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jurisprudentielles salvatrices, adaptant la règle à la conjoncture. Les justiciables sont en présence de
juges parlant leur langage, ce qui facilite l’accès à la justice, dès lors que la confidentialité est
respectée. Et surtout, les tribunaux de commerce ne sont pas isolés au sein de l’ordre judiciaire
français. La cohérence est assurée par un équilibre entre la première instance et les cours
hiérarchiquement supérieures. La prééminence est donnée en première instance à des juges issus du
monde de l’entreprise. En outre, la mission des avocats aux multiples spécialités est une source
précieuse de compétence juridique. En revanche, en appel comme en cassation, les litiges sont
portés devant des magistrats de l’ordre judiciaire seuls. Et depuis la création en 1946 à la Cour de
Cassation d’une Chambre commerciale, financière et économique, il n’a pas été assez souligné son
influence bénéfique sur l’unification et la clarification du droit commercial. Sa réactivité est tout à fait
remarquable et l’autonomie du droit économique y a trouvé sa légitimité.
En outre une formation des juges consulaires à leur mission est assurée d’une part, grâce à une
intégration progressive dans la complexité des contentieux et d’autre part au sein de l’Ecole
nationale de la Magistrature, institution étatique assurant la formation principale des magistrats
professionnels français.
Pour les juges consulaires, traditionnellement, grâce à la collégialité, les nouveaux bénéficient de
l’expérience des plus anciens. Et en conséquence, pour les fonctions plus complexes, des conditions
d’ancienneté sont exigées. Si la diversité des connaissances est amplement satisfaite dans les
tribunaux importants où le “vivier” des professionnels compétents, notamment en droit, est
largement pourvu, la situation est différente dans les tribunaux ayant une activité réduite. Cela
repose la question de la “carte judiciaire” et d’une centralisation des contentieux devant des
tribunaux moins nombreux mais composés de juges ayant démontré leurs aptitudes à intervenir dans
des matières spécifiques (commerce, bourse etc.).
L’Ecole nationale de la magistrature (ENM) assure une formation spécifique, des juges consulaires
aux arcanes du droit. Etre juge nécessite une méthode dans la conduite d’un raisonnement juridique,
la technique de la décision et le suivi procédural. Cette formation renforcée relève du service public.
L’enseignement en ligne est un moyen complémentaire de préparation.
Mais ce sont tous les magistrats qui devraient recevoir une formation en économie du droit et en
science juridique de l’économie. Au-delà des chambres commerciales des TGI ou des cours d’appel,
nul ne peut désormais agir dans l’ignorance de “l’économique”.
Enfin, tous les juges doivent respecter une déontologie inhérente à leur mission.
Qu’il s’agisse des magistrats issus de l’ENM ou des consulaires, ils ont tous, parce que juges, à
respecter des valeurs intangibles qui sont clairement rappelées à l’article 6 de la Convention
européenne des droits de l’homme : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue
équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial,
établi par la loi… ». Ils prêtent le même serment que les magistrats : « Je jure de bien et fidèlement
remplir mes fonctions, de garder religieusement le secret des délibérations et de me conduire en
tout comme un juge digne et loyal » (article L.722-7 du code de commerce). En ce sens, il existe bien
un statut universel du juge. Mais, au-delà des bonnes intentions, le respect de ses dispositions doit
être rigoureusement assuré.
Constitutionnellement, l’“autorité” judiciaire est indépendante. S’agissant des magistrats,
appartenant à la fonction publique, leur indépendance à l’égard de l’exécutif tient à leur statut
protecteur reposant depuis 1958 sur une loi organique posant des conditions strictes de nomination
et de carrière et la garantie d’inamovibilité des juges du siège.