie). Les autres cas sont des cas de C. ulcerans toxinogène survenant chez des patients avec une immunodépression. 2.6.6 Diagnostic bactériologique - prélèvement à partir d’une lésion bactérie poussant sur des milieux enrichis (gélose sang) en 24h bacille à GRAM + morphologie particulière : un peu renflé à une extrémité + position en palissade ou en lettre chinoise Identification par spectrométrie de masse ou techniques biochimiques Envoi de la souche au CNR pour rechercher le gène tox par PCR Déclaration obligatoire à l’ARS dès la suspicion ! 2.6.7 Sensibilité aux ATB - - Sensibles : o macrolides o aminopénicillines Résistantes : o céphalosporines (50% des souches) o clindamycine (la plupart des C. Ulcerans) 2.6.8 Conduite à tenir en cas de diphtérie - - - - - 6 On isole le patient On met en place l’antibiothérapie : o amoxicilline (adulte, enfant) o macrolide Sérothérapie antidiphtérie : o injection qui doit se faire très rapidement car dès que la toxine est fixée sur sa cible, c’est trop tard Vaccination : o la diphtérie est une maladie peu immunisante et la vaccination antidiphtérique doit être systématique à la phase de convalescence. Antibioprophylaxie : o concerne tous les proches contacts o amoxicilline ou macrolide en cas d’allergie aux bêta-lactamines Vaccination obligatoire : o pour les enfants : vaccination par anatoxine avant l’âge de 18 mois, rappel tous les 10ans L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S5 UE1 – Dr H MAMMERI - Infections ORL o à partie de 16ans, la dose d’anatoxine est 10 fois moins importante que la dose utilisée chez les nourrissons. 3 Otites 3.1 Otites moyennes aigues - - Définition : OMA purulente correspond à une surinfection bactérienne de l’oreille moyenne (rétro-tympanique). Surinfection de rhinopharyngite virale. Survient chez le nourrisson. Étiologie : bactéries présentes dans la flore oropharyngée remontant dans la trompe d’Eustache : o Streptococcus pneumoniae (GRAM +) o Haemophilus influenzae (GRAM -) o Branhamella catarrhalis (GRAM -) Diagnostic clinique : collection purulente soit rétro-tympanique non extériorisé (bombement du tympan) soit extériorisé (otorrhée). Complication : mastoïdite 3.2 Haemophilus influenzae - Coccobacille GRAM - appartenant à la flore oropharyngée Présente parfois une capsule Souche invasive recouverte d’une capsule composé de polysaccharides servant de sérotypage (le + fréquent est le B) Cette bactérie présente dans les voies respiratoires peut être responsable de deux types d’infections : o non invasive : complication d’infection virale surinfection ORL : OMA, sinusites, bronchites, conjonctivites o invasive (devenues exceptionnelle en France grâce à la vaccination des bébés contre le sérotype B) : septicémies avec possible localisation méningée, articulaire, la plupart sont des souches capsulées de sérotype B. 3.2.1 Diagnostic bactériologique - - Bactérie exigeante : géloses chocolat + atmosphère enrichie en CO2 facteurs de croissance nécessaire : facteur X et D identification biochimique ou par spectrométrie de masse Sensible : o Quinolones o Synergistines Résistante : o macrolides o peuvent acquérir des résistances par le biais de plasmides codant pour des pénicillinases (33% des souches) 7 L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S5 UE1 – Dr H MAMMERI - Infections ORL 3.2.2 Traitement - - Prophylactique : vaccin conjugué chez le nourrisson = 3 injections à 1 mois d’intervalle avant 6 mois puis rappel à 18 mois. Curatif : traitements probabilistes des infections des voies aériennes hautes et basses (sinusites, OMA, bronchites) : o amoxicilline + acide clavulanique = AUGMENTIN o cefopodoxime (C3G orale) o céfuroxime (C2G orale) o En cas d’allergie aux bêta-lactamines : pristinamycine (> 6 ans) fluoroquinolones (adultes) Traitement des infections invasives à Haemophilus influenzae : o céfotaxime o ceftriaxone 3.3 Otites externes - - Infection du conduit externe de l’oreille. Souvent associée aux baignades (otite des piscines). Signes fonctionnels : Otalgie Étiologie : o Pseudomonas aeruginosa o Staphylococcus aureus Traitement : gouttes dans les oreilles contenant des ATB Complication : otite maligne chez le diabétique, mastoïdite 4 Sinusite aigue - - - 8 Définition : surinfection après une infection virale d’une ou plusieurs cavités sinusiennes par des bactéries. Étiologie : o Streptococcus pneumoniae o Haemophilus influenzae o Branhamella catarrhalis Épidémiologie : o >3 ans : la sinusite maxillaire est la plus fréquente o localisation plus rare (sinusite frontale…) avec risque de complication (méningite) important Diagnostic clinique : (distinction avec une rhinosinusite congestive contemporaine d’une rhinopharyngite virale) o persistance de la douleur infra-orbitaire malgré un traitement antalgique pendant 48h o exacerbation de la douleur en anté-flexion o douleur unilatérale o augmentation de la rhinorrhée et se purulence L3 médecine AMIENS 2012/2013 – S5 UE1 – Dr H MAMMERI - Infections ORL - Traitement : o adulte : amoxicilline + acide clavulanique cefopodoxime céfuroxime lévofloxacine pristinamycine o enfant : les mêmes sauf lévofloxacine + macrolide 9