3
présenter la réalité de manières abstraites similaires, de sorte que la correspondance
devienne une structure partagée.
La phrase « Le blé est blond » présente la structure grammaticale sujet - copule -
prédicat, qui suit la prétendue structure métaphysique de la réalité ; entité - possession -
qualité.
La vérité comme cohérence
La deuxième théorie de la vérité part de l'idée que la vérité doit faire sens : elle doit être
cohérente. C'est la théorie préférée de ces grands inventeurs de systèmes philosophiques
que sont les rationalistes. Cette théorie de la vérité découle de la conviction que la vérité
est une, que la vérité prise dans son ensemble est plus vraie que toute vérité individuelle,
que toutes les vérités sont reliées entre elles en une seule figure, un seul monde, un seul
système. Ce système fait sens, il est cohérent, il se tient.
Dans le domaine des sciences, la recherche consiste à trouver des lois générales à partir
desquelles, conjointement aux données initiales, on pourra logiquement prédire un résultat.
La preuve scientifique utilise la déduction par hypothèses pour tirer la conclusion attendue
des observations actuelles et des régularités du passé. Dans le domaine des mathématiques,
en suivant des règles d'inférences précises, on pourra déduire des nouvelles vérités à partir
d'autres vérités plus élémentaires et d'axiomes. L'interconnexion logique naît de
l'interconnexion ontologique. La raison est le fil d'Ariane de la vérité, l'unité qui nous
guide hors du labyrinthe de l'ignorance.
L'éthique aussi fait sens : un principe éthique est cohérent avec un autre. La cohérence de
la vérité en sciences et en mathématiques peut en fait conférer de la force à notre espoir :
cet espoir que le sens des liens moraux qui nous unissent sur la Terre, notre radeau de
sauvetage, n'est pas une illusion. Si le monde semble parfois irrationnel, indifférent et
neutre, c'est uniquement parce que nous n'avons pas atteint le noyau moral, parce que nous
n'avons pas saisi le regard de Dieu qui ferait que le sens moral du monde serait aussi sûr
qu'une preuve mathématique.
La vérité comme valeur pratique
Pour la théorie pragmatique la vérité c'est ce qui marche. Plus subtilement, la vérité est un
processus de corroboration et de vérification, et les résultats intermédiaires sans cesse
réactualisés de ce processus.
Le pragmatisme prétend traiter la vérité comme le font les expérimentalistes. Pour qu'un
expérimentaliste accorde du crédit à une proposition, elle doit survivre à l'épreuve de
l'expérience scientifique. Autrement dit, on ne doit baser les prédictions que sur une
hypothèse précise, et vérifier ensuite que toutes les prédictions s'avèrent être vraies. En
bref, une hypothèse doit établir une différence sans équivoque avec les différentes façons
dont peuvent évoluer les expériences. Cette différence avec l'expérience possible est la
signification (la valeur cash, si l'on veut) de la proposition à la base de l'hypothèse. Dans la
mesure où la vérité change avec la signification, la vérité est juste la signification qui