Aurélie SOLAIRE GSU04 DD01 P2009 Mini – Mémoire de Synthèse du Séminaire - APPLICABILITE DE L’ETHIQUE ENVIRONNEMENTALE – Sommaire Introduction 3 I – L’éthique environnementale 1 – Un point de vue différent sur le monde 2 – Les pratiques qui en découlent 3 – Les limites de la théorie 4 4 5 5 II – Des solutions environnementales à différentes échelles 1 – Le cas de l’éco-construction 2 – Généralisation de telles solutions à d’autres domaines et d’autres populations 3 – Impacts et limites 6 6 7 7 III – Vers un changement de mentalité à travers des solutions simples à l’échelle humaine ? 1 – La nécessité d’un changement de mentalité 2 – La nécessité de traduire les théories environnementales en solutions concrètes et applicables 3 – De la répercussion des solutions entre les différentes échelles d’application 8 8 Conclusion 9 Sources 2 8 8 10 Hicham-Stéphane Afeissa a conclu son intervention sur l’éthique environnementale et le développement durable en constatant que cette théorie est difficilement applicable à la réalité, notamment politiquement. L’éthique environnementale demande la prise en compte morale de l’environnement non humain pour lui-même, pour sa valeur intrinsèque, et implique donc une redéfinition de la morale qui étend la considération au-delà de l’humain. Ce point de vue est difficilement conciliable avec le capitalisme et la conception occidentale de la société en général. Les adeptes de l’éthique environnementale ne proposent d’ailleurs pas de solution. En revanche, Hervé Piault lors de son intervention sur l’éco-construction, a présenté des solutions concrètes à l’échelle individuelle afin de minimiser autant que possible les impacts liés au domaine particulier de la construction, ce qui semble répondre à la théorie précédente. En examinant tous les aspects du projet, il vise à concilier les besoins actuels à des techniques non nuisibles pour l’environnement. Ce mode de pensée peut s’appliquer également à d’autres domaines comme on a pu le voir avec d’autres cas d’éco-conception. Je me suis interrogée sur cette contradiction. Quels sont les impacts et les limites des actions individuelles telles que l’éco-construction ? La généralisation de telles actions est-elle possible, en prenant en compte tous les êtres non-humains et leur protection/préservation ? Le changement de mentalité vers une éthique environnementale pourrait-il venir d’actions individuelles comme celle-ci, ou doit-il venir de mesures prises à l’échelle de la société tout entière ? Le changement de mentalité vers une éthique environnementale peut-il venir d'actions individuelles comme l'éco-construction ? Aurélie SOLAIRE – GSU04 – Mini-Mémoire DD01 3 I. L’éthique environnementale 1. Un point de vue différent sur le monde L’éthique environnementale est un courant philosophique apparu dans les années 1970 dans les pays anglo-saxons, particulièrement en Amérique du Nord. Cette philosophie examine le rapport de l’homme à son environnement comme cause principale de la crise écologique actuelle. Bien qu’il soit mort avant le début de ce mouvement, Aldo Leopold (1887 – 1948) fut le premier à considérer que l’origine de la crise écologique est idéologique. Dans son Almanach d’un comté des sables, il définit ainsi l’éthique environnementale : « Une action est juste, quand elle a pour but de préserver l'intégrité, la stabilité et la beauté de la communauté biotique. Elle est répréhensible quand elle a un autre but. » Les éthiciens de l’environnement entreprennent donc de poser les problèmes environnementaux sur le terrain de la morale. Il s’agit de repenser le rapport traditionnel de l’homme à la nature. En effet le point de vue occidental sur notre environnement, influencé par la tradition philosophique, morale, scientifique et religieuse, considère l’homme comme ‘centre du monde’. Le monde naturel qui l’entoure est, lui, considéré pour l’usage que l’homme peut en avoir, pour sa valeur instrumentale. La théorie même du créationnisme dans le christianisme, présente un monde créé pour l’homme, pour être son champ d’expérience et de pouvoir. L’homme est la mesure de toute chose, la valeur des choses est estimée à partir de l’utilité qu’on en tire. Auparavant, le paganisme prêtait à chaque chose, être vivant ou non-vivant, un esprit propre, et donc une valeur propre. Il était nécessaire et vital aux hommes de prêter la plus grande attention à la préservation de toute chose pour ne pas contrarier la divinité correspondante. Selon HichamStéphane Afeissa : « en détruisant l’animisme païen, le christianisme a rendu possible l’exploitation de la nature dans un climat d’indifférence à l’endroit d’un environnement que les esprits et les divinités ont fui ». L’éthique environnementale, au contraire, demande la prise en compte morale de l’environnement non-humain pour lui-même, pour sa valeur intrinsèque. Les autres formes de vie ont une dignité propre, tout comme l’homme, quel que soit l’usage qu’il peut ou non en avoir, et méritent une considération en tant que chose pour leur simple existence. Cette éthique de l’environnement constitue donc un argument à la protection et la préservation de la nature et de toutes ses composantes, et proteste contre le spécisme qui considère prédominants les intérêts des êtres humains par rapport à ceux des autres formes de vie. L’homme doit s’inscrire dans le monde naturel sans le bouleverser puisqu’il n’est qu’une entité parmi tant d’autres de la biodiversité. On peut ainsi résumer la différence de point de vue entre le développement durable et l’éthique environnementale. Le développement durable examine la responsabilité de protéger l’environnement au nom de l’usage que pourront en avoir les générations futures (valeur instrumentale de la nature) ; tandis que l’éthique environnementale pense que l’on a une responsabilité à l’endroit de la nature, pour elle-même en tant que telle, pour sa valeur propre (valeur intrinsèque). 4 2. Les pratiques qui en découlent Ce courant de pensée très développé en Amérique du Nord détient une influence dans de nombreux domaines : juridique, politique, sociologique, économique, écologique bien sûr, etc. Les valeurs intrinsèques de la nature commandent un certain nombre d’obligations morales : Mener une redéfinition de la morale qui étend la considération au-delà de l’humain : en abandonnant notre vision traditionnelle puisqu’elle fait partie du problème. Il s’agit concrètement de passer d’une morale centrée sur l’humain (l’anthropocentrisme) à une morale centrée sur la nature (l’écocentrisme). Cela implique la refonte des postulats philosophiques, théologiques, etc. Percevoir l’homme comme « un compagnon voyageur des autres espèces dans l’odyssée de l’évolution » (Aldo Leopold), sur fond de darwinisme et de évolution des espèces, et non plus de hiérarchie des espèces (ou l’homme tenait bien entendu le haut de l’échelle …) Examiner les fondements de la crise écologique afin d’y remédier Comprendre les cycles et les systèmes écologiques Protéger toute forme de vie pour sa valeur intrinsèque et non instrumentale Restreindre sur la base de normes les actions permises à l'égard de la nature : celles qui ne lui sont pas nuisibles. 3. Les limites de la théorie Le courant de l’éthique environnementale rencontre diverses critiques qui pointent ces limites ou ses faiblesses. Tout d’abord, la complexité du concept de valeur intrinsèque des êtres non humains, sur lequel devrait être refondée notre morale, pèse sur les débats, et rend la théorie difficilement transmissible à la politique, et donc difficilement applicable à la réalité. Constituée de valeurs qualitatives, cette philosophie semble séparée de nos sociétés capitalistes. Ce pendant le courant pragmatiste, interne à l’éthique environnementale, s’attache à rendre les valeurs de l’éthique environnementale applicables dans les débats publics. D’autre part, d’importantes divisions existent au sein même du courant de l’éthique environnementale. Les désaccords portent notamment sur le concept (fondamental pour HichamStéphane Afeissa) de valeur intrinsèque, d’écocentrisme, etc. Les discussions quant à ces divergences ont tendance à accaparer l’énergie de nombre d’éthiciens, au lieu qu’ils s’intéressent réellement à la résolution de la crise environnementale. D’ailleurs, l’éthique environnementale propose très peu de solutions concrètes. Par exemple, elle recommande la réduction de la population mondiale, pour permettre la survie des autres formes de vie sur Terre, et garantir l’intégrité des écosystèmes, mais ne propose aucune solution pour déclencher cette baisse de population. Ceci dit la stabilisation de la population prônée par le développement durable ne propose aucune solution non plus. Aurélie SOLAIRE – GSU04 – Mini-Mémoire DD01 5 II. Des solutions environnementales à différentes échelles 1. Le cas de l’éco-construction Le terme d’éco-construction évoque la mise en œuvre d’un bâtiment qui vise à minimiser les impacts sur l’environnement, particulièrement en diminuant l’énergie grise nécessaire à son édification. Il s’agit de réduire la quantité d’énergie nécessaire à la conception, l’extraction et le transport des matières premières, la fabrication des éléments de constitutifs, la construction, l’usage et le recyclage du bâtiment. Ces cibles peuvent par exemple être atteintes en utilisant des matériaux et procédés non polluants, en employant des technologies (panneaux solaires, puits canadiens …) permettant une consommation moindre (voire nulle) d’énergie non renouvelable au cours de la vie du bâtiment, mais également en s’intégrant harmonieusement à son environnement et ne rejetant rien de nocif (traitement des eaux …) Ainsi, tout le cycle de vie du bâtiment doit être pris en compte. Cela se résume en 3 objectifs : Savoir concevoir : le respect de l’environnement et les principes de durabilités doivent être mis en place dès la conception pour un résultat optimal, Savoir choisir les matériaux : bien entendu les matériaux doivent être non polluants, avoir d’excellentes caractéristiques techniques, mais également être produits à proximité du lieu de construction afin de minimiser les impacts dus au transport, etc. Savoir habiter : une maison écologique n’a aucun sens si ces principes ne sont pas appliqués après la construction : bon usage des fenêtres et du chauffage, etc. L’exemple apporté par Hervé Piault montre qu’il existe des gens concernés par la préservation de l’environnement, qui mettent en place des solutions concrètes pour remplacer une méthode moderne nocive pour la nature (ici la construction ‘traditionnelle’), par une ‘nouvelle’ méthode soucieuse de tout mettre en œuvre, de la conception, aux techniques en passant par les moyens de mise en œuvre et les procédés de fabrications des matériaux, l’endroit dont ils proviennent ou encore les personnes par qui ils sont conçus. [Le terme ‘nouvelle’ a été mis entre guillemets car on a pu constater que les techniques et matériaux employés sont largement inspirés de ceux qui étaient utilisés depuis des siècles et jusqu’il y a assez peu de temps dans nos contrées …] Ainsi, l’énergie nécessaire à la construction et l’utilisation d’une maison (700 000 à 1 millions de kWh en moyenne) peut être fortement diminué, de façon à ne plus nuire à l’environnement, de même que de nombreuses autres activités humaines, participant ainsi à la protection de notre environnement. 6 2. Généralisation de telles solutions à d’autres domaines et d’autres populations Comme on l’a vu lors de ce séminaire avec des exemples d’éco-conception, des solutions environnementales peuvent tout à fait s’appliquer à d’autres domaines, la seule limite étant l’imagination des concepteurs. Cependant, même si on tente de diminuer l’impact de leur fabrication sur l’environnement, il existe encore. Cet impact, multiplié par la multitude de biens et services que nous consommons, reste trop important. Malheureusement la plupart des procédés durables ou éthiques engendrent des surcoûts (par rapport à des procédés ne se souciant pas de ce genre de problématiques), qui empêchent certaines populations et certains pays entiers d’y accéder. 3. Impacts et limites Aujourd’hui le moteur (principal) de telles pratiques reste l’économie : nombre d’entreprises ne pratiquent pas une éthique environnementale ou un développement durable par conviction philosophique, mais parce que c’est ce qui s’avère profitable économiquement de nos jours. « C’est souvent ce qui est vraiment économique et efficient pour la société qui échappe aux calculs orthodoxes du produit national brut. » (J. Dethier). De ce fait, ce qui leur importe n’est pas réellement la protection de l’environnement en tant que tel, mais l’image qu’ils en tirent, l’usage (là encore) et le bénéfice qu’ils en ont. Dans le cas de l’éco-construction, il existe 3 freins principaux au développement de cette pratique, et il ne s’agit pas de la demande : Les éco-matériaux n’ont généralement ni label, ni reconnaissances par les assurances, réfrénant ainsi les personnes qui auraient voulu y avoir recours La main d’œuvre nécessaire à la mise en œuvre de procédés de constructions non polluants est beaucoup plus chère que l’énergie mécanique La main d’œuvre qualifiée pour les procédés d’éco-construction est rare, les écomatériaux également D’autre part, l’éco-construction telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, s’applique principalement aux maisons individuelles. Or ce modèle n’est viable que parce qu’il n’intéresse qu’une part minime de la population. En effet, le modèle de la maison individuelle va à l’encontre de la protection des espaces vierges et naturels. Si chaque foyer s’installait dans un habitat. Ceci dit le principe d’éco-construction peut facilement être appliqué à des îlots urbains plus importants, à des villes ou des quartiers comme c’est le cas par exemple au quartier Vauban à Fribourg. La construction d’ensembles plus denses Ici on constate que la protection de l’environnement est vue à travers l’usage humain, mais pas seulement ; après tout n’est-ce pas un point de départ comme un autre ? Aurélie SOLAIRE – GSU04 – Mini-Mémoire DD01 7 III. Vers un changement de mentalité à travers des solutions simples à l’échelle humaine ? 1. La nécessité d’un changement de mentalité Quel que soit le point de vue considéré (éthique environnementale, développement durable, ou autre), la nécessité d’un changement et d’une prise de conscience massive est urgente. Etant en train de rendre la planète invivable pour de nombreuses espèces dont nous-mêmes, il nous faut prendre en considération les besoins des autres espèces ou tout du moins ceux de nos générations futures. Aujourd’hui, les grandes théories environnementales parviennent certes à mettre tout le monde (ou presque) d’accord sur la nécessité de changer de comportement et donc de mentalité, mais rares sont les propositions faites pour initier ce changement en profondeur. 2. La nécessité de traduire les théories environnementales en solutions concrètes et applicables Comme on l’a vu, pour être applicables les théories environnementales, que ce soit l’éthique environnementale ou le développement durable, doivent être traduites en mesures concrètes afin d’avoir un impact réel. Les théoriciens doivent travailler davantage à penser des politiques et des actions concrètes pour mener à un changement de mentalité à grande échelle. Le ‘commun des mortels’ a besoin d’exemples pratiques pour correctement mettre en application ces théories. 3. De la répercussion des solutions entre les différentes échelles d’application Cependant, les problèmes environnementaux - dont le réchauffement climatique est probablement le plus flagrant et le plus inquiétant - se répandent à l’échelle mondiale et non locale. Il ne semble donc pas judicieux de limiter les actions et même les politiques à des questions locales, régionales ou même nationales. Comme le pose Hicham-Stéphane Afeissa : « La lutte contre le réchauffement climatique n’exige-t-elle pas que l’on développe le concept d’une communauté globale », que l’on mène des politiques universelles par coopération entre les différents pays ? La difficulté principale consiste à intéresser tout le monde ou du moins les grands décideurs de ce monde, des pays développés qui veulent garder leur avance à tout prix, aux pays en développement qui veulent monter sans se préoccuper des effets sur l’environnement. Pour que chacun se sente concerné, des politiques globales qui viendraient déclencher un changement de mentalité et les actions individuelles sont nécessaires. Mais pour provoquer cette action politique générale et coordonnée, je pense que les populations devraient montrer leur intérêt par la multiplication des actions individuelles. Donc il s’agirait d’un ‘cercle vertueux’ : les actions individuelles telles que l’éco-construction doivent montrer l’intérêt de la population mondiale pour la protection environnementale, afin que des politiques globales et concertées entre les différents pays viennent convaincre les récalcitrants de mener aux aussi des actions individuelles, engendrant ainsi petit à petit, de préférence avant qu’il ne soit trop tard, le changement de mentalité nécessaire à la survie de la planète et des multiples espèces qu’elle abrite. 8 Pour conclure, le changement de mentalités nécessaires à la préservation de notre environnement se heurte à de nombreux obstacles : tout dans le mode de vie des pays dits développés est aux antipodes de ce qui est nécessaire à la préservation des autres espèces vivant sur cette planète : depuis l’importance croissante de la population, jusqu’aux fondements de nos sociétés basés sur l’augmentation perpétuelle de la consommation et donc de la production … De plus les pays en développement tendent le plus souvent à grande vitesse vers le même modèle et répètent nos erreur, aggravant ainsi le phénomène mondial. Nous nous retrouvons ainsi, même avec les meilleurs intentions qui soient, englués dans ce mode de vie que nous savons néfaste pour l’environnement, et toute action semble minuscule et vaine. Si les théories environnementales sont convaincantes, la difficulté réside dans leur mise en œuvre, et dans la généralisation et la coordination des actions. Il s’agit donc de persévérer dans des actions locales les plus bénéfiques possibles pour l’environnement et ses diverses entités, et de lancer des politiques qui globalisent ces actions. Aurélie SOLAIRE – GSU04 – Mini-Mémoire DD01 9 Sources 10 Séminaire DD01 2009 Compte-rendu de l’intervention de Hicham-Stéphane Afeissa au séminaire DD01 2008 Site internet : Dicopo : dictionnaire de théorie politique – article de Hicham-Stéphane Afeissa sur l’éthique environnementale www.scienceshumaines.com Site internet The Aldo Leopold Fundation Site de Codem Picardie : Construction Durable et Eco-Matériaux Compte-rendu critique du livre de HSA : Ethique de l’environnement (site : Les enfants d’Aldo Leopold) Wikipédia : l’Ethique de l’environnement, Aldo Leopold Le Moniteur n°5452 : Architecture en bois …