un objet (terme qui ne doit pas être compris ici comme
signifiant une chose), ou l'objectivité immanente".
Tous les mots, ici, sont des pièges en puissance.
"Intentionnel", nous rappelle Brentano, est un terme
scolastique qu'utilise, par exemple, Thomas d'Aquin dans
le sens de "mental", par opposition à "réel". Dans
l'objet réel, c'est-à-dire situé en dehors de l'esprit,
la forme est unie à la matière; l'objet "intentionnel",
lui, n'est présent que par sa forme. "Inexistenz"
("Inexistence") vient du latin in-esse, qui signifie :
"être à l'intérieur de". Le contresens serait ici,
évidemment, de comprendre "inexistant" comme voulant dire
"non existant". L'objet vers lequel tend l'esprit (son
intention ) se situe à l'intérieur de l'esprit; voilà
pourquoi sa présence est "immanente".
La vie psychique, selon Brentano, est avant tout une
activité, un processus, une dynamique. Cette activité est
"présentation". Brentano précise : "Par présentation, je
ne veux pas dire cela même qui est présenté, mais bien
plutôt l'activité de présentation". Cette activité a un
contenu, ou plus précisément un "objet". L'objet est cela
même qui est présenté : le son que nous entendons, la
couleur que nous voyons, le froid que nous ressentons.
Ces objets de la présentation, Brentano les nomme, comme
pour mieux brouiller les pistes, "phénomènes physiques" -
par opposition à l'activité psychique précédemment
définie. Mais il précise, pour enlever toute ambiguïté,
que ces phénomènes "physiques" font bien partie des
"données de la conscience".
L'activité psychique est intrinsèquement consciente
d'elle-même. Quand nous pensons, nous avons une
perception immédiate du fait que nous pensons, et la
perception de l'activité pensante est simultanément
Ma traduction. Sur le rapport de Husserl à Brentano, surtout en tant
qu'il se situe en tronc commun par rapport à la bifurcation qui mène
d'un côté à Heidegger et de l'autre à Sartre, on consultera avec
profit Alain Renaut, Sartre, le dernier philosophe, Grasset, 1993;
plus spécialement p. 88-102.