
Pour la question dont je voudrais vous parler aujourdhui, je ne lui ai pas donne de titre. M. 
Gouhier a bien voulu vous dire avec indulgence, que cest cause de mon sejour au Japon. A 
vrai dire, cest une tres aimable attenuation de la verite. Disons queffectivernent, jusqua ces 
demiers jours, je navais guere trouve de titre ou pluto il y en avait un qui me hantait rnais que 
je nai pas voulu choisir, Vous allez voir pourquoi ceut ete indecent. En realite la question 
dont je voulais vous parler e dont je veux toujours vous parter, est Questce que la critique II 
faudrait essayer de tenir quelques propos autour de ce projet qui ne cesse de se former, de 
se prolonger, de renaitre aux confins de la philosophie, tout pres delle, tout contre elle, a ses 
depens, en direction dune philosophie a venir, a la place peutetre de route philosophie 
possible. Et il semble quentre la haute entreprise kantienne et les petites activites 
polcmicoprofessionnelles qui portent ce nom de critique, il me semble quil y a eu dans 
lOccident modeme a dater, grossierement, empiriquement, desXVquotXVquot siecles une 
certaine maniere de penser, de dire, dagir egalement, un certain rapport a ce qui existe, ce 
quon sait, ce quon fait, un rapport Ja societe, a la culture, un rapport aux autres aussi et 
quon pourrait appeler, disons, lattitude critique. ffien sur, vous vous etcnnerez dentendre dire 
quil y a quelque chose com me une attitude critique et qui serait specifique de la civilisation 
modeme, alors quil y a eu tant de critiques, polemiques, etc. et que rnerne les problernes 
kantiens ant sans doute des origines bien plus lointaines que ces xwxvr sieeles.n setonnera 
aussi de voir quon essaie de chercher une unite cette critique, alors quelle semble vouee par 
nature, par fonction, jallais dire par profession, a la dampersin, la oe, a la pur. Apres tout, la 
critique nexiste quen rapport avec autre chose quellerneme elle est instrument, moyen pour 
un avenir au une verite quelle ne saura pas et quelle ne sera pas, eJJe est un regard sur un 
dome oil. elle veut bien faire la police et OU elle nest pas capable de faire la loi. cela fait 
quelle est ne fonction qui est sphordonnee par rapport ce que constituent positivement la 
philosophie, la science, la politique, la morale, le droit, la litterature, etc. en meme temps, 
quels que soient les plaisirs ou Ies compensations qui accompagnent cette curieuse activite 
de critique, iI semble quelle v,gtsez rcgulierernent, presque toujours, non seulement guelque 
rmdeur tjutllitquot dont elle se reclame, mais aussi quelle soit soustendue par une sorfe 
iimperatif plus general plus general encore que celui dter les erreurs. II y a quelque chose 
dans la critique qui sapnte a,lti. t dune certaine facon, ce dont je voulais vous parler, c etait 
de I attitude cnuque comme vertu en general,  
 
fOUl  
 
encore une fois, parmi bien dautres. Je proposerai la variation suivante la ltmStonue 
chretieou leglise chretienne en tant quelle deployait une activile preciscment et 
specifiquement pastorale, a developpe cette idee singuliere, je crois, et etrangere tout fait a 
la culture antique que chaque individu, quels que soient son age, son statui, et ceci dun bout 
Iautre de sa vie et jusque dans le detail de ses actions, devait etre gouverne et devait se 
laisser gouvemer, cestadire diriger vers son salut, par quelquun auquelle lie un rapport 
global et en meme temps meticuleux, detaille, dobeissance, . Et cette operation de direction 
vers le salut dans un rapport dobeissance a quelquun doit se faire dans un triple rapport il, la 
verite Itrite entendue com me dogme Brite aussi dans la mesure oil. cette direction implique 
un certain mode de connaissance particuliere et individualisante des individus enfin dans la 
rnesure oil cette direction se deploie comme une technique J reflechie cornportant des regles 
generales, des connaissances particulieres, des preceptes, des methodes dexamen, 
daveux, dcntretiens, etc/Apres tout il ne faut pas oublier que ce que, pendant des siecles, on 
a appele dans leglise grecque techne technon et dans leglise romaine latine ars artium, 
cetait precisement Ia direction de conscience cetait lart de gouvemer les hornmes. Cet art de 
gouverner, bien sur, est reste longtemps lie des pratiques relativement limitees finalement,