LA RECHERCHE EN PROJETS : DE QUOI S’AGIT-IL ?
Un essai de synthèse - de la notion de projet au management par projets.
Il n’est pas facile de retracer plus de trente années de recherche en sciences de gestion
sur les projets, objets temporaires qui se dissolvent dès lors qu’ils se terminent à l’inverse des
sciences de l’ingénieur qui s’intéressent plutôt au livrable final. Il est donc nécessaire de
disposer d’une carte support pour décrire et comprendre les itinéraires suivis par les
chercheurs. Domaine laislongtemps en jachère par la recherche académique en sciences de
gestion, il nous est apparu nécessaire de baliser l’univers des projets collectifs par un rappel
rapide de la géographie de ses paysages mais aussi de l’histoire du développement de son
peuplement. Cet état de l’art de la recherche, tant française qu’anglo-saxonne, sera structuré
en fonction de quatre niveaux d’analyse devenus traditionnels : projet, gestion de projet,
management de projet et management par projets.
Bien sûr de nombreuses propositions de cartographie ont été proposées [Betts &
Lansley, 1995 ; Packendorff, 1995 ; Evaristo & van Fenema, 1999 ; Söderlund, 2004 ;
Crawford & al., 2006] mais elles sont soit partielles soit historiquement dépassées soit
orientées. Il existe évidemment également des corpus de connaissances édités par des
associations professionnelles dont le célèbre « Project Management Body of Knowledge »
mais ils sont nécessairement limités puisqu’ils sont des supports de certification et
synthétisent à un moment donné des « best practices » à prétention universelle et normative.
La cartographie que nous proposons ici n’échappera sans doute pas à ces critiques mais
devrait permettre de mieux comprendre les tendances récentes de la recherche, notamment
celle développée en Europe et relativement moins connue au Brésil.
1. UN CADRE D’ANALYSE DE LA RECHERCHE EN PROJETS
Dimensão managerial
e estratégica
Dimensão organizacional
Dimensão cognitiva
e psicológica
Dimensão instrumental
O ator
Inter-firmas network
Intra-firma
Infra-departamento
A equipe
Societal ou institu-
cional network
O sujeito
da análise O objeto
da análise
Sub-conjunto
Área de conhecimento
Sistema- projeto
Portifolio
Programa
População
O tempo
da análise
Duração da mudança
Ciclo de vida
completo
Trajetória
Fase
Tendencia a longo prazo
CARTOGRAFIA DA PESQUISA
EM PROJETOS
Processo de gerenciamento
Dimensão managerial
e estratégica
Dimensão organizacional
Dimensão cognitiva
e psicológica
Dimensão instrumental
O ator
Inter-firmas network
Intra-firma
Infra-departamento
A equipe
Societal ou institu-
cional network
O sujeito
da análise O objeto
da análise
Sub-conjunto
Área de conhecimento
Sistema- projeto
Portifolio
Programa
População
O tempo
da análise
Duração da mudança
Ciclo de vida
completo
Trajetória
Fase
Tendencia a longo prazo
CARTOGRAFIA DA PESQUISA
EM PROJETOS
Processo de gerenciamento
1.1. QUEL EST L’OBJET DE LA RECHERCHE ?
Trois axes verticaux permettent de mieux définir le cadre méthodologique adopté par
les différentes recherches.
Le premier cherche à repérer le sujet d’analyse. Certains travaux sont centrés
essentiellement sur les personnes placées en situation de projet et donc « acteurs de projet »
(le chef de projet, le commanditaire du projet, les responsables de lots de travaux, etc.) ou sur
l’équipe de projet (gestion de conflits, communication interne, coordination, motivation, etc.).
On peut étudier un département particulier de l’entreprise soit complètement dédié aux projets
(R&D), soit partiellement (département informatique), soit indirectement (département des
relations humaines). Des études de cas en profondeur ont étudié la dynamique des projets au
sein d’une organisation globale, qu’elle soit orientée-projet ou non. Plus largement, on peut
étudier le réseau d’entreprises collaborant sur de grands projets (Tunnel sous la Manche), de
grands programmes (notamment européens Airbus, Ariane), de nouvelles technologies
(logiciels open source). Enfin, des études peuvent concerner l’ensemble d’un secteur
(Télécommunications, Construction, etc.) ou un secteur institutionnel (entreprises publiques)
voire selon certains auteurs scandinaves ou autrichiens un pays tout entier. Préciser le cadre
d’analyse est essentiel pour préciser le contexte dans lequel s’inscrit les résultats de la
recherche et donc les conditions de sa validité externe.
Le deuxième axe consiste à préciser l’unité de temps de l’analyse. Les recherches
peuvent concerner une phase particulière (avant-projet, terminaison, etc.) ou l’ensemble de la
trajectoire du projet, de son émergence à sa conclusion. Depuis une bonne dizaine d’années,
un certain nombre d’auteurs s’intéressent au cycle de vie complet des produits ou livrables du
projet dans la lignée des travaux du CAM-I (conception à coût objectif global) mais aussi
pour des préoccupations et normes environnementales (ISO 14000, taux de recyclage) allant
jusqu’au démantèlement des équipements productifs (voir l’odyssée malheureuse de l’ex-
porte-avions Clémenceau ; la problématique du démantèlement des centrales nucléaires ; un
désinvestissement est une forme d’investissement). Dans les travaux s’intéressant à la gestion
du changement dans une organisation (structure/stratégie/système de management) la
trajectoire n’est pas balistique et les phénomènes liés aux routines organisationnelles, aux
identités professionnelles, aux jeux de pouvoir, etc. peuvent déclencher des mécanismes de
rejet ou de résistance liés à l’homéostasie des systèmes. Il convient alors de pouvoir observer
de manière longitudinale et diachronique, par le biais d’études de cas, le temps relatif propre
au changement des personnes concernées et impactées par le changement. Enfin, il existe la
durée nécessaire au repérage de tendances lourdes (trend) à l’intérieur d’un secteur ou sur
plusieurs secteurs concernant par exemple l’utilisation de nouveaux modèles de management
de projet. Ces travaux ont été nombreux ces dernières années concernant le secteur
automobile par exemple ou d’autres ayant trait à l’institutionnalisation du management de
projet.
Le troisième axe cherche à définir l’unité d’analyse de l’objet de la recherche. Au
niveau le plus élémentaire, les travaux peuvent concerner un sous-ensemble du projet (ex le
soutien logistique intégré, le système d’information et de pilotage du projet, etc.), un domaine
de connaissance si on se fère par exemple aux neuf domaines référencés dans le PMBoK
du PMI (management des risques) ou à un processus (identification des risques,
capitalisation sur les risques survenus et à l’efficacité des solutions de traitement). Il peut
traiter bien évidemment de l’ensemble du système-projet y compris l’environnement dans
lequel il s’insère et avec lequel il interagit. On trouvera notamment des recherches sur des
projets symboliques et emblématiques (le projet twingo, l’opéra de Sidney, les jeux
olympiques de Lillehammer, etc.), notamment dans le domaine des grands travaux. Les
travaux historiques peuvent apporter leur contribution dans cette démarche. Plus récemment,
se sont largement développés et en liaison avec l’institutionnalisation croissante du
management de projets des travaux concernant le management de programme, le
management de portefeuille de projets, le management multi-projets voire des populations de
projets au sein d’un réseau inter-firmes, d’un secteur, d’un territoire donné.
Bien évidemment, ces trois axes doivent être pris en compte simultanément pour
caractériser une recherche en projets et pouvoir capitaliser les résultats proposés et les
nouvelles connaissances ainsi générées. Par exemple, une recherche concernera la dynamique
de groupe des acteurs-projet tout au long de la trajectoire d’un programme, ou bien des
processus de capitalisation des connaissances techniques pendant la phase conception au sein
d’une entreprise de construction automobile.
1.2. QUELLES SONT LES PROBLEMATIQUES DE LA RECHERCHE ?
Les axes horizontaux du schéma font référence aux orientations dominantes, aux dimensions
que prennent en compte les différents travaux de recherche. Elles ne prétendent pas à
l’exhaustivité et ne sont bien sûr pas exclusives l’une de l’autre. Elles sont néanmoins utiles
pour préciser les finalités de ces recherches.
La dimension instrumentale est davantage prise en compte par des travaux de nature
normative prescrivant outils et méthodes à utiliser à des fins d’optimisation sous contraintes, à
visée économique.
La dimension organisationnelle inspire davantage les recherches pour qui les projets
doivent être examinés avant tout comme lieu de structuration d’organisations temporaires, de
centres d’expérimentation de processus organisationnels et décisionnels en dehors des normes
établies de l’organisation permanente, comme des « arènes » où se font et se défont les
pouvoirs, comme espace de coordination des moyens et des savoirs, comme unité de gestion
d’un monde réticulaire en mouvance permanente.
La dimension stratégique et managériale permet de comprendre comment les projets
agissent tant comme supports opératoires des intentions stratégiques (formulation de la
stratégie dans une visée planificatrice) voire comme vecteurs mêmes de la formation de la
stratégie. La recherche s’intéresse également aux conditions de la prise de décision du
lancement du projet et des difficultés d’arrêter un projet en cours (thème de l’escalade).
La dimension cognitive et psychologique renvoie à une épistémologie constructiviste,
qui envisage le projet comme utopie pourvoyeuse de sens pour ses initiateurs, comme mode
d’affirmation identitaire par rapport au monde et aux autres, comme lieu privilégié des
apprentissages face à la complexité et l’incertitude des situations que le projet va générer.
C’est le lieu privilégié de révélation, d’explicitation, d’élaboration et d’échange des
représentations de ce que les acteurs veulent explorer, anticiper, transformer, faire advenir par
la réalisation même du projet, espace dynamique de fusion entre les rationalités substantive et
procédurale.
Ici encore, les problématiques de recherche peuvent être riches et porteuses de
plusieurs dimensions. Ainsi des travaux récents menés en France témoignent que du
management d’un projet donné, on est passé au management d’un ensemble de projets, puis à
l’inscription des projets dans le système de conception de l’entreprise, défini comme le
produit de l’interaction entre la stratégie de l’entreprise, le management de ses connaissances
et le management de ses projets [Ben Mahmoud-Jouini, 1999].
1.3. QUELS SONT LES NIVEAUX D’ANALYSE ?
Nous nous proposons donc maintenant de vous présenter l’évolution historique des
recherches en projets en fonction du périmètre du système étudié, frontière artificielle
déterminée en dernière instance par la finalité du modélisateur et donc du chercheur.
Le premier niveau est relatif à celui de concept de projet. Il tente de décrire l’objet
même : de quoi s’agit-il ? Quelles sont ses caractéristiques, ses représentations, les signes, les
valeurs qu’il véhicule et charrie… au niveau individuel et/ou collectif, qu’est ce qui est projet
ou non ?
Le deuxième niveau s’intéresse à la « gestion de projet » qui a pour finalité de décrire
et comprendre l’opérativité du projet : comment cela fonctionne-t-il ? Pour très vite devenir
prescriptif : comment cela devrait fonctionner compte tenu de sa nature processuelle,
transitionnelle, de l’idée initiale aux livrables finaux.
Le troisième niveau relève du « management de projet », qui a pour vocation de
modéliser le projet comme vecteur de rationalisation de l’action collective temporaire. C’est
une organisation temporaire qui va s’enchâsser provisoirement au sein d’une organisation
permanente avant que d’être absorbé par elle. C’est aussi un espace de conception,
négociation, expérimentation et adoption de nouvelles règles par un réseau singulier d’acteurs
eux-mêmes contraints par leurs collectifs existants et la régulation qui s’y exerce. C’est moins
de la production des livrables qu’il s’agit que de l’expérimentation temporaire par un collectif
d’acteurs identifiés, « démasqués », de nouvelles logiques managériales et organisationnelles
et de leurs effets sur les organisations auxquelles ils appartiennent.
Enfin, le niveau du « management par projets » s’intéresse à l’écologie et à la
sociologie d’une population de projets tant au niveau intra-organisationnel qu’inter-
organisationnel. Quels sont les processus de finalisation, d’organisation, d’animation et de
contrôle de ces populations de projets, qu’ils représentent l’activité principale d’une
organisation (entreprise orientée-projet), qu’ils constituent les vecteurs opératoires de
changements stratégiques et/ou organisationnels d’une entité ou les unités de gestion au sein
d’un programme à finali commune que se donnent plusieurs entités (management de
programme).
2. NIVEAU DU PROJET
2.1. UNE SATURATION DE SENS
Le terme de projet ne s’est stabilisé dans son acception moderne qu’au milieu du XX°
siècle avec un double sens de représentation de quelque chose que l’on peut atteindre et du
travail préparatoire pour le faire, processus de développement et résultat de ce processus.
L’allemand et l’anglais proposent des mots différents pour ces deux acceptions de projet
comme « dessein » ou « programme », respectivement « entwurf et projekt », « purpose et
project ».
On doit à Jean-Pierre Boutinet [1993, 1994] d’avoir réalisé l’anthropologie du projet
retrouvant l’opposition aristotélicienne entre les projets existentiels « proairesis » et les
projets techniques « boulèsis ». Il expose notamment que le projet est devenu objet
d’investigation scientifique par les grandes écoles de la psychologie moderne : ainsi du
courant béhavioriste qui l’envisage comme anticipation temporelle destinée à favoriser le
développement de l’individu, le courant phénoménologique qui met en valeur la motivation et
le courant psychanalytique qui fait référence au concept d’idéal et de sublimation. Le projet
fait donc cohabiter deux dimensions fondatrices : une dimension symbolique à valeur
existentielle et une dimension technique à valeur d’efficacité.
Le concept de projet s’est développé historiquement selon quatre dimensions qui, en
se sédimentant, participe de la saturation des valeurs qu’on a pu lui conférer :
- le projet architectural de la Renaissance,
- le projet de la Philosophie des Lumières, précurseur de la Société Industrielle,
- le projet de la Phénoménologie existentielle,
- le projet individualisé de la Société post-industrielle.
Cet enracinement historique explique bon nombre de dérives de projets dès lors que
leur trajectoire se déroule sous l’influence exorbitante d’un des quatre pôles technique,
sociétal, existentiel ou individuel. Pris deux à deux, les pôles définissent des valeurs que les
acteurs porteront ou rechercheront selon la phase ou la nature des projets : efficacité et
productivité technique, négociation et participation, identité et intégration, créativité et
performance. Plus récemment, poursuivant la même veine, Jean-Pierre Bréchet [Bréchet
1997, 1998] insiste sur les dimensions projective, praxéologique et intentionnelle du projet et
les rapports liant les finalités aux modalités requises par l’action (ressources, compétences et
modes opératoires).
La figure du projet déborde de caractéristiques ontologiques nécessité biologique,
vocation démiurgique, mode de socialisation, visée praxéologique qui en expliquent sa
richesse mais aussi son ambiguïté, sa capacité à générer les paradoxes et à les transcender par
l’action.
2.2. AVANT QUE DE DEVENIR OBJET DE GESTION
On peut s’étonner que la littérature managériale n’ait, jusqu’à récemment, que peu
traité de la spécificité des projets au regard des problèmes de gestion opérationnelle, si ce
n’est sous l’angle de la prise de décision d’investissements et de leur rentabilité. La « genèse »
de toute entreprise, de toute organisation ne s’éclaire-t-elle pas avant tout par l’histoire
singulière de ses projets ? La vie des firmes en longue période n’est-elle pas scandée par le
sort qu’ont connu les différents projets qu’elles ont impulsés ? [Debourse & Hoflack 1992].
La saga des grandes figures d’entrepreneurs schumpeteriens ne se décline-t-elle pas selon
l’emboîtement successif des projets qu’ils ont décidés ?
Une première distinction fonde la spécificité des projets en les comparant aux activités
d’opérations currentes et routinières. De fait, les projets ont vocation à se transformer en
opérations et processus dont la régénération va induire d’autres projets. Il s’agit donc bien
d’une relation dialectique entre projets et opérations qui d’ailleurs, dans la réalité des
organisations, s’étalonnent davantage selon un continuum lié à une échelle d’innovation
croissante.
Des définitions positives ont bien sûr été posées soit par des institutions productrices
de normes ou par la littérature scientifique anglo-saxonne. Ainsi, la norme Afnor X50-115
définit en 2002 le projet comme un « processus unique, qui consiste en un ensemble
d’activités coordonnées et maîtrisées comportant des dates de début et de fin, entrepris dans
le but d’atteindre un objectif conforme à des exigences spécifiques ». La définition la plus
élaborée à notre connaissance est celle de Turner J.R. [1993] qui considère le projet comme
« un ensemble d’actions pour lequel des ressources humaines, matérielles et financières sont
organisées de manière nouvelle pour entreprendre un ensemble unique d’activités, bien
spécifiées, à l’intérieur de contraintes de coût, de délai et de performance, en vue de réaliser
un changement bénéfique défini par des objectifs d’ordre quantitatif et qualitatif ».
L’identification de caractéristiques communes aux projets n’a pas cependant conduit à
les considérer comme une catégorie homogène, les propositions de typologie sont
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