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Celles-ci ont pour ambition d’esquisser les règles et les procédures de délibération permettant,
dans la société démocratique, l’expression de la pluralité des opinions, la compétition libre
des arguments et le règlement paisible des différends. Héritière de la pensée des Lumières, ces
nouvelles théories ont confiance dans la capacité des hommes à établir des critères généraux
afin de protéger leurs droits et d’assurer la paix. Elles prolongent en ce sens l’idéal
d’universalité de la pensée moderne. Pour la plupart, elles entendent restaurer une « politique
de la raison » capable de dépasser les oppositions d’intérêts dans la société » (…)
« Dénonçant l’arbitraire des valeurs, conscients de la frontière souvent floue entre philosophie
et idéologie, ils entendent se cantonner à une réflexion sur les règles permettant d’assurer une
équité des droits entre les individus.
Ils affichent une orientation plus libérale : leur souci fondamental est de garantir « un
égal accès à la liberté individuelle ». (…) Le communautarisme voit au contraire la société
comme une communauté – ou comme un ensemble de communautés – soudée(s) par des
valeurs communes. Ses partisans adressent une double critique aux philosophies « modernes »
rangées sous l’étendard du libéralisme. Ils en dénoncent tout d’abord l’universalisme : ils
refusent de faire des principes abstraits issus du XVIIIème siècle (l’individu, la nation, l’Etat,
le droit) le socle de l’unité sociale, même s’ils ont en même temps un profond respect pour les
valeurs démocratiques (la liberté, l’égalité des chances, la solidarité). Ils critiquent ensuite
l’individualisme qui conduit selon eux, à diffuser une vision « atomiste » de la société. Pour
les communautariens, la société n’est pas un assemblage d’individus égoïstes. Elle est formée
de communautés qui sont des réalités sociologiques incontournables et des creusets dans
lesquels se forgent des valeurs essentielles à la cohésion sociale. Aussi, les théories qui se
contentent de rechercher des règles d’arbitrage des conflits sont incapables de promouvoir une
société unie et solidaire. Plus qu’une politique fondée sur la raison, il convient alors de
redonner un « horizon moral » à la société contemporaine, en explorant les articulations
possibles entre la recherche d’un « bien commun » pour la société (l’adhésion à des valeurs
partagées) et le respect de la liberté individuelle. »
Olivier Nay, « Histoire des idées politiques », Ed Dalloz/A. Colin, 2004, p.497.498
Il reste qu’il convient de se méfier de la taxinomie des positions.
Document n°175
« Les casiers ainsi confectionnés, purs (libéralisme, communautarisme, républicanisme) ou
mixtes (républicanisme libéral, libéralisme communautariste et autres combinaisons d’ismes),
quelles que soient par ailleurs leurs vertus, ont l’inconvénient de perdre de vue la singularité
des auteurs et de comprendre leur pensée en termes de solution et non de problème ».
Ph De Lara, « Le pluralisme raisonnable est-il raisonnable ?» in C. Audard, « John
Rawls. Politique et métaphysique”, éd puf, 2004, p.96
A) La pensée des libertariens : un libéralisme déontologique soucieux des
libertés ?
N’ayant pas pour objectif d’être exhaustif, ni d’ailleurs comme possibilité, nous nous
attacherons principalement, dans le cadre de la présentation de la pensée des libertariens, à
deux auteurs, R. Nozick et F. Hayek.