Faculté Lyon Est Epreuve de pédiatrie Pr Pierre Cochat
Corrigé
Elodie, 8 ans, n’a pas d’antécédent familial notable.
L’examen du carnet de santé ne signale aucune anomalie au niveau de l’échographie
fœtale ; elle est née à terme, avec un poids de naissance de 3300 g, une taille de taille 49
cm, un score d’Apgar 10-10. Durant les quatre premières années, elle ne pose pas de
problème particulier si ce n’est des infections ORL répétées. L’acquisition de la propreté
pour les urines et les selles est notée à l’âge de 3 ans, mais les parents signalent des fuites
d’urine occasionnelles jusqu’à l’âge 4 ans.
Peu de temps après la rentrée au cours préparatoire (6 ans), elle présente à nouveau des
fuites d’urine une à deux fois par semaine, tantôt diurnes, tantôt nocturnes. A l’âge de 7
ans, elle présente deux épisodes rapprochés de cystite traités par cotrimoxazole (Bactrim)
pendant 4 jours. A ce moment, les parents signalent que la culotte est souvent souillée par
des traces de selles.
Elle est admise en urgence ce soir pour hyperthermie mal supportée à 39,8 °C,
vomissements et douleurs abdominales diffuses.
A l’interrogatoire, vous apprenez qu’elle est « constipée » depuis un mois et que les fuites
d’urine sont plus fréquentes depuis une semaine. La fièvre est apparue depuis le matin
même, mais non quantifiée car bien supportée.
A l’examen, l’impression générale est bonne, malgré les douleurs abdominales. Elle pèse
20 kg (-1,8 DS) et mesure 114 cm (-2DS). La PA est à 105/65 mmHg, la fréquence cardiaque
à 110/min et la température à 39°C après prise de 400 mg de paracétamol. L’examen de la
culotte retrouve des traces de selles et d’urine.
L’examen des urines à la bandelette réactive montre : leucocytes +++, nitrites ++,
protéines +, sang +. Un bilan sanguin sommaire montre que l’hémogramme et
l’ionogramme sanguin sont normaux et que la créatininémie est de 46 µmol/L.
Questions
Quel diagnostic évoquez-vous pour l’épisode actuel, et sur quels arguments ? [10 points]
Pyélonéphrite aiguë (associée à une instabilité vésicale) [4]
- Symptomatologie d’infection urinaire haute (douleurs, fièvre) [2]
- Résultat de la bandelette réactive [2]
- Antécédents de troubles mictionnels évoquant une instabilité vésicale (fuites
d’urine, antécédents de cystite) associée à une rétention stercorale (constipation,
encoprésie) [2]
Quels examens complémentaires proposez-vous en urgence pour confirmer le diagnostic et
orienter le traitement ? [20 points]
- ECBU afin d’identifier le germe (examen direct + culture) et de réaliser un
antibiogramme [10]
- Hémocultures : inutiles [2]
- Marqueurs de l’inflammation (préférence à la CRP, souvent > 30 mg/L) : non
indispensables compte-tenu de la présentation clinique typique [4]
- Echographie rénale : oui si on peu l’obtenir facilement, sinon aucune urgence [4]
Quel traitement instaurez-vous en première intention et suivant quelles modalités ? [20
points]
Consensus AFSSAPS 2007
- Hospitalisation selon l’âge (systématique en dessous de 3 mois) et l’état clinique
(non inquiétant ici, donc traitement ambulatoire possible) [5]
- Traitement probabiliste en urgence : antibiothérapie parentérale pendant 2 à 4
jours : ceftriaxone (Rocéphine) 50 mg/kg par jour, en une seule injection IV ou IM
[10]
- Traitement antalgique et antithermique : paracétamol (15 mg/kg toutes les 6
heures tant que douleur et fièvre persistent) [5]
Expliquer la relation entre infection urinaire, trouble mictionnel et anomalies du transit
intestinal ? [10 points]
- Probable immaturité vésicale (acquisition un peu tardive et « hésitante » de la
propreté) ayant cédé le pas à une instabilité vésicale (fuites d’urine diurnes et
nocturnes) entretenue par une rétention stercorale (épisodes encoprétiques,
constipation) révélée lors de l’entrée au CP (autorisation d’aller aux toilettes
seulement lors des récréations)[5].
- L’instabilité vésicale avait entrainé d’abord des infections urinaires basses, puis une
pyélonéphrite aiguë, secondaire à un reflux vésico-urétéral (fonctionnel) qui a
véhiculé l’urine infectée au rein [5].
Passé la phase de l’urgence, proposez-vous d’autres investigations ? Si oui, lesquelles et
pourquoi ? [5 points]
- Echographie de l’appareil urinaire (vessie pleine) si elle n’a pas été réalisée
auparavant : pas tant pour rechercher une malformation importante (RAS durant la
grossesse), mais une malformation mineure ou une lithiase [3].
- La cystographie rétrograde pourrait être envisagée pour visualiser un reflux vésico-
urétéral mais on sait que ce reflux existe et que sa découverte n’aura aucune
sanction diagnostique ou thérapeutique. Arguments : échographie fœtale normale,
PNA dans un contexte de trouble mictionnel. Le seul argument pourrait venir d’une
échographie faisant suspecter une malformation inconnue jusque là [2].
Quelle prise en charge envisagez-vous au-delà de la période aiguë ? [15 points]
- Relais de l’antibiothérapie parentérale par un traitement oral adapté à
l’antibiogramme. Préférence au cotrimoxazole et au cefixime, du fait de leur
bonne pénétrance parenchymateuse. [10]
- Traitement de la rétention stercorale et de l’instabilité vésicale : bonne
hydratation, diététique privilégiant les fruits et légumes, éventuellement laxatif
osmotique. Régularité des selles et des mictions. Si les troubles urinaires persistent
malgré cela, discussion d’un traitement anticholinergique (oxybutinine) [10].
Vous revoyez Elodie en consultation un mois plus tard. Elle va parfaitement bien, mais les
parents vous questionnent sur sa croissance, car Elodie est « bien plus petite que sa sœur
au même âge ». En revanche, la mère a été « longtemps petite » puis « a bien grandi au
moment de la puberté ». La taille cible est calculée à + 0,5 DS (166 cm) et la radiographie
du poignet gauche montre que l’âge osseux est de 6 ans.
Comment estime t’on la taille cible finale d’un enfant ? [5 points]
- Taille finale des filles (cm) = [taille père (en cm) + taille mère (en cm) - 13] / 2
- Taille finale des garçons (cm) = [taille père (en cm) + taille mère (en cm) + 13] / 2
- Ce calcul est vrai à l’échelle d’une population mais est soumis à variation à
l’échelle d’une famille.
Quel est le mécanisme le plus probable de ce retard de croissance, et comment le prendre
en charge ? [15 points]
- Il s’agit probablement d’un retard de croissance constitutionnel, par simple retard
de maturation osseuse [5].
- Les arguments diagnostiques sont l’absence de pathologie chronique connue, le
retard de l’âge osseux, la même évolution staturale chez la mère [5].
- Le pronostic est habituellement bon et il n’y a pas de traitement spécifique [5].
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