Cours de dermato du 11/05/2010 Pr. Faure M. Denis PRURIT – Suite 1. Pemphigoïde bulleuse (d’après cas clinique) - Terrain : sujet âgé, sex-ratio = 1 Clinique : plaques urticariennes fixes et prurigineuses, chroniques (NB habituellement l’urticaire est fugace et fluctuant), avec apparition secondaire de bulles tendues, sous-épidermiques, sur la peau érythémateuse et les muqueuses. Diagnostic + : histologique sur 2 biopsies Biopsie d’une bulle pour examen anapath : bulle / décollement sous-épidermique, contenant un liquide clair, avec un infiltrat de PNN et PNE. Biopsie en peau péri-bulleuse pour immunofluorescence directe (IFD) : dépôts linéaires d’IgG et de complément C3 à la jonction dermo-épidermique. Prélèvement sanguin pour IF indirecte (IFI) : auto-Ac circulants de type IgG, spécifiques de la jonction dermo-épidermique ( = BMZ ou Basal Membran Zone). ● Mécanisme lésionnel : les auto-Ac provoquent une réaction d’hypersensibilité de type III (faisant intervenir les complexes immuns) qui entraîne une activation du complément (dépôts de C3) puis une activation des PNE (urticaire) et enfin des PNN par chimiotactisme. Ces derniers libèrent des protéases qui détruisent les protéines de la jonction dermo-épidermique. ● Traitement par corticothérapie générale. 2. Dermatite herpétiforme (d’après cas clinique) Terrain : à n’importe quel âge, sur terrain prédisposé. Clinique : papulo-vésicules érythémateuses avec érosions cutanées, aux faces d’extension des 4 membres, la région lombaire et les flancs. Eruptions par poussées de quelques semaines. Diagnostic + : histologique - Biopsie n°1 pour anapath : petits décollements dermo-épidermiques avec infiltrat de PNN appelés micro-abcès. - Biopsie n°2 pour IFD : dépôts granuleux d’IgA à la jonction dernoépidermique. - IFI : Ac anti-transglutaminase. Page 1 sur 4 Cours de dermato du 11/05/2010 Pr. Faure M. Denis Mécanisme lésionnel : sensibilisation digestive contre le gluten → production digestive d’IgA anti-tranglutaminase et activation des cellules cytotoxiques. La cytotoxicité s’exerce au niveau intestinal de manière asymptomatique : la biopsie retrouve une atrophie villositaire isolée sans signe digestifs. La transglutaminase est une enzyme non spécifique de transport de gluten au niveau digestif, présente aussi au niveau cutané. La synthèse d’auto-Ac de type IgA entraîne une réaction d’hypersensibilité de type III (cf supra) qui aboutit à la destruction de la jonction dermo-épidermique par libération de protéases par les PNN activés. NB : C’est le même mécanisme immun qui provoque la DH et la maladie cœliaque mais il n’y a pas coexistence des symptômes cutanés et digestifs. Ce sont 2 maladies bien distinctes ; même si l’on retrouve des lésions histologiques digestives asymptomatiques chez 4/5 des patients atteints de DH. Traitement : régime sans-gluten +/- sulfone (inhibiteur de l’activation des PNN) chez les patients très symptomatiques. L’absence de traitement augmente le risque de développement d’un lymphome digestif (MALT) par sur-stimulation chronique de système immunitaire digestif. 3. Conduite de l’interrogatoire et de l’examen clinique devant un prurit - Interrogatoire : le prurit est un signe fonctionnel qui provoque une démangeaison. Faire préciser : ancienneté, durée, localisation, mode évolutif. Rechercher une prise médicamenteuse (chronique ou ponctuelle), des antécédents personnels ou familiaux d’atopie et/ou d’allergies. - A l’examen : rechercher des lésions spécifiques d’une dermatose, des lésions non spécifiques de prurit (lésions de grattage, prurigo, lichénification), un dermographisme. Palper les aires ganglionnaires et la thyroïde. - NB devant un prurit nu : évoquer un prurit sénile, une prise médicamenteuse (AINS et aspirine++), une cholestase, une insuffisance rénale chronique, une maladie de Basedow, un lymphome. L’origine psychogène d’un prurit (pathomimie) est un diagnostic d’élimination. Page 2 sur 4 Cours de dermato du 11/05/2010 Pr. Faure M. Denis EROSIONS DES MUQUEUSES ORALES ET /OU GENITALES 1. Généralités / remarques - - Une érosion muqueuse n’est pas forcément révélatrice d’une IST. Par ordre de fréquence les IST responsables d’érosions muqueuses sont l’herpès et la syphilis. Le caractère chronique d’une érosion muqueuse doit fait évoquer un carcinome épidermoïde, surtout si elle siège sur une base indurée. Le caractère bipolaire d’une érosion n’est pas en faveur d’un cancer. Une érosion muqueuse peut être une forme de début des dermatoses bulleuses auto-immunes. Le signe de Nicolsky traduit in décollement intre-épidermique qui se traduit histologiquement par une acantholyse par destruction des desmosomes. 2. Erosions aigues (liste non exhaustive!) Génitales, multiples, purulentes, avec douleur et fièvre : primo-infection herpétique HSV-2. Diagnostic positif : cytodiagnostic de Tzanck sur frottis des lésions et mise en culture. Génitale, unique, indolore avec ADP satellite : syphilis Diagnostic sérologique TPHA- VDRL (attention négatif si trop précoce) et FTA en IFD. Les érosions muqueuses aigues sont souvent d’origine infectieuse (HSV, VZV, VIH, candidose, coxsackie), parfois traumatiques ou caustiques. Penser à une origine médicamenteuse : syndrome de Stevens-Johnson, qui est une toxidermie de forme muqueuse, +/- accompagné de lésions cutanées d’érythème polymorphe. 3. Erosion récidivante Récurrence herpétique ou zona. Le diagnostic est clinique, le traitement basé sur les antiviraux par voie orale. Aphtose : érosions buccales et/ou génitales à fond jaune « beurre frais » en poussées récidivantes, due à une vascularites par hypersensibilité de type II. Aphtose bipolaire + pseudo-folliculite cutanée + uvéite antérieure = maladie de Behçet. Page 3 sur 4 Cours de dermato du 11/05/2010 Pr. Faure M. Denis 4. Erosion chronique Penser à un carcinome épidermoïde +++ Maladie de Paget génitale : métastases de surface d’un carcinome épidermoïde génitale (vagin). Forme débutante d’une bullose auto-immune (cf infra). Lichen plan érosif : douleurs génitales chroniques. Aspect mixte d’érosion en carte de géographie et de leucoplasie, disparition du relief vulvaire/balanique normal et absence de cicatrisation spontanée ou sous traitement local. Le diagnostic est histologique sur biopsie de la lésion qui montre un infiltrat lymphocytaire. 5. Pemphigus vulgaire /!\ Terrain : âge moyen, auto-immunité. Clinique : lésions érosives, bulleuse et croûteuses muqueuse et cutanées (cuir chevelu++), survenant en peau saine. Signe de Nikosky positif (décollement à la pression). Aspect de faux impétigo, non sensible aux antibiotiques. Diagnostic : histologique - biopsie d’une bulle pour examen anapath : acantholyse intra-épidermique, présence de cellules acntholytiques au cytodiagnostic. - Biopsie péri-bulleuse pour IFD : dépôts d’IgG intercellulaires, pas de complément. - Prélèvement sanguin pour IFI : auto-Ac anti ICS (substance inter-cellulaire) avec titration des Ac à visée pronostique. Mécanisme lésionnel : hypersensibilité de type II. Traitement : corticothérapie locale + immunosuppresseurs. Le traitement est poursuivi tant que les Ac circulants sont détectables, même si le patient est asymptomatique ! 6. Pemphigoïde cicatricielle Terrain : femme âgée Clinique : bulles et érosions cutanéo-muqueuses (orales, ORL, génitales, oculaires) formant des cicatrices rétractiles et synéchiantes (rétrécissement des orifices génitaux, synéchies de la conjonctive oculaire). L’aspect clinique est identique à celui de lichen plan ; le diagnostic positif est donc histologique. Diagnostic : sur biopsie anapath montrant un décollement sous-épidermique avec dépôts linéaires d’IgG en IFD. Attention au carcinome épidermoïde muqueux développé sur les lésions de dermatoses inflammatoires dont le lichen plan++. Page 4 sur 4