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Chapitre 1
II-1. L’offre monétaire : une division centralisée du travail
Dans la sous-section I-2, nous avons constaté que les coûts de recherches engendrés
dans un processus d’échange pouvaient être réduits par la simple introduction du système
monétaire à la place du troc, tandis que le problème relatif aux coûts d’identification pouvait
se résoudre grâce à la standardisation de la monnaie en tant que marchandise intermédiaire.
Cette « standardisation » révèle, en fait, une tendance inéluctable de la centralisation au
regard de la « production monétaire », à savoir une offre centralisée de la monnaie, afin
d’atteindre une efficacité encore meilleure dans l’organisation des activités économiques.
Dans ce contexte, le « marché de la monnaie » peut, en pratique, se diriger vers deux modes
de production : soit l’émergence d’un monopole émettant la monnaie standardisée, soit la
mise en place d’un cartel entre plusieurs producteurs qui s’allient pour fournir des monnaies à
caractère identique.
Le travail du producteur monétaire, sous forme de monopole ou de cartel, peut en
théorie être entrepris par tous les agents économiques capables de maintenir, en termes de
qualité, cette « standardisation », décisive dans l’évolution monétaire. Comme il s’agit d’un
maintien perpétuel de la crédibilité de l’émetteur monétaire, seul l’Etat, dont le pouvoir se
renforce davantage au fil des derniers siècles, se situe dans la meilleure position, par
opposition à tous les agents privés susceptibles de proposer le service de l’offre monétaire.
Bénéficiant de cet avantage en termes de crédibilité, l’Etat, en tant qu’émetteur de la monnaie
standardisée, peut choisir en toute liberté la meilleure forme de monnaie en termes de profits.
La monnaie fiduciaire sous forme de billets étant beaucoup moins coûteuse que la monnaie
métallique, elle devient sans surprise le choix final de l’autorité officielle. Les coûts
d’identification sont réduits au minimum, pourvu que la standardisation de la monnaie
étatique soit crédible comme dans le cas de la monnaie métallique.
Mais le secteur privé, précisément le secteur bancaire qui s’est développé
progressivement, participe également à la « production » monétaire avec l’Etat. Il s’agit, en
fait, du domaine de l’offre de monnaie scripturale sous forme de crédits. On parvient ainsi à
une division du travail, pourtant centralisée sous le contrôle de l’Etat, dans l’offre de la
monnaie. D’un côté, le gouvernement en tant que « monopole naturel » émet la monnaie
fiduciaire avec les politiques nécessaires pour minimiser le risque de crises monétaires (c’est-
à-dire établir sa crédibilité), de l’autre, les banques créent des crédits (monnaies scripturales)